TUE, 7e ch., 15 octobre 2020, n° T-316/18
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
První novinová společnost a.s.
Défendeur :
Commission européenne, République tchèque, Česká pošta s. p.
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. R. da Silva Passos
Juges :
M. V. Valančius, M. L. Truchot
LE TRIBUNAL (septième chambre)
Antécédents du litige
1 Par décision du 22 février 2013, le Český telekomunikační úřad’ (autorité tchèque de régulation des télécommunications) a désigné, la seconde intervenante, Česká pošta s. p., dont le capital est détenu en totalité par la première intervenante, la République tchèque, en tant que prestataire du service postal au titre de l’obligation de service universel (ci-après l’« OSU »), et ce jusqu’au 31 décembre 2017.
2 Par cette décision, la seconde intervenante a été tenue, jusqu’à cette date, de garantir en permanence l’accessibilité universelle à tous les services postaux de base, tels que, notamment, ceux mentionnés à l’article 3, paragraphe 4, de la directive 97/67/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant des règles communes pour le développement du marché intérieur des services postaux de la Communauté et l’amélioration de la qualité du service (JO 1998, L 15, p. 14), telle que modifiée par la directive 2008/6/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 février 2008 (JO 2008, L 52, p. 3) (ci-après la « directive postale »).
3 Pour compenser les coûts générés par l’exécution de l’OSU, le gouvernement tchèque a initialement envisagé d’accorder à la seconde intervenante une compensation sous la forme d’un fonds de compensation pour les années 2013 et 2014 et d’une subvention directe pour les années 2015 à 2017 (ci-après le « projet initial de compensation »).
4 Le 30 juillet 2015, les autorités tchèques ont notifié à la Commission européenne un projet d’aide sous la forme d’une subvention directe, enregistré sous le numéro d’affaire SA.42756 (2015/N), au titre de l’exécution de l’OSU par la seconde intervenante pour la période 2015-2017.
5 Les 18 et 25 septembre 2015, la Commission a fait part aux autorités tchèques de certaines difficultés et sollicité des informations complémentaires.
6 En date du 4 novembre 2015, les autorités tchèques ont répondu à la Commission et, le 8 décembre 2015, une réunion a eu lieu entre elles.
7 Le 16 décembre 2015, la Commission a de nouveau fait part aux autorités tchèques de certaines préoccupations et sollicité des informations complémentaires. En particulier, elle a expliqué qu’elle éprouvait des doutes au sujet de la compatibilité du fonds de compensation pour les années 2013 et 2014.
8 Le 19 janvier 2016, les autorités tchèques ont répondu aux questions de la Commission.
9 Le 11 mars 2016, Mediaservis s.r.o., un prestataire privé de services postaux opérant sur le territoire tchèque, a déposé auprès de la Commission une plainte dans laquelle elle a notamment fait valoir que la compensation de l’OSU prévue en faveur de la seconde intervenante constituait une aide d’État incompatible (ci-après la « plainte »). Cette plainte a été enregistrée sous le numéro d’affaire SA.44859 (2016/FC).
10 Le 16 mars 2016, la Commission a sollicité des informations complémentaires auprès des autorités tchèques. Par ailleurs, elle a réitéré ses doutes au sujet du fonds de compensation pour les années 2013 et 2014.
11 Le 30 mars 2016, la Commission a transmis la plainte aux autorités tchèques.
12 Le 27 avril 2016, les autorités tchèques ont adressé, à la Commission, leurs observations sur la plainte.
13 Le 29 avril 2016, les autorités tchèques ont formellement retiré leur notification du 30 juillet 2015.
14 Le 29 avril 2016, la République tchèque a également procédé à une notification préalable (prénotification) d’une subvention directe pour les années 2015 à 2017 (ci-après la « première prénotification »).
15 Le 17 juin 2016, la Commission a organisé une réunion avec Mediaservis, au cours de laquelle a été discutée, notamment, la question de l’exonération de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de certains services de la seconde intervenante.
16 Le 20 juin 2016, Mediaservis a transmis à la Commission des observations en complément de la plainte.
17 Le 22 juin 2016, la Commission a organisé une réunion téléphonique avec les autorités tchèques.
18 Le 24 juin 2016, la Commission a transmis par courriel aux autorités tchèques un résumé de la réunion téléphonique du 22 juin 2016, en rapportant les questions qui avaient été discutées.
19 Concernant, tout d’abord, le fonds de compensation, la Commission a fait part de ses préoccupations dues à une absence de définition claire des services interchangeables en droit postal tchèque, du nombre probablement très limité de contributions envisageables, de l’ampleur des efforts à entreprendre pour s’assurer de la compatibilité du fonds et des risques de litiges au niveau tant national que de l’Union européenne, de sorte qu’elle a invité les autorités tchèques à supprimer ledit fonds, en se référant de manière étayée à un mécanisme similaire en Pologne.
20 Pour ce qui est, ensuite, des allégations d’exonérations de TVA, la Commission a invité les autorités tchèques à lui transmettre les versions antérieures, depuis 2004, et en vigueur des lois tchèques sur la TVA et sur la poste, ainsi que des clarifications supplémentaires concernant de possibles exonérations de TVA pour des services ne relevant pas de l’OSU ou dans le cadre de contrats individuellement négociés.
21 En ce qui concerne, enfin, la subvention directe pour les années 2015 à 2017, la Commission a pris note du lancement d’un appel d’offres pour sélectionner un consultant afin de procéder aux calculs du coût moyen pondéré au capital pour les scénarios factuels et contrefactuels dans le cadre du calcul des coûts nets évités par une inexécution de l’OSU (ci-après les « CNE ») et invité les autorités tchèques à lui fournir une description à jour de leur méthode de calcul des CNE selon le modèle suivi dans le cadre d’une décision relative aux Poste italiane adoptée en 2015
22 La Commission a aussi invité les autorités tchèques à dresser une liste de tous les services fournis par la seconde intervenante rémunérés par l’État, en indiquant s’il s’agissait de services d’intérêt économique général (SIEG), d’activités non économiques ou s’ils ne conféraient pas d’avantages, en ce qu’ils avaient fait l’objet d’appels d’offres préalables, tout en précisant que, si toute rémunération de ces services constituait une aide, celle-ci devait être compatible et qu’il ne pouvait en tout état de cause y avoir de surcompensation.
23 Dans le prolongement de la réunion du 22 juin 2016 et du courriel de la Commission du 24 juin 2016, les autorités tchèques ont, le 1er juillet 2016, communiqué des informations complémentaires à la Commission concernant le fonds de compensation et les allégations d’exonérations de TVA.
24 Le 11 juillet 2016, la Commission a organisé une réunion avec les autorités tchèques au cours de laquelle elle leur a demandé des informations complémentaires concernant le calcul des CNE et fait de nouveau part de ses préoccupations concernant le fonds de compensation.
25 Le 27 juillet 2016, la Commission a adressé aux autorités tchèques un courrier par lequel elle a confirmé et étayé ses préoccupations, exprimées dans son résumé de la réunion du 22 juin 2016, concernant le fonds de compensation, notamment à la lumière de sa communication relative à l’encadrement de l’Union européenne applicable aux aides d’État sous forme de compensations de service public (JO 2012, C 8, p. 15 ; ci-après l’« encadrement SIEG de 2012 ») et de la directive postale.
26 Le 31 août 2016, les autorités tchèques ont communiqué des informations à la Commission pour répondre à ses demandes d’informations concernant la méthode de calcul des CNE pour les années 2013 à 2016 dans le prolongement de la réunion du 11 juillet 2016.
27 Le 26 septembre 2016, Mediaservis a transmis à la Commission des observations en complément de la plainte.
28 Le 15 octobre 2016, la Commission a organisé une réunion avec Mediaservis.
29 Le 17 octobre 2016, les autorités tchèques ont, dans le prolongement du courrier de la Commission du 27 juillet 2016 et d’une lettre de la Commission du 8 août 2016, entendu répondre aux préoccupations de la Commission concernant le fonds de compensation en lui adressant la résolution no 894 du gouvernement tchèque, du 12 octobre 2016, de non-application de la base juridique du fonds de compensation.
30 Le 31 octobre 2016, Mediaservis a transmis à la Commission des observations en complément de la plainte.
31 Le 11 novembre 2016, la Commission a organisé une réunion téléphonique avec les autorités tchèques concernant, notamment, le calcul des CNE pour l’année 2014.
32 Le 18 novembre 2016, les autorités tchèques ont transmis des informations complémentaires à la Commission concernant le calcul des CNE pour l’année 2014.
33 Le 3 décembre 2016, les autorités tchèques ont transmis à la Commission les calculs du coût moyen pondéré au capital pour les scénarios factuels et contrefactuels dans le cadre du calcul des CNE durant les années 2013 à 2017 établis par un cabinet de consultants indépendants.
34 Le 20 décembre 2016, les autorités tchèques ont transmis des informations complémentaires à la Commission concernant le fonds de compensation, à savoir un mémorandum explicatif exposant les motifs de la résolution no 894 du gouvernement tchèque, du 12 octobre 2016, de non-application de la base juridique du fonds de compensation.
35 Le 30 janvier 2017, la Commission a organisé une réunion avec les autorités tchèques.
36 Le 13 février 2017, la Commission et les autorités tchèques ont échangé des courriels sur la question de la prise en compte des calculs du coût moyen pondéré au capital pour les scénarios factuels et contrefactuels dans le cadre du calcul des CNE pour les années 2013 à 2017.
37 Le 24 février 2017, la Commission a adressé un nouveau courriel aux autorités tchèques en les invitant à recalculer les CNE pour les années 2013 à 2017 sans prendre en compte un profit raisonnable.
38 Par résolution no 219, du 22 mars 2017, le gouvernement tchèque a supprimé le fonds de compensation en faveur de la seconde intervenante au titre de l’exécution de l’OSU pour les années 2013 et 2014.
39 Le 29 mars 2017, la Commission a adressé une lettre à Mediaservis. Dans cette lettre, elle a exprimé sa position préliminaire selon laquelle il n’existait aucun fondement pour poursuivre l’examen de l’affaire. Par ailleurs, elle a informé Mediaservis que cette dernière pouvait formuler des commentaires supplémentaires dans un délai d’un mois.
40 Le 28 avril 2017, Mediaservis a transmis à la Commission des observations en complément de la plainte concernant la subvention directe pour les années 2013 et 2014.
41 Dans le prolongement de leur lettre du 17 octobre 2016 et de leur réunion avec la Commission du 11 novembre 2016, les autorités tchèques ont, le 4 mai 2017, informé la Commission du fait que, par résolution no 219, du 22 mars 2017, le gouvernement tchèque avait supprimé le fonds de compensation en faveur de la seconde intervenante au titre de l’exécution de l’OSU pour les années 2013 et 2014 et remplacé ce mécanisme de compensation par une subvention de 800 millions de couronnes tchèques (CZK) pour ces deux années. Dans ce même courrier du 4 mai 2017, elles lui ont suggéré, concernant la compensation pour les années 2015 à 2017, de clore la procédure de prénotification et d’ouvrir une procédure formelle de notification en y intégrant la compensation par subvention directe pour les années 2013 et 2014.
42 Le 15 mai 2017, en prenant bonne note de la suppression du fonds de compensation pour les années 2013 et 2014 en date du 22 mars 2017, la Commission a invité les autorités tchèques à procéder à une nouvelle prénotification couvrant l’intégralité de la période allant de 2013 à 2017 et, dans cette perspective, sollicité des informations complémentaires de leur part du fait de l’incidence de cette modification sur le calcul des CNE, concernant, d’une part, un scénario contrefactuel pour l’intégralité de la période 2013-2017 sur une base ex ante, à savoir à compter de 2012, et, d’autre part, un scénario factuel avec des données réelles pour chaque année et une projection pour l’année 2017. Concernant la méthode de calcul des CNE, elle a invité lesdites autorités à consulter la décision bpost (SA.42366) et, eu égard à la technicité des questions, à organiser une réunion avec ses économistes pour mieux comprendre ses attentes, notamment quant à la prise en compte d’un profit raisonnable.
43 De manière plus ponctuelle, la Commission a demandé aux autorités tchèques de lui fournir : « 1) Mise à jour des données concernant le bénéficiaire (Česká pošta) : chiffre d’affaires, propriétaires, chiffre d’affaires, nombre d’employés et revenu net pour 2013 – 2017, services fournis (en lien et sans lien avec l’OSU), autres SIEG fournis. 2) Mise à jour des données concernant le marché postal tchèque : nombre d’opérateurs postaux, parts de marché. 3) Mise à jour de la description de la mesure prénotifiée (incluant l’aide octroyée pour 2013-2014) 4) Existence de l’aide : critère d’une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (au cas où vous auriez ajouté quoi que ce soit par rapport à votre soumission antérieure) 5) En particulier, concernant le critère de l’avantage : description détaillée de la conformité avec les critères Altmark (au cas où vous voudriez ajouter quoi que ce soit par rapport à votre soumission antérieure) 6) Compatibilité : description détaillée de la conformité avec les critères de compatibilité de l’[encadrement SIEG de 2012]. 7) Calcul des coûts nets de la fourniture de l’OSU : [méthode de calcul des CNE], scénarios factuels et contrefactuels, effets d’incitation à un profit raisonnable (en prenant en compte les remarques). Calcul de la charge financière pour la fourniture de l’OSU (en prenant en compte les remarques ci-dessus) ».
44 Le 6 juin 2017, les autorités tchèques ont transmis des informations complémentaires à la Commission concernant les appréciations de l’autorité tchèque de régulation des télécommunications sur la compensation des coûts nets et sur la prise en compte d’un profit raisonnable pour les années 2013 à 2017.
45 Le 8 juin 2017, la Commission a transmis les observations de Mediaservis en complément de la plainte aux autorités tchèques en sollicitant de leur part, dans un délai de vingt jours sous peine d’injonction, et d’ouverture de la procédure formelle d’examen, des informations complémentaires à cet égard, concernant, notamment, l’impossibilité pour le fournisseur de l’OSU de subir une perte financière, dès lors qu’il perçoit un profit raisonnable ; la fiabilité du calcul des CNE pour les années 2013 et 2014 ; le fait que le calcul des CNE repose sur un scénario contrefactuel non réaliste pour ce qui est du nombre de bureaux de poste fermés et de la réduction des fréquences des livraisons ; l’allocation des coûts surévalués des services de base et celle des autres services sous-évalués ; une violation de la directive postale, laquelle exige que les décisions sur des contributions financières pour l’exécution de l’OSU doivent reposer sur des critères objectifs, vérifiables et accessibles au public, et le fait que la compensation ne serait pas affectée à l’OSU, mais permettrait d’augmenter les salaires des employés de la bénéficiaire.
