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Décisions

CA Lyon, 8e ch., 27 octobre 2020, n° 19/03023

LYON

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Piscines Passions (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Stella, conseiller faisant fonction de président

Conseillers :

Mme Masson-Bessou, Mme Faivre

TGI Lyon, du 28 mars 2019

28 mars 2019

Suivant bon de commande du 29 septembre 2006 signé lors de la foire de Saint-Etienne, Jean S. a acquis auprès de la S.A.R.L Piscines Passion un modèle d'exposition d'abri de piscine télescopique comprenant cinq éléments pour un montant global de 22 000 euros. Lors de la foire, il a pu manipuler sans problème ledit abri composé d'une structure en aluminium et constater qu'il n'y avait aucune difficulté à l'emboîtement et au repli des éléments.

Cet ensemble était destiné à pouvoir être manié par une seule personne.

Le fabricant, la S.A.R.L CSP (Confort Sécurité Piscine) a fourni une garantie de 10 ans. Le 11 avril 2006, CSP a remis une attestation de conformité aux exigences de sécurité de la norme NF P90-309 (mai 2004) pour les éléments de protection des piscines enterrées.

La pose de l'abri a été réalisée par un sous-traitant DG Distribution pour le démontage-transport et remontage et par un grutier Loire Manutention sous la responsabilité de Piscines Passion entre le 13 et le 20 octobre 2006. Les techniciens de CSP sont intervenus, à la demande de Piscines Passion, fin 2006 pour remédier aux difficultés d'ouverture de l'ouvrage. L'intervention n'ayant pas mis fin à l'intégralité des difficultés, Monsieur S. a refusé de signer le procès-verbal de réception.

Ni Piscines Passion, ni CSP n'ont fait de réserves quant à la prestation du grutier.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 avril 2007, adressé à la société Piscines Passion, Monsieur S. a listé différents désordres apparents (problèmes de fonctionnement, dommage esthétique et éléments manquants) détaillés puis sollicité un rendez-vous pour régler les problèmes de fonctionnement et d'équipements manquants.

N'ayant pas pu remédier à certains désordres techniques et esthétiques, Piscines Passion a offert un dédommagement de 1200 euros et offert un robot Polaris avec son surpresseur en contrepartie de l'abandon de toutes poursuites. Monsieur S. a accepté cet accord et signé un document de renonciation à toutes poursuites le 22 mai 2007. Piscines Passion a exécuté sa contrepartie conformément à cet accord.

Au printemps 2009, à la mise en service de sa piscine, il a remarqué la déformation de quelques éléments empêchant leur repliement, deux des structures s'étant déformées sur une amplitude de plusieurs centimètres.

Par courrier du 23 juin 2009, Monsieur S. a demandé au fabricant CSP de résoudre le problème.

Une expertise privée diligentée par l'assureur de Monsieur S. a été réalisée en présence de CSP mais en l'absence de Piscines Passion qui n'a jamais fait connaître sa position ni présenté d'observations.

L'expert a constaté que le profil des éléments de l'abri de piscine en arc de cercle est déformé. En dépliant l'élément n°2 sur le n°1, les traverses hautes s'entrechoquent. Il est nécessaire d'exercer une pression latérale sur l'élément n°2 pour le reformer. Il s'emboîte alors dans le premier élément. Le 5ème élément est difficile à manipuler et se déboîte des rails. Une fois les éléments tous emboîtés, des écarts variables d'une structure à l'autre sont visibles confirmant la déformation des éléments.

Le 4 octobre 2011, l'expert amiable Thierry J. a conclu que la manipulation des éléments au moyen d'un treuil par Piscines Passion lors de la livraison a déformé la structure de chaque élément. Ce désordre existe depuis l'installation mais s'aggrave avec le temps.

Une première indemnisation a eu lieu. Sur place il a été constaté que les panneaux en polycarbonate était d'une épaisseur inférieure à 2mm alors que le bon de commande stipulait une épaisseur de 4mm. Il y a lieu de les remplacer, le coût s'élevant entre 5 000 et 7 500 euros. Il y a également lieu de remplacer les structures des éléments déformés soit un montant de travaux estimé à 10 000 ou 15000 euros. La responsabilité de Piscines Passion semble engagée pour l'épaisseur des panneaux. CSP revendique une exonération de responsabilité du fait du tiers, les structures ayant été déformées par Piscines Passion. Le conseil de CSP a fait valoir que Piscines Passion peut engager sa responsabilité pour vice du consentement par manquement à l'obligation d'information et de renseignement. Aucun accord amiable n'a pu être obtenu.

A la suite de ce rapport et à défaut de règlement amiable du litige, Jean S. a, suivant assignation en référé du 22 novembre 2011, obtenu le 10 janvier 2012, la désignation par le juge des référés du tribunal de grande instance de Lyon de Christian D. en qualité d'expert judiciaire.

L'expert a déposé son rapport le 28 février 2014.

