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Décisions

CA Versailles, 1re ch. sect. 1, 17 novembre 2020, n° 19/00274

VERSAILLES

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Palau

Conseillers :

Mme Lelievre, Mme Lauer

TGI Versailles, 1re ch., du 4 déc. 2018

4 décembre 2018

FAITS ET PROCÉDURE

M. De G. a cédé à M. et Mme M. deux biens immobiliers à usage d'habitation situés à [...], cadastrés section AA n o 643 pour le premier et AA 642-604 pour le second, par deux actes authentiques des 11 juillet 2008 et 12 août 2008 pour un prix total de 550 000 euros.

Le notaire instrumentaire était Maître Florent T. de la SCP T..

Le prix de vente des immeubles a été réglé au moyen de deux prêts consentis par le CIC et le Crédit agricole, qui ont inscrit sur les immeubles un privilège de prêteurs de deniers.

Le 30 décembre 2008, le technicien de la Direction départementale des Affaires sanitaires et sociales a rendu un rapport dans le cadre de l'évaluation de l'état d'insalubrité de l'immeuble situé [...].

Le 4 février 2009, le préfet de la région Nord Pas de Calais a émis un arrêté portant mise en demeure de faire cesser un danger imminent pour la santé et la sécurité des occupants liés à l'insalubrité de l'immeuble situé [...].

Le 12 mars 2009, le préfet a adopté un arrêté d'insalubrité relatif aux appartements l, 2, 3, et 4 et aux parties communes de l'immeuble situé [...], cadastré AA 605. 4

Représentés par Maître C., M. et Mme M. ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Valenciennes d'une demande de désignation d'un expert judiciaire afin de déterminer le prix réel des deux biens au contradictoire de M. De G..

Par ordonnance du 26 janvier 2010, le président du tribunal de grande instance de Valenciennes a ordonné une mesure d'expertise confiée à M. D..

Par courrier du 11 janvier 2011, adressé au service du contrôle des expertises, l'expert a indiqué avoir été dans l'impossibilité d'exécuter sa mission et « de déposer valablement un rapport » en raison du silence des parties, précisant qu'en cas de reprise de opérations, une consignation complémentaire minimale serait nécessaire.

Parallèlement, le 19 janvier 2010, les époux M. ont déposé une plainte simple contre le vendeur et le notaire des chefs d'escroquerie et faux en écriture publique.

Par actes en date des 10 février 2011 et 15 février 2011, M. et Mme M. ont assigné le CIC, le Crédit agricole Val de France puis le vendeur et le notaire instrumentaire devant le tribunal de grande instance de Valenciennes et ce afin d'obtenir la nullité de la vente et des contrats de prêt, la restitution du prix et la réparation de leur préjudice.

Le 16 janvier 2013 le tribunal de grande instance de Valenciennes a ordonné la radiation de l'affaire en l'absence de conclusions des demandeurs malgré une injonction en ce sens.

Les époux M. ont dessaisi Maître C. du dossier au profit de Maître S., avocat au barreau de Paris et associé de la SCP Henri L. et associés.

Maître S. a accepté la mission qui lui a été confiée au mois de novembre 2013 et a fixé le montant de la provision due au titre des diligences à accomplir au titre de sa succession à Maître C. dans le cadre de la procédure civile à la somme de 2 990 euros TTC et à son équivalent dans le cadre de la procédure pénale.

Maître S. a quitté la SCP Henri L. et associés et a continué à assurer la mission qui lui a été confiée dans le cadre d'un exercice individuel de la profession d'avocat.

Le 15 janvier 2015, Maître S. a sollicité le rétablissement de la procédure devant le tribunal de grande instance de Valenciennes par conclusions électroniques.

Par ordonnance en date du 14 janvier 2016, le juge de la mise en état a constaté la péremption de l'instance en application de l'article 386 du code de procédure civile.

Par acte du 18 mai 2017, M. et Mme M. ont fait assigner Maître S. devant le tribunal de grande instance de Versailles qui a prononcé le jugement dont appel.

