Livv
Décisions

CA Toulouse, 1re ch. sect. 1, 5 octobre 2020, n° 18/04013

TOULOUSE

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rouger

Conseillers :

M. Muller, M. Garrigues

Avocat :

SARL Lanta Immobilier

TGI Toulouse, du 14 mai 2018

14 mai 2018

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte notarié du 27 janvier 2014, M. B. et Mme C. ont acquis ensemble de M. M. et Mme L'H. une maison d'habitation située à Sainte Foy d'Aigrefeuille (31570), au prix de 350 000 €, outre 11 000 € pour le prix des meubles et objets mobiliers.

M. B. et Mme C. sont entrés dans les lieux début février 2014.

Estimant que le bien vendu était affecté de vices cachés,

M. B. et Mme C. ont fait citer Mme L'H., M. M. et la société Lanta Immobilier devant la juridiction de référés pour solliciter l'organisation d'une mesure d'expertise judiciaire, mesure ordonnée par décision du 23 janvier 2015 et confiée à Mme L..

L'expert judiciaire a déposé son rapport d'expertise le 17 septembre 2015.

Par acte d'huissier de justice délivré les 17 et 23 février 2016, M. B. et Mme C. ont fait citer M. M., Mme L'H. et la Sarl Lanta Immobilier devant le tribunal de grande instance de Toulouse sur le fondement de la garantie des vices cachés à l'égard des vendeurs et du manquement à l'obligation de conseil de l'agence immobilière, sollicitant leur condamnation solidaire à leur payer diverses sommes au titre de travaux de mise en conformité, de réparations, désinfection, nettoyage, dératisation et moins-value affectant leur immeuble, outre des dommages et intérêts pour préjudice moral et de jouissance.

Par jugement contradictoire du 14 mai 2018, le tribunal de grande instance de Toulouse a :

- condamné M. M. et Mme L'H. à verser à M. B. et Mme C. les sommes de :

* 28 112,28 € en réparation des dommages matériels, outre intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2015,

* 3 000 € au titre du préjudice moral,

* 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné M. M. et Mme L'H. aux entiers dépens de l'instance, en ce compris les dépens de référé dont le coût de l'expertise judiciaire,

- ordonné l'exécution provisoire.

Pour statuer ainsi le premier juge a retenu que la présence de rats à l'époque de la vente était indiscutable, que si quelques semaines de traitement avaient suffi à leur éradication, démontrant que le phénomène ne constituait pas à soi seul un vice, les dégâts occasionnés, invisibles malgré trois visites des candidats à l'achat au vu du rapport d'expertise, présentaient une importance relevant de l'article 1641 du code civil ; que néanmoins, s'agissant d'une maison construite dans les années 1990, les acquéreurs ne pouvaient ignorer la nécessité dans laquelle ils seraient de faire face à une certaine vétusté du bien d'autant qu'ils ont pu eux-mêmes se convaincre de certains désordres lors des visites du bien, le prix négocié ayant nécessairement tenu compte de cet état, limitant en conséquence, excluant toute perte de valeur vénale, l'indemnisation des dommages due par les vendeurs aux frais d'éradication des rongeurs et de remise en état des dégâts causés par ces animaux tels que chiffrés par l'expert (réfection des réseaux d'alimentation et d'évacuation concernés, réfection des portes et cloisons, travaux de peinture et d'électricité), outre intérêts au taux légal à compter de la date du dépôt du rapport d'expertise.

Il a estimé par ailleurs que dès lors que la présence de rongeurs n'était pas visible lors de la vente et que l'infestation n'avait été révélée que par des opérations de démontage ou d'investigations approfondies, aucune faute ne pouvait être reprochée à l'agent immobilier.

M. B. et Mme C. ont relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 24 septembre 2018 en ce qu'il a :

- écarté la responsabilité de la Sarl Lanta Immobilier,

- limité les condamnations de M. M. et Mme L'H. aux sommes de 28 112,28 € outre intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2015 en réparation des dommages matériels, à 3 000 € au titre du préjudice moral et à 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. B. et Mme C. du surplus de leurs demandes.