Monsieur D. a constaté que d'une manière générale seul l'élément n°2 perturbe le fonctionnement de l'ensemble de l'abri. Cette déformation n'existait pas à l'origine. Monsieur S. n'a pas évoqué cette déformation évidente dans son courrier du 29 avril 2007 à Piscines Passion. Les techniciens de CSP l'auraient remarquée en octobre 2006. Seul un voilage de structure était perceptible. Monsieur S. l'a évoquée pour la première fois dans son courrier du 23 juin 2009 à CSP soit trois ans après l'installation. Un simple réglage ne peut résoudre ce problème. La manutention par treuil des cinq éléments ensemble à l'origine n'était pas faite dans les règles de l'art et pouvait engendrer la déformation de tous les profils. Ces manipulations imputables à Loire Manutention sont sans doute à l'origine des difficultés de fonctionnement rencontrées par Monsieur S. dès la mise en service de l'abri mais ne justifient pas la déformation de l'élément n°2 qui est survenue trois ans après. A défaut de collaboration de CSP pour fournir la note de calcul justifiant le dimensionnement des profilés pour vérifier leur résistance, il a été fait appel à un bureau d'études en charpente métallique (BET de M.T.) pour savoir si cette structure pouvait résister aux conditions locales d'utilisation (effets de la neige, du vent). Il a été conclu à une non-conformité de la structure à une implantation en altitude en particulier dans la région de Larajasse et donc aux charges qu'elle est susceptible de devoir supporter. Une chute de neige stockée sur l'auvent 2,80m au-dessus de la structure aluminium s'ajoutant à une certaine épaisseur de neige stockée sur l'abri lui-même est la cause réelle de la déformation de l'élément n°2. Lors d'une réunion expertale, une congère est tombée sur l'élément n°2. L'abri de piscine fourni par Piscines Passion est impropre à sa destination. CSP a fait savoir que le coût des réparations serait supérieur au coût d'achat d'un matériel neuf et qu'il n'était pas certain de pouvoir remédier à la déformation. Elle a fourni un devis comprenant un geste commercial d'un montant de 22 000 euros TTC pour un abri de même type mais récent d'une valeur initiale de 32 000 euros. Compte tenu des difficultés à retrouver un abri conforme aux conditions climatiques, l'expert judiciaire a proposé, conformément au souhait de Monsieur S., le remboursement de son investissement outre le coût du démontage et de l'évacuation de l'abri soit 1500 euros. Le coût total de l'indemnisation peut être évalué 23 500 euros TTC. Une somme de 32 000 euros TTC correspond à la fourniture d'un abri de piscine mais celui-ci ne serait toujours pas conforme aux normes Neige et Vent à cette altitude. La responsabilité de Loire Manutention n'est pas retenue car la manutention simultanée des cinq éléments de l'abri n'est pas à l'origine de la déformation importante de la structure de l'abri. Les conclusions de Monsieur T. qui sont claires conduisent à retenir la responsabilité de Piscines Passion car l'abri n'est pas conforme à la norme NF P90-309 d'octobre 2007 qui renvoie aux règles AL 76 qui en font partie intégrante. La structure n'était pas adaptée aux conditions climatiques de la région de Larajasse. Piscines Passion aurait dû tenir compte de l'implantation géographique du projet et interroger en ce sens son fournisseur. Cet abri ne respecte pas les conditions minimum de la NF P 90-309, constat qui va à l'encontre du certificat délivré par CSP fabricant du produit. L'abri peut quand même fonctionner avec difficulté et avec l'aide de deux personnes pendant quelques saisons. A constater l'état du bassin vide, la piscine n'est pas utilisée en période hivernale voire en saison ainsi que l'a reconnu Monsieur S.. Il est proposé une somme de 300 euros par année d'utilisation à partir de la saison 2007. Le préjudice pourrait être estimé à la somme de 1800 euros pour les 6 années.

Par exploit en date du 10 décembre 2014, Monsieur S. a fait assigner devant le tribunal de grande instance de Lyon la S.A.R.L Piscines Passion en indemnisation de ses préjudices.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 7 octobre 2016, Monsieur S. a sollicité sur le fondement des articles 1134, 1147, 2224, 2052 et 2053 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, 515 et 648 du code de procédure civile, de :

-le déclarer recevable

-débouter la société Piscines Passion de ses demandes de nullité de l'assignation d'irrecevabilité et de prescription d'action,

-homologuer le rapport d'expertise judiciaire d'expert Christian D.,

-dire et juger que la société Piscines Passion a manqué à son obligation contractuelle d'information et de renseignement,

-condamner la société Piscines Passion à lui verser la somme de 33 500 € de dommages et intérêts à titre d'indemnisation de son préjudice matériel,

-la condamner à lui verser la somme de 2 700 € de dommages et intérêts à titre d'indemnisation de son trouble de jouissance, outre actualisation au jour de l'audience,

-la condamner à lui verser la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-outre les entiers dépens de l'instance qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire, distraits au profit de la SCP B. & M., Avocats, sur son affirmation de droit,

-ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

-et en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir, condamner la société Piscines Passion au paiement d'une indemnité équivalente au droit proportionnel mis à la charge du créancier par l'huissier instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2001.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 janvier 2017, la S.A.R.L Piscines Passion a demandé au tribunal, sur le fondement des articles 648 et 56 du code de procédure civile, 2044, 2052, 2224 et suivants du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, de :

-constater la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée le 10 décembre 2014,

-constater qu'une transaction est intervenue le 22 mai 2007,

-constater en conséquence l'irrecevabilité de l'action initiée devant le tribunal de grande instance de Lyon comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée,

-constater l'irrecevabilité des demandes pour cause de prescription,

Sur le fond,

-constater les incohérences et les inexactitudes du rapport d'expertise,

-constater que l'expert s'est contenté d'hypothèses par ailleurs écartées comme peu plausibles puis reprises comme étant les plus susceptibles d'expliquer le désordre,

-constater que le demandeur ne s'est pas expliqué sur la mise en place des filets à l'aplomb de l'élément numéro 2 déformé,

-constater que l'origine du désordre ne peut être établie avec certitude,

-le débouter de l'intégralité de ses demandes, 'ns et conclusions.

-le condamner à lui régler les sommes suivantes :

*2 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,

*4 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-Le condamner aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Amélie P. avocat sur son affirmation de droit.

Par jugement contradictoire en premier ressort du 28 mars 2019, le tribunal de grande instance de Lyon a :

-rejeté l'exception de nullité de l'assignation signifiée le 10 décembre 2014 à défaut de grief,

-rejeté les 'ns de non-recevoir,

-débouté Jean S. de sa demande d'indemnisation,

-débouté la S.A.R.L Piscines Passion de sa demande reconventionnelle en procédure abusive,

-condamné Jean S. aux dépens conformément à l'article 696 du code de procédure civile,

-admis les avocats qui en ont fait la demande et qui peuvent y prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

-condamné Jean S. à payer à la S.A.R.L Piscines Passion la somme de 2 800 euros au titre des frais non répétibles de l'instance,

-rejeté toutes les autres demandes plus amples ou contraires formées par les parties.