Aux termes de leurs conclusions précitées, M. et Mme M. exposent que M. De G. leur avait présenté les biens vendus comme étant deux immeubles de rapport entièrement occupés par des locataires suivant plusieurs baux d'habitation régulièrement conclus qu'il leur avait remis.

Ils rappellent les modalités de financement de leurs acquisitions et l'adoption, le 12 mars 2009, d'un arrêté préfectoral déclarant l'insalubrité de l'immeuble ce qui ne leur a plus permis de régler les échéances des prêts.

Ils relatent les procédures initiées et le changement d'avocat et indiquent que Maître S. était, dès janvier 2014, en possession de l'intégralité du dossier, leur confirmant alors que l'instance avait été radiée le 16 janvier 2013 et accusant réception du versement de la somme de 1500 euros au titre d'avance sur honoraires. Ils lui font grief de n'avoir sollicité le rétablissement de la procédure que le 15 janvier 2015, plus de deux ans après la dernière diligence des parties.

Ils affirment qu'au 14 janvier 2016, la prescription de leur action était déjà acquise et, donc, qu'ils étaient dépourvus de toute possibilité d'introduire de nouvelles actions en nullité des actes de vente et de crédit et en responsabilité du notaire et contestent le jugement en ce qu'il a écarté cette prescription

Ils sollicitent la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu la faute de l'avocat.

Ils se prévalent des termes du jugement qui a considéré, au regard des échanges de courriels des 16 et 25 novembre 2013 et des factures adressées par lui le 6 décembre 2013, qu'ils avaient bien chargé Maître S. de les représenter aussi bien dans le cadre de l'action pénale que dans le cadre de l'action civile et qu' « il ne peut se déduire des mots « première voie que vous aviez choisie» qu'ils lui avaient demandé de se désengager de l'action civile entre le 23 mai 2014 et le 16 janvier 2015.

Ils se prévalent également du jugement en ce qu'il a retenu que Maître S. a été de nouveau mandaté par eux lorsqu'il a quitté la SCP Henri L. et associés et que les mandats versés par eux sont établis au nom de Maître S. et non de la SCP d'avocats.

Enfin, ils rappellent que la péremption de l'instance été acquise le 20 septembre 2014 soit deux mois après la dernière diligence des parties, alors que Maître S. n'a sollicité le rétablissement de la procédure que le 15 janvier 2015.

Ils font valoir qu'ayant été chargé de les représenter depuis le 15 novembre 2013, Maître S. était en possession des éléments du dossier depuis le mois de décembre 2013, et donc qu'il a manqué à son devoir de diligence et a commis une faute de nature à engager sa responsabilité.

Ils sollicitent l'infirmation du jugement en ce qui concerne leur préjudice.

Ils rappellent, citant des arrêts, que pour apprécier la perte de chance causée par la faute de l'avocat, le juge doit procéder à une reconstitution fictive du procès et que toute perte de chance, même minime, ouvre droit à réparation dès l'instant où la faute de l'avocat est établie.

Ils ajoutent que l'absence de défense constitue une perte de chance et à tout le moins n'a pas permis au client d'avoir un juste procès.

Ils estiment, citant des arrêts, que la réparation intégrale est admise d'autant plus facilement en tenant compte de la gravité de la faute de l'avocat et qu'elle est également accordée toutes les fois où l'existence et le montant de la perte sont aisément chiffrables.

Ils ajoutent que la Cour de cassation a jugé qu'il doit être uniquement tenu compte des chances de succès de l'action, non des perspectives de recouvrement.

Ils invoquent les chances de succès de l'action entreprise.

Ils affirment qu'ils auraient certainement obtenu la nullité des contrats litigieux, la restitution du prix et ses accessoires et la réparation intégrale de leur préjudice.

Ils déclarent que, par son inaction, Maitre S. a laissé périmer l'instance alors qu'en vertu de sa mission, il devait accomplir tous les actes de procédure propres au succès de l'instance engagée.