L'affaire a été traitée selon la procédure sans audience, par décision du président de la formation de jugement, suivant avis adressé le 22 mai 2020 via le réseau virtuel privé avocats, à chaque avocat des parties qui ne s'y est pas opposé dans le délai de quinze jours, l'ordonnance de clôture étant intervenue le 8 juin 2020.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 14 mai 2020 (conclusions d'appelant n°3), M. B. et Mme C., appelants, demandent à la cour, au visa des articles 1641 et suivants et 1382 du code civil, de :

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a retenu la responsabilité de M. M. et Mme L'H. sur le fondement des vices cachés pour les désordres résultants de la vente du bien immobilier sis (...),

- réformer le jugement dont appel en ce qu'il a limité les condamnations de M. M. et Mme L'H. aux sommes aux sommes de 28 112,28 € outre intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2015 en réparation des dommages matériels, à 3 000 € au titre du préjudice moral et à 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en ce qu'il a écarté la responsabilité de la Sarl Lanta Immobilier et en ce qu'il a rejeté leurs autres demandes,

En conséquence,

- dire que la Sarl Lanta Immobilier a volontairement ou par négligence manqué à ses obligations de conseil, de vérification du bien mis en vente et de loyauté vis-à-vis des acquéreurs, de sorte que sa responsabilité est engagée,

- condamner solidairement Mme L'H., M. M. et la Sarl Lanta Immobilier à leur payer les sommes suivantes :

Eléments liés aux rongeurs :

* 2 722,50 € TTC au titre des travaux de dératisation,

* 8 528,96 € TTC au titre des travaux de reprise des cloisons et des portes des pièces du sous-sol,

* 5 387,69 € TTC au titre des peintures,

* 6 336 € TTC au titre des travaux de reprise de l'électricité du sous-sol, et de la réfection de l'armoire électrique endommagée,

* 6 557,38 € TTC au titre des travaux de remise en état des réseaux d'alimentation et d'évacuation des eaux,

* 14 384,42 € TTC au titre des travaux de changement de l'isolant de la mezzanine et du salon,

* 726 € TTC au titre du remplacement de la Vmc et des gaines d'aération perforées,

* 1 408,55 € TTC au titre des travaux d'étanchéité des bouches d'aération du vide sanitaire,

* 15 000 € au titre des travaux de remise en état des isolants, murs et réseau Tv des chambres et de la salle de bain de l'étage,

* 10 000 € au titre des réparations d'urgence, de l'enlèvement des déchets, du nettoyage des éléments souillés par les rongeurs, de la désinfection des murs et sols,

* 60 000 € au titre de la moins-value qui affecte la maison,

Eléments non conformes à la promesse de vente :

* 9 643,86 € TTC au titre de la mise en conformité de la cheminée,

* 2 337,88 € TTC au titre des travaux de reprise de l'étanchéité du Velux,

* 13 612,67 € TTC au titre des travaux de reprise de l'appentis,

- dire que les sommes susvisées seront indexées sur l'indice du coût de la construction aux fins de réactualisation des chiffrages de l'expert judiciaire,

- condamner solidairement Mme L'H. et M. M. au paiement d'une somme de 40 000 € au titre du préjudice moral et de jouissance de leur bien qu'ils ont subi, ou en tout état de cause d'une somme nettement supérieure aux 3 000 € ayant été alloués par les premiers juges,

- débouter Mme L'H., M. M. et la Sarl Lanta Immobilier de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions,

- condamner solidairement Mme L'H., M. M. et la Sarl Lanta Immobilier au paiement d'une somme de 8 633,02 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement Mme L'H., M. M. et la Sarl Lanta Immobilier aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise judiciaire (3 183,73 € TTC).

Ils indiquent avoir visité l'immeuble alors que la maison était chargée d'objets et de meubles, Mme L'H. y habitant encore, qu'ayant relevé des fissures apparentes sur la maison l'agence immobilière les a informés de l'existence d'un rapport d'expertise sécheresse établi par la Maif en 2003, qu'ayant demandé les diagnostics réalisés, le plans de la maison, le certificat de ramonage, compte tenu des informations rassurantes qui leur ont été présentées par la propriétaire et l'agent immobilier ils ont formalisé une proposition d'achat à hauteur de 360 000 € qui a été rapidement acceptée. Ils précisent que la visite rapide réalisée le 14 septembre 2013 avant la signature du compromis de vente a permis de lever certaines interrogations comme les fissures cachées par un tapis ou les diagnostics électriques, et soutiennent n'avoir réellement visité la maison qu'à deux reprises, les 8 et 14 août 2013, Mme L'H. et l'agent immobilier leur ayant toujours réaffirmé l'absence de problème particulier ou d'inquiétudes sur le bien, alors que la maison s'est avérée affectée de vices dont ils n'ont pu constater l'existence et mesurer l'ampleur qu'à l'occasion de leur prise de possession.