Sur la 'n de non-recevoir tirée de la transaction

Le tribunal a considéré que si les profils des cinq éléments étaient endommagés lors de l'installation de l'abri en octobre 2006 compliquant sa maniabilité, l'importante déformation du profil de l'élément 2 est survenue postérieurement, aggravant les difficultés de manœuvres sans pour autant empêcher totalement le repli ou le déploiement de la structure. Dès lors la transaction intervenue entre les parties le 22 mai 2007 ne pouvait porter sur ce point particulier affectant l'élément 2, de sorte qu'aucune autorité de la chose jugée ne peut être valablement invoquée concernant ce désordre précis.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action

Monsieur S. a recherché la responsabilité contractuelle de la Piscines Passion en raison d'un manquement à son devoir de conseil, de sorte que la prescription trentenaire a commencé à courir le jour de l'achat le 29 septembre 2006. Le délai n'était pas expiré lors de l'entrée en vigueur de la réforme, ni lors de l'introduction de l'instance en référé par exploit du 22 novembre 2011.

Sur les demandes indemnitaires principales formées par Monsieur S.

Le tribunal a considéré que l'expert ne présente pas de conclusion définitive sur l'origine du désordre, estimant qu'une chute de neige stockée sur l'auvent 2,80 mètres au-dessus de l'abri, ajoutée à l'épaisseur de neige déjà accumulée sur l'abri lui-même, est « sans doute la cause réelle de la déformation de l'élément n°2 », ajoutant que les photographies prises au cours de l'accédit du 13 février 2013 « donnent une indication de ce qui pourrait être la cause du désordre ». En outre il doit être relevé que l'expert judiciaire se fonde sur le rapport du BET T. qui s'est prononcé à partir d'une norme NF P90-309 d'octobre 2007 qui n'était pas en vigueur à la date de la vente de l'abri litigieux. Par ailleurs, la défenderesse déplore à juste titre que les circonstances du grutage aient été finalement écartées de l'analyse de la cause du désordre, dans la mesure où dans sa note expertale n°4 du 30 avril 2013 (page 2) Monsieur D. considérait que cette hypothèse ne peut être totalement éliminée même si l'hypothèse de la chute de neige est retenue. La chute de neige n'étant pas une cause certaine et exclusive de la déformation du profil de l'élément 2 de l'abri, il ne peut en être déduit une incompatibilité de cette structure aux conditions climatiques et à la configuration des lieux. Par suite, aucun manquement à l'obligation contractuelle de renseignement et d'information tiré de cette incompatibilité ne peut être valablement démontré.

Sur la demande reconventionnelle au titre de la résistance abusive

Il est constant que l'exercice d'une action en justice, de même que la défense à une telle action, constitue, en principe, un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équivalente au dol, ce qui fait défaut.

Il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire.

Appel a été interjeté par déclaration électronique le 30 avril 2019 par le conseil de Monsieur S. à l'encontre des dispositions du jugement l'ayant débouté de ses demandes, l'ayant condamné à des frais irrépétibles et aux dépens.

Suivant le dernier état de ses conclusions dites n°2 notifiées par voie électronique le 12 décembre 2019, Jean S. demande à la Cour de :

-réformer le jugement du Tribunal de Grande Instance de Lyon du 28 mars 2019 en ce qu'il l'a débouté de sa demande d'indemnisation et l'a condamné aux dépens et au paiement de la somme de 2 800 € à la société Piscines Passion le titre de l'article 700 du code de procédure civile,

-le confirmer en ce qu'il a rejeté l'exception de nullité de l'assignation et les fins de non-recevoir soulevées par la société Piscines Passion et l'a déboutée de sa demande reconventionnelle en procédure abusive,

Statuant de nouveau,

-homologuer le rapport d'expertise judiciaire déposé par Monsieur Christian D. le 28 février 2014,

-dire et juger que Piscines Passion a manqué à son obligation contractuelle de renseignement et d'information,

-dire et juger que la société intimée ne démontre pas avoir exécuté son obligation contractuelle de renseignement et d'information,

-la condamner à lui verser la somme de 33 500 € de dommages et intérêts à titre d'indemnisation de son préjudice matériel,

-la condamner à lui verser à la somme de 2 700 € de dommages et intérêts pour son trouble de jouissance, outre actualisation au jour de l'audience,

-la débouter de toutes ses demandes à son encontre

-la condamner à lui verser la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

-la condamner aux entiers dépens d'appel et de première instance qui comprendront les frais de l'expertise judiciaire, distraits au profit de la SCP B. & M., Avocats, sur son affirmation de droit,

-ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

-et en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir, la condamner au paiement d'une indemnité équivalente au droit proportionnel mis à la charge du créancier par l'huissier instrumentaire au titre de l'article 10 du décret 2001-212 du 8 mars 2001,

Sur la transaction, il y a lieu de la rescinder pour dol pour défaut d'information sur l'inadaptation de l'abri aux conditions climatiques de son lieu d'habitation. Il ne l'aurait pas acheté s'il avait su qu'il ne supporterait pas le climat. Il a été trompé par Piscines Passion. Le document litigieux appelé « « attestation » n'a été signé que par lui. En tout état de cause, cela ne concerne pas le même objet. L'accord était circonscrit aux litiges relatifs à l'exposition, le transport et l'installation de l'abri mais non son utilisation. Les désordres, objets de l'expertise judiciaire, sont apparus au printemps 2009 soit postérieurement. L'abri est inutilisable et nécessite deux personnes pour le manœuvrer. Le dédommagement correspond à 10% du prix de l'abri soit une somme « bien maigre » par rapport à l'ampleur des désordres ce qui démontre que l'objet de la transaction était autre. Il ne pouvait pas renoncer au droit à une indemnisation non encore né. N'ayant pas transigé sur les désordres objets de la cause, son action est recevable.

Ses demandes ne sont pas prescrites. Il n'a eu connaissance de l'inadaptation de son abri de piscine et par conséquent du manquement de Piscines Passion qu'à compter des opérations d'expertise judiciaire le 28 mars 2012. Il a acquis son abri de piscine avant la réforme de la prescription qui était auparavant de 30 ans et qui a été réduite à 5 ans. En application des dispositions transitoires de la loi nouvelle, la prescription trentenaire n'étant pas acquise au moment de l'entrée en vigueur de la loi, un délai de 5 ans a couru à compter de l'entrée en vigueur de la loi pour n'expirer qu'au 18 juin 2013. Or, l'action en référé a été engagée le 28 novembre 2011. Un nouveau délai de 5 ans a couru à la date de la signification de l'assignation. Ainsi, l'action au fond engagée le 10 décembre 2014 n'est pas prescrite.