Ils estiment qu'en reconstituant fictivement le procès et l'argumentation relative à la nullité pour vice de consentement, « il apparait évident que la solution qui aurait été très probablement retenue est celle de la nullité pour dol ou pour erreur sur les qualités substantielles ».

Ils rappellent que l'acte de vente en date du 11 juillet 2008 contient une clause intitulée « Désignation des biens » qui désigne le bien comme « un immeuble de rapport à usage d'habitation ».

Ils rappellent également que la clause intitulée « Conditions de la location » précise que le bien est vendu loué et dresse une liste des locataires, le revenu locatif mensuel brut dégagé par le bien litigieux étant de 1793,43 euros.

Ils rappellent également que le deuxième acte de vente en date du 12 août 2008 contient les mêmes mentions relativement à la désignation du bien vendu et à sa situation locative, ce bien permettant au propriétaire de percevoir un revenu locatif d'un montant global de 2.590 euros.

Ils soulignent que le financement des deux acquisitions litigieuses a été accordé par les banques prêteuses en tenant compte du revenu locatif existant qui permettrait le remboursement des échéances de prêt sans la moindre difficulté.

Ils indiquent que, compte tenu de la nature de l'investissement et du revenu locatif y attaché, l'accord des banques prêteuses est intervenu très rapidement et sans réserve.

Ils font valoir qu'ils ont, ainsi, consenti à la vente et au financement corrélatif en ayant la certitude qu'ils acquéraient deux immeubles de rapport leur permettant de percevoir un revenu locatif mensuel global de 4.383,43 euros ce qui leur permettait de payer les mensualités des deux crédits bancaires, dont le montant mensuel cumulé est de 3.879,78 euros.

Ils soutiennent donc qu'ils pensaient ainsi acquérir deux biens conformes à leur désignation dans les actes notariés et aux déclarations du vendeur et que leur croyance a été confortée par les circonstances favorables à l'acquisition notamment celles relatives à un concours bancaire donné immédiatement et sans réserve.

Ils exposent que, quelques mois à peine après l'acquisition litigieuse, le 9 février 2009, ils ont été destinataires d'un arrêté, pris le 4 février 2009, portant mise en demeure de faire cesser un danger imminent pour la santé et la sécurité des occupants lié à l'insalubrité de l'immeuble.

Ils déclarent que la première mise en demeure les a privés dès mars 2009 du revenu locatif qu'ils percevaient depuis la vente et qui était destiné à rembourser les échéances des deux crédits.

Ils soulignent que, compte tenu de l'ampleur des travaux de mise en conformité prescrits par le préfet, ils étaient dans l'impossibilité d'exécuter ces travaux d'autant plus qu'étant privés du revenu locatif qui leur permettaient de régler les échéances des deux crédits, ils étaient désormais poursuivis par les banques prêteuses pour le paiement de 550.000 euros.

Ils indiquent que la procédure d'insalubrité a donné lieu à un arrêté déclarant l'insalubrité de l'immeuble en date du 12 mars 2009.

Ils affirment qu'ils n'auraient jamais acquis cet immeuble s'ils avaient connu son état d'insalubrité au moment de la signature des actes de vente.

Ils en infèrent que la nullité des deux ventes aurait pu être obtenue sur le terrain du dol et subsidiairement sur le terrain de l'erreur sur les qualités substantielles de la chose.

S'agissant de la réticence dolosive, ils rappellent l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction applicable, et déclarent qu'elle réside dans le fait, pour un contractant tenu d'une obligation de renseignement, de garder le silence sur une information qu'il connaît ou devrait communiquer, face à quelqu'un qui est dans l'impossibilité de s'informer lui-même, cette réticence constituant un dol lorsqu'elle a pour but d'amener quelqu'un à contracter en le trompant.

Ils exposent que le dossier de diagnostic technique annexé aux deux actes de vente litigieux ne comporte pas d'état de l'installation intérieure d'électricité et ce, en violation de l'article L. 271-4 et L. 134-7 du code de la construction et de l'habitation.