Ils précisent que seul le rapport d'expertise judiciaire a permis d'établir la présence massive et ancienne de rongeurs, présence partiellement détectée en mars 2014 à l'occasion d'une vérification d'une vanne située derrière le cumulus occultée par une plaque en contre-plaqué recouverte de carreaux de faïence et vissée.

Ils relèvent que l'expert a noté le non fonctionnement de la Vmc, ce qu'ils ignoraient au moment de la vente, les murs et isolants ayant été irrémédiablement dégradés par l'absence de fonctionnement des dispositifs d'aération depuis plusieurs années, que le non fonctionnement du tirage et du moteur de ventilation de l'insert assurant le chauffage principal de l'immeuble n'a été révélé par M. M. qu'après la signature de l'acte authentique, l'expert judiciaire ayant en outre relevé l'absence d'étanchéité du conduit et du tubage de l'ancienne cheminée, non-conformité nécessitant le changement complet de la cheminée. Ils précisent que s'ils ont pu observer des traces sur le pourtour du velux et les lambris, ils se sont fiés aux explications rassurantes de l'agent immobilier et de Mme L'H. évoquant un phénomène de condensation naturelle en hiver et un oubli accidentel de fermeture du velux pendant un orage alors que l'expertise a révélé que la jupe en zinc étant fendue l'étanchéité du vélux n'était plus assurée et les bois et lambris humidifiés, estimant avoir été délibérément trompés par les vendeurs et l'agence immobilière.

S'agissant de l'appentis dont l'expert a relevé l'endommagement de la structure en bois, laquelle aurait été camouflée par des plaques de contre-plaqué installées sous les tuiles, ils relèvent que ni les vendeurs ni l'agence immobilière n'ont attiré leur attention sur ce point qu'ils ne pouvaient mesurer en tant que profanes.

Ils soutiennent qu'ils ont été victimes de manœuvres intentionnelles des vendeurs qui ne pouvaient ignorer les vices qu'ils invoquent et ne peuvent leur opposer la clause de non garantie insérée à l'acte de vente, et que l'agent immobilier, qui s'est abstenu de vérifier les informations présentées par la venderesse et qui ne les a pas averti des indices laissant fortement présumer divers problèmes au sein de l'habitation, a manqué à son obligation d'information et de conseil, sollicitant l'indemnisation des divers chefs de préjudice invoqués, et précisent que malgré la réalisation de travaux de remise en état sur des éléments défectueux, les évaluations immobilières qu'ils ont fait réaliser font ressortir une diminution moyenne de l'ordre d'un quart de la valeur du bien imputable directement à la réduction de la surface habitable par les pièces sinistrées et aux travaux de remise en état à engager, l'ancienne présence de rongeurs étant de surcroît un sujet sensible pour de potentiels acquéreurs, particulièrement les femmes.

Dans leurs dernières écritures transmises par voie électronique le 30 janvier 2020 (conclusions n° 3 récapitulatives et de synthèse), M. M. et Mme L'H., intimés, demandent à la cour, de :

- réformer purement et simplement le jugement dont appel,

Par voie de conséquence,

- rejeter purement et simplement les demandes formulées par les consorts B. C.,

- condamner solidairement les consorts B. C. au paiement d'une somme de 1 500 € sur le fondement d'un préjudice moral à leur profit,

- condamner solidairement les consorts B. C. au paiement d'une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens en ceux compris les dépens de référé et les frais d'expertise.

Ils soutiennent qu'en l'absence d'un quelconque commencement de preuve relatif à une volonté de dissimulation de leur part de nature à caractériser leur mauvaise foi, la clause d'exclusion de garantie insérée à l'acte doit recevoir application, et qu'à l'exception du problème des rongeurs qui pourrait constituer un vice caché pour ne s'être révélé qu'après que les acquéreurs aient entrepris d'importants travaux notamment de démolition, non garanti dès lors qu'ils l'ignoraient eux-mêmes, les désordres invoqués sont exclusivement liés à la vétusté et étaient visibles avant l'achat ainsi que l'a indiqué l'expert judiciaire. Estimant la procédure diligentée à leur encontre comme caractérisant un acharnement des acquéreurs en dépit des éléments du dossier, ils sollicitent des dommages et intérêts pour préjudice moral.

