DĂ©cisions

Cass. com., 4 novembre 2020, n° 18-16.932

COUR DE CASSATION

ArrĂȘt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Sports X (SARL)

DĂ©fendeur :

Desgardin

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

PrĂ©sident :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Poillot-Peruzzetto

Avocat gĂ©nĂ©ral :

M. Debacq

Avocats :

SCP Sevaux et Mathonnet, SCP Bouzidi et Bouhanna

Faits et procĂ©dure  

1. Selon l'arrĂȘt attaquĂ© (ChambĂ©ry, 20 mars 2018), le 1er janvier 2013, la sociĂ©tĂ© Sports X, distributeur français de matĂ©riel nautique, a conclu un contrat d'agence commerciale avec M. Desgardin.

2. La sociĂ©tĂ© Sports X l'ayant, le 15 septembre 2014, informĂ© qu'elle souhaitait travailler avec la sociĂ©tĂ© Freeride et ne pouvait ainsi honorer la commande qu'il avait obtenue de la concurrente de cette derniĂšre, la sociĂ©tĂ© South Wake Park, M. Desgardin a, le mĂȘme jour, demandĂ© le rachat de sa carte et, en rĂ©ponse Ă  la demande de la sociĂ©tĂ© Sport X de restitution du matĂ©riel mis Ă  sa disposition, l'a informĂ©e, par une lettre du 18 septembre suivant, de sa dĂ©mission.

3. Revenant sur les termes de cette lettre en affirmant qu'elle ne signifiait pas une rupture de son mandat, M. Desgardin a assigné la société Sports X en paiement, notamment, d'une indemnité compensatrice du préjudice subi en raison de la rupture de contrat.

4. En défense, la société Sports X a demandé au tribunal de constater que la rupture était intervenue à l'initiative de M. Desgardin ou, à défaut, à la suite de sa faute lourde, et de rejeter ses demandes.

Examen du moyen  

Sur le moyen, pris en sa premiĂšre branche  

Enoncé du moyen

5. La sociĂ©tĂ© Sports X fait grief Ă  l'arrĂȘt de dire que la rupture du contrat d'agence a pour origine un manquement de sa part et qu'elle doit rĂ©parer le prĂ©judice subi par M. Desgardin du fait de la rupture du contrat, de la condamner Ă  payer Ă  celui-ci certaine somme Ă  titre d'indemnitĂ© compensatrice et de rejeter sa demande reconventionnelle de dommages-intĂ©rĂȘts, alors « que M. Desgardin, demandeur, se bornait Ă  soutenir, en ses Ă©critures d'appel, que la cessation de son activitĂ© Ă©tait intervenue Ă  l'initiative de la sociĂ©tĂ© Sports X, sans prĂ©tendre ni offrir d'apporter la preuve que, dans l'hypothĂšse oĂč il serait jugĂ© Ă  l'inverse que cette rupture lui serait imputable, elle serait justifiĂ©e par des actes imputables Ă  la sociĂ©tĂ© Sports X ; que la cour d'appel ne pouvait, de son propre chef, aprĂšs avoir Ă©cartĂ© le moyen soulevĂ© par M. Desgardin, prĂ©tendre relever que la dĂ©mission de celui-ci serait justifiĂ©e par la dĂ©cision commerciale de la sociĂ©tĂ© Sports X de refuser de conclure un contrat avec la sociĂ©tĂ© Freeride, sans mĂ©connaĂźtre par lĂ  mĂȘme les termes du litige opposant les parties et violer l'article 4 du code de procĂ©dure civile. »

RĂ©ponse de la Cour  

Vu l'article 4 du code procédure civile :

6. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

7. Pour dire que la rupture du contrat d'agence de M. Desgardin a pour origine un manquement de la sociĂ©tĂ© Sports X et que cette derniĂšre doit rĂ©parer le prĂ©judice subi par M. Desgardin du fait de la rupture du contrat puis la condamner Ă  lui payer une certaine somme au titre de l'indemnitĂ© compensatrice, l'arrĂȘt, aprĂšs avoir relevĂ© que, M. Desgardin a mis fin Ă  son mandat, en raison du refus opposĂ© par le mandant d'honorer la commande d'un nouveau client qu'il avait trouvĂ© et qui n'a pas Ă©tĂ© agrĂ©Ă©, Ă©nonce que, s'il n'est nullement interdit Ă  une sociĂ©tĂ© mandante, dans le cadre de sa politique commerciale, de ne pas donner suite Ă  des commandes obtenues par son agent, ce dernier a droit Ă  ĂȘtre indemnisĂ© lorsque, comme en l'occurrence, il s'ensuit une perte de ses revenus, le montant des commissions versĂ©es Ă©tant un des Ă©lĂ©ments fondamentaux du contrat d'agence puis, relevant que le chiffre d'affaires potentiel qui pouvait ĂȘtre atteint par la sociĂ©tĂ© Freeride Ă©tait susceptible d'ĂȘtre significatif, en dĂ©duit que l'imputabilitĂ© de la rupture incombe Ă  la sociĂ©tĂ© Sports X.

8. En statuant ainsi, alors que M. Desgardin se bornait Ă  soutenir que la rupture du contrat Ă©tait intervenue Ă  l'initiative de la sociĂ©tĂ© Sports X, sans prĂ©tendre que, si la cour retenait qu'elle Ă©tait Ă  son initiative, elle serait justifiĂ©e par des actes imputables Ă  la sociĂ©tĂ© Sports X, la cour d'appel, qui a mĂ©connu l'objet du litige, a violĂ© le texte susvisĂ©.  

PAR CES MOTIFS,

et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs,

la Cour :

CASSE ET ANNULE,

Sauf en ce qu'il rejette la demande de M. Desgardin au titre de l'indemnitĂ© de prĂ©avis, l'arrĂȘt rendu le 20 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de ChambĂ©ry ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'Ă©tat oĂč elles se trouvaient avant cet arrĂȘt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.