CA Paris, Pôle 4 ch. 6, 23 octobre 2020, n° 18/15074
PARIS
Arrêt
Infirmation partielle
PARTIES
Demandeur :
G2 Works (SARL)
Défendeur :
Star Lease (Sté), Mona & Co (SARL), Panifour (SAS), VDMC (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Durand, Conseillère exerçant les fonctions de Président
Conseillers :
Mme Guillaudier, Mme Morlet
EXPOSÉ DU LITIGE
Faits et procédure
En 2011, la société Mona & Co, qui venait d'acquérir un fonds de commerce au [...], a fait appel aux services de la société G2V Facilities, aux droits de laquelle vient aujourd'hui la société G2V Works (société G2V), pour l'agencement complet du local commercial afin de le transformer en boulangerie-pâtisserie-salon de thé.
Deux devis ont été établis par la société G2V le 02 septembre 2011 pour des travaux d'aménagement du local commercial, pour un montant de 294.261,44 euros TTC et le 8 septembre 2011 pour les fournitures nécessaires à l'exploitation de la boulangerie pour 279.818,55 euros TTC.
La société G2V a fait appel aux entreprises suivantes :
- la société Panifour pour la fourniture et l'installation du matériel de cuisson et de préparation,
- la société d'exploitation nouvelle des Ets Neveu (société SE2N) pour la fourniture et l'installation du système d'extraction d'air,
- la société VDMC pour la fourniture et l'installation de la ventilation et de la climatisation,
- Monsieur Victor F. pour la fourniture et la livraison des vitrines.
Afin de financer l'acquisition du matériel, la société Mona & Co a conclu, le 2 décembre 2011, un contrat de crédit-bail mobilier avec la société Star Lease, dont la dernière mensualité a été versée le 15 janvier 2017. La société Mona & Co est devenue depuis lors propriétaire de ce matériel.
La société Mona & Co s'est plainte d'un retard dans la réalisation des travaux et de divers dysfonctionnements du matériel. Elle a retenu la somme de 52.163,80 euros hors taxes (soit 62.387,90 euros TTC), sur le montant des travaux, les équipements ayant été réglés par la société Star Lease à la société G2V, et a fait constater les désordres par un Huissier de Justice, le 21 mars 2012.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 26 mars 2012, la Mairie de Paris a demandé que la façade soit mise en conformité avec l'arrêté du même jour et avec une autorisation du 16 décembre 2011.
D'autre part, la Direction Départementale de la Protection des Populations de Paris a mis en avant, le 9 mai 2012, une non-conformité majeure des produits liée à la réfrigération insuffisante de la vitrine horizontale de présentation.
La société Mona & Co a obtenu, par ordonnance de référé du 12 juillet 2012, la désignation d'un expert en la personne de Monsieur G., ensuite remplacé par Monsieur B..
Au cours des opérations d'expertise, la société G2V a repris une partie des désordres tels que la vitrine réfrigérée verticale (pour les boissons), remplacée en juin 2013. Pour le reste, l'expert a relevé, dans son rapport déposé le 18 décembre 2014 :
- un dysfonctionnement de la vitrine réfrigérée horizontale,
- un dysfonctionnement de la climatisation dans la boutique,
- une température ambiante excessive au sous-sol en raison de la présence du four et du refoulement du condenseur du tour soufflant directement dans la pièce,
- des difficultés de fonctionnement du four à pâtisserie.
Suivant échange de lettres entre les conseils des sociétés Mona & Co et Panifour en dates des 10 et 12 juin 2015, la société Panifour a accepté de remplacer le four et de réparer le tour défectueux, et il est constant qu'elle a respecté ces engagements. En contrepartie, la société Mona and Co a renoncé à demander l'annulation de la vente du four pâtissier et le remboursement des frais nécessaires à la réparation du tour réfrigéré et a accepté d'arrêter le chiffrage de son préjudice au 31 décembre 2014. L'accord a précisé que la société Mona & Co ne renonçait en rien à demander des dommages et intérêts au titre du préjudice subi.
C'est dans ces conditions que la société Mona and Co a fait assigner les sociétés G2V Works, Star Lease et Panifour devant le tribunal de commerce de Paris puis que la société G2V Works a fait assigner la société Nouvelle des Etablissements Neveu, la SMABTP en qualité d'assureur de la société G2V, Monsieur F. et la société VDMC et que la société Panifour a fait assigner la société Allianz en qualité d'assureur de la société Panifour. Les instances ont été jointes.
Décision déférée
Par jugement du 14 mai 2018, le tribunal de commerce a statué de la façon suivante :
- Dit recevable l'exception d'incompétence soulevée par la SMABTP, ès qualités d'assureur de la société ARIATEL (devenue SARL G2V WORKS),
- Ordonne la disjonction de l'affaire RG 2015068071, qui oppose Ia SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, la SMABTP, ès qualités d'assureur de la société ARIATEL (devenue SARL G2V WORKS), et la SARL SOCIÉTÉ NOUVELLE DES ETABLISSEMENTS NEVEU (S.E.2N) de l'affaire RG J2017000305,
- Se déclare incompétent pour l'affaire RG 2015068071 au profit du tribunal de grande instance de Paris,
- Dit que Ie greffe procédera à la notification de la présente décision par lettre recommandée avec accusé de réception adressée exclusivement aux parties.
- Dit qu'en application de l'article 84 CPC, la voie de l'appel est ouverte contre la présente décision dans le délai de quinze jours à compter de ladite notification.