Dans ses dernières écritures transmises par voie électronique le 7 janvier 2019, la Sarl Lanta Immobilier, intimée, demande à la cour, au visa de l'article 1382 du code civil, de :

- constater qu'aucun manquement à une obligation d'information et de conseil ne saurait lui être reproché par les demandeurs,

Par conséquent,

- confirmer le jugement dont appel,

Y ajoutant,

- condamner en cause d'appel tout succombant à lui verser la somme de 4 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes et sous la même solidarité aux entiers dépens dont distraction au profit de l'avocat soussigné.

Elle expose qu'elle n'est tenue que d'une obligation de moyen consistant à informer l'acquéreur des données portées à sa connaissance par le vendeur ou des éléments visibles, n'ayant pas à procéder à des démontages ou investigations approfondies. Elle retient, que de l'aveu même des acquéreurs le problème lié à la présence de rongeurs n'était pas visible lors de leur emménagement le 1er février 2014, n'ayant pu s'en apercevoir que lorsqu'ils ont procédé à des démolitions, de sorte qu'il ne peut lui être reproché un quelconque manquement à son obligation d'information et de conseil sur ce point. Elle relève que selon l'expert judiciaire le non fonctionnement de la Vmc était connu et accepté par les acquéreurs qui en ont tenu compte dans leur offre d'achat ; que l'expert judiciaire n'a pas pu constater l'état de la cheminée puisque celle-ci était changée lors de son intervention et qu'en tout hypothèse en tant qu'agent immobilier elle n'avait pas à contrôler les tubages de l'ancienne cheminée ni à monter sur le toit ; que le menu désordre affectant l'étanchéité du vélux et de la mezzanine était visible lors de l'acquisition, tout comme l'état de la structure bois de l'appentis pris en compte dans l'offre d'achat ; que n'étant pas un expert en bâtiment elle ne pouvait percevoir le manque d'étanchéité des aérations du vide sanitaire.

Elle conteste en toute hypothèse les demandes d'indemnisation chiffrées par les acquéreurs alors qu'aucune attitude déloyale n'est caractérisée à son encontre.

SUR CE, LA COUR :

1°) Sur l'action en garantie des vices cachés diligentée à l'encontre des vendeurs

Selon les dispositions des articles 1641 et 1643 du code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus. Il est tenu des vices cachés quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n'ait stipulé qu'il ne sera obligé à aucune garantie.

Par ailleurs, selon les dispositions de l'article 1642 du même code, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents ou dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

En l'espèce, l'acte notarié de vente du 27 janvier 2014 dispose que l'acquéreur prendra les biens vendus en l'état où ils se trouveront le jour de l'entrée en jouissance sans aucune garantie de la part du vendeur pour raison, s'il s'agit d'un immeuble bâti, de l'état des constructions, de leurs vices même cachés, sous réserve des dispositions légales ou réglementaires contraires.

Cette clause, parfaitement valable entre particuliers, doit recevoir application sauf si l'acquéreur établit que le vendeur avait connaissance au jour de la vente des vices cachés pour lesquels ils sollicitent la garantie légale.

Au regard du cadre juridique ci-dessus posé, les vices invoqués doivent être sériés.

a) Sur l'infestation de rongeurs

Selon les déclarations qu'ils ont faites devant l'expert judiciaire :

- les consorts B.-C. ayant emménagé en février 2014, ils ont déclaré avoir ressenti en mars 2014 une forte odeur dans la salle de bains du sous-sol qu'ils n'avaient pas sentie lors de leurs visites des lieux avant la vente, et entendu le soir des bruits de rongeurs, de sorte qu'ils ont acheté du raticide et ont fermé par grillage anti-rongeurs les bouches d'aération du vide sanitaire et que fin mars 2014, après mise en place de pesticide et nettoyage avec de l'eau de Javel, il n'y avait plus ni rats ni odeur

- lors de la recherche de la vanne d'arrêt de l'eau début mai 2014, ils ont démonté dans la salle de douche du sous-sol une trappe carrelée cachant le cumulus et constaté sur le sol, derrière cette paroi, une zone d'excréments de rongeurs et des débris d'isolant

- ils ont alors déposé seuls l'ensemble des isolants en façade, cassé les cloisons de la salle de douche et du bureau, le faux-plafond en BA 13 du bureau et de la salle de douche étant alors tombé au sol, endommagé par l'urine et les excréments des rats, ceux-ci ayant creusé des galeries dans le polystyrène isolant des hourdis

- ils ont informé les vendeurs de cette situation en juillet 2014

- en novembre 2014, ils ont fait intervenir le bureau d'études Technipure, lequel a rendu son rapport en décembre 2014 après une visite sur place du 17 novembre 2014.