Sur le fond, l'analyse des désordres grâce à l'aide du BET T. est accablante pour Piscines Passion. L'abri fourni était impropre à sa destination pour ne pas être adapté aux conditions climatiques de la région et aux charges qu'il était susceptible de supporter. La chute de neige est la cause des désordres. Le vendeur aurait dû tenir compte de l'implantation géographique du projet et interroger son fournisseur en ce sens. Selon le code de la consommation, le vendeur a l'obligation d'informer le client sur les caractéristiques essentielles du bien vendu ou du service rendu. Il a également le devoir de déconseiller. Il doit informer sur les conditions d'utilisation ou d'installation et les précautions d'emploi. Il doit émettre des réserves sur l'utilisation envisagée et réaliser des études approfondies. Il doit se renseigner sur les besoins de l'acheteur et l'informer fût-il accompagné de l'installateur lors de l'achat de l'adéquation du matériel proposé à l'utilisation prévue. Il doit prendre en compte les spécificités de la situation existante et la configuration des lieux. C'est sur le vendeur que pèse la charge de la preuve de l'exécution de son obligation. En l'espèce, la preuve par Piscines Passion fait défaut indépendamment de toute question de conformité du produit à la norme en vigueur. Il n'aurait pas acquis ce produit s'il avait su qu'il était inadapté au climat de son lieu d'habitation et qu'il ne supporterait pas le poids de la neige. Malgré la conformité du produit à la norme NF, la société venderesse reste à l'égard de l'acheteur débitrice d'une obligation d'information qui lui imposait de déconseiller l'acquisition de cet abri. Elle aurait dû à minima attirer son attention sur les risques et l'informer quant aux précautions à prendre pour l'utilisation de l'abri. Lors de l'installation, elle a pu constater la présence de l'appentis. Cela n'a pas été fait. Elle a commis une faute. Elle doit l'indemniser de l'intégralité de son préjudice.

L'abri est impossible à réparer. Il est préconisé son remplacement pour un montant total de 23 500 euros. Mais le devis de CSP est une offre commerciale qui ne contient pas le prix TTC mais HT. Le tarif minimum est de 32 000 euros. Son dédommagement ne peut être inférieur à 33 500 euros (abri + démolition + évacuation) montant minimum pour réparer intégralement le préjudice et pourvoir au remplacement de l'abri. En outre, son préjudice de jouissance actualisé est de 2 700 euros pour les 9 années écoulées outre actualisation le jour de l'audience.

Suivant le dernier état de ses conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 17 février 2020, la S.A.R.L Piscines Passion demande à la Cour de :

-dire et juger l'appel de Monsieur S. recevable mais non fondé,

-réformer le jugement au visa des articles 2044 et 2052 du Code Civil et constater qu'une transaction a été conclue le 22 mai 2007,

-constater en conséquence l'irrecevabilité de l'action de Jean S. comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée.

Subsidiairement,

-réformer le jugement au visa des articles 2224 et suivants du Code Civil et constater l'irrecevabilité des demandes de Monsieur S., ses demandes étant prescrites.

A titre infiniment subsidiaire et sur le fond,

-confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur S. de ses entières demandes,

-le débouter de l'intégralité de ses demandes fins et conclusions,

-le condamner à lui régler les sommes suivantes :

* 5 000 euros de dommages et intérêts pour résistance abusive,

* 6 000 euros en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile en sus des entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Géraldine V., Avocat sur son affirmation de droit.

Piscines Passion fait observer que la lettre de 2009 à CSP montre que Monsieur S. était conscient de l'existence et des effets de la transaction à l'égard du distributeur. Son action se heurte à l'autorité de la chose jugée. Les problèmes techniques de l'installation sont les mêmes que ceux objets de la transaction suivant laquelle il a accepté un dédommagement en renonçant à toute action. Au 22 mai 2007, Monsieur S. connaissait déjà les difficultés de l'abri traitées en expertise. Cela ressort de sa lettre recommandée avec accusé de réception du 29 avril 2007 qui pointe l'infrastructure vrillée lors du portage et le manque de manœuvrabilité de la structure dû aux embrases tordues. C'est à tort que le jugement a retenu que l'importante déformation du profil de l'élément 2 était survenue postérieurement aggravant les difficultés de manœuvres. L'expertise amiable a précisé que le désordre existait à l'origine et s'aggravait légèrement. Dans son assignation en référé, il a indiqué que dès la livraison, les problèmes sont apparus, l'abri ne fonctionnant pas normalement. De même lors de l'accédit n°1, l'expert judiciaire qui a rapporté les propos de Monsieur S. note que les problèmes de maniabilité sont signalés dès la mise en service et que le technicien de CSP le 26 octobre 2006 a effectué plusieurs réglages et constaté un voilage de la structure en aluminium suite à la manutention. Ne voyant pas d'amélioration, il a refusé de signer le procès-verbal de réception. Cette déformation était connue dès l'origine même si elle s'est aggravée. Dans le dire n°1 du conseil de l'appelant, il est rappelé que l'intégralité des éléments est depuis l'origine déformée. Monsieur S. joue sur les mots en évoquant des désordres liés à l'utilisation de l'abri. Or, les problèmes techniques concernent à l'évidence la déformation de l'abri. L'expert judiciaire dans son accédit n°3 a indiqué que si la déformation est apparue dès octobre 2006, l'abri n'avait pas encore subi une chute de neige. Cette transaction comporte des concessions réciproques. Le dédommagement représentait 10% du prix de vente de l'abri. Elle refuse d'être tenue responsable du temps mis par Monsieur S. pour agir. Il a assigné au fond 10 mois après le dépôt du rapport d'expertise sans évoquer la transaction qui avait pourtant été soumise au juge des référés. Il n'a pas non plus répondu à la sommation de communiquer du 11 octobre 2019. Or, cette sommation de communiquer est indispensable si Monsieur S. soutient que les problèmes sont apparus au printemps 2009 car il a fait poser des filets sur la partie haute de sa grange surplombant en partie l'abri de piscine notamment l'élément 2 en 2007-2008.