- Dit qu'à défaut d'appel dans ce délai, le dossier sera transmis à la juridiction susvisée dans les conditions prévues par l'article 82 CPC,
- Se dit compétent pour l'affaire RG J2017000305 après disjonction de l'affaire RG 2015068071,
- Dit n'y avoir lieu à prononcer la résolution de la vente de la vitrine réfrigérée ;
- Condamne la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, au paiement d'une somme de 37 200 euros TTC (31 000 € HT) à la SARL MONA & CO en remboursement du prix de la vitrine réfrigérée ;
- Condamne la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SARL MONA & CO la somme de 7 028 € (5 428 € + 1 600 €) pour la remise en état du système de climatisation et d'extraction d'air ;
- Condamne la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SARL MONA & CO la somme 38 789 € de dommages et intérêts pour le retard dans l'ouverture de la boulangerie-pâtisserie ;
- Condamne la SAS PANIFOUR à payer à la SARL MONA & CO la somme de 143 100 € au titre du préjudice lié à la perte de marchandise ;
- Condamne la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SARL MONA & CO la somme de 15 900 € au titre du préjudice lié à la perte de marchandise ;
- Condamne in solidum la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, et la SAS PANIFOUR à payer à la SARL MONA & CO la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice d'image ;
- Déboute la SARL MONA & CO de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
- Condamne la SARL MONA & CO à payer à la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, la somme de 62 387,90 € au titre des factures impayées outre intérêts au taux légal à compter de l'émission des factures ;
- Dit qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de garantie de la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, envers la SMABTP, ès qualités d'assureur de la société ARIATEL (devenue SARL G2V WORKS) ;
- Dit que la SA STAR LEASE est hors de cause ;
- Déboute la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, de sa demande de garantie par la SAS PANIFOUR de l'indemnisation du manque à gagner de la SARL MONA & CO ;
- Déboute la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, de sa demande de garantie par la SAS PANIFOUR de l'indemnisation de l'image de marque ;
- Dit que la société de droit portugais VDMC garantira la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, de sa condamnation concernant les travaux d'augmentation de la puissance de la climatisation ;
- Condamne la SA ALLIANZ IARD à garantir la SAS PANIFOUR de ses condamnations ;
- Condamne in solidum la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, et la SAS PANIFOUR à payer à la SARL MONA & CO la somme de 37 800 € au titre de l'article 700 du CPC ;
- Condamne la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SA STAR LEASE la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du CPC ;
- Déboute pour les demandes autres, plus amples ou contraires ;
- Ordonne l'exécution provisoire ;
- Condamne in solidum la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, et la SAS PANIFOUR aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 310,57 € dont 51,55 € de TVA et les frais d'expertise judiciaire pour 25 534 euros.
La société G2 Works a interjeté appel le 14 juin 2018 en intimant les sociétés Star Llease, Mona & Co, Panifour, VDMC et Monsieur F. en visant les dispositions en gras. Elle s'est ensuite désistée de son appel à l'égard de la société Star Lease, ce qui a été constaté par ordonnance du conseiller de la mise en état du 13 décembre 2018.
Demandes des parties
Par conclusions du 10 janvier 2020, la société G2V Works forme les demandes suivantes :
Vu les articles 1231-1, 1315, 2044 et 2052 du Code civil,
Vu le protocole d'Accord signé entre MONA & CO et PANIFOUR,
A titre principal,
INFIRMER la décision rendue en première instance en ce qu'elle a :
- Condamné la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, au paiement d'une somme de 37.200 euros TTC (31.000 € HT) à la SARL MONA & CO en remboursement du prix de la vitrine réfrigérée ;
- Condamné la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SARL MONA & CO la somme de 7.028 € (5428 € + 1600 €) pour la remise en état du système de climatisation et d'extraction d'air ;
- Condamné la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SARL MONA & CO la somme 38 789 € de dommages et intérêts pour le retard dans l'ouverture de la boulangerie-pâtisserie ;
- Condamné la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SARL MONA & CO la somme de 15 900 € au titre du préjudice lié à la perte de marchandise ;
- Condamné in solidum la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, et la SAS PANIFOUR à payer à la SARL MONA & CO la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice d'image ;
- Dit que la SA STAR LEASE est hors de cause ;
- Débouté la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, de sa demande de garantie par la SAS PANIFOUR de l'indemnisation du manque à gagner de la SARL MONA & CO ;
- Débouté la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, de sa demande de garantie par la SAS PANIFOUR de l'indemnisation de l'image de marque ;
- Condamné in solidum la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, et la SAS PANIFOUR à payer à la SARL MONA & CO la somme de 37.800 € au titre de l'article 700 du CPC ;
- Condamné la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, à payer à la SA STAR LEASE la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du CPC ;
- Condamné in solidum la SARL G2V WORKS, anciennement dénommée G2V FACILITIES puis ARIATEL, et la SAS PANIFOUR aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 310,57 € dont 51,55 € de TVA et les frais d'expertise judiciaire pour 25.534 euros.
Statuant à nouveau,
- DÉBOUTER la société MONA & CO de l'intégralité de ses demandes ;
- DIRE ET JUGER que l'émission d'un avoir est redondante avec la condamnation de la société G2V à régler la somme de 31.000 € HT à la société MONA & CO.
- CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a :
- Condamné la société MONA & CO à verser la somme de 62.387, 90 € à la société G2V au titre des factures impayées outre intérêts au taux légal à compter de l'émission des factures ;
- Dit que la société de droit portugais VDMC garantira la société G2V WORKS de sa condamnation concernant les travaux d'augmentation de la puissance de climatisation ;
- Débouté la société MONA & CO de sa demande au titre du préjudice moral ;
A titre subsidiaire,
- LIMITER la responsabilité de la société G2V à 10% des condamnations au titre des désordres affectant le système de climatisation ;
- LIMITER la responsabilité de la société G2V à 20% des condamnations au titre des désordres affectant le système d'extraction d'air, le restant pesant sur la société PANIFOUR ;
- LIMITER la responsabilité de la société G2V à 10% des condamnations au titre des désordres affectant la vitrine réfrigérée ;
- LIMITER la responsabilité de la société G2V à 10% des condamnations au titre de l'atteinte du droit à l'image, soit à hauteur de 1 000 euros, le reste pesant sur la société PANIFOUR ;
- CONDAMNER exclusivement la société PANIFOUR au titre du préjudice moral de la société MONA & CO ;
- CONDAMNER la société PANIFOUR à relever et garantir indemne la société G2V WORKS de toutes condamnations qui viendraient à être mises à sa charge et ce en principal, intérêts et frais, dépens (frais d'expertise) et sommes au titre de l'article 700 du CPC ;
En conséquence,
- CONDAMNER la société PANIFOUR à garantir G2V WORKS de toutes les sommes qui seraient mises à sa charge au profit de MONA & CO au titre du poste manque à gagner relatif aux années 2012, 2013 et 2014, du préjudice lié à l'atteinte à l'image de marque, du préjudice moral, du remboursement des frais d'expertise judiciaire, de l'article 700 du CPC.
En tout état de cause,
- CONDAMNER les défenderesses in solidum à verser à la société G2V WORKS la somme de 10.000 € au titre de l'article 700 du CPC ainsi qu'aux entiers dépens.
