Commission, 10 juin 2010, n° M.5803
COMMISSION EUROPÉENNE
Décision
Eurovia / Tarmac
LA COMMISSION EUROPÉENNE
vu le traité instituant l'Union européenne,
vu le règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil du 20.1.2004 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises (ci-après, "le règlement sur les concentrations"), et, en particulier, son article 9, paragraphe 3,
vu la notification du 19 avril 2010, effectuée par Eurovia S.A., en vertu de l'article 4 dudit règlement,
vu la demande présentée par la France le 12 mai 2010 de référer à l'Autorité de la Concurrence (ci-après "l'Autorité") la partie de la concentration relative à la France,
CONSIDÉRANT CE QUI SUIT:
1. Le 19 avril 2010, la Commission a reçu notification d'un projet de concentration2 par lequel Eurovia S.A. (ci-après "Eurovia", France), contrôlée par le groupe Vinci (ci-après "Vinci", France) acquiert, par l'acquisition d'actions, le contrôle exclusif de six filiales de Tarmac situées en France, en Allemagne, en République Tchèque et en Pologne.
2. L'Autorité a reçu une copie de la notification le 21 avril 20103.
3. Par lettre du 12 mai 2010, la France a demandé le renvoi à ses autorités compétentes de la partie du projet de concentration relative à la France en vue de son appréciation au regard du droit national de la concurrence de la France, conformément à l'article 9, paragraphe 2), point a) du règlement sur les concentrations ("la demande").
I. PARTIES
4. Eurovia est active dans le domaine de la construction et de l'entretien des routes ainsi que dans la production de matériaux de construction (granulats et enrobés) et la fourniture de services liés aux infrastructures. Il s'agit d'une filiale du groupe Vinci qui est actif dans le domaine de la construction (bâtiment, génie civil et construction hydraulique), des concessions (autoroutes et parkings) et dans diverses activités liées au secteur énergétique (constructions électrique, thermique et mécanique).
5. Les filiales de Tarmac concernées par l'affaire produisent et vendent des granulats en France, Allemagne, République Tchèque et Pologne.
II. OPÉRATION
6. Conformément à l'accord de cession conclu le 12 février 2010, Eurovia s'engage à acquérir le contrôle exclusif de toutes les filiales4 concernées au moyen de l'achat d'actions. Par conséquent, la transaction notifiée constitue une concentration au sens de l'Article 3(1)(b) du Règlement sur les concentrations.
III. DIMENSION UE
7. En prenant en compte les données financières soumises par les Parties pour le dernier exercice financier, les entreprises concernées ont réalisé sur le plan mondial un chiffre d'affaires total d'un montant de plus de 5 milliards d'Euros (Vinci: 33.458 millions d'euros en 2008) mais Tarmac réalise un chiffre d'affaires dans l'Union inférieur à 250 millions d'euros en 2009 (Tarmac: […] millions d'euros)5.
8. Néanmoins, dans au moins chacun de trois Etats membres le chiffre d'affaires total réalisé par toutes les entreprises concernées représente un montant supérieur à 100 millions d'euros (Vinci: […] millions d'euros en République tchèque, […] millions d'euros en France, […] millions d'euros en Allemagne et […] millions d'euros en Pologne) et dans chacun de ces marchés le chiffre d'affaires total réalisé individuellement par Vinci et Tarmac est supérieur à 25 millions d'euros (Tarmac: […] millions d'euros en République tchèque, […] millions d'euros en France, […] millions d'euros en Allemagne et […] millions d'euros en Pologne). Le chiffre d'affaires réalisé dans l'Union par chacun d'eux est supérieur à 100 millions d'euros (Vinci: […] millions d'euros, Tarmac: […] millions d'euros). Vinci réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires dans l'Union en France mais ce n'est pas le cas de Tarmac. L’opération notifiée a donc une dimension européenne.