46 Le 19 juin 2017, la Commission a organisé une réunion avec les autorités tchèques.
47 En date du 28 juillet 2017, les autorités tchèques ont notifié à la Commission une compensation sous la forme exclusive d’une subvention directe couvrant l’ensemble de la période allant de 2013 à 2017 (ci-après la « seconde prénotification »).
48 En réponse à la lettre de la Commission du 8 juin 2017 et en contestant le bien-fondé des allégations de Mediaservis, les autorités tchèques ont, le 3 août 2017, transmis des informations complémentaires à la Commission relatives aux prix orientés vers les coûts ; à la transparence du calcul des CNE de l’OSU ; à la fiabilité des données fournies par la seconde intervenante, et aux salaires de ses employés.
49 Le 1er septembre 2017, la Commission a sollicité des informations de la part des autorités tchèques concernant, notamment, le scénario contrefactuel à partir de données factuelles de 2012 ; l’utilisation de données réelles dans le scénario factuel ; le calcul des coûts nets ; la possibilité de doubles comptages, la demande d’un rapport d’audit d’un cabinet sur les audits d’allocation des coûts.
50 Le 2 octobre 2017, les autorités tchèques ont transmis l’ensemble des informations complémentaires demandées par la Commission dans son courrier du 1er septembre 2017.
51 Le 17 octobre 2017, la Commission a sollicité des informations complémentaires de la part des autorités tchèques, concernant des données factuelles et les CNE.
52 Le 18 octobre 2017, la Commission a organisé une réunion avec les autorités tchèques.
53 Le 30 octobre 2017, les autorités tchèques ont transmis l’ensemble des informations complémentaires demandées par la Commission dans son courrier du 17 octobre 2017.
54 En date du 18 décembre 2017, les autorités tchèques ont formellement notifié à la Commission (ci-après la « notification formelle ») une aide sous la forme d’une compensation accordée par la République tchèque à la seconde intervenante pour l’accomplissement de ses activités de poste dans le cadre d’une OSU pour la période allant de 2013 à 2017 (ci-après l’« aide notifiée »).
55 Le 22 décembre 2017, Mediaservis a transmis à la Commission des observations en complément de la plainte.
56 Le 19 février 2018, la Commission a adopté la décision C(2018) 753 final, aide d’État SA.45281 (2017/N) et aide d’État SA. 44859 (2016/FC) – déclarant que les compensations accordées par la République tchèque à Česká pošta pour l’accomplissement de ses activités de poste dans le cadre d’une obligation de service universel pour la période allant de 2013 à 2017 – constituaient une aide d’État compatible avec le marché intérieur, conformément à l’article 106, paragraphe 2, TFUE (ci-après la « décision attaquée »).
57 Par la décision attaquée, la Commission a considéré que, si la mesure en cause constituait une aide d’État, au sens de l’article 107 TFUE, cette dernière, en ce que la seconde intervenante était chargée d’un SIEG, était toutefois compatible, au sens de l’article 106, paragraphe 2, TFUE.
58 En substance, la Commission a retenu que l’aide notifiée permettait à la seconde intervenante d’assurer l’exécution de l’OSU.
59 La Commission a également considéré qu’étaient réunies les conditions pour déclarer compatible une aide, au sens de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, posées dans l’encadrement SIEG de 2012 (voir décision attaquée, considérant 159).
Procédure et conclusions des parties
60 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 22 mai 2018 et régularisée en dernier lieu le 12 juillet 2018, Mediaservis a formé le présent recours.
61 Les 11 et 17 septembre 2018, la République tchèque et Česká pošta ont, respectivement, conformément à l’article 143 du règlement de procédure du Tribunal, demandé à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.
62 La Commission a déposé le mémoire en défense au greffe du Tribunal le 1er octobre 2018.
63 La requérante a déposé le mémoire en réplique au greffe du Tribunal le 26 novembre 2018.
64 Par ordonnance et décision du président de la première chambre du Tribunal du 5 décembre 2018, Česká pošta et la République tchèque ont, respectivement, été admises à intervenir.
65 La Commission a déposé le mémoire en duplique au greffe du Tribunal le 30 janvier 2019.
66 Le 18 février 2019, la République tchèque et la seconde intervenante ont respectivement déposé leurs mémoires en intervention au greffe du Tribunal.
67 Le 12 mars et le 8 avril 2019, Mediaservis et la Commission ont, respectivement, déposé leurs observations sur les mémoires en intervention.
68 Le 30 avril 2019, Mediaservis a, en application de l’article 106 du règlement de procédure, demandé à être entendue dans le cadre d’une audience de plaidoiries.
69 La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, en application de l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée.
70 Sur proposition du juge rapporteur, le Tribunal (septième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure et a, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 du règlement de procédure, invité la Commission à produire certains documents. Par ailleurs, cette dernière, ainsi que Mediaservis et la République tchèque, ont été invitées à répondre à plusieurs questions pour réponse par écrit avant l’audience.
71 Les parties ont déféré à ces demandes dans les délais impartis. Dans sa réponse, la requérante, První novinová společnost a.s., a indiqué qu’elle venait aux droits de Mediaservis.
72 Par lettre déposée au greffe du Tribunal le 15 janvier 2020, la Commission a émis des observations sur le rapport d’audience, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal d’audience.
73 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
74 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
75 La République tchèque conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
76 La seconde intervenante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours.
En droit
77 Au soutien du recours, la requérante invoque cinq moyens.
78 Le premier moyen est tiré d’une violation de l’article 108, paragraphes 2 et 3, TFUE, en ce que la Commission a décidé de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen nonobstant l’existence de difficultés sérieuses ressortant de la durée de la procédure (première branche) et du caractère insuffisant ou incomplet de son examen de l’affaire (seconde branche).
79 Le deuxième moyen est tiré d’un examen incomplet et insuffisant de l’affaire par la Commission (première branche), la décision attaquée étant également entachée à cet endroit d’un vice de motivation (seconde branche).
80 Le troisième moyen, composé de quatre branches, est tiré d’erreurs manifestes d’appréciation, au titre de l’application de l’encadrement SIEG de 2012, concernant le calcul des CNE pour l’accomplissement des activités de poste dans le cadre de l’OSU.
81 Le quatrième moyen est tiré d’une erreur de droit concernant, au titre du calcul desdits coûts nets, la non-prise en compte de certains bénéfices, en violation du paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012 et de l’annexe I, partie B, de la directive postale.
82 Le cinquième moyen est tiré d’une erreur de droit, en ce que la Commission n’a pas, en violation du point 2.9 de l’encadrement SIEG de 2012, imposé d’exigences supplémentaires pour prévenir une affectation des échanges (première branche), la décision attaquée étant également entachée à cet endroit d’un vice de motivation (seconde branche).
83 Il convient d’examiner ensemble le premier moyen et la première branche du deuxième moyen avant de traiter, de manière autonome, la seconde branche du deuxième moyen ainsi que les troisième à cinquième moyens.
Sur le premier moyen et sur la première branche du deuxième moyen, tirés d’une violation de l’article 108, paragraphes 2 et 3, TFUE, pour absence d’ouverture de la procédure formelle d’examen
84 Dans le cadre du premier moyen du recours et de la première branche du deuxième moyen, la requérante invoque une violation par la Commission de l’article 108, paragraphes 2 et 3, TFUE pour absence d’ouverture de la procédure formelle d’examen, alors que celle-ci y aurait été tenue aux fins de sauvegarder ses droits procéduraux, en tant que partie intéressée, au sens de l’article 108, paragraphe 2, TFUE, puisque l’examen de l’affaire suscitait selon elle des difficultés sérieuses.
85 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la phase préliminaire prévue par l’article 108, paragraphe 3, TFUE a seulement pour objet de ménager à la Commission un délai de réflexion et d’investigation suffisant pour se former une première opinion sur les projets d’aides qui lui ont été notifiés afin de conclure, sans qu’un examen approfondi soit nécessaire, qu’ils sont compatibles avec le traité FUE ou, au contraire, de constater que leur contenu soulève des doutes quant à cette compatibilité (voir arrêt du 3 mai 2001, Portugal/Commission, C‑204/97, EU:C:2001:233, point 34 et jurisprudence citée ; arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 97).
86 L’article 4 du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 TFUE (JO 2015, L 248, p. 9), lequel correspond, en substance, à l’article 4 du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article [108 TFUE] (JO 1999, L 83, p. 1), détaille les conditions dans lesquelles ce qu’il convient d’appeler la phase d’examen préliminaire des mesures d’aide doit être conduite (voir arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 98 et jurisprudence citée).
87 À cet égard, lorsqu’une partie requérante demande l’annulation d’une décision de ne pas soulever d’objections sur le fondement de l’article 263 TFUE, elle met en cause essentiellement le fait que la décision prise par la Commission à l’égard de la mesure litigieuse a été adoptée sans que cette institution ouvre la procédure formelle d’examen, violant ce faisant ses droits procéduraux. Dans le cadre de ce type de recours, ladite partie peut invoquer, aux fins de la préservation des droits procéduraux dont elle bénéficie dans le cadre de la procédure formelle d’examen, uniquement des moyens de nature à démontrer que l’appréciation des informations et des éléments dont la Commission disposait ou pouvait disposer, lors de la phase d’examen préliminaire de la mesure notifiée, aurait dû susciter des doutes quant à la compatibilité de cette dernière avec le marché intérieur, étant rappelé à cet égard que les éléments d’information dont la Commission « pouvait disposer » sont ceux qui apparaissaient pertinents pour l’appréciation à effectuer et dont elle aurait pu, sur sa demande, obtenir la production au cours de la phase préliminaire d’examen (voir arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 99 et jurisprudence citée).
88 L’existence de doutes de nature à justifier l’ouverture de la procédure visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE se traduit par l’existence objective de difficultés sérieuses que la Commission a rencontrées lors de l’examen du caractère d’aide de la mesure en cause ou de sa compatibilité avec le marché intérieur. Il ressort, en effet, à cet égard, de la jurisprudence que la notion de difficultés sérieuses revêt un caractère objectif (arrêt du 21 décembre 2016, Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:989, point 31).
89 L’existence de telles difficultés doit être recherchée tant dans les circonstances de l’adoption de l’acte attaqué que dans son contenu, d’une manière objective, en mettant en rapport les motifs de la décision avec les éléments dont la Commission disposait et pouvait disposer lorsqu’elle s’est prononcée sur la compatibilité des aides litigieuses avec le marché intérieur (voir arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 77 et jurisprudence citée).
90 Il en découle que le contrôle de légalité effectué par le Tribunal sur l’existence de difficultés sérieuses, par nature, ne peut se limiter à la recherche de l’erreur manifeste d’appréciation (voir arrêts du 27 septembre 2011, 3F/Commission, T‑30/03 RENV, EU:T:2011:534, point 55 et jurisprudence citée, et du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 80 et jurisprudence citée).
91 En effet, une décision adoptée par la Commission sans ouverture de la phase formelle d’examen peut être annulée, en raison de l’omission de l’examen contradictoire et approfondi prévu par le traité FUE, même s’il n’est pas établi que les appréciations portées sur le fond par la Commission étaient erronées en droit ou en fait (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2010, British Aggregates e.a./Commission, T‑359/04, EU:T:2010:366, point 58).
92 Il y a aussi lieu de rappeler que, conformément à la finalité de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et au devoir de bonne administration qui lui incombe, la Commission peut, notamment, engager un dialogue avec l’État notifiant ou des tiers afin de surmonter, au cours de l’examen préliminaire, des difficultés éventuellement rencontrées. Cette faculté présuppose que la Commission puisse adapter sa position en fonction des résultats du dialogue engagé, sans que cette adaptation doive être a priori interprétée comme établissant l’existence de difficultés sérieuses (voir arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 101 et jurisprudence citée).
93 Ce n’est que si ces difficultés n’ont pu être surmontées qu’elles se révèlent être sérieuses et qu’elles doivent conduire la Commission à avoir des doutes, l’amenant ainsi à ouvrir la procédure formelle d’examen (voir arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 101 et jurisprudence citée).
94 En tout état de cause, il appartient à la partie requérante de prouver l’existence de doutes, preuve qu’elle peut fournir à partir d’un faisceau d’indices concordants (voir arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 102 et jurisprudence citée).
95 C’est à l’aune de cette jurisprudence qu’il convient d’examiner l’argumentation de la requérante visant à établir l’existence de doutes qui auraient dû amener la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen.
96 À cet égard, la requérante avance différents éléments démontrant, selon elle, l’existence de difficultés sérieuses. Dans le cadre de la première branche du premier moyen du recours, elle fait valoir la durée de la procédure. Par la seconde branche du premier moyen du recours et par la première branche du deuxième moyen du recours, elle reproche à la Commission le caractère insuffisant ou incomplet de son examen de l’affaire.
Sur la première branche du premier moyen, tirée de la durée de la procédure
97 Dans le cadre de la première branche du premier moyen du recours, la requérante fait valoir la durée de la procédure, en faisant observer que l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589, prévoit un délai de deux mois pour l’examen préliminaire, lequel ne pourrait être prorogé que par consentement mutuel ou si la Commission réclame d’autres informations.
98 Or, la décision attaquée n’a été adoptée que le 19 février 2018, soit près de deux années après avoir reçu la plainte, le 11 mars 2016, et ce après que la Commission a transmis par deux fois ses observations aux autorités tchèques, et les a saisies de trois demandes d’informations supplémentaires, les 15 mai, 1er septembre et 17 octobre 2017. Un tel délai excéderait manifestement celui imparti à la Commission pour finaliser son examen préliminaire.
99 Des difficultés sérieuses ressortiraient de toute évidence du délai en cause associé au nombre de demandes adressées aux autorités tchèques.
100 La requérante soutient que, même non pertinent pour la computation du délai de deux mois, le traitement d’une plainte durant une très longue durée reflète clairement des difficultés sérieuses et que le nombre d’observations de sa part durant la procédure ne saurait justifier la durée excessive du traitement de l’affaire.