Par conclusions du 08 janvier 2020, la société Mona & Co forme les demandes suivantes :
Vu les (anciens) articles 1134, 1147, 1604 et suivants et 1641 et suivants du Code civil,
- DIRE ET JUGER que la société G2V Works n'a pas exécuté son obligation de délivrance conforme au titre des articles 1604 et suivants du Code civil, concernant la vitrine horizontale réfrigérée de présentation des produits de marque « VDMC » ;
- DIRE ET JUGER que la société G2V Works n'a pas exécuté ses obligations d'information et de conseil concernant la climatisation et le système d'extraction ;
- DIRE ET JUGER que la société G2V Works a engagé sa responsabilité contractuelle à l'égard de la société Mona & Co en achevant les travaux avec 14 semaines de retard sur le planning initial, soit le double du délai contractuellement convenu ;
En conséquence,
- CONFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné la société G2V Works au paiement d'une somme de 37.200 euros à la société Mona & Co en remboursement du prix de la vitrine horizontale réfrigérée de marque VDMC (G2V ayant émis un avoir mais n'ayant procédé à aucun remboursement) ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné la société G2V Works au paiement de la somme de 7.028 euros à la société Mona & Co pour la remise en état du système de climatisation et d'extraction d'air ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works au paiement d'une somme de 60.867 euros hors taxes au titre de la remise en état du système de climatisation et d'extraction d'air ou, subsidiairement, à la somme de 32.951 euros hors taxes ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné la société G2V Works au paiement de la somme de 38.789 euros de dommages et intérêts à la société Mona & Co pour le retard dans l'ouverture de la boulangerie-pâtisserie ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works et à indemniser la société Mona & Co du préjudice subi en raison du retard dans l'ouverture de la boulangerie-pâtisserie à hauteur de 111.000 euros ou, subsidiairement, à hauteur de 77.579 euros hors taxes ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné la société G2V Works à payer à la société Mona & Co la somme de 15.900 euros au titre du préjudice lié à la perte de marchandise ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works à indemniser la société Mona & Co de son manque à gagner à hauteur de 37.260 euros, conformément au rapport d'expertise ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné in solidum la société G2V Works et la société Panifour au paiement de la somme de 10.000 euros à la société Mona & Co à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice d'image ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works seule à indemniser la société Mona & Co du préjudice lié à l'atteinte de l'image de marque, à hauteur de 11.250 euros ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a débouté la société Mona & Co de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works à indemniser la société Mona & Co du préjudice moral qu'elle a subi à hauteur de 15.000 euros ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné in solidum la société G2V Works et la société Panifour au paiement de la somme de 25.534 euros à Mona & Co au titre des frais d'expertise judiciaire ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works au paiement à la société Mona & Co de la somme de 19.150 euros en remboursement des frais d'expertise judiciaire intégralement avancés par la société Mona & Co ;
- INFIRMER le jugement du 14 mai 2018, en ce qu'il a condamné in solidum la société G2V Works et la société Panifour au paiement de la somme de 37.800 euros à Mona & Co au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;
Statuant à nouveau :
- CONDAMNER la société G2V Works au paiement à la société Mona & Co de la somme de 28.350 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile au titre de la procédure de première instance ;
- CONDAMNER la société G2V Works au paiement à la société Mona & Co d'une indemnité complémentaire de 7.000 euros au titre de la procédure d'appel ;
- CONDAMNER la société G2V Works aux entiers dépens.
Par conclusions du 11 décembre 2018, la société Panifour forme les demandes suivantes :
CONFIRMER le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société G2V de l'ensemble de ses demandes fins et prétentions à l'encontre de la société PANIFOUR.
DÉBOUTER la société G2V de sa demande en garantie à l'encontre de la société PANIFOUR, ainsi que de l'ensemble de ses fins demandes et prétentions à l'encontre de cette dernière.
CONDAMNER la société G2V à payer à la société PANIFOUR la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi que les entiers dépens de l'instance.
La clôture de l'instruction de l'affaire, prononcée selon ordonnance du 09 janvier 2020, a été révoquée le 17 septembre 2020, et la nouvelle clôture a été prononcée le même jour.
La société VDMC et Monsieur F. n'ont pas constitué avocat. La société G2V leur a signifié la déclaration d'appel par actes d'huissier du 18 juillet 2018 transmis au Portugal. En l'absence de preuve des modalités de la remise, il convient de statuer par défaut.
MOTIFS
A/ Sur les demandes concernant la société Star Lease
La société G2V s'étant désistée de son appel à l'égard de la société Star Lease, désistement constaté par ordonnance du conseiller de la mise en état du 13 décembre 2018, ses demandes tendant à l'infirmation des dispositions du jugement mettant la société Star Lease hors de cause et condamnant la société G2V à régler à la société Star Lease la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile sont irrecevables.
B/ Sur la condamnation de la société G2V à payer à la société Mona & Co la somme de 7 028 € au titre de la remise en état des systèmes de climatisation et d'extraction d'air
* La somme de 7 028 € se décompose de la façon suivante :
- 5 428 € HT pour l'augmentation de la puissance de la climatisation au rez-de-chaussée,
- 1 600 € en réparation des problèmes d'extraction d'air au sous-sol.
* La société G2V demande l'infirmation de cette disposition et le rejet des demandes formées au titre de ces désordres.
S'agissant de la climatisation au rez-de- chaussée, elle conclut que le contrat ne prévoyait pas de température contractuelle, qu'elle était seulement tenue de mettre en place un système garantissant une température normale dans des conditions normales d'utilisation, et qu'elle n'a pas commis de faute dès lors qu'elle ne pouvait anticiper que la climatisation fonctionnerait avec une porte d'entrée constamment ouverte. En tout état de cause elle souligne qu'elle a fait confiance à son sous-traitant, la société VDMC, qui a conseillé et livré le matériel sans aucune mise en garde et en conclut que sa responsabilité doit se limiter à 10 %.
S'agissant de l'extraction d'air au sous-sol, elle conclut qu'il n'était pas prévu au marché de traiter la température ambiante du sous-sol, et qu'au demeurant, les hautes températures qui y ont été constatées sont le fait du matériel défectueux. Elle souligne également que la société Mona & Co a déjà été indemnisée pour les préjudices résultant de la chaleur excessive au sous-sol dans le cadre du protocole transactionnel conclu avec la société Panifour. À titre subsidiaire, elle demande que les sommes allouées soient limitées à 20 % du préjudice pour tenir compte de la responsabilité de la société Panifour, comme en première instance.