IV. MARCHÉS EN CAUSE
Marchés de produits
Les granulats
9. Les granulats sont des matériaux granulaires d'un diamètre de 0 à 150 mm qui sont extraits de carrières et de mines. Ils peuvent être utilisés comme produits finis (pour le ballast des voies ferrées) et ils constituent le matériau brut de base pour les produits liés à la construction tel que le béton prêt à l'emploi (constitué à 80 % de granulats), les produits pré coulés, les enrobés bitumineux ("enrobés", constitués à 95% de granulats) et le ciment. On peut distinguer les granulats primaires (extraits de matériaux bruts naturels) des granulats secondaires (d'origine artificielle). Néanmoins, comme les cibles ne sont pas actives sur le marché des granulats secondaires, la présente analyse se limitera aux granulats primaires.
10. Deux types principaux de granulats peuvent être distingués: les granulats d'origine alluvionnaire (gravier et sable) proviennent de l'érosion de fragments de roches qui ont été transportés et déposés par l'eau et la glace et qui sont ensuite extraits de puits peu profonds. Les granulats issus de roches massives proviennent de l'explosion et du broyage de roches et sont de deux natures, soit des roches calcaires (sédimentaires) soit des roches éruptives.
11. Dans de précédentes affaires, la Commission a considéré qu'il n'était pas nécessaire de distinguer ces différents types de granulats primaires, le choix des granulats étant fonction essentiellement de la distance entre les lieux d'extraction et d'utilisation plutôt qu'entre les types de granulats6. L'Autorité retient la même approche que la Commission, compte tenu du caractère pondéreux des granulats et donc de l'importance des coûts de transport7.
12. Bien qu'Eurovia soumette que la Commission devrait s'en tenir à sa pratique décisionnelle passée, les résultats de l'enquête de marché lancée par la Commission en France montrent que les clients sont visiblement partagés (aucune majorité claire ne se dégage) sur la nécessité de distinguer entre granulats alluvionnaires et éruptifs. Les partisans d'une telle distinction évoquent notamment des différences de caractéristiques, lesquelles permettent de répondre à des usages voire à des normes règlementaires spécifiques, telles que l'utilisation de granulats éruptifs pour les travaux routiers. En tout état de cause la question d'une segmentation plus fine du marché des granulats primaires peut rester ouverte dans la mesure où quelle que soit la définition retenue, l'opération menace d'affecter significativement la concurrence sur le marché des granulats.
Les enrobés
13. Les enrobés sont un matériau composite communément utilisé pour la construction de revêtements routiers, d'autoroutes, de parkings et de pistes d'aéroport. L'enrobé est traditionnellement constitué de 95% de granulats et de 5% de bitume.
14. La Commission européenne s'est intéressée aux enrobés dans plusieurs décisions8 où elle a considéré que les enrobés constituent un marché distinct des granulats et des travaux routiers. Par ailleurs, Eurovia soumet qu'aucune distinction ne devrait être faite entre les différents enrobés et que cette position a également été retenue par la Commission et par l'Autorité, même si cette dernière a envisagé la possibilité d'une distinction entre les enrobés produits à partir de centrales fixes et ceux produits à partir de centrales mobiles9. En tout état de cause, la question d'une segmentation plus fine du marché des enrobés peut rester ouverte dans la mesure où elle n'a pas d'impact sur l'analyse concurrentielle.
Les travaux routiers
15. Les activités de travaux routiers sont une catégorie particulière de génie civil incluant la construction et la maintenance d'infrastructures routières constituées de granulats (notamment dans les fondations des routes), d'enrobés et parfois de ciment. La Commission a considéré que le marché de la construction de routes est un marché distinct des matériaux utilisés (granulats et enrobés)10. L'Autorité, quant à elle, considère un marché distinct des travaux routiers incluant tant la construction que l’entretien des routes. En outre, l'Autorité a envisagé, tout en laissant la question ouverte, l’existence d’un marché distinct des travaux autoroutiers, notamment au regard des contraintes propres des travaux autoroutiers. En tout état de cause, la question d'une segmentation plus fine du marché des travaux routiers peut rester ouverte dans la mesure où elle n'a pas d'impact sur l'analyse concurrentielle.
