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Décisions

CCE, 29 mai 2006, n° M.4206

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Veolia Transport-BCP/SNCM

CCE n° M.4206

29 mai 2006

Messieurs, Mesdames,

Objet:  Affaire n° COMP/M.4206 - Veolia Transport-BCP/SNCM

1. Le 21/04/2006, la Commission a reçu notification, conformément à l'article 4 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil (le Règlement sur les concentrations), d'un projet de concentration par lequel les entreprises Veolia Transport (« Veolia Transport», France) appartenant au groupe Veolia Environnement (« Veolia Environnement», France) et Butler Capital Partners (« BCP », France) contrôlée par M. Walter Butler acquièrent, au sens de l'article 3 paragraphe 1 point b du Règlement sur les concentrations, le contrôle en commun de l'entreprise Société Nationale maritime Corse Méditerranée (« SNCM», France) par achat d'actions.

I. LES PARTIES

2.  Veolia Transport exploite des services de transport de voyageurs pour le compte de collectivités publiques (transports collectifs en agglomération, transports collectifs interurbains et régionaux) et gere a ce titre des réseaux routiers et ferroviaires et, dans une moindre mesure, des services de transport maritime. Veolia Transport est une filiale de Veolia Environnement qui regroupe, outre la division transport, des activités de traitement de l'eau (Veolia Eau), de services énergétiques (Dalkia) et de propreté (Veolia Propreté).

3.  BCP est la société de gestion des fonds de promotion pour le capital risque (FPCR) France Private Equity II et France Private Equity III. BCP est détenue par M. Walter Butler.

4.  La Société Nationale maritime Corse Méditerranée (SNCM), détenue indirectement par l'Etat français, est principalement active dans l'activité de transport de passagers et de marchandises depuis la France (ports de Marseille, Nice et Toulon) vers la Corse et le Maghreb (Algérie et Tunisie) et, accessoirement, la Sardaigne. A ce titre, la SNCM assure une activité de transport régulier de passagers et de leurs véhicules et une activité de transport régulier de fret. La SNCM gère également des activités annexes (services de représentation commerciale d’armateurs étrangers, services de consignation de navires et services de transit internationaux).

II. L’ OPERATION

5. La présente opération consiste en la privatisation de la SNCM par l'Etat français. Ainsi, aux termes d’un projet de Protocole d’Accord devant être conclu entre Veolia Transport, BCP et l'Etat français, Veolia Transport et BCP acquerront le contrôle conjoint de la SNCM.

6. Le Protocole d’accord prévoit que le capital de la SNCM sera détenu à hauteur de 38% par BCP, 28% par Veolia Transport, 25% par l'Etat français (au travers de la Compagnie Générale Maritime et Financière CGMF) et 9% par les salariés.

7. Le Protocole d’accord prévoit également que le conseil de surveillance de la SNCM sera composé de 14 membres, dont 4 désignés par BCP, 3 par Veolia Transport, 3 par l'Etat et 4 représentants des salaries. Le président du Conseil de surveillance de la SNCM sera désigné par BCP et détiendra une voix prépondérante en cas de partage des voix. Veolia Transport et BCP détiendront donc ensemble la majorité des voix au sein du conseil de surveillance de la SNCM.

8. Le Protocole d’accord prévoit enfin que la gestion opérationnelle de la SNCM sera assurée par un directoire agissant sous le contrôle du conseil de surveillance.

9. BCP et Veolia Transport exerceront un contrôle conjoint sur la SNCM sur la base d’un pacte d’actionnaires devant être conclu entre eux.

10. En premier lieu, Veolia Transport assurera la gestion opérationnelle de la SNCM. En effet, le pacte d’actionnaires prévoit que le directoire sera compose de membres proposes exclusivement par Veolia Transport.

11. En deuxième lieu, le pacte d’actionnaire prévoit que BCP disposera d’un droit de veto sur les décisions stratégiques concernant la SNCM. Ainsi, Veolia Transport et BCP ont élaboré conjointement le plan d’affaires de la SNCM pour la période 2005-2009, lequel sera annexe a leur pacte d’actionnaires. Le pacte d’actionnaires entre Veolia Transport et BCP prévoit que toute modification au plan d’affaire actuel ainsi que T adoption des plans d’affaires futurs devront être décidées avec l'accord du conseil de surveillance a la majorité des voix, y compris celle de son président qui sera nomme par BCP.

12.  En troisième lieu, dans l'hypothèse ou le directoire de la SNCM ne respecterait pas les orientations stratégiques fixes dans le plan d’affaires, le pacte d’actionnaire prévoit que Veolia Transport devra, a la demande de BCP, voter en faveur de la révocation du directoire.

13. Au vu de ce qui précède, il apparait que Veolia Transport et BCP auront la possibilité d’exercer conjointement une influence déterminante sur l'adoption des décisions stratégiques concernant la SNCM.

III. LA CONCENTRATION

14. Au vu des éléments qui précèdent, l'opération constitue une concentration au sens de l'article 3 du Règlement sur les concentrations.

IV. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

15. Les entreprises concernées réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 5 000 millions d’euros[1]. Chacune d'entre dies réalise un chiffre d'affaires dans la Communauté de plus de 250 millions d’euros, mais aucune d'entre dies ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires dans un seul et même Etat membre. L'opération a donc une dimension communautaire.

V.  ANALYSE CONCURRENTIELLE

16. Les principaux marches concernes par l'opération sont les marches des services de transport maritime régulier de passagers et de marchandises (activité de ferry). Ni Veolia Transport, ni BCP ne proposent des services correspondants aux activités accessoires de la SNCM citées au point 4 ci-dessus.