Il résulte dudit rapport produit en pièce 4 par les appelants, étayé de photographies fournies essentiellement par les acquéreurs, prises tant avant qu'après qu'ils aient déposé les isolants de façade et cassé les cloisons de la salle de douche et du bureau que :

- sous les plaques de faux plafonds des rongeurs ont créé des galeries et un accès direct entre cette pièce et la salle de bains du premier étage

- les rails servant à maintenir les plaques de placo sont rouillées à cause de l'urine, la rouille n'apparaissant qu'au fur et à mesure des années

- la présence d'excréments et de traces d'urine ont été détectées derrière le cumulus lors de l'expertise

- les rongeurs ont formé des galeries à plusieurs endroits dans l'isolant hourdis de la salle de bains sise dans le garage, des traces d'urine persistant malgré un nettoyage à l'eau de javel et à l'acétone

- la salle de bains, le bureau et une grande partie du garage sont détériorés par les galeries et les traces d'urine

- sous la baignoire de la salle de bains située à l'étage ont été constatés les excréments laissés par les rongeurs sous toute la surface sous la baignoire, signe d'une forte présence avec de nombreux dégâts

- dans le vide sanitaire, le plafond a partiellement été rongé et, au niveau de la canalisation de la salle de bains ont été constatées une importante quantité de morceaux de polystyrène, des traces d'excréments témoignant de la présence des rongeurs depuis plusieurs années ainsi que des rongeurs en décomposition, le câble téléphonique ayant été grignoté et un trou dans le parpaing laissant entrevoir l'autre côté du mur

- les rongeurs ont pu se frayer un chemin pour accéder à la canalisation, des traces d'incisives en témoignant, le trou constaté dans le vide sanitaire ressortant dans un parterre de fleurs situé au niveau de la façade avant de la maison entre l'entrée du garage et la porte d'entrée

- des sachets de produits rodenticides ont été retrouvés dans la buanderie et le garage

- dans les faux plafonds ont été constatés des galeries faites par les rongeurs pour accéder d'un endroit à un autre ainsi qu'un rajout de polystyrène pour éviter le passage des rongeurs par le trou qu'ils avaient réalisé

- dans les combles différents chemins d'excréments de rongeurs ont été constatés sur la laine de verre sous tuiles de la toiture donnant sur la mezzanine et le salon.

Ce rapport conclut, compte tenu des traces, galeries, accumulation d'excréments et traces d'urine retrouvées à tous les niveaux de l'habitation (pièces à vivre, combles, vide sanitaire, toiture), des détériorations constatées (fils rongés, placo et faux-plafond grignotés, canalisations trouées), à une infestation de l'immeuble par rongeurs depuis plusieurs années ne pouvant être ignorée des résidents.

L'expert judiciaire a quant à lui contradictoirement constaté le creusement du polystyrène des hourdis en plafond, des traces et des excréments de rongeurs, des fils rongés, attestant de la présence certaine de rongeurs.

Compte tenu de la quantité des traces et dégâts relevés après enlèvement par les acquéreurs de l'ensemble des cloisons du sous-sol, faux-plafonds et doublages, il est certain d'une part, que cette présence de rongeurs était ancienne, bien antérieure à la vente et d'autre part, que les acquéreurs n'ont pu s'en rendre compte qu'après la vente.

L'importance des traces, des excréments, des galeries permettant le passage des rongeurs à tous les niveaux de l'habitation du vide sanitaire jusque sous la toiture, y compris vers le devant de la maison, des dégâts sur les fils électriques, le parpaing, tout comme le rajout au niveau d'un faux-plafond d'un morceau de polystyrène pour colmater un passage de rongeurs établissent suffisamment que les vendeurs, et particulièrement Mme L'H. qui occupait la maison jusqu'en janvier 2014, ne pouvaient ignorer à la date de la vente la présence de rongeurs dans l'immeuble, ce dont ils n'ont pas informé les candidats acquéreurs. La clause de non garantie prévue à l'acte ne peut donc recevoir application au titre de ce vice.