Enfin, elle demande la garantie de la société Panifour.
* La société Mona & Co demande l'augmentation de la somme allouée, ainsi qu'il sera examiné plus loin.
S'agissant de la climatisation au rez-de-chaussée, elle soutient qu'il y a eu une erreur dans le choix du matériel, imputable à la société G2V qui a manqué à ses obligations de conseil et d'information.
S'agissant de l'extraction d'air au sous-sol, elle soutient que le système mis en place est totalement insuffisant.
Sur ce
Constatations de l'expert
* Au rez-de-chaussée, Monsieur B. a constaté que la climatisation fonctionnait puisque la température de soufflage était proche des valeurs normales, mais qu'elle n'arrivait pas à combattre les apports thermiques. Il en a déduit que la puissance installée était insuffisante. Cependant, constatant d'une part qu'il n'était pas prévu de température contractuelle, d'autre part que la porte du magasin donnant sur la rue était 'pratiquement toujours ouverte, rendant impossible la maîtrise des déperditions et des apports', il a proposé de ne retenir que 30 %, soit 5 428 € HT du devis présenté par la société Mona & Co.
* Au sous-sol, il a constaté que la température ambiante était élevée et expliqué que la production de chaleur était 'due à la présence du four et au refoulement du condenseur du tour, qui souffle directement dans la pièce, ce qui constitue un défaut de conception'. Cependant, il n'a pas constaté de dysfonctionnement notable de l'extraction et il précise que 'lorsque le problème du tour sera réglé, la température du sous-sol devrait redevenir supportable'. Dans ces conditions, il a estimé que seul le traitement du marbre du tour devait être retenu, et a estimé les travaux à 8 000 € HT en proposant de la partager à hauteur de 80 % à la charge de la société Panifour et à hauteur de 20 % à la charge de la société G2V.
Sur la responsabilité de la société G2V
* Le devis de travaux prévoyait, pour le rez-de-chaussée, dans son article 6.6, la fourniture et la pose d'un système de climatisation dans les termes suivants :
« - le groupe de condensation sera positionné au-dessus de la porte double et l'évacuation et l'apport d'air seront effectués par grille de soufflage
- fabrication d'un coffrage acoustique autour du groupe ».
Il est vrai qu'il n'est pas contractuellement prévu que le système de climatisation permette d'atteindre une température précise. Cependant, l'expert a constaté que, alors que la température de soufflage était proche des valeurs normales, elle n'arrivait pas à combattre les apports thermiques et en a déduit que la puissance installée était insuffisante. À titre de confirmation de l'inefficacité du système, la cour relève qu'au cours de la réunion du 10 avril 2013, l'expert a noté que la température dans le magasin était en moyenne de 26 °C, la même qu'à l'extérieur. Dès lors que le système est inefficace, il importe peu qu'aucune température contractuelle n'ait été prévue.
Ainsi, la société G2V a commis une faute contractuelle dès lors que, faute d'étude suffisante de la configuration des lieux au regard de leur destination, elle a conseillé un système de climatisation incapable de maintenir dans le magasin une température normale. Elle ne peut se prévaloir du fait que la porte d'entrée du magasin soit pratiquement toujours ouverte. En effet, d'une part cette circonstance ne peut être qualifiée d'anormale puisqu'un commerce de boulangerie est destiné à la réception de très nombreux clients, d'autre part la société G2V ne démontre pas avoir précisé à la société Mona & Co que le fonctionnement correct de la climatisation était conditionné à une utilisation particulière des lieux.
Par ailleurs, la société G2V ne peut opposer au maître d'ouvrage les fautes éventuellement commises par la société VDMC, son sous-traitant.
* Le devis de travaux prévoyait, dans son article 4.5, l'installation d'une ventilation au sous-sol dans les termes suivants :
« - Mise en place d'un système VMC double flux pour l'extraction et l'apport d'air neuf,
- Mise en place d'une extraction d'air au niveau du four ».
Dès lors que la société G2V avait été chargée par la société Mona & Co non seulement d'installer un système d'extraction d'air au sous-sol mais également d'y installer le matériel, et notamment le tour, que l'expert a constaté une température ambiante de 28 °C, qualifiée dans sa note aux parties n° 1, de 'trop élevée', et que cet excès est dû à une anomalie de conception du tour, il importe peu que le devis n'ait pas prévu de température contractuelle au sous-sol. Il suffit en effet de constater que la société G2V est responsable, à l'égard du maître d'ouvrage, des fautes de conception relatives à l'installation du tour commises par la société Panifour et des conséquences dommageables qui ont suivi.
Sur la réparation des désordres
La somme de 60 867 € réclamée à titre principal par la société Mona & Co se répartit de la façon suivante :
- devis Siemac du 17 juin 2014 pour remplacement de la climatisation au rez-de-chaussée du magasin, modification des extractions et des compensations du sous-sol, modification des extractions de la hotte existante et du capteur dédié au four, s'établissant à 43 387,15 € HT au total ;
- devis Univers Froid du 19 juin 2014 de fourniture et pose de deux condenseurs à air avec création d'un local technique avec grille extérieure en façade, pour le prix total de 17 480 € HT.
Cependant, il ressort du rapport d'expertise d'une part que le remplacement de la climatisation du rez-de-chaussée n'est pas nécessaire puisqu'il suffit d'augmenter sa puissance, d'autre part qu'il n'est pas nécessaire de remplacer ou modifier le système d'extraction d'air en sous-sol puisqu'il suffit de réparer le défaut de conception affectant le tour. Ainsi, ces sommes ne sauraient être retenues.
À titre subsidiaire la société Mona & Co demande l'allocation de la somme de 32 951 € HT se décomposant de la façon suivante :
- 18 095 € HT correspondant au devis Siemac de remplacement du système de climatisation,
- remboursement de la somme de 14 856 € HT correspondant, précise-t-elle, au chiffrage fait par G2V du système d'extraction.
Le remplacement du système de climatisation étant inutile, la première somme ne saurait être allouée en totalité. La cour considère que la somme de 5 428 € HT allouée en première instance, représentant 30 % de la réclamation, indemnise exactement la société Mona & Co du préjudice résultant de la nécessité d'augmenter la puissance du système. Elle ne saurait être réduite à 10 % de la somme, ainsi que le demande la société G2V dans le dispositif de ses conclusions, dès lors qu'elle est responsable à l'égard du maître d'ouvrage des manquements commis par son sous-traitant, la société VDMC.