16. Marchés géographiques
Les granulats
17. Les granulats sont des produits lourds et volumineux dont les coûts de transport constituent une part significative du prix final. Les Parties soumettent que les prix des granulats doublent, par route, au-delà de 50 kilomètres en fonction de la topographie de la zone et des granulats concernés. Les granulats peuvent aussi être transportés sur de plus longues distances par voie fluviale ou ferroviaire mais ce n'est le cas que dans les zones où les ressources disponibles sont insuffisantes. De façon générale, les marchés des granulats sont locaux. Dans des affaires précédentes, la Commission a retenu, en fonction des particularités des zones concernées, un rayon de 50-80 kilomètres autour de chaque site de production11.
18. Les Parties ont fourni des parts de marché fondées sur des zones de chalandise d'une taille variant en fonction des circonstances locales (rayons entre 50 et 80 kilomètres). Pour sa part, l'Autorité, au regard de sa pratique décisionnelle12, retient généralement une distance de 40 kilomètres autour des carrières, ce qui est cohérent avec les résultats de l'enquête de marché lancée par la Commission.
Les enrobés
19. Les enrobés sont un produit périssable qui nécessite un transport dans des containers spéciaux chauffés afin de les empêcher de se décomposer avant la livraison. Ainsi, la Commission a considéré un marché géographique dans un rayon de 25-100 kilomètres à partir du lieu de production des enrobés13. Les Parties comme l'Autorité considèrent que le marché géographique est local (l'Autorité considère une distance de 40 kilomètres autour du lieu de production des enrobés).
Les travaux routiers
20. La Commission a, par le passé, analysé les marchés des travaux routiers en prenant en compte une base nationale14, bien que la possibilité de considérer une segmentation plus locale n'ait pas été exclue. Les parties considèrent que le marché géographique concerné est local mais l'Autorité, dans sa pratique décisionnelle, a considéré aussi bien les aspects locaux que nationaux15.
V. APPRÉCIATION SOUS L'ANGLE DE LA CONCURRENCE
21. Dans sa demande de renvoi, l'Autorité fait valoir que l'opération notifiée menace d'affecter la concurrence en France par le biais d'effets horizontaux et verticaux.
Effets horizontaux
22. L'autorité souligne que dans un rayon de 40 kilomètres autour de différentes carrières détenues par Tarmac, notamment de celles situées dans la Corrèze (département 19), l'Indre (département 36), la Creuse (département 23) et la Saône- et-Loire (département 71), les parts de marché de la nouvelle entité dépasseront 40%, avec des chevauchements d'activité généralement supérieurs à 10%.
23. L'analyse de l'Autorité est confirmée par les éléments communiqués par Eurovia dans la notification. Le tableau suivant présente les parts de marché combinées d'Eurovia et de Tarmac sur un marché global des granulats (incluant donc les granulats d'origine alluvionnaire et ceux issus de roches massives) dans un rayon de 40 kilomètres autour des carrières de la société cible16.