Le marche des services de transport maritime régulier de passagers

17. Ce marche a de précédemment examine par la Commission dans les cas IV/M1045 DFO/Scandlines (1998), IV/36.253 P&O Stena Line I (1999) et COMP/M 2838 P&O/P&O Stena Line II (2002). Le marché pertinent inclut le transport de passagers et des véhicules de tourisme. Cette définition de marche reste appropriée pour l'analyse de la présente opération.

18. D’un point de vue géographique, les marches de transport maritime régulier de passagers sont traditionnellement examines route par route, en termes de point d’origine/point de destination, chaque liaison représentant un marche distinct[2].

19. Les routes maritimes desservies par la SNCM sont les suivantes :

Marseille

(France)

Ajaccio, Bastia, Calvi, He Rousse, Porto Vecchio, Propriano (Corse), Alger, Oran, Skikda, Bejaia, Annaba (Algérie), Tunis (Tunisie), Porto Torres (Sardaigne)

Nice (France)

Ajaccio, Bastia, He Rousse, Calvi, Propriano

Toulon

(France)

Ajaccio, Bastia, He Rousse, Calvi, Propriano (Corse), Tunis (Tunisie), Porto Torres (Sardaigne)

Porto Torres (Sardaigne)

Marseille, Toulon (France continentale) Ajaccio, Propriano (Corse)

Tunis

(Tunisie)

Gênes (Italie), Toulon, Marseille (France continentale).

 

 

20. II n’est pas nécessaire se prononcer plus avant sur le point de savoir si certains de ces ports sont substituables entre eux compte tenu de leur proximité géographique ou s’il convient de considérer des modes alternatifs de transport (transport aérien par exemple), en raison de l'absence de chevauchement entre les activités des parties concernées. En effet, ni BCP, ni Veolia Transport ne proposent de services de transport régulier de passagers par voie maritime, aérienne ou terrestre sur les routes de la SNCM ou des routes qui pourraient être considérées comme substituables du fait de leur proximité géographique. Ainsi, BCP n’exerce aucune activité de transport de passagers tandis que Veolia Transport n’exerce aucune activité de transport maritime régulier de passagers dans la même zone géographique que la SNCM[3].

Le marché des services réguliers de frêt maritime

21. Ce marché a été identifié dans IV/36.253 P&O Stena Line I (1999) qui concernait les services de transport de fret maritime régulier (services maritimes et services intermodaux de porte a porte) entre l'Angleterre et le continent européen.

22. La SNCM assure une activité de transport de fret essentiellement au départ du port de Marseille. II n’est pas nécessaire de définir plus en détail le marché en cause dans la mesure ou aucune des parties notifiantes ne propose ce type de services.

23. La SNCM assure actuellement, au travers de la Compagnie Méridionale de Navigation (CMN), une délégation de service public au titre de la continuité territoriale entre la Corse et le continent. Cette délégation de service public doit être renouvelée à compter de 2007. Veolia indique qu’elle n’a pas par le passé participé aux appels d’offre relatifs à ce service public et qu’elle n’avait pas l'intention d’ y participer à l'avenir en l’absence de la présente transaction. De fait, rien n’indique que Veolia aurait participé au futur appel d’offres qui sera organisé par la collectivité territoriale de Corse en 2007. L’opération n’a donc pas pour effet de diminuer le nombre de sociétés ayant soumissionné à aux appels d’offres relatifs a ce service public dans le passé ou susceptibles d’y soumissionner à l’avenir.

Aides d’Etat

24. La présente opération s’accompagne du versement par l’Etat français de subventions publiques a la SNCM. II s’agit d’une opération complexe sous forme de deux recapitalisations dont la première serait destinée à permettre la reprise partielle du capital de la SNCM par Veolia et BCP et la deuxième serait effectuée conjointement par ces dernières, ainsi que d’autres mesures à caractère social à destination des salaries de la SNCM. La vente est subordonnée, entre autres, a la condition résolutoire de l'autorisation de la Commission concernant ces nouvelles mesures ainsi que le plan de restructuration de la SNCM notifie par la France le 18 février 2002. L’ensemble de ces mesures, a supposer qu’elles constituent des aides d’Etat au sens de l'article 87 du traite CE, fera 1’objet d’une procédure séparée de la présente procédure. En tout état de cause, ces mesures n’ont pas d’impact sur l'appréciation concurrentielle menée au titre du Règlement sur les concentrations pour au moins deux raisons. D’une part, les mesures envisagées ont pour seul objectif de maintenir en activité la SNCM sans renforcer sa puissance commerciale. A cet effet, la Commission sera tenue de vérifier que d’éventuelles aides a la restructuration restent limitées au minimum nécessaire. D’autre part, les parties notifiantes ne sont pas présentes sur les mêmes marches que la SNCM, il n’y a ainsi pas de chevauchement d’activités.

VI. CONCLUSION

25. Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et de la déclarer compatible avec le marche commun et avec 1'accord EEE. Cette décision est prise sur la base de l'article 6, paragraphe 1, point b, du règlement du Conseil n° 139/2004.

 

 

 

 

 

 

1. Chiffre d’affaires calcule conformément a 1'article 5(1) du règlement relatif au contrôle des opérations de concentrations et a la communication de la Commission sur le calcul du chiffre d’affaire (JO C 66, du 2.3.1999, p. 25).

2. Voir cas IV/M1045 DFO/Scandlines.

3. Veolia Transport assure une activité de ferry au Finnmark (Norvège) et en Zeeland (Pays-Bas). Veolia Transport assure aussi une activité de navettes (transport inter-urbain) dans la rade de Toulon, mais cette activité purement locale ne saurait être assimilée a une activité de ferry.