La société Mona & Co ne démontre pas que la température du sous-sol demeure trop élevée malgré la réparation, dans le cadre de l'accord transactionnel conclu entre elle et la société Panifour, des désordres affectant le tour. Ainsi, à défaut de preuve de la persistance d'un désordre matériel, aucune somme ne saurait être allouée au titre de la reprise du système d'extraction d'air, ce malgré la faute retenue plus haut.
Dans ces conditions, le jugement sera infirmé en ce qu'il a condamné la société G2V à payer à la société Mona & Co la somme de 7 028 € pour la remise en état du système de climatisation et d'extraction d'air. Statuant à nouveau, la cour condamnera la société G2V à verser à la société Mona & Co la somme de 5 428 € pour la remise en état du système de climatisation et déboutera la société Mona & Co de sa demande de dommages et intérêts au titre de la remise en état du système d'extraction d'air.
La demande en garantie formée contre la société Panifour sera rejetée dès lors que c'est la société VDMC qui a réalisé les travaux de climatisation. Au demeurant, la disposition du jugement condamnant la société VDMC à garantir la société G2V de la condamnation concernant les travaux d'augmentation de la puissance de la climatisation n'est pas l'objet d'un appel.
C/ Sur la condamnation de la société G2V à payer à la société Mona & Co la somme de 38 789 € à titre de dommages et intérêts en réparation du retard dans l'ouverture de la boulangerie pâtisserie
*L'expert judiciaire, se fondant sur l'existence du planning établi par la société G2V, a constaté l'existence d'un retard de livraison des travaux de trois mois, et a calculé qu'au cours de cette période, la société Mona & Co avait réglé de façon inutile, au titre des salaires et loyers, une somme de 72 000 € HT. Considérant cependant que les locaux n'avaient pas été mis à la disposition de la société G2V dans les délais suffisants, il a proposé de partager cette somme entre les deux sociétés, soit 38 789 € HT à la charge de la société G2V.
*Le tribunal de commerce a estimé que le retard de livraison des travaux imputable à la société G2V était de un mois et demi et a alloué à la société Mona & Co, à titre de dommages et intérêts, le montant des charges inutilement réglées par elle au cours de cette période.
*La société G2V conclut à titre principal qu'aucun élément contractuel ne prévoit une date de fin de travaux, le prévisionnel sur lequel se fonde la société Mona & Co ayant été établi à titre purement indicatif. À titre subsidiaire, elle soutient que le décalage entre la date figurant sur ce planning et l'achèvement effectif des travaux est dû au seul fait de la société Mona & Co, qui l'a informée tardivement de l'acquisition du deuxième local qui devait être adjoint au premier, a modifié ses demandes à plusieurs reprises, a tardé à répondre à ses interrogations, et lui a demandé à plusieurs reprises de retarder le début des travaux. Par ailleurs elle fait valoir que le calcul opéré par la société intimée pour justifier son préjudice est inadapté.
*La société Mona & Co se fonde sur le planning fourni par la société G2V pour soutenir que les travaux devaient durer trois mois et se terminer le 30 novembre 2011. Elle chiffre sa perte de marge brute sur cette période à 111 000 €. À titre subsidiaire, elle demande que l'indemnisation des charges de salaires et loyers allouée par les premiers juges soit augmentée à 77 579 € correspondant aux trois mois de retard.
Sur ce
Le devis de travaux en date du 02 septembre 2011, accepté à une date inconnue, ne prévoit pas de délai de réalisation ni de date de livraison. Un planning prévisionnel a certes été établi, fixant l'ouverture du chantier au 06 septembre 2011 et la remise des clefs au 30 novembre 2011. Cependant, y figure la mention suivante :
« Ce planning s'entend sous réserve de l'obtention des différentes autorisations nécessaires à la réalisation des travaux (au plus tard obtention de l'ensemble des autorisations au 03 octobre 2011). Les retards occasionnés par la non remise des autorisations de mairie, propriétaires des murs ou administrations, ne sont pas pris en compte dans ce planning. Ce planning est transmis à titre informel. En aucun cas il ne peut être reproché G2V Facilities toutes modifications sur ce planning. Seule la société G2V Facilities est responsable des informations et du contenu de ce planning. G2V Facilities peut être amenée à apporter toutes modifications au cours de l'exécution de l'ouvrage. »
En raison de cette mention, qui réservait à la société G2V la possibilité de modifier le planning, la société Mona & Co ne pouvait pas le considérer comme contractuel.
Par ailleurs, il n'est pas établi que la durée effective des travaux, qui s'établit à six mois, ait été anormale au regard des obstacles rencontrés. Ainsi, outre le fait que la société Mona & Co a elle-même participé à l'allongement des opérations, demandant ainsi le report de la réalisation des ouvertures du 03 octobre au 10 octobre 2011, il est avéré que les autorisations nécessaires n'ont pas toutes été obtenues au 03 octobre 2011, l'OPAC ayant tardé à donner son accord pour la terrasse, nécessaire au dépôt de la demande d'occupation du domaine public, et la société Mona & Co ayant en définitive, suivant décharge de responsabilité signée le 08 décembre 2011, autorisé la société G2V à entreprendre les travaux sur la façade du local commercial sans attendre les décisions définitives des services d'urbanisme.
Le non-respect du délai de trois mois figurant au planning ne revêtant pas, au vu de ces éléments, un caractère fautif, la disposition du jugement condamnant la société G2V à payer à la société Mona & Co la somme de 38 789 € à titre de dommages et intérêts sera infirmée et la demande de dommages et intérêts rejetée.
D/ Sur la condamnation de la société G2V à payer à la société Mona & Co la somme de 37 200 € TTC (31 000 € HT) en remboursement du prix de la vitrine réfrigérée
*Les premiers juges, constatant que la vitrine réfrigérée horizontale était devenue la propriété de la société Mona & Co, et que la société G2V, reconnaissant les dysfonctionnements de ce matériel, l'avait reprise et avait établi un avoir daté du 30 octobre 2017 difficilement utilisable, ont condamné la société G2V à en rembourser le coût d'achat à la société Mona & Co.