101 La Commission ne saurait légitimement invoquer des échanges préalables à une notification formelle pour retarder à l’envi le point de départ du délai d’examen. À cet égard, la requérante mentionne la notification intervenue le 30 juillet 2015 et enregistrée sous le numéro d’affaire SA.42756. Elle souligne que cette procédure a ensuite été transformée en prénotification en avril 2016 en raison de lacunes graves. En substance, elle soutient que les contacts entre la Commission et les autorités tchèques, préalables à la notification formelle du 18 décembre 2017, doivent être pris en considération.
102 La requérante ajoute que, si la Commission prétendait que la manière dont les autorités tchèques avaient agi en l’espèce était conforme aux règles applicables, cela signifierait, en raisonnant par l’absurde, que tout État membre pourrait toujours, lorsqu’il a l’intention de notifier une mesure, maintenir avec la défenderesse des contacts dans le cadre de la prénotification pendant une période quasi indéfinie. Pendant cette période, l’État membre pourrait, en coopération avec la Commission, sans être pressé par le temps ou autre, traiter et résoudre tout problème potentiellement soulevé par la mesure afin de pouvoir ensuite la notifier. Les procédures de notification en tant que telles prendraient alors, de toute évidence, rapidement fin avec l’approbation par la défenderesse de la mesure notifiée, puisque tous les problèmes auraient, alors, déjà été discutés à l’occasion des contacts intensifs entre l’État membre et la défenderesse dans le cadre de la prénotification.
103 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la durée de l’examen préliminaire peut, avec d’autres éléments, constituer un indice des difficultés sérieuses rencontrées par la Commission, si elle excède notablement ce qu’implique normalement un tel examen (voir arrêt du 16 septembre 2013, Orange/Commission, T‑258/10, non publié, EU:T:2013:471, point 42 et jurisprudence citée).
– Sur l’adoption tardive de la décision attaquée au regard de l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589
104 Aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses dans le cadre de l’examen de la mesure en cause justifiant l’ouverture de la procédure formelle, la requérante fait valoir que la décision attaquée a été adoptée tardivement au regard du délai fixé par l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589.
105 À cet égard, il convient de rappeler que, en application de l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589, une décision de ne pas soulever d’objection, visée au paragraphe 1 dudit article, est prise dans un délai de deux mois. Ce délai court à compter du jour suivant celui de la réception d’une notification complète, une notification étant considérée comme complète si, dans les deux mois suivant sa réception ou la réception de toute information additionnelle réclamée, la Commission ne réclame pas d’autres informations, ce délai pouvant au demeurant être prorogé par accord mutuel entre la Commission et l’État membre concerné (voir arrêt du 16 septembre 2013, Orange/Commission, T‑258/10, non publié, EU:T:2013:471, points 45 et 46 et jurisprudence citée).
106 Il en ressort clairement que le délai de deux mois en cause ne court nullement à compter, le cas échéant et comme en l’espèce, d’une plainte dont aurait été saisie la Commission, de sorte que la première computation dudit délai proposée par la requérante doit être rejetée.
107 En l’espèce, il est constant que la notification formelle par les autorités tchèques de l’aide litigieuse n’est intervenue que le 18 décembre 2017.
108 C’est ainsi au plus tôt à compter de la réception de la notification formelle, à savoir le 18 décembre 2017, qu’il convient, au titre de l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589, de calculer le délai de deux mois en cause, et non, comme le soutient la requérante, à partir de la plainte, ni à partir de la première prénotification ou de la seconde prénotification. Dès lors, les délais intervenus avant la notification formelle n’entrent pas dans ledit calcul (voir, en ce sens, arrêts du 16 septembre 2013, Orange/Commission, T‑258/10, non publié, EU:T:2013:471, point 52, et du 3 décembre 2014, Castelnou Energía/Commission, T‑57/11, EU:T:2014:1021, point 67).
109 Ainsi, dans le contexte factuel et chronologique de la présente affaire, ce n’est que le 18 décembre 2017, soit deux mois et un jour avant l’adoption de la décision attaquée, que la Commission a été saisie d’une notification formelle et complète, au sens de l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589 (voir, en ce sens, arrêt du 28 mars 2012, Ryanair/Commission, T‑123/09, EU:T:2012:164, point 168).
110 Partant, il y a lieu de conclure que le délai de deux mois et un jour qui s’est écoulé en l’espèce entre la notification formelle et l’adoption de la décision attaquée correspond, à une journée près, au délai fixé par l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589.
111 Cette appréciation ne saurait être remise en cause par l’arrêt du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission (T‑388/03, EU:T:2009:30), invoqué par la requérante.
112 Certes, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission (T‑388/03, EU:T:2009:30), il a été fait grief à la Commission d’avoir enfreint le délai de deux mois en cause, en ce qu’elle avait clos sa procédure pour l’examen préliminaire sept mois après que l’État en cause lui avait notifié le projet d’aide en cause.
113 Cependant, dans l’affaire en cause, la notification effectuée n’était ni une notification préalable ni une prénotification, mais une notification formelle et complète.
114 Force est ainsi de constater que ces circonstances de l’affaire en cause divergent sensiblement de celles de la présente affaire.
115 Dès lors, en ce que la requérante cherche à établir l’existence de difficultés sérieuses dans le cadre de l’examen de la mesure en cause justifiant l’ouverture de la procédure formelle, en se référant à l’adoption tardive de la décision attaquée au regard de l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589, son argumentation ne saurait prospérer.
– Sur la durée de la procédure pour l’examen préliminaire
116 Aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses dans le cadre de l’examen de la mesure en cause justifiant l’ouverture de la procédure formelle, la requérante fait valoir la durée excessivement longue de la procédure pour l’examen préliminaire indépendamment du délai fixé par l’article 4, paragraphe 5, du règlement 2015/1589. À cet égard, certes, la durée de ladite procédure peut constituer un indice de ce que la Commission a pu avoir des doutes en ce qui concerne la compatibilité de l’aide en cause avec le marché intérieur (voir, en ce sens, arrêt du 24 janvier 2013, 3F/Commission, C‑646/11 P, non publié, EU:C:2013:36, point 32 et jurisprudence citée).
117 Il est également vrai que, en l’espèce, la décision attaquée a été adoptée le 19 février 2018, soit plus de trente mois après la première notification, intervenue le 30 juillet 2015, plus de 23 mois après la plainte, déposée le 11 mars 2016, et plus de 22 mois après la première prénotification, intervenue le 29 avril 2016, une telle durée, particulièrement longue, pouvant constituer un indice de l’existence de difficultés sérieuses.
118 Il n’en reste pas moins que, si elle peut constituer un indice de ce que la Commission a pu avoir des doutes en ce qui concerne la compatibilité de l’aide en cause avec le marché intérieur, la durée de la procédure pour l’examen préliminaire ne saurait à elle seule permettre de déduire que la Commission était confrontée à des difficultés sérieuses et qu’elle aurait dès lors dû ouvrir la procédure formelle d’examen (voir, en ce sens, arrêt du 24 janvier 2013, 3F/Commission, C‑646/11 P, non publié, EU:C:2013:36, point 32 et jurisprudence citée).
119 Aussi le caractère raisonnable de la durée d’une procédure pour l’examen préliminaire doit s’apprécier en fonction des circonstances propres à chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, des différentes étapes procédurales que la Commission doit suivre, de la complexité de l’affaire ainsi que de son enjeu pour les différentes parties intéressées (voir arrêt du 15 mars 2018, Naviera Armas/Commission, T‑108/16, EU:T:2018:145, point 61 et jurisprudence citée).
120 Or, dans la présente affaire, il ressort clairement de l’ensemble des éléments du dossier quant aux différentes étapes de l’examen préliminaire effectué par la Commission, telles que rapportées aux points 4 à 59 ci-dessus, que les circonstances de l’espèce expliquent et justifient la durée certes particulièrement longue de cet examen, laquelle ne saurait toutefois révéler, à elle seule, l’existence de difficultés sérieuses.
121 En effet, en premier lieu, il est constant que la Commission a, dans le prolongement de la première notification du 30 juillet 2015, fait part aux autorités tchèques de certaines préoccupations concernant le projet initial de compensation, que lesdites autorités ont fourni des informations complémentaires à cet égard et que ces autorités ont formellement retiré leur notification le 29 avril 2016.
122 En second lieu, premièrement, il faut relever que la Commission a, peu de temps après sa réception, le 11 mars 2016, communiqué la plainte aux autorités tchèques le 30 mars 2016. Ces dernières ont promptement répondu le 27 avril 2016 avant de lui adresser la première prénotification le 29 avril 2016.
123 Deuxièmement, dans le prolongement de la première prénotification, la Commission a organisé, dès les 17 et 22 juin 2016, des réunions avec les autorités tchèques, de même que les 11 juillet, 15 octobre et 11 novembre 2016 ainsi que les 30 janvier et 19 juin 2017.
124 Troisièmement, durant cette phase de la procédure, la Commission a également demandé des informations complémentaires aux autorités tchèques les 8 juillet, 24 juin et 27 juillet 2016 ainsi que les 13 février, 24 février, 15 mai et 8 juin 2017.
125 Quatrièmement, il faut relever que, dans le prolongement des réunions et des demandes d’informations en cause, les autorités tchèques ont transmis des informations complémentaires à la Commission en date des 8 juillet, 31 août, 17 octobre, 18 novembre, 3 décembre et 20 décembre 2016 ainsi que les 13 février, 4 mai et 6 juin 2017.
126 Cinquièmement, durant cette phase de la procédure, la requérante ne conteste pas que la Commission a parallèlement réceptionné de Mediaservis à quatre reprises des observations en complément de la plainte les 20 juin, 26 septembre et 31 octobre 2016 ainsi que le 28 avril 2017.
127 Sixièmement, la requérante ne conteste pas non plus que, à la suite de la plainte et des observations en cause que la Commission a communiquées aux autorités tchèques en date du 8 juin 2017, celle-ci a organisé des réunions et correspondu avec Mediaservis les 17 juin et 15 octobre 2016 ainsi que le 29 mars 2017.
128 Force est ainsi de constater que, durant la procédure d’examen antérieure et postérieure à la plainte ainsi qu’à la première pré-notification, loin de rester inactive, la Commission a, conformément à la finalité de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et au devoir de bonne administration qui lui incombe, engagé un dialogue avec les autorités tchèques afin de surmonter, au cours de l’examen préliminaire, les difficultés rencontrées.
129 Il résulte de ce qui précède que, contrairement à ce que prétend la requérante, le fait que la Commission a estimé, au cours de l’examen préliminaire, que la mesure en cause soulevait des difficultés et requérait des modifications n’était nullement de nature à obliger celle-ci à ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, les difficultés rencontrées pouvant encore être surmontées au cours d’un dialogue avec les autorités tchèques et notamment, comme en l’espèce, au moyen d’un réaménagement des modalités de la compensation indiquée par lesdites autorités (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:989, point 37).
130 En d’autres termes, si les difficultés rencontrées ont été surmontées, elles se sont révélées ne pas ou pour le moins ne plus être sérieuses et en tout état de cause non dirimantes, ce qui a pu, à bon droit, conduire la Commission à lever d’éventuels doutes, l’amenant ainsi à ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen (voir, en ce sens, arrêt du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 101 et jurisprudence citée).
131 Il convient, en troisième lieu, de relever qu’il a résulté de ces premières phases de la procédure, à savoir celle ayant débuté à compter de la notification du 30 juillet 2015, retirée le 29 avril 2016, de la plainte et de la première prénotification, que les autorités tchèques ont apporté, durant la phase d’examen préliminaire de la Commission, des modifications significatives à leur projet de compensation.
132 Il faut rappeler en effet que, pour compenser les coûts générés par l’exécution de l’OSU, le gouvernement tchèque avait initialement envisagé d’accorder à la seconde intervenante une compensation sous la forme d’un fonds de compensation pour les années 2013 et 2014 et d’une subvention directe pour les années allant de 2015 à 2017.
133 Il convient tout autant de rappeler que, par résolution no 219, du 22 mars 2017, le gouvernement tchèque a supprimé le fonds de compensation en faveur de la seconde intervenante au titre de l’exécution de l’OSU pour les années 2013 et 2014 et que les autorités tchèques ont, le 4 mai 2017, informé la Commission de ladite résolution et, au titre de l’exécution de l’OSU pour lesdites années, du remplacement du mécanisme de compensation initial par une subvention directe également pour ces années.
134 Par la suite, en date du 15 mai 2017, la Commission a invité les autorités tchèques à procéder à une nouvelle prénotification couvrant l’intégralité de la période allant de 2013 à 2017 et, dans cette perspective, sollicité des informations complémentaires de leur part du fait de l’incidence de cette modification sur le calcul des CNE durant l’intégralité de la période d’exécution de l’OSU.
135 Ainsi, en date du 28 juillet 2017, les autorités tchèques ont notifié à la Commission une compensation accordée à la seconde intervenante sous la forme exclusive d’une subvention directe couvrant l’ensemble de la période allant de 2013 à 2017.
136 Partant, ce n’est qu’à compter du 28 juillet 2017, c’est-à-dire de la seconde prénotification, que la Commission a été en mesure d’examiner la compensation accordée à la seconde intervenante pour l’ensemble de la période allant de 2013 à 2017.
137 Or, durant cette dernière phase de la procédure, à savoir celle s’étant écoulée entre la seconde prénotification, du 28 juillet 2017, et la notification formelle, déposée le 18 décembre 2017, premièrement, il est constant que la Commission a saisi les autorités tchèques de demandes d’informations complémentaires les 1er septembre et 17 octobre 2017, de même qu’elle a organisé une réunion avec lesdites autorités le 18 octobre 2017.
138 Deuxièmement, il est tout autant constant que les autorités tchèques ont transmis des informations complémentaires à la Commission en date du 3 août 2017 et, dans le prolongement de ces demandes d’informations et réunion, les 2 octobre et 30 octobre 2017.