L'importance établie de l'infestation des lieux et des dégâts générés, existants au jour de la vente et non révélés aux acquéreurs, peu important que ces derniers aient réalisé postérieurement à l'acquisition des travaux de démolition et rénovation conséquents qui leur ont permis de découvrir la situation, laquelle portait atteinte à l'état sanitaire du bien et son habitabilité à défaut de traitement efficace, caractérise pour les acquéreurs un vice caché antérieur à la vente de nature à rendre l'immeuble impropre à sa destination d'immeuble d'habitation ou à en diminuer tellement l'usage qu'ils n'en auraient donné qu’un moindre prix s'ils avaient été informés de la situation dans la mesure où d'une part, ils devaient exposer des frais de dératisation (495 € TTC pour la dératisation initiale à poursuivre sur cinq années à hauteur de 445,50 € par an selon l'expert judiciaire, soit 2  227,50 € TTC), d'autre part réaliser des travaux de reprise nécessaires pour remédier aux dommages imputables aux rongeurs, à savoir la reprise des réseaux d'alimentation électrique et d'évacuation endommagés au niveau du sous-sol (1 833,70 € TTC selon le devis de l'entreprise Bordes du 21 novembre 2014), la réfection de l'isolant de la mezzanine ( 8 783,50 € TTC selon le devis de l'entreprise Intérieure Toulousain du 26 novembre 2014 retenu par l'expert judiciaire), reprendre a minima les placo, isolants hourdis et plafonds endommagés par les rongeurs, les travaux de peinture étant chiffrés par l'expert à 5 387,69 € TTC au vu du devis Apps du 24 novembre 2014, l'expert retenant au surplus un devis de la même entreprise concernant la réfection des cloisons et portes pour un montant de 7 584,69 € TTC sur lequel il sera revenu, soit des sommes conséquentes à exposer indépendamment de toute autre rénovation dont la connaissance au jour de la vente par les acquéreurs aurait nécessairement eu une incidence sur le prix offert à l'achat.

Il en résulte que les consorts B.-C. sont bien fondés en leur action en garantie pour vices cachés et que les vendeurs ne pouvant ignorer l'infestation par les rongeurs, sont tenus à réparation à leur égard en application des dispositions de l'article 1645 du code civil dans la seule mesure du préjudice effectivement subi.

Sur ce point, le devis Apps du 24 novembre 2014 chiffrant un coût de réfection de portes et cloisons au sous-sol pour 7 584,69 € TTC, dit annexé au rapport d'expertise (annexe 20) n'est pas produit. Aucun des dégâts inventoriés ci-dessus ne fait référence à des portes endommagées au niveau du sous-sol. En conséquence, l'indemnisation des seuls dommages liés aux rongeurs au niveau des cloisons, à savoir les placo et hourdis isolants, sera justement estimée à la somme de 5 000 € TTC outre les frais de peinture tels que retenus par l'expert judiciaire.

Le devis Econstructions du 30 novembre 2014 a été justement écarté par l'expert judiciaire puisqu'au-delà de la réfection de l'isolant de la mezzanine il intégrait une prestation de plafond tendu sans rapport avec des dégâts occasionnés par les rongeurs. De même l'expert judiciaire a justement retenu le devis de l'entreprise Bordes pour la réfection de l'alimentation électrique comme répondant exclusivement aux travaux nécessités par les dégâts imputables aux rongeurs, les autres interventions sur l'électricité de l'immeuble ressortant des travaux de conformité préconisés par le diagnostic du cabinet Saretec avant la vente sur l'incidence duquel il sera revenu ci-après.

Le remplacement des bouches d'aération du vide sanitaire résulte selon l'expert judiciaire, non utilement démenti, d'un manque d'étanchéité alors qu'elles existent depuis la construction datant de 1990. Il n'est pas justifié que ce remplacement soit imputable à des dégâts occasionnés par les rongeurs.

Il convient en conséquence, infirmant partiellement le jugement entrepris quant au quantum retenu à ce titre, de condamner solidairement M. Marc-André M. et Mme Véronique L'H., vendeurs, à payer aux consorts B.-C., pris ensemble, acquéreurs, à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices liés à la seule infestation des rongeurs et à la reprise des dégâts qu'ils ont occasionnés la somme totale de 23 727,39 €, se décomposant comme suit :

- 2 722,50 € au titre des frais de dératisation

- 1 833,70 € au titre de la reprise des réseaux d'alimentation électrique et d'évacuation endommagés au niveau du sous-sol

- 8 783,50 € au titre de la réfection de l'isolant au niveau de la mezzanine

- 5 387,69 € au titre de la réfection des peintures du sous-sol

- 5 000 € au titre de la réfection des placo-plâtres et hourdis isolants endommagés au sous-sol.