Ils rappellent que l'objectif du dossier de diagnostic technique est de protéger et de mieux informer le futur acquéreur sur les éléments de l'immeuble susceptibles de présenter des risques pour la santé ou pour la sécurité des personnes.

Ils soulignent que cette obligation légale d'information pèse sur tout vendeur, qu'il soit profane ou professionnel.

Ils font valoir que le vendeur des deux immeubles a sciemment omis de produire, dans le cadre des deux ventes, l'état de l'installation intérieure d'électricité qui a été vraisemblablement établi par le cabinet d'expertise Dolinski conformément aux prescriptions légales et règlementaires, car cet état permettait de révéler des anomalies graves et un risque certain pour la santé et la sécurité des occupants.

Ils précisent, citant l'arrêté du 4 février 2009, que la non-conformité de l'installation électrique et le caractère défectueux du chauffage électrique sont l'une des principales causes de la mise en œuvre de la procédure d'insalubrité.

Ils considèrent que, par cette omission, le vendeur a sciemment méconnu ses obligations dans l'intention de provoquer dans leur esprit une erreur déterminante de leur consentement.

Ils affirment également que le dol est caractérisé par les déclarations mensongères du vendeur dans les actes authentiques, celui-ci ayant déclaré « que les biens vendus répondent à la notion de décence telle que définie par l'article 6 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 sur les rapports locatifs (') obligeant le bailleur à remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté des éléments le rendant conforme à l'usage d'habitation. ».

Ils déclarent que la procédure d'insalubrité a mis en évidence le risque pour la santé et la sécurité que représentaient les deux immeubles pour les locataires et le caractère indécent des logements.

Ils considèrent que le vendeur ne pouvait ignorer ces risques, ayant été sollicité par les locataires pour mettre ces logements en conformité avec la législation précitée et la notion de décence et citent des courriers de Mme F. en date des 7 et 17 juillet 2008 adressés à la CAF et à la DDASS.

Ils concluent qu'en leur dissimulant volontairement les plaintes des locataires et le danger que représentaient ces logements pour les occupants, le vendeur a commis un dol appuyé par les déclarations mensongères dans l'acte notarié, au sujet d'un élément déterminant dans leur consentement, dans la mesure où ils n'auraient pas acquis ces biens s'ils avaient eu connaissance du caractère indécent des logements, alors que leur investissement était locatif.

Ils estiment ainsi que la nullité judiciaire des deux contrats de vente pour dol était une certitude.

S'agissant de l'erreur sur les qualités substantielles de la chose, ils citent les articles 1109 et 1110 du code civil dans leur rédaction applicable, et définissant l'erreur constitutive d'un vice du consentement comme celle qui porte sur la substance de la chose, c'est-à-dire sur les qualités substantielles, déterminantes que la victime de l'erreur avait en vue quant à la prestation reçue.

Ils rappellent qu'elle doit entrer dans le champ contractuel, le cocontractant devant avoir connu l'importance essentielle, aux yeux de la victime de l'erreur, que revêtait la qualité défaillante.

Ils réitèrent qu'ils ont acquis les immeubles litigieux dans le cadre d'un investissement locatif et précisent que M. M., alors employé au sein d'une société de transport routier de fret interurbain, avait la qualité de profane.

Ils font valoir que cette caractéristique de bien à usage d'habitation revêtait un caractère substantiel pour eux ainsi qu'il ressort de la description du bien objet de la vente en tant qu'immeuble de rapport, de la déclaration du vendeur quant au caractère décent des logements et de la liste des baux.

Ils en infèrent que la qualité de logement destiné à la location et conforme à l'exigence de décence était une qualité substantielle du bien, sans laquelle ils n'auraient pas contracté.

Ils ajoutent que les établissements de crédit n'ont prêté leur concours financier qu'en considération du revenu locatif généré par les deux immeubles.