139 Ainsi, tant le déroulement de la procédure que l’évolution de la situation en cause ainsi que les échanges complémentaires qui en ont résulté entre la Commission et la République tchèque constituent des circonstances objectives, étrangères à toute difficulté sérieuse rencontrée lors de l’examen des mesures en cause, ayant contribué à allonger la durée de la procédure pour l’examen préliminaire par la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 15 mars 2018, Naviera Armas/Commission, T‑108/16, EU:T:2018:145, points 65 à 73).
140 Au demeurant, la phase de la procédure s’étant écoulée entre la seconde prénotification, le 28 juillet 2017, et la notification formelle, le 18 décembre 2017, a duré moins de cinq mois, alors que la Commission se devait, dans le cadre d’un dialogue avec les autorités tchèques, de mener un examen approfondi de la mesure modifiée en cause aux fins de lever toute éventuelle préoccupation quant à la compatibilité de l’aide.
141 Force est ainsi de constater que, durant l’intégralité de la période s’étant écoulée entre, d’une part, la première notification, la plainte et la première prénotification et, d’autre part, la seconde prénotification et la notification formelle, loin de se révéler inefficace, la Commission a invité et obtenu des autorités tchèques, conformément à la finalité de l’article 108, paragraphe 3, TFUE et au devoir de bonne administration qui lui incombe, une modification de la mesure d’aide et des informations complémentaires indispensables pour en apprécier le contenu modifié, aux fins de surmonter, au cours de l’examen préliminaire, les préoccupations qu’elle avait pu rencontrer.
142 À cet égard, il convient de relever qu’il ressort de la jurisprudence que le seul fait que des discussions se soient instaurées entre la Commission et l’État membre notifiant durant la phase d’examen préliminaire et que, dans ce cadre, des informations complémentaires aient pu être demandées par la Commission sur les mesures soumises à son contrôle ne peut pas, en soi, être considéré comme un indice de ce que cette institution se trouvait confrontée à des difficultés sérieuses d’appréciation (voir arrêt du 10 juillet 2012, TF1 e.a./Commission, T‑520/09, non publié, EU:T:2012:352, point 76 et jurisprudence citée).
143 Il est enfin également constant que la requérante a ajouté à la plainte des observations les 20 juin, 26 septembre et 31 octobre 2016 et 28 avril 2017, et de nouvelles observations le 22 décembre 2017, ce qui a encore, le cas échéant, permis à la Commission d’affiner son examen et de jauger sa conviction pour la renforcer quant à la compatibilité de la compensation accordée à la seconde intervenante.
144 Il en ressort en tout état de cause que, durant l’intégralité de la phase de l’examen de l’affaire par la Commission, Mediaservis a été entendue par la Commission et que cette dernière a pu adapter sa position en fonction des informations transmises non seulement par les autorités tchèques, mais également par Mediaservis, sans que cette adaptation doive être a priori interprétée comme établissant l’existence de difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêts du 13 juin 2013, Ryanair/Commission, C‑287/12 P, non publié, EU:C:2013:395, point 71 ; du 21 décembre 2016, Club Hotel Loutraki e.a./Commission, C‑131/15 P, EU:C:2016:989, point 31, et du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 101).
145 Dès lors, le déroulement de la procédure d’examen préliminaire n’est pas en lui-même révélateur de difficultés sérieuses qui obligeaient la Commission à ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE.
146 Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du premier moyen du recours.
Sur la seconde branche du premier moyen et sur la première branche du deuxième moyen, tirées d’un examen de l’affaire prétendument insuffisant ou incomplet par la Commission
147 Dans le cadre de la seconde branche du premier moyen et de la première branche du deuxième moyen, la requérante fait valoir, aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses, le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen de l’affaire par la Commission.
148 La requérante fait observer que la Commission est tenue d’examiner l’ensemble des éléments de fait et de droit portés à sa connaissance par les personnes éventuellement affectées dans leurs intérêts par l’octroi d’une aide et que c’est à la lumière tant des informations notifiées par l’État membre concerné que de celles fournies par les éventuels plaignants que ladite institution doit former son appréciation dans le cadre de l’examen préliminaire institué par l’article 108, paragraphe 3, TFUE.
149 À cet égard, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de la jurisprudence que le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par la Commission des éléments de droit et de fait qui ont été portés à sa connaissance lors de la procédure d’examen préliminaire constitue un indice de l’existence de difficultés sérieuses [voir arrêts du 3 décembre 2014, Castelnou Energía/Commission, T‑57/11, EU:T:2014:1021, point 88 et jurisprudence citée, et du 17 mars 2015, Pollmeier Massivholz/Commission, T‑89/09, EU:T:2015:153, point 50 (non publié) et jurisprudence citée].
150 À cette fin, la requérante supporte la charge de la preuve qu’elle peut rapporter à partir d’un faisceau d’indices concordants, relatifs, notamment, au caractère insuffisant ou incomplet de l’examen effectué par la Commission lors de la procédure d’examen préliminaire. Cependant, en tant que partie intéressée, elle ne dispose ni des pouvoirs d’enquête ni de capacités d’investigation comparables à celles dont bénéficie la Commission, au besoin en sollicitant la coopération de l’État membre concerné, pour mener à bien son examen de la mesure notifiée.
151 Dès lors, en l’espèce, à un stade de la procédure où les parties intéressées n’ont pas encore été mises en demeure de présenter leurs observations par une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, il suffit que la requérante expose les raisons pour lesquelles elle estime, au vu de la décision attaquée, que la Commission aurait dû avoir des doutes sur la compatibilité de la mesure notifiée avec le marché intérieur. Elle n’est donc pas tenue de présenter tous les éléments de nature à établir l’incompatibilité de l’aide notifiée.
152 À cet égard, il a été jugé que la Commission pouvait, dans certaines circonstances, être tenue d’instruire une plainte en allant au-delà du seul examen des éléments de fait et de droit portés à sa connaissance par le plaignant. En effet, la Commission est tenue, dans l’intérêt d’une bonne administration des règles fondamentales du traité relatives aux aides d’État, de procéder à un examen diligent et impartial de la plainte, ce qui peut rendre nécessaire que celle-ci procède à l’examen d’éléments qui n’ont pas été expressément évoqués par le plaignant (voir arrêt du 15 mars 2018, Naviera Armas/Commission, T‑108/16, EU:T:2018:145, point 101 et jurisprudence citée).
153 Par ailleurs, il convient de rappeler que, pour être en mesure d’effectuer un examen suffisant au regard des règles applicables aux aides d’État, la Commission n’est pas tenue de limiter son analyse aux éléments contenus dans la notification de la mesure en cause. Elle peut et, le cas échéant, doit rechercher les informations pertinentes, afin de disposer, lors de l’adoption de la décision attaquée, d’éléments d’évaluation pouvant raisonnablement être considérés comme étant suffisants et clairs pour les besoins de son appréciation. Pour illustration, il a déjà été jugé que la Commission avait effectué un examen « actif et diligent » de la compatibilité d’une aide dès lors qu’elle s’était interrogée sur le bien-fondé des arguments avancés par l’État membre concerné (voir, en ce sens, arrêt du 10 décembre 2008, Kronoply et Kronotex/Commission, T‑388/02, non publié, EU:T:2008:556, point 127), tandis qu’il a été considéré que cet examen était « insuffisant », dès lors qu’elle n’avait pas obtenu d’informations qui lui auraient permis d’apprécier une mesure (voir, en ce sens, arrêt du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission, T‑388/03, EU:T:2009:30, points 109 et 110).
154 Dès lors, pour prouver l’existence de doutes au sens de l’article 4, paragraphe 4, du règlement no 659/1999, il suffit que la requérante démontre que la Commission n’a pas recherché et examiné, de manière diligente et impartiale, l’ensemble des éléments pertinents aux fins de cette analyse ou qu’elle ne les a pas dûment pris en considération, de manière à éliminer tout doute quant à la compatibilité de la mesure notifiée avec le marché intérieur.
155 En outre, il est de jurisprudence constante que la légalité d’une décision en matière d’aides d’État doit être appréciée en fonction des éléments d’information dont la Commission pouvait disposer au moment où elle l’a arrêtée (voir, en ce sens, arrêt du 15 avril 2008, Nuova Agricast, C‑390/06, EU:C:2008:224, points 54 et 55 et jurisprudence citée). Or, les éléments d’information dont la Commission « pouvait disposer » incluent ceux qui apparaissaient pertinents pour l’appréciation que cette institution devait effectuer conformément à l’article 108, paragraphes 2 et 3, TFUE et à l’article 4, paragraphes 3 ou 4, du règlement no 659/1999.
156 Afin de démontrer l’existence de doutes quant à la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur, il est dès lors loisible à la requérante d’invoquer toute information pertinente dont disposait ou pouvait disposer la Commission à la date où elle a adopté la décision attaquée. De même, aux fins du contrôle de légalité que le Tribunal est appelé à effectuer à cet égard, celui-ci peut prendre en considération tout élément d’information qui est mentionné dans la décision attaquée au soutien de l’appréciation qui y est effectuée par la Commission.
157 Il convient dès lors de vérifier si les éléments avancés par la requérante devant le Tribunal, au vu des informations disponibles lors de l’adoption de la décision attaquée, étaient de nature à susciter des doutes quant à la compatibilité partielle ou totale de la mesure notifiée avec le marché intérieur, imposant dès lors à la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen, sans préjudice de l’exercice ultérieur par cette institution de son pouvoir d’appréciation de la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur à la suite de l’ouverture de ladite procédure.
158 En l’espèce, la requérante fait valoir qu’il ressort d’une comparaison des motifs de la décision attaquée et des informations portées à la connaissance de la Commission, notamment par Mediaservis, que celle-ci n’a pas traité toutes les informations communiquées et invoque cinq griefs en ce sens.
– Sur le premier grief, tiré d’une prétendue non-facturation de la TVA
159 La requérante rappelle que Mediaservis a fait état auprès de la Commission, dans la plainte et dans ses observations du 20 juin 2016, de la tolérance par les autorités tchèques de la non-facturation de la TVA par la seconde intervenante dans le cadre d’« accords négociés à titre particulier et des services postaux ne relevant pas du service universel ». Une telle pratique serait contraire aux directives TVA et constituerait une aide d’État. Dans la décision attaquée, la Commission aurait uniquement traité la question de la TVA en considérant les bénéfices tirés par la seconde intervenante de l’exemption de TVA comme un bénéfice immatériel lié à la détermination des coûts nets. En revanche, la Commission n’aurait pas traité le grief spécifique tiré d’une absence de facturation de la TVA par la seconde intervenante dans le cadre d’« accords négociés à titre particulier et des services postaux ne relevant pas du service universel ».
160 La requérante estime que la Commission n’a aucunement répondu au grief en question dans la décision attaquée, en ne l’ayant abordé que pour les prestations relevant de l’OSU. Elle s’oppose à l’argumentation sur les obligations lui incombant, s’agissant, en l’espèce, d’aides étroitement liées, au sens de l’ordonnance du 25 mars 1998, FFSA e.a./Commission (C‑174/97 P, EU:C:1998:130), de sorte que la Commission était tenue de faire des recherches pour répondre aux questions dont celle-ci avait été saisie.
161 La requérante s’oppose également aux allégations selon lesquelles Mediaservis n’a rapporté aucune preuve de ce que la seconde intervenante, en ne facturant pas la TVA dans le cadre d’accords négociés à titre particulier, avait violé la zákon č. 235/2004 Sb., o dani z přidané hodnoty (loi n° 235/2004 Rec., concernant la taxe sur la valeur ajoutée), telle que modifiée (ci-après la « loi tchèque sur la TVA »), la société aux droits desquels elle vient ayant, à plusieurs reprises, signalé des suspicions et pressé la Commission de les confirmer, à savoir des contrats entre la seconde intervenante et certains grands expéditeurs.
162 Cette argumentation ne saurait prospérer aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses révélant un examen insuffisant ou incomplet de l’affaire par la Commission.
163 Certes, Mediaservis a pu faire état, dans la plainte, lors de la réunion avec la Commission du 17 juin 2016 et dans sa lettre à la Commission du 26 septembre 2016, de services fournis par la seconde intervenante, dans le cadre d’accords négociés individuellement et pour des services ne relevant pas de l’OSU, sans facturation de TVA. Assurément aussi, la Commission n’a pas répondu à ce grief dans la décision attaquée.
164 Il n’en demeure pas moins, tout d’abord, que la Commission a pris en compte, aux considérants 133 à 135 de la décision attaquée, l’incidence de l’exonération de la TVA concernant les services relevant de l’OSU, ce que ne conteste pas la requérante.
165 Par ailleurs, même à les supposer établies, des non-facturations de TVA relatives à des services ne relevant pas de l’OSU n’auraient eu aucune incidence concernant le calcul des CNE relatifs à l’OSU, ce calcul consistant, ainsi que cela ressort du paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012, en la différence entre le coût net supporté par le prestataire lorsqu’il exécute ces obligations et le coût ou bénéfice net du même prestataire lorsqu’il ne les exécute pas. Comme le souligne la Commission, le fait que des non-facturations de TVA relatives à des services ne relevant pas de l’OSU aient eu lieu ou non devrait être reflété dans le scénario factuel ainsi que dans le scénario contrefactuel. Ces non-facturations n’auraient donc aucune incidence sur le calcul du montant de la compensation accordée à la seconde intervenante.
166 Enfin, la décision attaquée porte uniquement sur la compensation de l’exécution de l’OSU accordée à la seconde intervenante pour la période 2013-2017. Or, la requérante ne démontre pas que le grief tiré des non-facturations de TVA relatives à des services ne relevant pas de l’OSU est étroitement lié à cette compensation. D’ailleurs, il ressort des documents produits par la requérante devant le Tribunal que, dans la plainte, Mediaservis avait dénoncé des non-facturations de TVA relatives à des services ne relevant pas de l’OSU au cours d’une période différente de celle couverte par la compensation qui est l’objet de la décision attaquée.
167 L’argument que la requérante tire des points 33 à 35 de l’ordonnance du 25 mars 1998, FFSA e.a./Commission (C‑174/97 P, EU:C:1998:130), ne peut donc prospérer.
168 Dans ces conditions, l’absence de réponse de la Commission au grief tiré des non-facturations de TVA relatives à des services ne relevant pas de l’OSU dans la décision attaquée est sans incidence sur la légalité de cette dernière.