*La société G2V soutient à titre principal que l'avoir est redondant avec la condamnation prononcée en première instance. À titre subsidiaire elle précise que la vitrine a été fournie et installée par Monsieur F., sous-traitant à qui elle a fait confiance. À titre infiniment subsidiaire, elle demande la limitation de sa condamnation à 10 % de la somme.
*La société Mona & Co souligne qu'elle a dû elle-même remplacer ce matériel défaillant et demande la confirmation du jugement.
Sur ce
C'est par des motifs pertinents que la cour approuve et qu'il n'y a pas lieu de rappeler intégralement que les premiers juges ont condamné la société G2V à rembourser à la société Mona & Co la vitrine réfrigérée horizontale défaillante qu'elle lui avait livrée, qui avait été payée à la société G2V grâce au crédit bail mobilier contracté par la société Mona & Co auprès de la société Star Lease et dont la société Mona & Co était devenue propriétaire en levant l'option à la fin de ce contrat. En effet, d'une part l'émission par la société G2V d'un avoir est difficilement utilisable dès lors qu'en suite du présent litige, la société Mona & Co pourrait légitimement changer de fournisseur, d'autre part la société Mona & Co est en droit de demander le remboursement intégral du matériel défaillant auprès de la société G2V, vendeur intermédiaire.
La condamnation ne saurait être réduite à 10 %, ainsi que le demande la société G2V, dès lors qu'elle est responsable à l'égard de sa cliente des dommages provenant des défauts de la chose qu'elle lui a vendue, peu important qu'elle l'ait elle-même acquise auprès d'un tiers.
Le jugement sera confirmé sur ce point, étant précisé que la cour n'est pas saisie de la demande tendant à la restitution par la société Mona & Co de l'avoir émis par la société G2V, qui ne figure pas au dispositif des conclusions de celle-ci.
La demande en garantie formée par la société G2V contre la société Panifour sera rejetée. En effet, c'est auprès de Monsieur F. que la société G2V s'est procuré la vitrine horizontale défaillante.
E/ Sur la perte de marchandises
-L'expert judiciaire a relevé que le four à pâtisserie ne permettait pas une cuisson uniforme des produits en raison d'un défaut de fabrication, ce qui avait généré des pertes de produits, ceux-ci trop ou pas assez cuits étant difficilement vendables soit, à raison de 300 produits par jour et d'une perte de 0,50 € par produit, une perte totale de 122 400 € HT de mars 2012 à fin 2014, qu'il a proposé de répartir à hauteur de 90 % à la charge de la société Panifour et 10 % à la charge de la société G2V.
Il a par ailleurs relevé que la vitrine réfrigérée horizontale présentait une puissance frigorifique insuffisante et que la réclamation concernant les produits perdus en raison de ce défaut, à hauteur de 37 260 € HT était « tout à fait recevable ». Il a proposé de répartir cette somme à hauteur de 90 % à la charge de Monsieur F. et 10 % à la charge de la société G2V.
*Les premiers juges ont chiffré le préjudice total subi par la société Mona & Co à 159 000 € et condamné la société G2V à payer 10 % de cette somme soit 15 900 €, étant précisé qu'ils ont par ailleurs condamné la société Panifour à payer les 90 % restant soit la somme de 143 100 €.
*Il ressort de la lecture des conclusions de la société Mona & Co les éléments suivants :
- elle fait état d'un accord transactionnel intervenu à la suite du jugement entre elle et les sociétés Panifour et Allianz aux termes duquel ces dernières ont accepté de verser la somme de 120 000 €, l'assureur se désistant de l'appel qu'il avait formé et la société Mona & Co renonçant notamment à procéder à l'exécution forcée du jugement ;
- en appel, la société Mona & Co limite sa demande contre la société G2V au paiement de la somme de 37 260 € HT correspondant à la perte de marchandises en raison de la vitrine horizontale défectueuse (page 28 des conclusions).
*À titre principal, la société G2V oppose à cette demande de dommages et intérêts les dispositions de l'article 10 de ses conditions générales de vente excluant notamment le préjudice qui serait lié au manque à gagner.
À titre subsidiaire elle soutient que ni sa faute ni le caractère certain du préjudice ne sont établis. Par ailleurs, dans le dispositif de ses conclusions, elle demande que la condamnation au titre des désordres affectant la vitrine réfrigérée soit réduite à 10 %, et forme une demande en garantie contre la société Panifour.
Sur ce
La société Mona & Co fonde sa demande en réparation du manque à gagner sur les dispositions des articles 1604 et suivants et 1641 et suivants du code civil.
Le rapport d'expertise judiciaire démontre que la vitrine réfrigérée horizontale générait des températures supérieures à ce que requiert la réglementation. La société Mona & Co a d'ailleurs reçu de la Direction départementale de la protection des populations de Paris, le 09 mai 2012, un rappel à la réglementation constatant, à titre de « non-conformité majeure », qu'une température de + 12°C avait été relevée à cœur d'un éclair en vitrine réfrigérée dans la zone de vente. Il est ainsi établi que ce matériel, vendu par la société G2V, était affecté d'un vice caché le rendant impropre à l'usage auquel il était destiné, et que la société Mona & Co ne l'aurait pas acquis si elle en avait connu le défaut. En application de l'article 1641 du code civil, la société G2V est, en sa qualité de vendeur, tenu de la garantie de ce vice sans que la démonstration d'une faute soit nécessaire.
Le devis afférent à la fourniture des matériels de boulangerie et pâtisserie comporte des conditions générales de vente précisant, dans leur article 10 relatif à la garantie :
« (...). Il est expressément entendu que G2V n'encourra aucune responsabilité pour tous dommages ou coûts indirects, ni pour toutes pertes et notamment pertes de profit, de données ou d'information et de tous dommages et frais découlant de l'utilisation ou de l'impossibilité d'utilisation du produit.
(...) »
Cependant, cette clause limitative de garantie est inapplicable en l'espèce dès lors qu'elle est opposée par un professionnel ayant notamment pour activité selon son extrait K bis l'aménagement d'espaces de travail, la gestion et l'optimisation des biens d'équipement, la vente et l'installation d'aménagements spécifiques, à un professionnel d'une autre spécialité, en l'espèce la boulangerie pâtisserie. Dans ces conditions, en application des dispositions de l'article 1645 du code civil, la société G2V, réputée connaître les vices du matériel vendu, est tenue, outre la restitution du prix reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.