| 40 kilomètres | ||
Eurovia | Tarmac | Combinée | |
Cluis (36) | [10-20]% | [40-50]% | [60-70]% |
St Agnant(23) | [0-5]% | [40-50]% | [40-50]% |
Pouligny (36) | [10-20]% | [20-30]% | [40-50]% |
Naves (19) | [0-5]% | [40-50]% | [40-50]% |
Le Mainchon (19) | [0-5]% | [40-50]% | [50-60]% |
St Remy (19) | [0-5]% | [10-20]% | [20-30]% |
Lapleau (19) | [5-10]% | [10-20]% | [10-20]% |
Voutezac-Ceyrat (19) | [10-20]% | [20-30]% | [40-50]% |
Chasteaux-Crochet (19) | [10-20]% | [20-30]% | [40-50]% |
Montgibaud (19) | [0-5]% | [10-20]% | [10-20]% |
Uzerche (19) | [10-20]% | [30-40]% | [40-50]% |
St Denis-Martel (46) | [10-20]% | [20-30]% | [40-50]% |
Mellecey- Givry (71) | [40-50]% | [10-20]% | [60-70]% |
La Salle (71) | [5-10]% | [30-40]% | [40-50]% |
Igé (71) | [10-20]% | [30-40]% | [40-50]% |
St Martin (71) | [10-20]% | [30-40]% | [40-50]% |
Ste Cécile (71) | [10-20]% | [40-50]% | [50-60]% |
Montagny Les Buxy (71) | [20-30]% | [30-40]% | [50-60]% |
24. Ainsi, à l'exception de la carrière de Tarmac située dans la Creuse, où il n'y a pas de chevauchement d'activité entre les parties et de quatre carrières situées dans la Corrèze (où la part de marché combinée est inférieure à [20-30]% ou le chevauchement d'activité peu significatif), l'opération va permettre à la nouvelle entité de détenir des parts de marché supérieures à 50%, voire 60% dans de nombreuses zones de l'Indre, de la Corrèze et de la Saône-et- Loire.
25. Une majorité des entreprises ayant répondu à l'enquête de marché de la Commission ont exprimé leurs inquiétudes quant aux effets de l'opération notifiée sur la concurrence. En particulier, de nombreux clients interrogés lors de l'enquête de marché de la Commission ont notamment souligné que cette nouvelle structure des marchés était préjudiciable au bon fonctionnement de la concurrence, en particulier dans des départements où celle-ci est déjà considérée comme insuffisante tels que la Corrèze, l'Indre et la Saône-et-Loire. Plusieurs clients situés dans l'Indre par exemple ont souligné que l'opération entrainait l'élimination de la seule alternative réelle à Tarmac, les autres carrières indépendantes étant situées à des distances trop éloignées. Une majorité de clients localisés à Mâcon (Saône-et Loire) a indiqué que l'opération aboutissait à la création d'un "monopole" en Saône-et Loire, en particulier pour les granulats de roches massives, dans la mesure où Tarmac détient la plupart des carrières autour de Mâcon alors qu'Eurovia possède la carrière de Sennecey qui constitue une alternative proche aux carrières de Tarmac. Des inquiétudes comparables ont été exprimées par les clients situés dans le département de la Corrèze.
26. L'Autorité indique en outre que l'entrée de nouveaux opérateurs sur ces marchés est peu probable, compte tenu de la rareté des carrières disponibles et du fait que l'ouverture d'un nouveau site nécessite d'entamer une procédure administrative lourde, les carrières étant des installations classées (dans la mesure où elles ont un impact sur l'environnement).
27. La partie notifiante a confirmé que l'ouverture d'une nouvelle carrière nécessitait une procédure détaillée comprenant une enquête publique, une étude d'impact et l'obtention d'une autorisation administrative nécessaire pour exploiter la carrière, qui est attribuée pour une durée limitée et pour une production annuelle maximale. Cette procédure peut durer jusqu'à 5 ans. Ce point a également été confirmé par l'enquête de marché, qui n'a pas mis en évidence que de nouvelles carrières allaient ouvrir dans les zones géographiques affectées par l'opération.
28. Par conséquent, il, apparaît que l'opération menace d'affecter significativement la concurrence en France par le biais d'effets horizontaux sur le marché des granulats.
Effets verticaux
29. L'Autorité remarque que sur les zones précédemment évoquées au titre des effets horizontaux et sur lesquelles la nouvelle entité disposera de fortes positions concernant les granulats, Eurovia est actuellement un acteur important en tant que producteur d'enrobés et opérateur de travaux routiers. Dès lors, l'Autorité fait valoir que l'opération est de nature à restreindre l'accès des concurrents de la nouvelle entité aux marchés avals en limitant l'accès des concurrents de la nouvelle entité aux marchés des granulats, principal composant des enrobés et matière première essentielle dans la réalisation de travaux routiers.