Ils concluent que la nullité était encourue sur ce fondement.

Ils soutiennent, en conséquence, que l'action en nullité des conventions de crédit et d'assurances avait de sérieuses chances d'aboutir compte tenu de la nullité des contrats de vente.

Ils soulignent, citant un arrêt, que ces contrats sont interdépendants des contrats de vente des biens immobiliers.

Les époux rappellent par ailleurs, les obligations du notaire tenu de veiller à l'efficacité des actes dont il est rédacteur et estiment qu'il doit, à cet effet, rechercher l'intention des parties et déceler les obstacles juridiques susceptibles de surgir.

Ils exposent qu'en application de l'article L. 271-4, I, du code de la construction et de l'habitation, un dossier de diagnostic technique doit obligatoirement être annexé à toute promesse de vente ou, à défaut, à tout acte authentique de vente portant sur tout ou partie d'un immeuble bâti et que, conformément à l'article L. 134-7 du même code, ce dossier comprend obligatoirement un état de l'installation intérieure d'électricité.

Ils soulignent que cette disposition vise à évaluer les risques qui sont de nature à porter atteinte à la sécurité des personnes.

Ils rappellent que l'état de l'installation intérieure électrique n'a pas été produit en annexe de l'acte authentique, muet sur cette question.

Ils font valoir que cette omission est imputable au notaire rédacteur de l'acte qui avait l'obligation de s'assurer du respect du formalisme imposé en matière de vente d'immeubles bâtis et de s'assurer ainsi de l'efficacité de l'acte qu'il rédige et de sa cohérence avec l'intention des parties.

Ils réitèrent que leur intention était d'acquérir deux immeubles de logements correspondant aux caractéristiques de logement décent puisque l'achat constituait, pour eux, un investissement locatif.

Ils soutiennent que, par son manquement à son obligation d'information, le notaire a participé à créer cette fausse conception de la réalité dans leur esprit et les a déterminés à acquérir en toute confiance un bien insalubre ne répondant à aucune norme de sécurité quant à son installation électrique.

Ils affirment que, s'ils avaient été avertis par le notaire de l'absence de l'état de l'installation intérieure électrique de l'acte et des risques encourus, ils n'auraient pas acquis les biens ni emprunté à cet effet.

Ils en concluent que la responsabilité professionnelle du notaire était acquise et qu'ils pouvaient obtenir sa condamnation à réparer l'intégralité de leur préjudice si l'avocat n'avait pas commis de faute et estiment à près de 100% le pourcentage de chance à retenir.

Ils soulignent que le tribunal n'a pas critiqué ces arguments mais considéré que la chance de succès de l'action n'avait pas été perdue mais retardée et le contestent.

Ils soutiennent que la perte de chance était définitive compte tenu de la prescription de l'action en nullité et en responsabilité.

Ils rappellent qu'en application de l'article 1304 alinéa 1 du code civil dans sa rédaction applicable, le délai de prescription de l'action en nullité d'un contrat est de 5 ans et que ce temps court « dans le cas d'erreur ou de dol, du jour où ils ont été découverts ».

Ils rappellent également qu'ils ont découvert que leur bien était insalubre en février 2009, date à laquelle ils ont reçu une mise en demeure de faire cesser un danger imminent suivi de l'arrêté préfectoral d'insalubrité.

Ils rappellent enfin qu'ils ont assigné le vendeur, les établissements bancaires et le notaire le 10 et 15 février 2011.

Ils observent que la péremption de l'action en nullité a fait perdre rétroactivement à ces assignations l'effet interruptif de prescription mais a laissé subsister l'action si elle n'était pas prescrite.

Ils exposent l'effet des actes de procédure qui ont été réalisés depuis le 4 février 2011, « date de la découverte de l'erreur ou du dol », sur le cours du délai de prescription.

Ils citent la demande d'instruction in futurum.

Ils rappellent le courrier de l'expert du 11 janvier 2011 et précisent que le bien objet de l'expertise a fait l'objet d'une « saisie-vente » par jugement en date du 28 octobre 2010 devenu définitif.