Monsieur S. se trompe lorsqu'il prétend qu'il y a eu dol au moment de la transaction pour obtenir sa rescision alors qu'il n'argumente que les manœuvres dolosives au moment de la vente.

Sur la prescription, Piscines Passion maintient que cinq ans se sont écoulés depuis le contrat au moment de l'assignation en référé. Il ne doit pas être tenu compte de la prétendue date de découverte des désordres le 28 mars 2012. Si les désordres sont apparus au printemps 2009, l'assignation au fond le 10 décembre 2014 a été faite postérieurement au délai de cinq ans.

Sur le fond, elle met de nouveau en avant les incohérences et inexactitudes du rapport d'expertise de Monsieur D. qui se contente d'hypothèses par ailleurs écartées comme peu plausibles puis reprises comme étant les plus susceptibles d'expliquer le désordre : la chute de neige (accédit 3 en page 4/5). Or, les relevés météo évoqués dans une note du 15 avril 2013 n'ont pas été exploités par l'expert. L'hypothèse liée au grutage simultané des éléments de l'abri par-dessus des constructions, qui était privilégiée, a été écartée sans convaincre car elle paraissait être l'hypothèse la plus probable à l'origine. Par ailleurs, Monsieur S. ne s'est pas expliqué sur la mise en place des filets à l'aplomb de l'élément n°2 déformé, la toiture abritant en partie l'abri de piscine sur 4,40 m. N'ont pas été investiguées les hypothèses d'une déformation de l'élément n°2 lors de la mise en place d'une échelle ou d'un échafaudage permettant l'accès à la charpente (soit à partir du fond de la piscine, soit sur l'élément n°2, le faîtage se trouvant à plus de 6 mètres au-dessus). Lors de la réunion du 6 septembre 2013, ces travaux ont été évoqués par Monsieur S. qui fait état de travaux faits par un professionnel. L'expert judiciaire n'a fait aucune observation à ce sujet même en réponse à la lettre de 12 septembre 2013 adressée à toutes les parties. Contrairement à ce qu'a indiqué l'expert privé, il n'y a pas eu de problème d'épaisseur anormale des panneaux ainsi que l'ont déterminé l'expert judiciaire et le BET.

Ainsi, l'origine du désordre ne peut être établie avec certitude. Enfin le grief tiré du non-respect d'une norme qui est postérieure à la vente et la pose de l'abri de piscine ne peut fonder une responsabilité car elle n'était pas une obligation en vigueur. Par ailleurs, le professionnel n'a pas su que l'abri de piscine serait en partie protégé par une telle toiture susceptible d'occasionner une surcharge de neige. Il ne saurait être exigé d'un professionnel qu'il connaisse parfaitement la maison de ses clients. Il appartenait à l'acheteur de fournir ces informations. L'expert est parti du principe que la congère de neige a entraîné la déformation de l'élément n°2 sans démontrer pourquoi il retient cette hypothèse en écartant les autres. Une congère se forme en tout état de cause de manière aléatoire compte tenu des variations de relief, de vitesse du vent, de la température de l'air et de celle de la neige. Ces éléments sont impossibles à anticiper. L'expert n'a même pas vérifié si la chute de la congère lors de la réunion d'expertise avait conduit à une déformation plus importante de l'élément n°2. Il n'y a aucune cause exclusive ni certaine à la déformation de l'élément n°2.

Elle rappelle que cet abri de piscine comportait une attestation de conformité du constructeur.

Les normes de référence du BET T. ne concernent pas les abris de piscine. Elle fait valoir que l'abri de piscine était conforme à la norme applicable, il n'y a pas lieu de tenir compte du lieu précis de situation de l'abri de piscine.

Sur l'indemnisation du préjudice, le raisonnement de Monsieur S. est aberrant car il entend persister dans l'idée d'installer un nouvel abri qui ne sera pas adapté au climat.

Saisi de conclusions d'incident par la S.A.R.L Piscines Passion le 17 février 2020 pour enjoindre l'appelant de communiquer, sous astreinte, les justificatifs de travaux ayant conduit à la mise en place de filets sur l'appentis en aplomb exact de l'élément n°2 de l'abri de piscine qui est déformé et a fait l'objet d'une expertise judiciaire, le conseiller de la mise en état a, par ordonnance du 17 juin 2020, débouté l'intimée de sa demande au motif que l'existence de ces pièces datant de 2006-2008 n'est pas établie et que les parties pourront tirer toutes conséquences de leur existence comme de leur absence sachant que la présence de ces filets n'est pas contestée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 14 septembre 2020 et les plaidoiries ont été fixées au 23 septembre 2020 à 9 heures.

A l'audience du 23 septembre 2020, les conseils des parties ont déposé leurs dossiers respectifs.

Puis, l'affaire a été mise en délibéré au 27 octobre 2020.

MOTIFS

A titre liminaire, la Cour rappelle que les demandes des parties tendant à voir la Cour « constater » ou « dire et juger » ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31 et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Par ailleurs, la Cour constate que Piscines Passion n'a pas repris son exception de nullité de l'assignation de Monsieur S.. Dès lors, la Cour n'a pas à répondre à la demande sans objet de Monsieur S. de confirmer le rejet de l'exception de nullité de l'assignation.

Sur la recevabilité de l'action en justice de Monsieur S. et la portée de la transaction litigieuse

En application de l'article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend notamment à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut du droit d'agir.

Selon l'article 2044 du code civil, la transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née ou préviennent une contestation à naître. Ce contrat doit être écrit. Ce contrat reste soumis aux conditions générales de validité des contrats.

L'article 2052 du code civil dispose que la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite entre les parties d'une action en justice ayant le même objet.