Cette indemnisation destinée à la réalisation de travaux chiffrés pour l'essentiel à partir de devis datant de novembre 2014, il convient, à titre d'indemnisation complémentaire de dire que la somme ci-dessus allouée devra être actualisée à la date du paiement effectif en fonction de la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction l'indice de référence étant celui de novembre 2014.

2°) Sur les autres vices invoqués

L'expert judiciaire a constaté le non fonctionnement de la Vmc, des traces d'infiltrations non récentes et visibles sur les lambris au niveau du Vélux de la mezzanine, l'entourage du Vélux étant usagé et n'assurant plus l'étanchéité, l'endommagement de la structure en bois de l'auvent de l'appentis extérieur, les bois étant endommagés par les intempéries y compris les poteaux pourris au pied, des anomalies électriques déjà signalées dans le rapport de diagnostic établi par le cabinet Saretec dans un rapport du 31 juillet 2013, rappelé à l'acte de vente (anomalies sur l'appareil général de commande et de protection et son accessibilité, anomalies quant aux règles liées aux zones de locaux contenant baignoire ou douche, matériels électriques vétustes, inadaptés à l'usage, conducteurs non protégés mécaniquement, prise obturateur), anomalies dont l'acquéreur a déclaré faire son affaire personnelle de la mise en conformité, portail extérieur dans un état très vétuste.

Dans un message électronique du 25 février 2014 adressé à Mme L'H., M. B. rappelait « vis à vis de la baisse de prix : notre proposition n'avait rien d'indécent au regard du marché et des éléments d'équipement ou d'entretien à changer (tuiles et traverses affaissés de l'appentis, remplacement du cumulus, état général du chalet, Vmc ne fonctionnant plus, volets gondolés ne fermant plus, joints de cheminée non changés, électricité anormale dans le bureau...). Vous l'avez acceptée de votre propre volonté. »

Il ressort de ces éléments que les désordres dont se plaignent les acquéreurs à titre de vices cachés relatifs à la Vmc, à l'électricité, à l'appentis et au cumulus étaient parfaitement connus d'eux avant l'intervention de l'acte de vente pour avoir été pris en compte dans leur offre de prix, de sorte que leur action en garantie de ces chefs ne peut prospérer.

Les traces d'infiltrations au niveau du Vélux de la mezzanine étant anciennes et visibles, il s'agit de vices apparents dont les acquéreurs ont pu se convaincre eux-mêmes avant la vente de l'immeuble qu'ils ont visité à plusieurs reprises.

En ce qui concerne la cheminée, cette dernière avait été entièrement refaite au jour de l'expertise par les acquéreurs, l'ancienne n'ayant pas été conservée, de sorte que l'expert judiciaire n'a rien pu constater. Il a néanmoins retenu qu'il ressortait de l'attestation fournie par l'entreprise Lancry ayant refait la cheminée que cette dernière avait constaté des traces de suie dans la hotte et des traces de fumée en plafond et aux sorties d'air chaud, établissant une absence de ramonage au 10 juillet 2014, et précisé que la cheminée ancienne était bien pourvue d'un tubage inox mais que la jonction entre le conduit et le tubage n'était pas étanche. Le mail du 25 février 2014 sus énoncé faisant expressément référence à l'absence de changement de joints de la cheminée comme ayant été prise en compte dans l'offre de prix des acquéreurs, il en résulte que le problème d'étanchéité de l'ancienne cheminée invoqué par les acquéreurs était connu d'eux au moment de la vente et qu'ils ne peuvent invoquer un vice caché à ce titre.

Le remplacement des bouches d'aération du vide sanitaire, dont l'expert indique qu'elles existent depuis la construction de la maison, soit 1990, et sont visibles, ne résulte pas d'un vice caché.

En conséquence, le premier juge a justement débouté les consorts B.-C. de leur action en garantie des vices cachés au titre de ces divers désordres ou non conformités apparentes au jour de la vente et résultant de la vétusté.

3°) Sur les demandes de dommages et intérêts complémentaires

L'éradication des nuisibles ayant été effectuée il ne peut en résulter aucune perte de valeur vénale de l'immeuble.

En revanche, il est certain que la présence des rongeurs non signalée par les vendeurs et révélée aux acquéreurs après la vente, a occasionné à ces derniers divers tracas tant pour la traiter, que pour nettoyer les parties souillées, enlever les odeurs et désinfecter murs et sols, préjudice tant matériel par l'énergie déployée que moral, justement évalué par le premier juge à 3 000 €.