Ils font valoir que si la prescription a été interrompue par l'effet de l'ordonnance de référé, ce délai a recommencé à courir en application de l'article 2239 du code civil à compter de la disparition de la cause de la suspension, c'est-à-dire à compter du jour où l'expert a déposé au tribunal son rapport au visa de l'article 279 du code de procédure civile soit le 11 janvier 2011.

Ils affirment donc que le délai de prescription a expiré le 18 janvier 2014 avant l'ordonnance ayant déclaré la péremption d'instance, et, donc, que la prescription était acquise.

Ils font valoir que si la prescription a été suspendue par la demande en justice conformément à l'article 2241 du code civil, l'interruption ne produit ses effets que jusqu'à l'extinction de l'instance soit jusqu'à l'ordonnance de référé intervenue le 26 janvier 2010.

Ils affirment donc que la prescription a couru à nouveau pour 5 ans à compter du 26 janvier 2010, expirant le 26 janvier 2015 et qu'ainsi, toute nouvelle action introduite postérieurement à cette date était prescrite.

Ils reprochent au tribunal d'avoir considéré que l'ordonnance ayant désigné un expert a suspendu le délai de prescription et qu'en l'absence de rapport d'expertise, le délai est depuis suspendu et, donc, que leur action n'est pas prescrite.

Ils font valoir que la mesure d'expertise n'aura jamais lieu puisque l'expert s'est dessaisi de sa mission depuis le 11 janvier 2011 et que le bien immobilier objet de l'expertise a fait l'objet d'une vente forcée par la banque prêteuse le 28 octobre 2010, c'est-à-dire avant même que l'expert n'informe le tribunal de l'impossibilité de sa mission.

Ils infèrent de l'article 2239 du code civil que l'effet suspensif de la demande d'expertise ne peut se poursuivre à l'infini puisque cela reviendrait à rendre l'action en nullité de la vente perpétuelle et imprescriptible.

Ils ajoutent que l'expert s'est dessaisi de la mission au motif que « le silence des parties fait obstacle à la poursuite de ma mission » et qu'il se trouve « dans l'impossibilité de déposer valablement un rapport », cette impossibilité étant renforcée par la vente forcée du bien, objet de l'expertise à compter du 28 octobre 2010.

Ils soutiennent donc que le délai de prescription a repris son cours à compter de la disparition de la cause de suspension et que la prescription était acquise à la date de l'ordonnance constatant la péremption.

Ils en concluent qu'ils ont perdu toutes les chances d'obtenir la nullité des contrats de vente et des contrats de prêt et d'obtenir la réparation de leur préjudice au notaire sur le fondement de la responsabilité civile contractuelle.

Subsidiairement, ils soutiennent que la prescription est acquise à l'égard des établissements bancaires et du notaire.

Ils rappellent que l'acte interruptif doit s'adresser à celui qu'on veut empêcher de prescrire.

Ils rappellent également que l'assignation en référé n'a été délivrée qu'au vendeur à l'exclusion des établissements bancaires et du notaire.

Ils en infèrent que la suspension prétendue ne s'applique qu'au vendeur des biens litigieux et non aux deux établissements bancaires et au notaire.

Ils soulignent que ceux-ci étaient partie au litige principal et que leurs demandes à leur encontre portaient aussi bien sur la nullité des conventions de crédit que sur leur responsabilité pour manquement à leur obligation d'information.

Ils précisent que ces banques continuent leurs poursuites à leur encontre afin de recouvrer les sommes qui leur sont dues, même après la vente forcée des biens.

Ils concluent que, compte tenu de l'acquisition à leur égard de la prescription, le 4 février 2014, ils ont ainsi perdu toutes les chances d'obtenir la nullité des conventions de crédit et la réparation de leur préjudice consécutif au manquement du notaire à son obligation d'information.

Ils citent la plainte avec constitution de partie civile.