169 Partant, le présent grief ne saurait prospérer, en ce qu’il est en partie non fondé et inopérant pour le surplus.
– Sur le deuxième grief, relatif aux services autres que ceux liés à l’OSU et aux subventions de petites communes
170 La requérante prétend que Mediaservis a dénoncé, dans la plainte, la possibilité pour la seconde intervenante, en raison de la densité de son réseau, de fournir de nombreux autres services générant des revenus, tels que des services financiers, de même que les subventions versées par des petites communes, la Commission n’ayant aucunement mentionné ces éléments dans la décision attaquée en se contentant de se satisfaire des méthodes comptables de la seconde intervenante jugées par celle-ci pertinentes.
171 La requérante dénonce la superficialité des arguments de la Commission et le défaut de report détaillé des différents services en cause, cette dernière s’étant contentée de distinguer les services postaux et les services non postaux.
172 L’explication fournie par la Commission dans le mémoire en défense relative aux subventions versées par des petites communes et relevant selon elle de partenariats commerciaux serait tardive et ne figurerait pas dans la décision attaquée, en violation de l’obligation de motivation incombant à la Commission.
173 Sur le terrain de la preuve de telles mesures, la requérante rappelle avoir été dans l’impossibilité d’accéder auxdits partenariats et fait observer que c’était à la Commission qu’il appartenait de vérifier si ces accords avaient été conclus dans des conditions purement commerciales, ce qui ne serait pas le cas sur la base de déclarations du 26 février 2018 d’un membre tchèque du Parlement européen, faisant état d’échanges avec le ministre de l’Intérieur tchèque sur l’opportunité d’un redéploiement du réseau de la seconde intervenante.
174 Au surplus, la requérante conteste l’incidence de la fermeture des bureaux de poste sur certains services autres que ceux relevant de l’OSU.
175 Cette argumentation ne saurait prospérer aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses révélant un examen insuffisant ou incomplet de l’affaire par la Commission.
176 En effet, pour ce qui est, d’une part, des sources de revenus supplémentaires générées par le réseau de la seconde intervenante, la Commission les a pris en compte dans le cadre du scénario contrefactuel, ce qui relève de l’appréciation du bien-fondé de la décision, la Commission ayant en tout état de cause traité ce volet de la plainte.
177 Le fait que la Commission n’ait pas ventilé en détail les autres services en cause ne saurait, en soi, établir le caractère incomplet ou insuffisant de son examen de l’affaire, d’autant moins dans le cadre de la méthode de calcul des CNE (voir point 165 ci-dessus).
178 D’autre part, concernant les prétendues subventions octroyées par de petites communes, il est constant que la Commission n’a pas, dans la décision attaquée, répondu à l’argument de Mediaservis. Force est toutefois de constater que la requérante s’efforce de renverser la charge de la preuve qui lui incombe et que, dans le cadre des éléments fournis à la Commission, elle n’a rapporté, ce qu’elle admet expressément, aucune preuve de l’existence de ces accords et, a fortiori, de leurs conditions non commerciales.
179 En tout état de cause, les déclarations d’un membre du Parlement, le 26 février 2018, dont fait état la requérante sont postérieures à la date d’adoption de la décision attaquée, la Commission n’en ayant ainsi manifestement pas disposé durant la procédure d’examen.
180 Partant, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir mené un examen incomplet ou insuffisant s’agissant de ces éléments, de sorte que le présent grief ne saurait prospérer, en ce qu’il est non fondé.
– Sur le troisième grief, tiré de certaines déclarations publiques
181 La requérante soutient que, alors que Mediaservis les lui avait communiquées dans la plainte et dans ses observations du 28 avril 2017, la Commission n’a aucunement examiné la déclaration du président-directeur général de la seconde intervenante, selon laquelle « [cette dernière] dégagerait des bénéfices y compris sans la compensation des coûts nets » et celle du Premier ministre tchèque, selon laquelle « la compensation en faveur de la seconde intervenante pour [les années] 2013 et 2014 n’a[vait] pas pour objectif réel la compensation de pertes, mais de permettre une hausse des salaires à l’avenir ».
182 Ces déclarations démontreraient que les autorités tchèques avaient fourni à la Commission des informations erronées sur les coûts de l’OSU, ce qui aurait dû amener celle-ci à approfondir son examen à cet égard.
183 La requérante ajoute que la Commission a omis le paragraphe 21 de l’encadrement SIEG de 2012, lequel circonscrit l’affectation de la compensation à la couverture du coût net de l’exécution des obligations de service public.
184 Cette argumentation ne saurait prospérer aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses révélant un examen insuffisant ou incomplet de l’affaire par la Commission.
185 En effet, pour ce qui est de la première déclaration en cause, faisant état de bénéfices même sans la compensation, il convient de souligner que la situation bénéficiaire d’ensemble de l’opérateur de l’OSU ne saurait nullement exclure des résultats déficitaires pour l’exécution de l’OSU, sauf à remettre en cause l’économie même de la compensation pour l’exécution de cette obligation. En d’autres termes, la méthode de calcul des CNE est autonome des autres résultats de l’opérateur.
186 En bref, aucun opérateur bénéficiaire, par ailleurs, n’accepterait de prendre à sa charge une OSU au risque de devoir imputer les coûts nets en résultant sur ses bénéfices générés par ses autres activités.
187 Concernant la seconde déclaration en cause, faisant état de l’affectation de la compensation à des augmentations de salaires, force est de constater que rien ne s’oppose dans l’encadrement SIEG de 2012 à ce que le produit de la compensation soit affecté à d’autres postes que l’OSU, s’agissant d’une décision de gestion de l’opérateur.
188 La lecture qu’oppose la requérante du paragraphe 21 de l’encadrement SIEG de 2012 est manifestement erronée.
189 Aux termes du paragraphe 21 de l’encadrement SIEG de 2012, « [l]e montant de la compensation ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir le coût net de l’exécution des obligations de service public », compte tenu d’un bénéfice raisonnable
190 Or, et ainsi que l’a relevé à juste titre la Commission, il ne ressort aucunement du paragraphe 21 de l’encadrement SIEG de 2012 que la compensation doit être affectée à la couverture du coût net de l’OSU, mais seulement qu’elle ne doit pas dépasser ledit coût.
191 Il est clair que la requérante confond le montant de la compensation avec son affectation.
192 Dès lors, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir mené un examen insuffisant ou incomplet de l’affaire sur la base des deux déclarations en cause.
193 Partant, le présent grief ne saurait prospérer, en ce qu’il manque en droit.
– Sur le quatrième grief, tiré de la politique tarifaire de la seconde intervenante
194 La requérante soutient que Mediaservis a, dans la plainte, fourni à la Commission des éléments de preuve concernant la politique tarifaire de la seconde intervenante relative aux lettres ordinaires et comprenant des prix applicables à la clientèle ordinaire (expéditeurs d’un seul article) et aux expéditeurs en gros (banques, assurances, compagnies d’énergie, etc.) en courrier rapide ou en lots ou courrier hybride, démontrant que cette politique tarifaire n’était pas fondée sur une imputation adéquate des coûts entre le service universel et les autres activités, mais s’expliquait plutôt par une subvention croisée des services où la seconde intervenante fait face à une concurrence grâce au revenu tiré du service universel. Aucun des faits rapportés à cet effet ne serait mentionné dans la décision attaquée.
195 Aux fins de maintenir ses soupçons de subventionnement croisé à partir du revenu tiré de l’OSU en faveur des services ouverts à la concurrence, la requérante fait observer que l’audit réalisé annuellement par un auditeur indépendant ne vérifie pas les clés de répartition des différents postes.
196 La requérante prétend également que la modification apportée au projet initial, à savoir la suppression du fonds de compensation, ne pouvait justifier une mise à jour des CNE, ce qui renforce le soupçon que les données fournies dans le cadre de la seconde prénotification ont été arrangées afin de donner l’impression de respecter les critères de l’encadrement SIEG de 2012, ce qui aurait dû amener la Commission à approfondir son examen de la mesure en cause.
197 Cette argumentation ne saurait prospérer aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses révélant un examen insuffisant ou incomplet de l’affaire par la Commission.
198 En effet, d’une part, il y a lieu de relever que, sur le plan comptable, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir approfondi son examen de la mesure en cause en se fiant à la comptabilité soumise, dès lors que celle-ci faisait apparaître de manière séparée les coûts et recettes relatifs aux activités liées à l’OSU et ceux relatifs aux autres activités, et ce selon une clé de répartition approuvée par l’autorité réglementaire nationale et sous le contrôle annuel d’un auditeur indépendant.
199 D’autre part, il convient de souligner que les différenciations tarifaires évoquées par la requérante ne sont pas en principe contraires aux dispositions pertinentes de la directive postale pour ce qui est des services relevant de l’OSU, son article 12 permettant des tarifs individualisés sous réserve du respect de certaines conditions de transparence et de non-discrimination.
200 Concernant les activités ne relevant pas du champ de l’OSU, il suffit de relever, à l’instar de la Commission et des parties intervenantes, que ces prix sont libres et obéissent à la loi de l’offre et de la demande, de sorte que toute différenciation tarifaire peut logiquement en ressortir.
201 Il ne saurait par conséquent ici non plus être valablement reproché à la Commission de ne pas avoir approfondi son examen de la mesure en cause à cet égard.
202 À titre surabondant, il y a lieu de souligner que l’encadrement SIEG de 2012 ne s’oppose nullement à ce que l’opérateur de l’OSU puisse librement affecter commercialement la compensation versée à ce titre sur d’autres services, de sorte que l’argumentation de la requérante ne saurait prospérer et que le quatrième grief doit être rejeté.
– Sur le cinquième grief, tiré du scénario contrefactuel des autorités tchèques
203 La requérante soutient que la Commission a examiné la logique du scénario alternatif soumis par les autorités tchèques quant à la réduction de ses bureaux et de la fréquence de ses livraisons à défaut de service universel, sans aucunement répondre aux arguments présentés dans les observations de Mediaservis du 26 avril 2017. Dans lesdites observations, Mediaservis faisait valoir que l’utilisation du réseau dense de la seconde intervenante pour d’autres activités lui permettrait de ne jamais réduire ainsi la taille de son réseau et qu’une réduction de la fréquence des livraisons entraînerait une perte significative de parts de marché pour la seconde intervenante, en particulier pour la livraison de produits commandés en ligne.
204 La requérante objecte la prise en compte d’un choix stratégique sous-optimal à l’aune du critère de l’investisseur privé opérant en économie de marché (ci-après l’« OEM ») et déplore la superficialité des considérants 112 et 113 de la décision attaquée.
205 Aux fins de contester la fiabilité du scénario en cause, la requérante fait état d’estimations officielles dont elle viendrait de prendre connaissance et qui remettraient totalement en cause les projections retenues.
206 Cette argumentation ne saurait prospérer aux fins d’établir l’existence de difficultés sérieuses révélant un examen insuffisant ou incomplet de l’affaire par la Commission.
207 En effet, en substance, la requérante conteste la fiabilité du scénario contrefactuel des autorités tchèques, pour ce qui est, à défaut de l’OSU, de la réduction de son réseau et de ses fréquences de livraison, inenvisageable pour la fourniture d’autres services, ce qui aurait dû amener la Commission à percevoir des difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen.
208 Ainsi, pour rejeter ce grief, il suffit de relever que la Commission en a, à suffisance de droit, débattu aux considérants 112 et 113 de la décision attaquée et de souligner que le fait que le résultat de l’appréciation de la Commission ne confirme pas ledit grief ne saurait établir que ladite institution a mené un examen incomplet ou insuffisant de l’affaire à cet égard.
209 En tout état de cause, d’une part, le test de l’OEM ne saurait être utilement invoqué, en ce qu’il n’est applicable que pour apprécier l’existence d’une aide d’État, non sa compatibilité.
210 D’autre part, les nouvelles évaluations dont fait état la requérante, à les considérer vérifiables, iraient à l’encontre de la thèse de celle-ci, en ce que le nombre de bureaux fermés serait encore plus élevé que celui retenu dans le scénario contrefactuel des autorités tchèques.
211 Par conséquent, le présent grief doit être rejeté, en ce qu’il est non fondé.
212 Partant, aucun des griefs formulés dans le cadre de la seconde branche du premier moyen et de la première branche du deuxième moyen ne permettant d’établir que la Commission a mené un examen incomplet ou insuffisant lors de la procédure préliminaire d’examen, il y a lieu de considérer que la requérante n’a pas rapporté d’indices de l’existence de difficultés sérieuses à cet égard.
213 Il convient, par conséquent, d’écarter lesdits griefs comme non fondés.
214 Dès lors, il y a lieu de rejeter la seconde branche du premier moyen et, partant, le premier moyen dans son ensemble, ainsi que la première branche du deuxième moyen.
Sur la seconde branche du deuxième moyen, tirée d’un vice de motivation
215 Dans le cadre de la seconde branche du deuxième moyen, la requérante estime que, en n’examinant pas l’ensemble des éléments de fait et de droit portés à son attention par Mediaservis et décrits dans le cadre de la première branche du deuxième moyen, la Commission a violé l’obligation lui incombant de motiver la décision attaquée.
216 La requérante ajoute que la motivation doit figurer dans la décision attaquée, que les deux réunions que Mediaservis a eues avec la Commission, les 17 juin et 15 octobre 2016, avaient pour seul objet de lui permettre de communiquer à ladite institution des informations et que la seule lettre reçue de cette institution, le 29 mars 2017, ne visait qu’à exprimer des doutes sur l’octroi d’une aide et à l’informer de l’intention de clore le dossier sans fournir d’autres justifications, et sans fournir les réponses des autorités tchèques, de sorte qu’elle n’a eu connaissance du point de vue de la Commission, et encore seulement sur certains points, qu’après la publication de la décision attaquée.
217 À cet égard, il convient de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que la portée de l’obligation de motivation dépend de la nature de l’acte en cause et du contexte dans lequel il a été adopté. Ainsi, la décision de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE doit uniquement contenir les raisons pour lesquelles la Commission estime ne pas être en présence de difficultés sérieuses d’appréciation de la compatibilité de l’aide concernée avec le marché intérieur et même une motivation succincte de cette décision doit être considérée comme suffisante au regard de l’exigence de motivation que prévoit l’article 296 TFUE si elle fait apparaître de façon claire et non équivoque les raisons pour lesquelles la Commission a estimé ne pas être en présence de telles difficultés, la question du bien-fondé de cette motivation étant étrangère à cette exigence (arrêts du 22 décembre 2008, Régie Networks, C‑333/07, EU:C:2008:764, points 65, 70 et 71 ; du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 111, et du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 79).