Il ressort des factures produites en pièce n° 40 que la société Mona & Co a remplacé le matériel défaillant par une vitrine qui lui a été livrée au mois de mai 2014. Il est dès lors certain qu'elle a, pendant plus de deux ans, subi des pertes de produits en raison de l'impossibilité de les conserver correctement dans une vitrine insuffisamment réfrigérée. S'agissant de l'évaluation du préjudice résultant de ces pertes, l'expert judiciaire, qui s'est rendu plusieurs fois dans les lieux et a pu apprécier les conditions d'exploitation du fonds de commerce, notamment son volume d'activité, a estimé que la somme réclamée, à savoir 37 260 € HT, était 'réaliste' (réponses aux dires, page 15). La cour observe que le chiffre d'affaire de la société Mona & Co a considérablement augmenté entre les années 2013 et 2014, passant de 569 393 € à 749 222 €, amélioration manifestement due en partie au remplacement de la vitrine. Cependant, dès lors qu'il n'est pas certain que les marchandises jetées auraient toutes été vendues, la cour réduira la somme proposée par l'expert à 25 000 €.
La condamnation ne saurait être réduite à 10 %, ainsi que le demande la société G2V, dès lors qu'elle est responsable à l'égard de sa cliente des dommages provenant des défauts de la chose qu'elle lui a vendue, peu important qu'elle l'ait elle-même acquise auprès d'un tiers.
Ainsi, la disposition critiquée sera infirmée, et la société G2V sera condamnée à régler à la société Mona & Co la somme de 25 000 € en réparation des pertes de produits résultant du vice caché affectant la vitrine horizontale réfrigérée.
La demande en garantie formée par la société G2V contre la société Panifour a été à juste titre rejetée, étant observé que c'est Monsieur F. auprès de qui la société G2V s'est procuré la vitrine horizontale défaillante.
F/ Sur les dispositions du jugement relatives au préjudice d'image
1° Sur la condamnation des sociétés G2V et Panifour in solidum à régler à la société Mona & Co la somme de 10 000 € en réparation du préjudice d'image
*La société G2V conclut à titre principal à l'infirmation de cette disposition. Elle fait valoir l'absence d'atteinte à l'image de marque en raison de l'absence de preuve d'une image de marque préalable, et soutient qu'il ressort de l'analyse faite par Monsieur L., expert comptable qui a analysé à sa demande les réclamations de la société Mona & Co, que la mauvaise image de ce commerce provient plutôt de la mauvaise composition de ses produits, de la mauvaise qualité de ses matières premières et d'une piètre attention portée à la clientèle.
À titre subsidiaire, rappelant l'accord transactionnel conclu entre la société Mona & Co et la société Panifour et soutenant que la dégradation des produits provient directement du four et du tour pâtissier, elle demande que la condamnation à son encontre soit réduite à 10 %, soit 1 000 €.
*La société Mona & Co soutient que la qualité dégradée de ses produits, provenant de l'absence de réfrigération de la vitrine horizontale et de l'absence de climatisation 'décente' du local, a donné lieu à de nombreuses plaintes des clients. Elle chiffre son préjudice d'image à 15 000 € et, estimant que les trois quarts du préjudice sont dus aux fautes commises par la société G2V, demande que le jugement soit infirmé sur ce point et que la société G2V, seule, soit condamnée à lui régler la somme de 11 250 €.
Sur ce
C'est par des motifs pertinents qu'il est inutile de rappeler intégralement que les premiers juges ont caractérisé l'existence d'un préjudice d'image, en soulignant notamment que cette boutique neuve était censée être plus attractive et plus confortable pour la clientèle. Il convient d'ajouter que l'existence d'un commentaire négatif sur le site internet des Pages Jaunes ne saurait suffire à apporter la preuve de la responsabilité propre de la société Mona & Co dans l'existence de son préjudice d'image.
La cour considère que le préjudice a été exactement évalué par les premiers juges à la somme de 10 000 €. Elle note que la société Mona & Co limite sa demande contre la société G2V à la part de responsabilité de cette dernière. Compte tenu des manquements respectifs commis par les sociétés G2V (fourniture de la vitrine réfrigérée par Monsieur F. et défauts de la climatisation installée par la société VDMC, ce dont elle est responsable à l'égard de la société Mona & Co) et Panifour (fourniture du four et du tour défaillants), la cour estime que la société G2V est responsable à concurrence de 70 % de ce préjudice.
Ainsi, le jugement sera infirmé sur ce point et, statuant à nouveau, la cour condamnera la société G2V seule à régler à la société Mona & Co la somme de 7 000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de l'atteinte à son image.
2°Sur la demande en garantie formée par la société G2V contre la société Panifour
Dans le dispositif de ses conclusions, la société G2V demande l'infirmation du jugement en ce que sa demande en garantie dirigée contre la société Panifour a été rejetée, et la condamnation de celle-ci à la garantir.
Dès lors que la société G2V est condamnée dans la stricte mesure de sa part de responsabilité à l'égard de la société Mona & Co, elle ne saurait obtenir la garantie de la société Panifour. Le jugement sera en conséquence confirmé en ce que cette demande de garantie a été rejetée.
G/ Sur la disposition du jugement déboutant la société Mona & Co de sa demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral
*La société Mona & Co maintient cette demande en appel. Elle fait valoir qu'elle a subi pendant plusieurs années les désagréments liés aux dysfonctionnements divers objets du litige, que les conditions de travail de ses salariés au sous-sol ont été éprouvantes et ont affecté leur état de santé, que trois boulangers et une pâtissière ont démissionné entre mars 2012 et juin 2013, et que la procédure lui a demandé beaucoup d'énergie. Elle évalue ce préjudice à 20 000 € et, considérant que la société G2V en est responsable à hauteur des trois quarts, demande la condamnation de cette dernière à lui payer la somme de 15 000 €.
*La société G2V demande la confirmation du jugement sur ce point, faute de preuve de l'existence d'un tel préjudice. Dans le dispositif de ses conclusions, elle demande à titre subsidiaire que seule la société Panifour soit condamnée à ce titre et demande également la garantie de celle-ci.
Sur ce
L'expert a confirmé, en page 16 de ses réponses aux dires, que les conditions de travail, principalement dans le sous-sol, étaient très pénibles pour le personnel. La cour considère qu'il s'ensuit de ce constat l'existence d'un préjudice moral subi par la société, obligée de gérer des dysfonctionnements multiples et responsable à l'égard de ses salariés, de leurs conditions de travail.