En l'espèce, le document litigieux intitulé ATTESTATION signé le 22 mai 2007 par Jean S. exclusivement, a été rédigé comme suit « je... certifie sur l'honneur à ce jour accepter l'installation de mon abri de piscine. Connaissant plusieurs problèmes techniques et esthétique suite à l'exposition, le transport et l'installation, je reçois et accepte à ce jour à titre de dédommagement la somme 1200 euros par chèque et un robot polaris et son surpresseur pour une valeur totale de 2200 euros. Par conséquent, je certifie ne jamais engager de poursuite envers la société Piscines Passion qui m'a vendu cet abri de piscine ».

Il importe également que la transaction n'ait pas été obtenue par dol et qu'elle comporte des concessions réciproques et équilibrées représentant pour chaque partie un sacrifice réel pour faire obstacle à l'introduction d'une action en justice ou à la poursuite de ladite action déjà engagée entre les parties.

Si l'une de ces conditions fait défaut, il ne saurait y avoir une transaction valable et de nature à ôter tout droit d'agir.

Il appartient à Jean S. qui conteste toute valeur au document litigieux de démontrer qu'il ne saurait être qualifié de transaction.

En premier lieu, Monsieur S. ne démontre aucune manœuvre dolosive de la part de Piscines Passion pour l'obtention de son attestation puisqu'il ne saurait être tiré de l'existence de prétendues manœuvres dolosives au moment de la vente de l'abri de piscine, objet du présent litige, la preuve de manœuvres dolosives au moment de la conclusion de leur accord du 22 mai 2007 soit plus de six mois plus tard.

En revanche, ce document qui n'a été signé que de la part de Jean S. doit s'interpréter strictement compte tenu de l'importance des conséquences juridiques qui en découlent.

Selon sa formulation, Monsieur S. a expressément circonscrit l'abandon de ses droits d'action à l'encontre de Piscines Passion aux litiges concernant l'exposition, le transport et l'installation de l'abri. Les litiges relatifs aux dommages relatifs à l'utilisation de l'abri de piscine sont donc exclus de l'engagement contractuel. Jean S. démontre suffisamment que la transaction et l'action en justice ne concernent pas le même objet. Il appartenait à la société Piscines Passion, au 22 mai 2007, de faire préciser dans ce document que la transaction concernait également l'utilisation de l'ouvrage.

En tout état de cause, et contrairement à ce que soutient Piscines Passion, il ressort des constats de l'expert judiciaire, de même que de l'expert amiable mais également de la comparaison des courriers de Monsieur S. en avril 2007 et en juin 2009 que les désordres tenant à la déformation de l'abri et à son défaut de maniabilité connus au moment de l'attestation signée le 22 mai 2007 concernaient un manque de manœuvrabilité de la structure due aux embases tordues, soit la partie basse de la structure alors qu'en 2009 les difficultés de déploiement et de repli de l'ouvrage étaient dues à un désordre relatif à la partie haute des éléments, les traverses hautes s'entrechoquant.

Les formules utilisées par Jean S. et son conseil pour décrire des difficultés de manœuvrabilité récurrentes depuis l'origine sont sans influence sur les constats concrets des experts privé et judiciaire en 2011 puis 2012 quant aux déformations en partie haute de l'abri de piscine responsables d'une grande difficulté de manœuvrabilité différente des premières causes de défauts de manœuvrabilité en 2006.

En revanche, l'interprétation de l'expert privé selon laquelle il s'agirait d'une aggravation de la difficulté d'origine ne sera pas retenue dans la mesure où il est parti du postulat que la déformation a été due à la manipulation des éléments par treuil au moment de l'installation alors que cette hypothèse a été invalidée durant l'expertise judiciaire, cette déformation des parties hautes qui n'existait pas à l'origine, qui n'a fait l'objet d'aucune réserve par la fabricant au moment de son intervention en octobre 2006 et qui est survenue trois ans après l'installation étant nécessairement sans lien avec les désordres d'origine.

La Cour constate d'ailleurs que l'expert privé s'est également trompé sur un autre point important en reprochant une faute à Piscines Passion quant à l'épaisseur des panneaux livrés qui ne seraient pas conformes alors qu'après vérification durant l'expertise judiciaire, les panneaux étaient en réalité de la bonne épaisseur. Son rapport est donc à relativiser.

Dans ces conditions, la transaction du 22 mai 2007, qui ne couvre pas le présent litige, ne saurait être un obstacle à la présente procédure judiciaire. La Cour rejette la fin de non-recevoir formée par Piscines Passion tirée de l'attestation du 22 mai 2007 et confirme le jugement déféré sur ce point.

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription des demandes de Monsieur S.

Avant la loi du 17 juin 2008 ayant porté réforme de la prescription, la prescription des actions en responsabilité contractuelle prévue à l'article 2262 du Code Civil était de 30 ans. Le délai a été ramené à 5 ans par l'article 23 de ladite loi. En vertu de l'article 26 II, cette règle s'applique aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi soit le 19 juin 2008 sans que la durée totale puisse excéder la durée antérieure. Avant cette réforme, le délai de 30 ans accordé expirait, 30 ans après la signature du contrat, le manquement reproché à Piscines Passion étant relatif à son obligation d'information et de conseil de professionnel soit le 29 septembre 2036.

En application de réforme de 2008, le délai de 5 ans à compter de l'entrée en vigueur de la loi expirait le 19 juin 2013. Or, Monsieur S. a bien assigné la S.A.R.L Piscines Passion en référé le 22 novembre 2011 en interrompant le délai de cinq ans ce qui a reporté d'autant le délai de prescription au 22 novembre 2016. Puis, il l'a assignée au fond par acte du 10 décembre 2014 soit bien avant l'expiration des délais de prescription.

C'est donc par un raisonnement erroné que la société Piscines Passion a invoqué la prescription quinquennale sans tenir compte, au cas d'espèce, des effets de la réforme de 2008.

La Cour confirme le jugement déféré sur ce point en ce qu'il a rejeté l'exception d'irrecevabilité formée par Piscines Passion au titre de la prescription.