218 La motivation doit permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise afin, d’une part, de pouvoir défendre leurs droits et de vérifier si la décision est ou non bien fondée et, d’autre part, de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle de légalité. Il n’est pas exigé que la motivation spécifie tous les éléments de fait et de droit pertinents, dans la mesure où la question de savoir si la motivation d’un acte satisfait aux exigences de l’article 296 TFUE doit être appréciée au regard non seulement de son libellé, mais aussi de son contexte ainsi que de l’ensemble des règles juridiques régissant la matière concernée. En particulier, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués devant elle par les intéressés, mais il lui suffit d’exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (arrêts du 15 juin 2005, Corsica Ferries France/Commission, T‑349/03, EU:T:2005:221, points 62 à 64 ; du 16 octobre 2014, Eurallumina/Commission, T‑308/11, non publié, EU:T:2014:894, point 44, et du 6 mai 2019, Scor/Commission, T‑135/17, non publié, EU:T:2019:287, point 80).
219 En l’espèce, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir pris position sur les éléments de fait et de droit que Mediaservis lui a communiqués et qui révélaient selon elle l’existence de difficultés sérieuses justifiant l’ouverture de la procédure formelle d’examen.
220 Or, s’agissant, premièrement, de la prétendue aide d’État résultant de la non-perception prétendument illégale de la TVA dans le cadre d’accords négociés individuellement et de services postaux ne relevant pas du service universel, force est de constater que la Commission n’a pris position, aux considérants 133 à 135 de la décision attaquée, que sur l’exonération de la TVA des prestations du service universel.
221 Il n’en demeure pas moins que la Commission n’était pas tenue de se prononcer, dans le cadre de son examen de l’affaire et eu égard à l’objet de la décision attaquée, à savoir la compatibilité de la compensation de l’exécution de l’OSU, sur la légalité d’éventuelles non-facturations de la TVA pour des services ne relevant pas de l’OSU (voir point 166 ci-dessus).
222 Concernant, deuxièmement, la densité du réseau de la seconde intervenante permettant la fourniture d’autres services, force est de constater que la Commission a pleinement pris en compte ces services aux considérants 87 à 94 et 116 de la décision attaquée.
223 En ce que l’appréciation par la Commission de ces services relève du bien-fondé de la décision attaquée, l’argumentation de la requérante ne saurait prospérer sur le terrain de la motivation de ladite décision.
224 Pour rejeter le grief relatif aux subventions octroyées par de petites communes, il suffit de relever qu’il est manifeste qu’il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir pris position sur l’argumentation aucunement étayée de Mediaservis à cet égard, la Commission n’ayant en tout état de cause pas été tenue de se prononcer sur cet aspect qui ne revêtait pas une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée et la requérante ayant été en mesure de le comprendre.
225 Troisièmement, en ce qui concerne les déclarations du président-directeur général de la seconde intervenante et du Premier ministre tchèque (voir point 182 ci-dessus), la Commission admet ne pas s’être prononcée sur ces déclarations.
226 Toutefois, ainsi qu’il ressort de l’appréciation du Tribunal de la seconde branche du premier moyen et de la première branche du second moyen, ce grief repose sur une compréhension erronée des CNE, de sorte que l’argumentation de la requérante à cet endroit ne saurait prospérer non plus sur le terrain de la motivation.
227 Quatrièmement, s’agissant de la prétendue imputation des coûts entre le service universel et les autres activités s’expliquant, selon la requérante, plutôt par une subvention croisée des services où la seconde intervenante fait face à une concurrence grâce au revenu tiré du service universel, force est encore de constater que la Commission a répondu auxdits griefs aux considérants 93 et 94 de la décision attaquée.
228 Cinquièmement, en ce qui concerne les arguments dirigés contre la logique du scénario alternatif soumis par les autorités tchèques, quant à la réduction de ses bureaux et la fréquence de ses livraisons à défaut de service universel, force est de constater que la Commission y a répondu aux considérants 112 et 113 de la décision attaquée.
229 En tout état de cause, pour ce qui est d’hypothèses, de thèses et d’éléments ponctuels dont Mediaservis aurait fait part à la Commission et sur lesquels cette dernière ne se serait pas prononcée, il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir systématiquement pris position à cet égard, dès lors qu’elle a exposé les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée.
230 S’agissant, enfin, de la non-communication à la requérante des réponses des autorités tchèques, il suffit de rappeler que la Commission n’était pas en droit de transmettre ces réponses, sauf à compromettre le dialogue et, partant, la collaboration entre la Commission et lesdites autorités (voir, en ce sens, arrêt du 7 septembre 2017, AlzChem/Commission, T‑451/15, non publié, EU:T:2017:588, points 54 à 57).
231 Par conséquent, il y a lieu de rejeter la seconde branche du deuxième moyen et, dès lors, le deuxième moyen dans son ensemble.
Sur le troisième moyen
232 Dans le cadre du troisième moyen du recours, la requérante soutient que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation en considérant qu’une surcompensation des coûts nets résultant de l’exécution de l’OSU était exclue.
Observations liminaires
233 L’article 106, paragraphe 2, TFUE prévoit que les entreprises chargées de la gestion des SIEG sont soumises aux règles des traités et, notamment, aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie et que le développement des échanges ne doit être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union (arrêt du 8 mars 2017, Viasat Broadcasting UK/Commission, C‑660/15 P, EU:C:2017:178, point 28).
234 En permettant, sous certaines conditions, des dérogations aux règles générales du traité, l’article 106, paragraphe 2, TFUE vise à concilier l’intérêt des États membres à utiliser certaines entreprises, notamment du secteur public, en tant qu’instrument de politique économique ou fiscale avec l’intérêt de l’Union au respect des règles de concurrence et à la préservation de l’unité du marché intérieur (arrêt du 8 mars 2017, Viasat Broadcasting UK/Commission, C‑660/15 P, EU:C:2017:178, point 31).
235 Ce que l’article 106, paragraphe 2, TFUE vise, par l’appréciation de la proportionnalité de l’aide, à prévenir, c’est que l’opérateur chargé du service public bénéficie d’un financement dépassant les coûts nets du service public (arrêts du 7 novembre 2012, CBI/Commission, T‑137/10, EU:T:2012:584, point 293 ; du 16 octobre 2013, TF1/Commission, T‑275/11, non publié, EU:T:2013:535, point 131, et du 24 septembre 2015, Viasat Broadcasting UK/Commission, T‑125/12, EU:T:2015:687, point 87).
236 À cet égard, le paragraphe 21 de l’encadrement SIEG de 2012 prévoit que le montant de la compensation accordée à une entreprise chargée d’un SIEG ne doit pas dépasser ce qui est nécessaire pour couvrir le coût net de l’exécution des obligations de service public, compte tenu d’un bénéfice raisonnable. Comme cela ressort de ce même paragraphe, le coût net s’entend comme le coût net évité ou comme le total des coûts supportés, déduction faite des recettes perçues, lorsque la méthode du coût net évité ne peut être appliquée.
237 Selon le paragraphe 24 de l’encadrement SIEG de 2012, le coût net nécessaire, effectif ou escompté, pour exécuter les obligations de service public doit être calculé en utilisant la méthode du coût net évité lorsque la législation nationale ou celle de l’Union l’exige et, dans d’autres cas, lorsque c’est possible.
238 L’annexe I de la directive postale prévoit l’application de la méthode du coût net évité pour le calcul du coût net de l’OSU dans le secteur postal.
239 C’est ainsi que, dans la décision attaquée, la Commission a apprécié l’existence éventuelle d’une surcompensation au regard de la méthode des CNE.
240 Au paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012, il est expliqué :
« [l]a méthode du coût net évité consiste à calculer le coût net nécessaire, effectif ou escompté, pour exécuter les obligations de service public comme la différence entre le coût net supporté par le prestataire lorsqu’il exécute ces obligations et le coût ou bénéfice net du même prestataire lorsqu’il ne les exécute pas. Il convient de veiller à évaluer correctement les coûts que le prestataire de services éviterait et les recettes qu’il ne percevrait pas si aucune obligation de service public ne lui était imposée. Le calcul du coût net devrait évaluer les bénéfices, y compris immatériels dans la mesure du possible, pour le prestataire du SIEG. »
241 À titre de comparaison, selon le paragraphe 28 de l’encadrement SIEG, la méthode de répartition des coûts consiste à calculer le coût net nécessaire à l’exécution des obligations de service public comme la différence entre les coûts et les recettes d’un prestataire désigné liés à l’exécution des obligations de service public, tels que précisés et estimés dans le mandat.
242 C’est à la lumière de ces considérations qu’il convient d’examiner le troisième moyen, qui se compose de quatre branches. La première branche est tirée, en substance, d’un système comptable non fiable. La deuxième branche est tirée, en substance, d’un scénario contrefactuel irréaliste. Les troisième et quatrième branches sont tirées, respectivement et en substance, d’une politique tarifaire orientée vers les coûts et d’une prise en compte partielle des recettes.
243 En ce que les troisième et quatrième branches du troisième moyen portent, en substance, sur la détermination des recettes relatives au service postal universel, il convient de les traiter avant la deuxième branche relative au scénario contrefactuel.
Sur la première branche du troisième moyen, tirée d’un système comptable non fiable au regard du paragraphe 31 de l’encadrement SIEG de 2012
244 Selon la requérante, la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en se bornant à constater que le système comptable et d’imputation des coûts de la seconde intervenante permettait une imputation des coûts et des recettes entre les activités avec un niveau de pertinence suffisant.
245 La requérante ajoute que la clé de répartition des coûts et des recettes entre les activités relevant de l’OSU et celles qui y sont extérieures est erronée, ce qu’un audit ne saurait au demeurant révéler. Cela renforcerait les soupçons d’une répartition erronée des coûts et des recettes, avec une incidence sur la modification du calcul des CNE au cours de la procédure administrative.
246 Ainsi, en substance, par la première branche du troisième moyen, la requérante reproche à la Commission de n’avoir pas dûment établi l’existence d’une séparation comptable appropriée entre les activités relevant de l’OSU et celles y étant extérieures, et ce en violation du paragraphe 31 de l’encadrement SIEG de 2012.
247 En clair, la Commission aurait dû, selon la requérante, conduire un examen plus approfondi de la comptabilité de la seconde intervenante, en faisant notamment référence aux diverses catégories de coûts mentionnés au paragraphe 31 de l’encadrement SIEG de 2012.
248 À cet égard, il convient, d’une part, de rappeler que le paragraphe 44 de l’encadrement SIEG de 2012 prévoit que, « [l]orsqu’une entreprise exerce des activités qui se situent à la fois dans le cadre du SIEG et en dehors de celui-ci, sa comptabilité interne doit indiquer séparément les coûts et les recettes liés au SIEG et ceux liés aux autres services dans le respect des principes énoncés au [paragraphe] 31 ».
249 D’autre part, le paragraphe 31 de l’encadrement SIEG de 2012, qui figure dans la partie dudit encadrement dédiée à la méthode de détermination des coûts nets fondée sur la répartition des coûts prévoit :
« Lorsqu’elle réalise également des activités ne relevant pas du SIEG, les coûts à prendre en considération peuvent englober tous les coûts directs nécessaires à l’exécution de ces obligations et une contribution adéquate aux coûts indirects communs à la fois au SIEG et aux autres activités. Les coûts liés à d’éventuelles activités ne relevant pas du SIEG doivent englober tous les coûts directs et une contribution adéquate aux coûts communs. Pour déterminer la contribution adéquate aux coûts communs, les prix du marché pour l’utilisation des ressources peuvent, le cas échéant, être pris comme référence. En l’absence de tels prix du marché, la contribution adéquate aux coûts communs peut être déterminée en faisant référence au niveau de bénéfice raisonnable que l’entreprise devrait réaliser sur les activités n’entrant pas dans le champ d’application des SIEG ou, le cas échéant, à l’aide d’autres méthodologies. »
250 L’argumentation de la requérante invite à apprécier si, en se limitant à constater, aux considérants 89 à 93 de la décision attaquée, que la seconde intervenante bénéficiait d’une comptabilité séparant les activités relevant de l’OSU et celles y étant extérieures, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation.
251 À cet égard, il convient de relever que la Commission ne s’est pas seulement limitée au seul constat d’une comptabilité séparant les activités relevant de l’exercice de l’OSU de celles y étant extérieures.
252 En effet, aux considérants 90 à 93 de la décision attaquée, la Commission a souligné que la comptabilité de la seconde intervenante reposait sur un système comptable ayant fait l’objet d’un audit, dans le cadre, notamment, de l’adhésion de la République tchèque à l’Union.
253 La Commission a ajouté que la comptabilité de la seconde intervenante faisait l’objet, sur une base annuelle, d’audits réalisés par un opérateur indépendant, dont les rapports pour les années allant de 2013 à 2016 attestaient du respect des règles de séparation comptable entre les différentes activités.
254 En d’autres termes, la Commission a conduit une analyse approfondie du système comptable, en particulier de sa fiabilité. Il ne saurait lui être reproché d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation en en tenant compte aux fins de la détermination des coûts nets résultant de l’exécution de l’OSU.
255 Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du troisième moyen.
Sur la troisième branche du troisième moyen, tirée, en substance, de la non-prise en compte de l’orientation de la politique tarifaire vers les coûts en violation du paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012
256 La requérante reproche à la Commission de ne pas avoir tenu compte, en violation du paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012, du fait que la zákon č. 29/2000 Sb., o poštovních službách (loi n° 29/2000 relative aux services postaux, telle que modifiée) (ci-après la « loi postale tchèque ») prévoyait d’ores et déjà que les prix pratiqués pour l’exécution de l’OSU devaient être orientés vers les coûts.
257 Par ailleurs, selon la requérante, si les prix pratiqués au cours des dernières années pour les particuliers ont augmenté, les rabais proposés aux grands expéditeurs ne seraient pas, quant à eux, orientés vers les coûts, en violation de la loi postale tchèque. Ces rabais constitueraient des mesures d’incitation commerciale, de sorte que la seconde intervenante ne saurait, en substance, être autorisée à en demander le remboursement au titre de la compensation des coûts nets.