30. En ce qui concerne la position d'Eurovia sur les marchés des enrobés et des travaux routiers dans les zones horizontalement affectés et d'après les informations communiquées par les parties, Eurovia déteindrait des parts de marché de [20-30]% pour les enrobés et les travaux routiers dans le département de l'Indre (respectivement [20-30]% et [20-30]% dans le département voisin du Cher). Elles atteindraient [40-50]% pour les enrobés et [30-40]% pour les travaux routiers dans le département de la Corrèze (respectivement [60-70]% et [30-40]% dans le département voisin de la Dordogne). Enfin, ces parts de marché s'élèveraient à [10- 20]% pour les enrobés et [20-30]% pour les travaux routiers en Saône-et-Loire (respectivement [20-30] et [10-20]% dans le département voisin de la Côte-d'Or). La nouvelle entité détient aussi des parts de marchés assez élevés dans ces départements sur le marché des granulats (voir paragraphe 22). Sur le marché des travaux routiers au niveau national, Eurovia serait également un acteur significatif avec [20-30]% de parts de marché, le leader étant Colas avec [20-30]%.
31. De nombreux tiers interrogés lors de l'enquête de marché ont exprimé leurs craintes que la combinaison de fortes parts de marchés combinées pour les granulats en amont et de position significatives sur les marchés avals des travaux routiers n'entraine progressivement la marginalisation de clients de Tarmac sur le marché des granulats qui sont également concurrents d'Eurovia pour les travaux routiers. Plusieurs entreprises locales de travaux routiers ont indiqué qu'elles craignaient d'être exclues de ces marchés dans la mesure où Eurovia serait en mesure d'augmenter les prix de granulats ou de les proposer à des conditions moins favorables.
32. L'entrée d'Eurovia sur les marchés des granulats dans des zones où elle était avant la transaction peu présente modifie selon ces clients les conditions de concurrence sur ces marchés avals dans la mesure où elle donne à la nouvelle entité la maîtrise de l'ensemble des ressources nécessaires à la réalisation de travaux routiers. Le risque est d'autant plus élevé que les granulats, en particulier ceux issue de roches éruptives, constituent la matière première essentielle pour la réalisation de couches de fondations ou de couches de roulement.
33. L'Autorité fait valoir qu'une telle restriction de l'accès des concurrents aux marchés des granulats est également envisageable dans le département de la Haute-Vienne, zones dans lesquelles Tarmac est seul présent en tant que producteur de granulats et où l'opération crée un nouveau lien vertical entre la présence de Tarmac dans les marchés amont de granulats et celle d'Eurovia sur les marchés aval des enrobés et des travaux routiers.
34. A cet égard, il convient de faire observer que Tarmac détient dans ce département 8 carrières de granulats dont les parts de marché, dans un rayon de 40 kilomètres autour de ces sites, s'échelonnent entre [20-30]% et [70-80]%. Sur les marchés avals des enrobés et des travaux routiers dans le département de la Haute-Vienne, les parts de marché d'Eurovia sont de respectivement [30-40]% et [20-30]%. La transaction va donc rapprocher un acteur local majeur du marché des granulats et un opérateur significatif dans les marchés avals. De nombreux clients de Tarmac situés autour de Limoges ont souligné qu'une telle modification de la structure du marché pourrait avoir des répercussions négatives sur leur accès aux granulats, les autres carrières indépendantes étant trop éloignées pour constituer des alternatives.
35. Par conséquent, il apparaît que l'opération menace d'affecter significativement la concurrence en France par le biais d'effets verticaux.
Analyse de l'article 9 du Règlement sur les concentrations
36. Les conclusions de l'Autorité quant aux définitions de marchés de produits et géographiques sont en ligne avec la pratique de la Commission. Etant donné que la dimension géographique de ces marchés est au plus nationale, il est considéré que les marchés français sont distincts d'autres zones géographiques.
37. Au regard des éléments présentés par l'Autorité, il apparaît que la concentration menace d'affecter significativement la concurrence sur les marchés des granulats, des enrobés et des travaux routiers, à l'intérieur du territoire français.