Sur la responsabilité contractuelle de Piscines Passion

Jean S. prétend que la responsabilité contractuelle de Piscines Passion est engagée en ce qu'elle a commis une faute en ayant manqué à son obligation précontractuelle d'information et de conseil ayant à son sens généré un important préjudice constitué par la dégradation, par l'effet de la neige, de son abri de piscine qui était dès l'origine inadapté à l'altitude de son domicile et aux conditions climatiques de sa région et par un trouble de jouissance durant 9 années. Il a notamment réclamé une indemnisation correspondant au remplacement de son abri de piscine outre les frais de démontage-évacuation de l'abri de piscine litigieux.

Il lui appartient dès lors de démontrer une faute, un préjudice et un lien de causalité entre la faute et le préjudice.

Sur les manquements de Piscines Passion à son obligation précontractuelle d'information et de conseil

Jean S. reproche un manquement précontractuel par le professionnel à son obligation contractuelle de renseignement et d'information sur le fondement des articles 1134, 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 en ce que la société Piscines Passion, lorsqu'il s'apprêtait à acquérir l'abri de piscine, n'a pas tenu compte de la configuration des lieux et de leurs contraintes climatiques, indépendamment de la norme en vigueur, pour déconseiller cette acquisition.

Il s'appuie sur les conclusions de l'expert judiciaire qui a indiqué qu'une chute de neige stockée sur l'auvent 2,80 mètres au-dessus de l'abri, ajoutée à l'épaisseur de neige déjà accumulée sur l'abri lui-même, est « sans doute la cause réelle de la déformation de l'élément n°2 ». Il en déduit que la S.A.R.L Piscines Passion aurait dû tenir compte de l'implantation géographique du projet et interroger son fournisseur et met en avant que la charge de la preuve que l'obligation a été remplie pèse sur le professionnel.

La S.A.R.L Piscines Passion a fait remarquer que la norme à partir de laquelle l'incompatibilité de l'abri de piscine aux conditions climatiques a été analysée est postérieure à la date de son installation de sorte qu'elle est inapplicable. Elle a affirmé que ledit abri était parfaitement conforme à la norme en vigueur en 2006 ainsi que cela ressort de l'attestation du constructeur. Elle a contesté l'obligation qui lui serait faite de se rendre chez tous les clients pour vérifier l'absence de difficulté potentielle autour de l'abri de piscine, a mis en avant les hésitations de l'expert quant aux causes des désordres car dans le cadre de son rapport définitif, il ne retient plus comme cause du désordre les opérations de grutage rendues nécessaires pour l'installation de l'abri, et privilégié la chute de neige après avoir initialement considéré que cette hypothèse était discutable. Elle a également observé que des filets ont été installés par Monsieur S. sous la toiture de la grange qui surplombe en partie l'abri de piscine postérieurement à l'installation de l'abri de piscine de telle sorte qu'il n'est pas exclu que la déformation du profil n°2 soit intervenue à cette occasion sans que l'expert ait examiné cette hypothèse ni pris le soin de répondre à son dire sur ce point.

La Cour constate que les premiers juges ont considéré que l'expertise ne démontrait pas que la cause des désordres affectant l'abri de piscine était la chute de neige de manière certaine et exclusive. En conséquence, ils ont déduit qu'il n'était pas établi d'incompatibilité de la structure aux conditions climatiques et à la configuration des lieux d'autant que le rapport du BET T. s'était prononcé en fonction d'une norme postérieure à la vente. Ils en ont conclu qu'aucun manquement à l'obligation de renseignement et d'information tiré de cette incompatibilité ne peut être valablement démontré.

Or, ce raisonnement a inversé la charge de la preuve qui doit peser non sur le consommateur mais sur le vendeur lequel doit démontrer qu'il s'est acquitté de l'obligation de conseil lui imposant de se renseigner sur les besoins de l'acheteur. Le tribunal a tiré de l'absence de certitude de la dégradation de l'abri de piscine par la neige, l'absence de faute du vendeur alors que l'obligation du vendeur d'information et de conseil doit être remplie quelle que soit la survenue ou non d'un risque et d'un dommage.

Selon l'article L. 111-1 ancien du code de la consommation dans sa version applicable au jour de la vente litigieuse, tout professionnel vendeur de biens ou prestataire de services doit avant la conclusion du contrat mettre le consommateur en mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien ou du service. En cas de litige, la charge de la preuve que l'obligation d'informations précontractuelles et de conseils a été remplie incombe au vendeur.

Le vendeur professionnel a l'obligation de démontrer qu'il s'est acquitté de l'obligation de conseil lui imposant de se renseigner sur les besoins de l'acheteur afin d'être en mesure de l'informer notamment quant à l'adéquation de la chose proposée à l'utilisation prévue. Il ne peut se retrancher derrière le fait que l'acheteur ne lui aurait pas donné les informations quant à son projet et sa localisation s'il ne démontre pas avoir rempli son obligation de se renseigner.

En l'espèce, quand bien même l'abri de piscine litigieux bénéficiait d'une attestation de conformité du constructeur à la norme en vigueur au moment de la vente, soit la norme NF P90-309 de mai 2004 applicable aux éléments de protection pour piscines enterrées non closes privatives à usage individuel ou collectif, il ressort de cette norme, produite par Piscines Passion, qu'elle imposait déjà que la structure doive résister au minimum à une charge de neige de 450 Pa (45 daN/m²). Par ailleurs, contrairement à ce qu'a soutenu Piscines Passion, cet abri de piscine dont la structure a été réalisée en aluminium se devait aussi, comme l'a indiqué le bureau d'études T., de respecter les règles AL 76 ce qui ressort de la lecture de la pièce 21 de l'intimée.

En dépit du fait que le BET T. a visé la norme NF P-90-309 dans sa version de 2007, ses calculs demeurent valables car la norme de 2007 n'a pas modifié le fait que les structures devaient résister au minimum à une charge de neige de 450 pa (45 daN/m²). Une telle charge est reproduite sous une température de -5°C. Or, à Larajasse, à une altitude de 690 m, la pression de base pour la neige normale est de 0,45 kPa, pour monter à une pression de 0,75 kPa pour une neige extrême voire 0,80 pour une pression de neige accidentelle. Même dans le cas de la pression de neige la plus basse préconisée par la norme NF, qui était la même en 2004 qu'en 2007, la structure en aluminium n'était pas adaptée aux charges qu'elle devait supporter à 690 mètres d'altitude entraînant des déformations des arceaux.