258 En tout état de cause, la requérante souligne que, à supposer que la méthode des CNE fasse état d’un coût net pour l’exécution de l’OSU, la Commission n’aurait pas examiné, dans la décision attaquée, le caractère inéquitable desdits coûts, en violation de l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale.
259 À cet égard, il importe de souligner que les allégations de la requérante reposent essentiellement sur des affirmations de sa part et qu’elle ne démontre pas que la Commission a violé l’article 7, paragraphe 3, de la directive postale pour ne pas avoir examiné si les coûts nets liés à l’exécution de l’OSU représentaient une charge financière inéquitable. Par ailleurs, les éléments du dossier et la décision attaquée montrent que la Commission a examiné si les autorités tchèques avaient déterminé le montant de la compensation de l’OSU au regard de l’existence d’une charge financière inéquitable pour la seconde intervenante au sens de ladite disposition. En effet, d’abord, il ressort des informations transmises par ces autorités à la Commission et notamment des informations transmises le 2 octobre 2017, que lesdites autorités ont présenté à la Commission la manière dont elles avaient déterminé la charge financière inéquitable. Ensuite, aux considérants 22 à 26 de la décision attaquée, la Commission a décrit le mécanisme de compensation prévu par la loi postale tchèque afin de compenser les coûts nets « qui représentaient une charge financière inéquitable ». Par ailleurs, aux considérants 144, 145 et 149 de ladite décision, elle a constaté que la seconde intervenante recevait une compensation pour la partie des coûts nets de l’OSU qui était considérée comme une charge inéquitable pour l’entreprise, que ladite loi prévoyait que les coûts nets qui excédaient une certaine limite n’étaient pas considérés comme une charge inéquitable et que la dernière phase de la procédure administrative devant l’autorité réglementaire nationale, préalable au versement d’une compensation, consistait à comparer les coûts nets avec la limite prévue par cette loi. Enfin, au considérant 150 de cette décision, elle a relevé que, compte tenu des limites imposées par la même loi, le remboursement pouvait ne pas être suffisant pour couvrir l’intégralité des coûts nets supportés.
260 Pour le surplus, en substance, par la troisième branche du troisième moyen, la requérante soutient que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation dans la détermination des coûts résultant de l’exécution de l’OSU. L’exécution de l’OSU ne saurait être à perte, en ce que la loi postale tchèque dispose que les prix pratiqués doivent être orientés vers les coûts. En d’autres termes, si les prix pratiqués doivent être orientés vers les coûts, l’exécution de l’OSU ne saurait générer des coûts nets à la charge de la seconde intervenante.
261 Premièrement, par son argumentation, la requérante fait valoir, en substance, que, dans la mesure où les prix pratiqués dans le cadre de l’exécution de l’OSU doivent être orientés vers les coûts, une comparaison entre le total des coûts supportés par la seconde intervenante dans le cadre de l’exécution de l’OSU et le total des recettes perçues dans ce cadre ne ferait pas apparaître l’existence d’un coût net pour l’exécution de l’OSU.
262 Or, ainsi que cela ressort du point 240 ci-dessus, la méthode qui consiste à calculer le coût net nécessaire à l’exécution des obligations de service public comme la différence entre les coûts et les recettes d’un prestataire désigné liés à l’exécution des obligations de service public est la méthode de répartition des coûts.
263 Ainsi, l’argumentation de la requérante est fondée sur la prémisse selon laquelle, si la Commission avait appliqué la méthode de la répartition des coûts, la seconde intervenante n’aurait pas pu prétendre à une compensation.
264 Cependant, comme cela est expliqué au paragraphe 27 de l’encadrement SIEG de 2012, la Commission considère la méthode des CNE comme la plus précise pour déterminer le coût d’une obligation de service public. Dans ledit encadrement, l’application de la méthode de répartition des coûts est donc prévue uniquement à titre subsidiaire, lorsque l’application de la méthode des coûts nets évités est impossible ou inappropriée.
265 Par ailleurs, la requérante ne démontre pas qu’il était impossible ou inapproprié d’appliquer la méthode des CNE en l’espèce. D’ailleurs, ainsi que cela est indiqué au point 238 ci-dessus, ladite méthode est expressément prévue par la directive postale.
266 Il convient également de rappeler que, dans la décision attaquée, la Commission a apprécié l’existence de coûts nets au regard de la méthode des CNE.
267 Deuxièmement, il importe de constater que, dans le secteur postal, l’obligation d’orientation des prix vers les coûts, éventuellement augmentés d’un niveau approprié de bénéfices, doit souvent se concilier avec les autres obligations imposées aux prestataires du service universel telles que l’obligation de fixer le prix du service universel à un niveau abordable et uniforme.
268 En effet, dans les zones à coûts élevés, si les tarifs étaient strictement calculés sur la base des coûts, les services postaux ne seraient pas considérés comme abordables. Cette difficulté justifie l’imposition d’obligations de service universel et la possibilité de compenser le coût de ces obligations. Lesdites obligations sont fondées sur la prémisse que, aux conditions du marché, les services en question ne seraient pas proposés sur l’intégralité du territoire d’un État membre. En effet, la prestation de certains services relevant du service universel ne peut être effectuée qu’à perte ou à un coût net s’écartant des conditions normales d’exploitation commerciale.
269 Ainsi, la nécessité de concilier les différentes obligations imposées au prestataire du service universel peut faire obstacle à ce que chaque service soit fourni à un prix qui permette de couvrir l’intégralité des coûts qui lui sont imputés.
270 La méthode des CNE permet, en raison de ses caractéristiques, de tenir compte de la circonstance que l’opérateur chargé de l’OSU dans le domaine postal peut être soumis à l’obligation de facturer un prix abordable, voire uniforme pour un même service relevant de l’OSU sur l’ensemble d’un territoire tout en supportant des coûts différents pour fournir ce service dans des zones géographiques différentes.
271 En effet, il y a lieu de rappeler que la méthode des CNE consiste à calculer le coût net nécessaire, effectif ou escompté, pour exécuter les obligations de service public comme la différence entre le coût net supporté par le prestataire lorsqu’il exécute ces obligations et le coût ou bénéfice net du même prestataire lorsqu’il ne les exécute pas.
272 Comme cela ressort de la décision attaquée, la méthode des CNE implique d’élaborer un scénario contrefactuel, c’est-à-dire une situation hypothétique dans laquelle le prestataire d’un tel service n’en serait plus chargé. Cette méthode consiste, dans un premier temps, à apprécier si, en l’absence de l’OSU, l’opérateur initialement chargé de cette OSU changerait de comportement et cesserait de fournir les services déficitaires ou modifierait les modalités de fourniture des services déficitaires et, dans un second temps, à apprécier l’incidence de ce changement de comportement sur ses coûts et ses recettes afin d’en déduire et de calculer un éventuel coût net évité.
273 En d’autres termes, il s’agit d’estimer le coût net de l’OSU en appréciant dans quelle mesure l’opérateur chargé de l’OSU augmenterait ses bénéfices s’il n’était pas obligé de fournir le service universel.
274 C’est pourquoi, dans la décision attaquée, la Commission a analysé le scénario factuel, à savoir le coût net supporté par la seconde intervenante lorsque celle-ci exécute l’OSU, puis le scénario contrefactuel fourni par les autorités tchèques, à savoir le coût ou le bénéfice net de la seconde intervenante si cette dernière n’exécutait pas l’OSU.
275 En ce qui concerne le scénario factuel, la Commission a constaté, au considérant 105 de la décision attaquée, que les recettes et les coûts actuels de la seconde intervenante étaient pris en compte pour les années allant de 2013 à 2016 et qu’une estimation avait été prise en compte pour 2017. Il y a lieu de noter que, dans la mesure où le scénario factuel est fondé sur l’ensemble des recettes et des coûts de la seconde intervenante, il tient nécessairement compte de l’obligation d’orientation des prix du service universel vers les coûts.
276 En ce qui concerne le scénario contrefactuel, la Commission a constaté que les autorités tchèques avaient identifié les éléments du service universel que la seconde intervenante n’assurerait pas dans des conditions de marché, à savoir la gestion de certains bureaux de poste, la distribution des lettres cinq jours par semaine pour certains circuits de livraison et certains processus secondaires.
277 À la différence de la méthode de répartition des coûts, qui repose sur une comparaison de l’ensemble des coûts et des recettes liés au service universel, la méthode des CNE repose, ainsi que cela ressort de la décision attaquée, sur une approche qui conduit, dans le cadre du scénario contrefactuel, à décomposer les coûts du service universel, à tout le moins, en différents éléments ou segments tels que les bureaux de poste ou les circuits de livraison auxquels il convient d’allouer notamment un volume, des recettes et des coûts. Ensuite, il est procédé à une estimation des bénéfices et des pertes directes de l’opérateur pour chaque segment ou élément identifié. C’est à la suite de ces opérations qu’il est possible de calculer le coût net du service universel, à savoir la somme totale des économies en termes de coûts nets qui seraient réalisées en l’absence de l’OSU.
278 Compte tenu de ce qui précède, l’application de la méthode des CNE peut conduire, à la suite de l’appréciation du scénario contrefactuel, à identifier un coût net pouvant faire l’objet d’une compensation malgré le fait que, dans le scénario factuel, le prix pratiqué pour l’exécution de l’OSU prévoit d’ores et déjà la couverture des coûts et un niveau approprié de bénéfices. C’est pourquoi, comme la Commission l’a indiqué dans le mémoire en défense, il est concevable qu’un opérateur rentable ait droit à une compensation pour l’OSU en application de ladite méthode.
279 Ainsi, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir commis une erreur manifeste d’appréciation, sur le seul constat que la loi postale tchèque obligerait à exécuter l’OSU à un prix prévoyant un niveau approprié de bénéfice.
280 Partant, il y a lieu de rejeter la troisième branche du troisième moyen.
Sur la quatrième branche du troisième moyen, tirée d’une prise en compte partielle des recettes en violation des paragraphes 32 et 45 de l’encadrement SIEG de 2012
281 La requérante soutient, en substance, que la Commission a exclu, en violation des paragraphes 32 et 45 de l’encadrement SIEG de 2012, tant les subventions perçues par la seconde intervenante de la part de municipalités tchèques que les recettes d’autres activités pour lesquelles la seconde intervenante bénéfice de droits spéciaux ou exclusifs, lesquelles recettes sont conditionnées au large réseau dont celle-ci bénéficie.
282 À cet égard, d’une part, il convient de rappeler que la Commission a calculé les coûts nets résultant de l’exécution de l’OSU sur le fondement de la méthode des CNE. Cette méthode invite, schématiquement, à comparer la situation financière d’une entreprise lors de et en l’absence de l’exécution de l’OSU. Il convient ainsi, à cette fin, de tenir compte de l’ensemble des recettes tirées de l’exécution de l’OSU, mais également des coûts supportés dans ces deux scénarios alternatifs.
283 D’autre part, selon le paragraphe 32 de l’encadrement SIEG de 2012, « [l]es recettes a' prendre en considération doivent inclure a' tout le moins la totalité des recettes tirées du SIEG, telles que précisées dans le mandat, ainsi que les bénéfices excessifs générés par des droits spéciaux ou exclusifs, même liés a' d’autres activités, comme le prévoit le point 44, que ces bénéfices excessifs soient ou non qualifiés d’aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, [TFUE] ».
284 Or, en l’espèce, la Commission a, selon la requérante, exclu du calcul des coûts nets les subventions que percevrait la seconde intervenante de la part de municipalités tchèques et les recettes de services non postaux dont l’existence dépend toutefois du réseau postal.
285 Pour ce qui est, en premier lieu, des recettes de services non postaux, il convient d’emblée de souligner que la référence faite par la requérante, sur le fondement du paragraphe 45 de l’encadrement SIEG de 2012, aux autres droits spéciaux ou exclusifs que détiendrait la seconde intervenante pour lesdits services ne saurait être pertinente.
286 En effet, il convient, dans le cadre de la méthode des CNE, ainsi que cela ressort des considérations exposées au point 282 du présent arrêt, de comparer la situation financière de la seconde intervenante dans deux scénarios alternatifs, que les recettes proviennent de droits exclusifs ou non.
287 Or, en l’espèce, force est de constater qu’il ressort de la décision attaquée que de telles recettes ont été prises en compte.
288 En ce sens, une lecture combinée des considérants 108, 114, et 116 de la décision attaquée révèle, en substance, que la comptabilité de la seconde intervenante prise en compte pour l’élaboration des deux scénarios distingue les coûts et les recettes pour chaque bureau de poste, laquelle comptabilité intègre les recettes des services postaux et non postaux.
289 Pour ce qui est, en deuxième lieu, des subventions que la seconde intervenante aurait reçues de la part de municipalités tchèques, force est de constater que la requérante se borne à évoquer l’existence de telles subventions sans en rapporter la preuve.
290 Indépendamment de ce constat, il ressort des écrits de la Commission et des parties intervenantes que les subventions auxquelles la requérante fait référence concernent des aides financières à destination d’entités tierces chargées d’administrer les bureaux de poste concédés par la seconde intervenante à des municipalités.
291 En d’autres termes, la seconde intervenante n’est pas la bénéficiaire de ces subventions, de sorte qu’il ne saurait être reproché à la Commission de ne pas en avoir tenu compte dans le cadre du calcul des coûts nets.
292 Partant, il y a lieu de rejeter la quatrième branche du troisième moyen.
Sur la deuxième branche du troisième moyen, tirée d’un scénario contrefactuel erroné
293 La requérante soutient que la Commission a erronément considéré que la seconde intervenante réduirait, en l’absence de la mesure en cause, tant la taille de son réseau que la fréquence de ses livraisons. Un tel scénario ne saurait s’expliquer par les choix stratégiques de la seconde intervenante, sauf à violer le test de l’OEM.
294 La fermeture de milliers d’établissements serait en effet hautement improbable, dans la mesure où, outre le fait qu’elle s’y soit déjà opposée par le passé, la seconde intervenante exerce d’autres activités commerciales qui lui assurent des sources de revenus importants.
295 Il en irait tout autant de la réduction de la fréquence de livraisons des produits commandés en ligne, tant par le biais de courriers que de colis, en ce que, à supposer qu’il en soit ainsi, la seconde intervenante perdrait pour le commerce en ligne d’importantes parts de marché.