38. Les conditions pour un renvoi au titre de l'Article 9(2)(a) du Règlement sur les concentrations sont donc remplies.
39. Conformément à l'Article 9(3) Règlement sur les concentrations, lorsque les conditions d'un renvoi d'une concentration de dimension européenne sont remplies, la Commission a le choix de renvoyer ou non l'affaire à une autorité nationale. A cet égard, l'Autorité fait valoir qu'elle a fréquemment étudié les marchés concernés par l'opération et elle s'est, à de nombreuses reprises, prononcée sur des pratiques mises en œuvre sur ces marchés. L'Autorité possède donc une connaissance actuelle et approfondie du secteur particulièrement appropriée dans l'étude de l'opération proposée.
VI. CONCLUSION
40. Eu égard aux considérations qui précèdent, les conditions sont réunies pour demander un renvoi au titre de l'article 9, paragraphe 2, point a). La Commission considère également que, compte tenu du caractère local des marchés concernés par l'opération, les autorités compétentes de la France sont mieux placées pour procéder à un examen approfondi et exhaustif de l'affaire. Elle estime donc opportun d'exercer le pouvoir discrétionnaire qui lui est conféré par l'article 9, paragraphe 3), point b), en vue d'autoriser le renvoi.
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:
Article premier
Le projet de concentration notifié par lequel Eurovia prend le contrôle de six filiales de Tarmac est renvoyé aux autorités compétentes de la France pour la partie de la concentration relative à la France, conformément à l'article 9, paragraphe 3), point b), du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil.
Article 2 La France est destinataire de la présente décision.
1. JO L 24 du 29.1.2004, p. 1 («le Règlement sur les concentrations»). Applicable à compter du 1er décembre 2009, le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne («TFUE») a introduit divers changements, parmi lesquels le remplacement des termes «Communauté» par «Union» et «marché commun» par «marché intérieur». Les termes du TFUE seront utilisés dans cette décision.
2. Conformément à l'article 4 du Règlement sur les concentrations
3. La Commission et l'Autorité ont coopéré étroitement durant toute la procédure conformément à l'article 19 du règlement sur les concentrations.
4. Tarmac possède également, dans le domaine des granulats, des filiales au Royaume-Uni et en Roumanie. […]
5. Chiffre d'affaires calculé conformément à l'article 5(1) du règlement sur les concentrations et la communication juridictionnelle de la Commission (JOCE C95, 16.04.2008 et version française modifiée JOCE C 43 of 21.02.2009 ).
6. Voir la décision de la Commission dans l'affaire COMP/M.1827 Hanson/ Pioneer du 20 mars 2000.
7. Lettres du ministre de l’économie C2004-6,du 18 mai 2004, au conseil de la société Financière granulats, relative à une concentration dans le secteur de la production et de la commercialisation de granulats et C2008-14 du 14 mai 2008, aux conseils de la société Colas Est, relative à une concentration dans le secteur des travaux routiers.
8. Voir par exemple la décision dans l'affaire COMP/M.5158 Strabag/Kirchloff du 15 juillet 2008.
9. L'Autorité ne semble toutefois pas retenir une telle distinction car les centrales mobiles nécessitent une production importante et elles ne représentent que 5% des centrales d'enrobés en France.
10. Affaire COMP/M.5158 Strabag/ Kirchhoff.
11. Affaire Heidelberg COMP/M.4719 Heidelberg Cement/Hanson
12. Lettre du Ministre de l’économie C2008-116 du 1er décembre 2008, au conseil de la société Fayat, relative à une concentration dans le secteur des travaux publics, du matériel routier et des équipements routiers.
13. Affaires COMP/M.3754 Strabag/Dywidag; COMP/M.1827 Hanson/Pioneer; COMP/M.1779 Anglo American/Tarmac; COMP/M.678 Minorco/Tilcon.
14. Affaire COMP/M.5158 Strabag/Kirchhoff
15. Avis du conseil de la concurrence n°01-A-08 et décisions du ministre C2008-14 précitée.
16. Form CO, pages 148, 152 et 156.