Les appelants ne peuvent en revanche invoquer une perte d'occupation de surface habitable au niveau du sous-sol des suites de l'infestation de rongeurs, alors qu'ils ont manifestement entrepris, pour des raisons étrangères à cette infestation, d'importants travaux de démolition et de rénovation dans le sous-sol qui ont seuls rendus inutilisables le temps de leur exécution les locaux du sous-sol. Il ne peut en effet être raisonnablement soutenu que pour identifier l'origine de mauvaises odeurs et rechercher la présence éventuelle de nuisibles ils se seraient trouvés contraints d'arracher dans les pièces aménagées au sous-sol l'intégralité des isolants en façade et de casser les cloisons de la salle de douche et du bureau, opérations au cours desquelles les faux plafonds se seraient effondrés.

4°) Sur l'action en responsabilité à l'encontre de l'agence immobilière

Aucun élément du dossier n'établit que la Sarl Lanta Immobilier ait été informée lors de son intervention en tant que mandataire des vendeurs d'une infestation de rongeurs dans l'immeuble mis en vente.

Pour le surplus les désordres ou non conformités invoquées par les acquéreurs n'étant pas de nature à caractériser des vices cachés, aucun manquement à l'obligation d'information et de conseil n'est caractérisé à l'encontre de la Sarl Lanta Immobilier, les acquéreurs ne pouvant reprocher à cette dernière une absence d'information sur des défectuosités ou non conformités dont ils pouvaient se convaincre eux-mêmes avant la vente.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a débouté les consorts B.-C. de leur action en responsabilité pour faute diligentée à l'encontre de la Sarl Lanta Immobilier.

5°) Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral présentée par les consorts M.-L'H.

Les prétentions formées par les consorts B.-C. à l'encontre des consorts M.-L'H. étant jugées partiellement fondées, le premier juge a justement débouté ces derniers de leur demande de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant de la procédure.

6°) Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Les consorts M.-L'H. succombant, les dispositions du jugement entrepris quant aux dépens de première instance et à l'octroi d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au profit des consorts B.-C. doivent être confirmées.

Les consorts B.-C. d'une part, et les consorts M.-L'H. d'autre part, succombant chacun en leurs appels respectifs, ils supporteront chacun les dépens d'appel à hauteur de moitié et l'équité ne commande pas qu'il soit accordé aux uns ou aux autres une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

Les consorts B.-C. succombant en leur appel à l'égard de la Sarl Lanta Immobilier, ils se trouvent redevables à son égard au titre de la procédure d'appel d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile dans les conditions définies au dispositif du présent arrêt.

PAR CES MOTIFS :

La Cour,

Confirme le jugement entrepris sauf quant au montant de l'indemnisation allouée à M. Arnaud B. et Mme Christelle C. au titre des dommages matériels inhérents à l'infestation de l'immeuble par des rongeurs

Statuant à nouveau sur le chef infirmé et y ajoutant,

Dit que M. Marc-André M. et Mme Véronique L'H. doivent garantir M. Arnaud B. et Mme Christelle C. des conséquences dommageables du vice caché constitué par l'infestation de l'immeuble vendu par des rongeurs

Condamne solidairement M. Marc-André M. et Mme Véronique L'H. à payer à M. Arnaud B. et Mme Christelle C. pris ensemble, la somme de 23 727,39 € à actualiser à la date du paiement effectif en fonction de la variation de l'indice BT 01 du coût de la construction, l'indice de référence étant celui de novembre 2014, à titre de dommages et intérêts en réparation du coût des travaux de reprise nécessaires des suites de l'infestation de l'immeuble vendu par des rongeurs

Rejette le surplus des demandes de M. Marc-André M. et Mme Véronique L'H. à ce titre

Condamne in solidum M. Arnaud B. et Mme Christelle C. à payer à la Sarl Lanta Immobilier une indemnité de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel

Déboute M. Marc-André M., Mme Véronique L'H., M. Arnaud B. et Mme Christelle C. de leurs demandes respectives d'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel

Dit que les dépens d'appel seront supportés pour moitié chacun, d'une part par M. Arnaud B. et Mme Christelle C., pris ensemble, d'autre part par M. Marc-André M. et Mme Véronique L'H., pris ensemble, avec autorisation de recouvrement direct au profit de M. Vincent P., avocat de la Selarl Arcanthe, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.