296 Qui plus est, le scénario contrefactuel analysé par la Commission est, selon la requérante, différent de celui présenté à l’organisme tchèque chargé de déterminer les CNE, ce qui compromettrait également sa fiabilité. Alors que, pour l’année 2013, la Commission mentionne la fermeture de 1076 bureaux, ledit organisme fait, pour la même année, état de la fermeture de 2094 bureaux.
297 À cet égard, il ressort des considérants 108 et 114 de la décision attaquée que les coûts et les recettes liés au fonctionnement des bureaux de poste étaient enregistrés dans les comptes de chacun desdits bureaux et que la seconde intervenante affectait des recettes et des coûts aux bureaux de poste afin d’apprécier leur rentabilité. C’est donc sur cette base que le nombre des bureaux de poste qui seraient conservés ou non dans le scénario contrefactuel a été fixé et que l’impact de la fermeture de certains bureaux de poste sur les coûts et les recettes de la seconde intervenante a été analysé.
298 Par ailleurs, au considérant 109 de la décision attaquée, la Commission a constaté que la fréquence et le nombre de lettres livrées à chaque point individuel avaient fait l’objet d’un exercice de monitorage à l’échelle nationale de la part de la seconde intervenante, que les données obtenues avaient été incluses dans une base de données et qu’une analyse supplémentaire avait été effectuée pour déterminer les zones candidates à une fréquence de livraison moins élevée.
299 Selon le considérant 113 de la décision attaquée, il est rationnel que, dans des conditions de marché, à savoir notamment en l’absence d’obligations liées à la densité de son réseau et à la fréquence de livraison, la seconde intervenante changerait son comportement. Ce changement consisterait, d’une part, à fermer les bureaux de poste qui sont déficitaires et à conserver ceux qui sont rentables et, d’autre part, à modifier la fréquence de livraison dans certaines zones géographiques afin de réduire ses coûts.
300 Dès lors, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a considéré, au considérant 113 de la décision attaquée, que le scénario contrefactuel élaboré par les autorités tchèques était crédible au motif qu’il reposait sur des hypothèses rationnelles qui reflétaient les efforts de la seconde intervenante pour optimiser ces décisions commerciales aux moyens d’une réduction de ses coûts et d’une augmentation de ses recettes.
301 Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante tirés, en substance, du fait que la fermeture de bureaux de poste ou la réduction de la fréquence de livraison auraient un impact sur les recettes de la seconde intervenante.
302 En effet, comme l’a expliqué la Commission au considérant 113 de la décision attaquée et comme cela ressort du considérant 116 de ladite décision, l’impact négatif sur la demande qui est lié à la réduction du réseau postal a été pris en considération lors de l’élaboration du scénario contrefactuel. En effet, les autorités tchèques ont pris en compte le fait que la fermeture de certains bureaux de poste entraînerait un changement de la demande et influencerait à la fois les coûts et les recettes liés aux services postaux et non postaux. Par ailleurs, s’agissant de l’impact d’une réduction de la fréquence de livraison dans certaines zones, il ressort des considérants 109 et 119 de cette décision que ladite réduction s’appliquerait uniquement aux lettres et non aux colis, dans la mesure où ces derniers sont livrés au moyen d’un réseau différent.
303 Partant, indépendamment du débat relatif au nombre effectif de fermetures de bureaux de poste prévu dans le cadre du scénario contrefactuel, la deuxième branche du troisième moyen ne saurait prospérer, de sorte qu’il y a lieu de la rejeter, de même, dès lors, que ledit moyen dans son ensemble.
Sur le quatrième moyen
304 Dans le cadre du quatrième moyen du recours, la requérante invoque une violation du paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012, lu en combinaison avec l’annexe I, partie B, de la directive postale.
305 La requérante reproche à la Commission d’avoir uniquement pris en compte, aux fins du calcul des coûts nets, les bénéfices immatériels que générerait l’exécution de l’OSU, sans rechercher si d’autres avantages commerciaux pouvaient être pertinents à cette fin.
306 Il en irait en particulier ainsi de la possibilité pour la seconde intervenante de profiter de son réseau étendu pour d’autres activités que ses activités concurrentielles, telles que, notamment, ses activités bancaires, d’assurance ou de vente au détail de loterie.
307 La requérante ajoute que, si les concurrents de la seconde intervenante fournissent leurs services sur l’ensemble du territoire, c’est avant tout grâce au réseau de la seconde intervenante auquel ils ont recours.
308 À cet égard, il convient de rappeler que, aux termes de l’annexe I, partie B, de la directive postale, « [l]e calcul [des coûts nets] tient compte de tous les autres éléments pertinents, y compris les bénéfices immatériels et les avantages commerciaux dont le prestataire de services postaux désigné pour prester le service universel a bénéficié, le droit de réaliser un bénéfice raisonnable ainsi que les mesures d’incitation à l’efficacité économique. Il convient de veiller à évaluer correctement les coûts que le prestataire du service universel désigné aurait évités s’il avait eu le choix de ne pas remplir d’obligations de service universel. Le calcul du coût net devrait évaluer les bénéfices, y compris les bénéfices immatériels, pour l’opérateur de service universel ».
309 En l’espèce, la Commission a identifié quatre avantages immatériels liés à l’exécution de l’OSU, à savoir, au considérant 136 de la décision attaquée, le renforcement de la valeur de la marque, la vente exclusive de timbres postaux et articles de philatélie, le renforcement de l’effet publicitaire et un avantage provenant de l’exonération de la TVA, ce que la requérante ne conteste pas.
310 En revanche, la requérante reproche à la Commission, d’une part, d’avoir écarté, en tant que bénéfice immatériel, l’existence d’un réseau dense et l’omniprésence de la seconde intervenante.
311 À cet égard et ainsi que l’a relevé la Commission au considérant 128 de la décision attaquée, figurent parmi les bénéfices immatériels communément retenus dans le secteur postal l’omniprésence et les avantages liés à un réseau étendu.
312 Toutefois, la Commission ne saurait avoir violé le paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012, lu en combinaison avec l’annexe I, partie B, de la directive postale, en ne tenant pas compte de cet aspect, en ce que, ainsi que la Commission l’a relevé à juste titre au considérant 136 de la décision attaquée, les concurrents de la seconde intervenante sont également actifs sur l’ensemble du territoire sans pour autant être tenus d’entretenir un réseau étendu.
313 Ainsi, dans les circonstances de l’espèce, l’omniprésence de la seconde intervenante sur le marché ne saurait être considérée comme un bénéfice immatériel résultant de l’obligation, au titre de l’exécution de l’OSU, de maintenir un réseau étendu.
314 La requérante reproche, d’autre part, à la Commission de n’avoir pas considéré, comme relevant de la catégorie des bénéfices immatériels et avantages commerciaux, le fait pour la seconde intervenante de profiter de son réseau étendu pour ses activités concurrentielles.
315 Or, un tel avantage ne saurait être considéré comme un bénéfice immatériel ou un avantage commercial, au sens de l’annexe I, partie B, de la directive postale, dont a bénéficié la seconde intervenante dans l’exécution de l’OSU.
316 En effet, le fait de fournir des services non postaux par le biais du réseau postal ne se rapporte pas directement à l’exécution de l’OSU.
317 Ainsi, la Commission ne saurait avoir violé le paragraphe 25 de l’encadrement SIEG de 2012 ainsi que l’annexe I, partie B, de la directive postale.
318 Partant, il y a lieu de rejeter le quatrième moyen du recours.
Sur le cinquième moyen
319 Dans le cadre du cinquième moyen du recours, la requérante invoque une violation du point 2.9 de l’encadrement SIEG de 2012 (première branche) et une violation de l’obligation de motivation (seconde branche).
Sur la première branche du cinquième moyen, tirée d’une violation du point 2.9 de l’encadrement SIEG de 2012
320 Selon la requérante, la Commission a commis une erreur de droit en autorisant la mesure en cause sans que celle-ci soit subordonnée à des conditions ou à des engagements de la part de la République tchèque aux fins de limiter les graves distorsions de concurrence qui seraient induites par ladite mesure.
321 La requérante souligne en effet avoir fait état de sérieuses préoccupations au sujet d’une pratique de subvention croisée des services où la seconde intervenante fait face à une concurrence grâce au revenu tiré du service postal universel.
322 À cet égard, il convient de rappeler que, en application des paragraphes 52 et 53 de l’encadrement SIEG de 2012 figurant sous le point 2.9 dudit encadrement, si, dans certaines circonstances exceptionnelles, de graves distorsions de la concurrence sur le marché intérieur restent sans réponse et que l’aide affecte les échanges dans une mesure contraire a' l’intérêt de l’Union, la Commission examine s’il est possible de limiter ces distorsions en imposant des conditions a' l’État membre ou en exigeant des engagements de ce dernier.
323 Or, en l’espèce, la Commission ne saurait avoir manqué à ses obligations en n’imposant pas de telles conditions à la République tchèque ou en n’exigeant pas de cette dernière des engagements.
324 En effet, la Commission a levé les doutes relatifs à l’existence d’une distorsion de concurrence induite par une surcompensation des coûts nets et, in fine, considéré la mesure en cause comme compatible, au sens de l’article 106, paragraphe 2, TFUE.
325 Ainsi, à défaut de doute sur une surcompensation des coûts nets et, partant, sur l’existence d’une distorsion de concurrence, la Commission n’était a fortiori aucunement tenue d’imposer à la République tchèque des conditions ou des engagements, de telles modalités n’étant envisageables qu’en présence de graves distorsions de concurrences.
326 Qui plus est, les motifs avancés par la requérante aux fins d’imposer à la République tchèque des conditions ou d’exiger de sa part des engagements sont les mêmes qui devaient permettre d’attester d’une surcompensation des coûts nets. Or, ainsi que cela ressort de la réponse apportée aux troisième et quatrième moyens, les arguments de la requérante, tirés, en substance, d’une surcompensation, ont été rejetés.
327 En tout état de cause, il convient d’ajouter que, conformément au paragraphe 54 de l’encadrement SIEG de 2012 figurant sous le point 2.9 dudit encadrement, « [i]l ne devrait se produire de graves distorsions de la concurrence de nature a' être contraires aux intérêts de l’Union qu’en des circonstances exceptionnelles uniquement » et que « [l]’attention de la Commission portera uniquement sur les distorsions provoquées par des aides ayant des effets négatifs significatifs sur d’autres États membres et sur le fonctionnement du marché intérieur, parce qu’elles empêchent, par exemple, des entreprises de secteurs importants de l’économie de développer leurs activités de manière a' pouvoir fonctionner efficacement ».
328 Or, les circonstances de l’espèce ne sauraient être considérées comme des circonstances exceptionnelles, au sens du paragraphe 54 de l’encadrement SIEG de 2012.
329 Il en est d’autant moins ainsi qu’il ressort des considérants 143 à 151 de la décision attaquée que la Commission a vérifié à suffisance l’exclusion de tout risque de surcompensation de l’exécution de l’OSU.
330 En particulier, au considérant 151 de la décision attaquée, la Commission a exposé que le coût net de l’OSU pour la période 2013-2017 était de 4 289 millions de CZK et que le montant maximal de la compensation était de 2 600 millions de CZK. De même, elle a indiqué audit considérant que l’autorité réglementaire nationale procéderait à des vérifications ex post aux fins de détecter une surcompensation.
331 Au regard de ces circonstances, c’est donc à juste titre que, au considérant 153 de la décision attaquée, la Commission a considéré que, en l’espèce, il n’y avait pas lieu de poser des conditions ou d’exiger des engagements de la part de la République tchèque au titre du paragraphe 51 de l’encadrement SIEG de 2012.
332 Ainsi, il ne saurait être reproché à la Commission d’avoir violé le point 2.9 de l’encadrement SIEG de 2012.
333 Partant, il y a lieu de rejeter la première branche du cinquième moyen.
Sur la seconde branche du cinquième moyen, tirée d’une violation de l’obligation de motivation
334 Dans le cadre du cinquième moyen, pris en sa seconde branche, la requérante invoque une violation de l’obligation de motivation.
335 Selon la requérante, même si aucune obligation de la Commission d’imposer des exigences supplémentaires nécessaires pour garantir que le développement des échanges n’est pas affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union n’existait en l’espèce, il découle à la fois de la part de marché de la seconde intervenante et de son comportement sur le marché que la Commission était tenue de mentionner les raisons concrètes pour lesquelles de telles exigences supplémentaires, au sens du point 2.9 de l’encadrement SIEG de 2012 n’étaient pas nécessaires. Par conséquent, en se limitant aux raisons fournies au considérant 153 de la décision attaquée, la Commission aurait violé son obligation de motivation de sa décision.
336 À cet égard, il convient de relever qu’il ressort des paragraphes 51 et 52 de l’encadrement SIEG de 2012 qu’il est exceptionnel de recourir à des exigences supplémentaires.
337 Ainsi, dès lors que la Commission a déclaré sans équivoque dans la décision attaquée que l’aide était compatible, une telle déclaration implique qu’aucune circonstance exceptionnelle n’a été établie.
338 Aussi, pour rejeter le cinquième moyen pris en sa seconde branche tirée d’une violation de l’obligation de motivation, il suffit de relever que la Commission ne saurait être tenue d’exposer les motifs pour lesquels elle n’a pas imposé d’exigences supplémentaires, dès lors qu’elle n’était pas tenue d’en imposer.
339 Par conséquent, il y a lieu de rejeter la seconde branche du cinquième moyen et, dès lors, le cinquième moyen dans son ensemble.
340 Partant, il y a lieu de rejeter le recours dans son intégralité, sans qu’il soit nécessaire de se prononcer sur sa recevabilité pour autant que la requérante conteste le bien-fondé de la décision attaquée.
Sur les dépens
341 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission, conformément aux conclusions de cette dernière
342 Conformément à l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres intervenus au litige supportent leurs dépens. La République tchèque supportera, dès lors, les dépens qu’elle a exposés. L’autre intervenante supportera également ses propres dépens, en application de l’article 138, paragraphe 3, dudit règlement.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) První novinová společnost a.s., venant aux droits de Mediaservis s. r. o., supportera ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.
3) La République tchèque et Česká pošta s. p. supporteront leurs propres dépens.