Dès lors, Piscines Passion invoque vainement le fait que l'abri de piscine avait un certificat de conformité à la norme NF P-90-309 laquelle prévoyait qu'il devait avoir une résistance minimale à la neige qui n'était que dans les moyennes basses de la pression de la neige qui tombe habituellement sur Larajasse. Elle invoque aussi vainement n'avoir pas su dans quelles conditions l'abri de piscine serait utilisé dès lors qu'elle avait connaissance de l'adresse de son acquéreur et qu'elle a organisé l'acheminement de l'abri de piscine de la foire à la résidence de l'acquéreur. Le fait que l'abri de piscine ait été situé en partie sous une grange est indifférent puisque l'abri de piscine était en tout état de cause impropre, quant à sa résistance, à sa destination pour les conditions climatiques de la région même si le fait qu'il puisse, au cas d'espèce, être exposé en partie à des chutes de congères d'un toit en sus de la charge d'un important enneigement, ait aggravé le risque de désordres.

Or, il n'est ni démontré ni même allégué par Piscines Passion qu'elle a pris en compte le projet d'installation de ce système de protection dans une région à fort enneigement pour déconseiller l'acquisition, ni même qu'elle a informé son candidat acquéreur des risques encourus en cas de chute de neige, ni même qu'elle lui a remis une notice d'informations sur les conseils d'utilisation à suivre en cas de chute de neige. Il n'est pas non plus allégué qu'elle a pris soin de se renseigner auprès de son fournisseur CSP sur l'adéquation de cet abri de piscine aux besoins de l'acheteur.

En tout état de cause, il ressort même de l'expertise judiciaire de Monsieur D. qu'aucun abri de piscine n'est adapté aux conditions climatiques de la région de Monsieur S. si bien qu'il doit envisager un autre système de protection et de sécurité de sa piscine, sauf à opter en toute connaissance de cause pour un abri de piscine à ses risques et périls.

Ainsi, quelle que soit la cause des déformations en hauteur de l'élément n°2 de l'abri de piscine, la Cour retient comme établi le manquement par Piscines Passion à son obligation précontractuelle d'informations et de conseil et infirme le jugement déféré sur ce point.

Sur le préjudice allégué

Selon l'article 1147 du code civil applicable à l'époque de la vente, le débiteur est condamné s'il y a lieu au paiement de dommages et intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation.

Monsieur S. sollicite le remplacement de son abri de piscine dans le dernier état de ses conclusions puisqu'il sollicite le prix d'un abri de piscine neuf outre les frais de démontage-évacuation de son abri de piscine défectueux. Il sollicite également l'indemnisation de son préjudice de jouissance. Il réclame dès lors l'indemnisation d'un préjudice matériel et de jouissance entièrement constitué alors même que la faute du vendeur professionnel n'est constituée que d'un manquement à son obligation précontractuelle de conseil et d'information. Alors même qu'il a prétendu devant l'expert qu'il ne souhaitait pas remplacer son abri de piscine, il sollicite néanmoins une indemnisation pour le remplacement de son abri de piscine défectueux par un neuf.

Or, le préjudice résultant d'un manquement à l'obligation de conseil et d'information ne saurait a priori équivaloir au préjudice matériel et de jouissance résultant de l'éventuelle réalisation du risque. Il pourrait n'être qu'une perte de chance de ne pas contracter, moyen que la Cour soulève d'office, aucune partie ne l'ayant invoqué alors même que Monsieur S. a fait valoir que s'il avait disposé de l'information, il n'aurait pas acquis cet abri de piscine qui est impropre à sa destination.

En application de l'article 16 du code de procédure civile, la Cour invite les parties à présenter leurs observations sur la nature du préjudice subi par Jean S. et son lien de causalité avec la faute de Piscines Passion qui a manqué à son obligation précontractuelle de conseil et d'informations et notamment sur l'existence d'une simple perte de chance qui ouvre droit à réparation.

Si une perte de chance même minime est indemnisable, conformément au droit commun, il appartient au demandeur d'apporter la preuve de l'existence de son préjudice. La réparation de la perte de chance doit être mesurée à la chance perdue et ne peut être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée.

Avant dire droit sur la demande de réparation des préjudices invoqués par Monsieur S., la Cour invite les parties à présenter leurs observations sur l'existence d'un préjudice entièrement constitué ou d'une simple perte de chance avant le 22 janvier 2021 et sur le lien de causalité existant entre la faute et le préjudice.

Renvoie la cause et les parties sur ce point à l'audience du 27 janvier 2021 à 9 heures

La Cour sursoit à statuer sur les autres demandes des parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare sans objet la demande de Monsieur S. tendant à voir confirmer le rejet de l'exception de nullité de l'assignation que la S.A.R.L Piscines Passion n'a pas formulée devant la Cour,

Confirme le jugement déféré sur le rejet des deux fins de non-recevoir présentée par la S.A.R.L Piscines Passion et la recevabilité de l'action judiciaire de Monsieur S.,

Infirme le jugement déféré sur la faute imputée à la société Piscines Passion,

Statuant à nouveau sur ce point,

Déclare que la S.A.R.L Piscines Passion a commis un manquement à son obligation précontractuelle d'information et de conseil à l'égard de Jean S.,

Avant dire droit sur la demande de réparation des préjudices invoqués par Monsieur S., invite les parties à présenter leurs observations sur l'existence d'un préjudice entièrement constitué ou d'une simple perte de chance avant le 22 janvier 2021 et sur le lien de causalité existant entre la faute et le préjudice,

Renvoie la cause et les parties sur ce point à l'audience du 27 janvier 2021 à 9 heures,

Sursoit à statuer sur la demande d'indemnisation de Jean S., sur l'appel incident de la société Piscines Passion au titre de la résistance abusive, sur les demandes des parties relatives à l'article 700 du code de procédure civile, aux dépens et autres demandes accessoires.