Il convient de chiffrer ce préjudice, au vu des éléments de l'espèce, à 10 000 €. La cour ne saurait, ainsi que le demande la société G2V, condamner 'exclusivement' la société Panifour au paiement de cette somme. Au demeurant, la société Mona & Co ne forme pas de demande à ce titre contre la société Panifour, et limite sa demande contre la société G2V à la part de responsabilité de cette dernière. La cour retiendra, pour les motifs déjà précisés dans le cadre de l'atteinte à l'image, une proportion de 70 % à la charge de la société G2V et, infirmant le jugement sur ce point, condamnera la société G2V à régler à la société Mona & Co la somme de 7 000 € en réparation de son préjudice moral.
Dès lors que la société G2V est condamnée dans la stricte mesure de sa part de responsabilité à l'égard de la société Mona & Co, elle ne saurait obtenir la garantie de la société Panifour. Cette demande sera rejetée.
H/ Sur les autres demandes formées par la société G2V
Il n'y a pas lieu de statuer sur les demandes formées par la société G2V tendant à la confirmation de la condamnation de la société Mona & Co à lui régler la somme de 62 387,90 € à titre principal en règlement des factures impayées et de la disposition du jugement disant que la société VDMC garantira la société G2V de la condamnation relative aux travaux d'augmentation de la puissance de la climatisation, dès lors que ces dispositions du jugement ne sont critiquées par aucune des parties.
I/ Sur les frais irrépétibles et les dépens
*Les premiers juges ont condamné in solidum la société G2V et la société Panifour à payer à la société Mona & Co la somme de 37 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les dépens comprenant notamment les frais d'expertise s'élevant à 25 534 €.
*La société G2V demande l'infirmation de ces dispositions. Elle rappelle qu'une grande partie des demandes de la société Mona & Co était totalement injustifiée et que la multiplication des griefs a pesé sur le coût de l'expertise.
*La société Mona & Co demande également l'infirmation de ces dispositions. Renonçant à toute demande contre la société Panifour et estimant que la société G2V est responsable de ses préjudices à hauteur des trois quarts, elle demande la condamnation de la société G2V seule à lui régler, au titre des frais irrépétibles de première instance, la somme de 28 350 €, et au titre des frais d'expertise, celle de 19 150 €.
Sur ce
La disposition relative aux dépens de première instance sera confirmée, sauf en ce qu'elle inclut le coût de l'expertise. La charge finale de cette condamnation se répartira à hauteur de 70 % à la charge de la société G2V et de 30 % à la charge de la société Panifour.
Le coût de l'expertise sera mis à la charge de la société G2V seule à hauteur de 19 150 €, ainsi que le demande la société Mona & Co. Afin que la société G2V ne conserve à sa charge que 70 % de cette condamnation, comme le reste des dépens, il y a lieu de condamner la société Panifour à garantir la société G2V à hauteur de 5/75.
Par ailleurs, eu égard à l'importance du litige, la cour condamnera la société G2V seule à régler à la société Mona & Co, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 8 000 € en première instance. La demande en garantie formée à ce titre contre la société Panifour sera rejetée.
Les éléments de l'espèce conduisent la cour à mettre les dépens d'appel à la charge de la société G2V, mais à rejeter toutes les demandes formées en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement,
Dans les limites de l'appel,
Déclare irrecevables les demandes de la société G2V Works tendant à l'infirmation des dispositions du jugement mettant la société Star Lease hors de cause et condamnant la société G2V à régler à la société Star Lease la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
Infirme le jugement en ce que les premiers juges :
- ont condamné la société G2V Works à payer à la société Mona & Co la somme de 7 028 € pour la remise en état du système de climatisation et d'extraction d'air,
- ont condamné la société G2V Works à payer à la société Mona & Co la somme de 38 789 € à titre de dommages et intérêts pour le retard dans l'ouverture de la boulangerie-pâtisserie,
- ont condamné la société G2V Works à payer à la société Mona & Co la somme de 15 900 € à titre de dommages et intérêts pour perte de marchandises,
- ont condamné in solidum la société G2V Works et la société Panifour à payer à la société Mona & Co la somme de 10 000 € en réparation de son préjudice d'image,
- ont débouté la société Mona & Co de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral,
- ont condamné in solidum la société G2V Works et la société Panifour à payer à la société Mona & Co la somme de 37 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- ont condamné in solidum la société G2V Works et la société Panifour aux dépens comprenant ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 310,57 € dont 51,55 € de TVA et les frais d'expertise judiciaire pour 25 534 €,
Statuant à nouveau sur ces points,
Condamne la société G2V Works à payer à la société Mona & Co les sommes de :
- 5 428 € au titre de la remise en état de la climatisation au rez-de-chaussée,
- 25 000 € en réparation des pertes de produits résultant du vice caché affectant la vitrine horizontale réfrigérée,
- 7 000 € en réparation du préjudice d'atteinte à l'image de la société Mona & Co,
- 7 000 € en réparation du préjudice moral,
- 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- 19 150 € au titre du coût de l'expertise judiciaire,
Déboute la société Mona & Co de sa demande de dommages et intérêts au titre du système d'extraction d'air au sous-sol,
Déboute la société Mona & Co de sa demande de dommages et intérêts au titre du retard dans l'ouverture de la boulangerie-pâtisserie,
Déboute la société G2V Works de ses demandes en garantie formées contre la société Panifour concernant les condamnations relatives à la climatisation, au remboursement de la vitrine réfrigérée, au préjudice moral, aux frais irrépétibles,
Condamne la société Panifour à garantir la société G2V Works de la condamnation prononcée au titre du coût de l'expertise judiciaire à concurrence de 5/75,
Condamne in solidum la société G2V Works et la société Panifour aux dépens de première instance, comprenant ceux à recouvrer par le greffe liquidés à la somme de 310,57 € dont 51,55 € de TVA et ne comprenant pas les frais d'expertise judiciaire, et condamne la société Panifour à garantir la société G2V Works à concurrence de 30 % de cette condamnation,
Confirme le jugement pour le surplus,
Y ajoutant,
Rejette les demandes formées par la société Mona & Co, la société G2V Works et la société Panifour en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la société G2V Works aux dépens d'appel.