Ils exposent, citant des arrêts, que la plainte avec constitution de partie civile a un effet interruptif de prescription dès lors qu'elle manifeste une volonté d'obtenir réparation.

Ils déclarent que la plainte avec constitution de partie civile déposée le 9 juin 2015 ne fait état d'aucun préjudice subi par eux et ne contient aucune demande de réparation. Ils en concluent, citant un arrêt du 25 janvier 2000, qu'elle n'interrompt pas la prescription.

Ils font valoir qu'aucun des termes employés dans la plainte avec constitution de partie civile ne fait état du moindre préjudice subi par eux ni ne démontre leur volonté d'en obtenir réparation.

Ils soulignent que cette plainte ne vise nullement, ni directement ni indirectement à obtenir réparation d'un quelconque préjudice, qui n'est, d'ailleurs, même pas évoqué ce que n'ignore pas Maître S. qui l'a rédigée pour leur compte et a facturé à cet effet la somme de 3600 euros.

Ils en concluent que le délai de prescription n'a pas pu être interrompu par cette plainte.

Ils soutiennent donc qu'ils ont perdu toute possibilité d'obtenir la nullité des ventes litigieuses et des conventions de prêt et la réparation de leur préjudice grâce au mécanisme de la responsabilité contractuelle du notaire.

Les époux exposent le quantum de la réparation de la perte de chance de gagner le procès.

Ils rappellent leurs développements sur l'acquisition de la prescription et qu'ils ont agi contre le vendeur, les établissements bancaires et le notaire et font grief au tribunal d'avoir confondu toutes ces actions et les parties contre lesquelles ces actions ont été intentées, réduisant le litige à une simple action en nullité des ventes.

Ils réitèrent qu'en tout état de cause, l'action engagée à l'encontre des établissements bancaires et du notaire est incontestablement prescrite.

A titre principal, ils invoquent la prescription de toute action.

Ils font alors valoir qu'ils ont perdu toute chance d'obtenir la restitution consécutive aux demandes de nullité des ventes litigieuse et des conventions de crédit.

Ils observent que la restitution obéit aux règles de la nullité qui entraîne un effacement rétroactif du contrat.

Ils en infèrent qu'afin de déterminer l'assiette des restitutions, il convient de faire comme si tous les contrats n'avaient jamais existé et remettre les choses dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion des actes annulés.

Ils considèrent donc qu'ils pouvaient demander la condamnation du vendeur à restituer le prix des deux ventes, soit la somme de 550.000 euros et des frais y afférents soit la somme de 40.410 euros, la nullité des contrats de crédit et assurance, soit l'effacement rétroactif de la dette qui leur est réclamée aujourd'hui dont le montant s'élève aux sommes respectives de 426.928,30 euros et 377.555,88 euros.

Ils ajoutent le remboursement de la taxe foncière et des dépens et la somme de 4.000 euros qui aurait pu leur être allouée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En réponse à l'appelant, ils font valoir que la somme de 550.000 euros correspond au prix de vente des biens dont ils auraient pu obtenir restitution et que cette somme compense la perte de chance d'obtenir la restitution du prix consécutivement à la nullité de la vente.

Ils réitèrent qu'aucun aléa n'existait quant à leur chance de voir leur action en nullité pour vice de consentement prospérer.

Ils précisent que les sommes de 426.928,30 euros et 377.555,88 euros correspondent à leur endettement actuel.

Ils soutiennent qu'Il ne s'agit donc pas d'une éventualité ou d'une chance perdue mais d'une dette chiffrée, composée du solde du crédit après déduction du prix de vente par adjudication et adjonction de tous les frais et intérêts moratoires que les banques ont appliqués depuis 2008.

Ils estiment que si Maître S. n'avait pas commis de faute, ils auraient pu obtenu la nullité des conventions de crédit et n'auraient pas aujourd'hui à supporter cette dette.

Ils en concluent qu'il s'agit d'un chef de préjudice distinct, réel et actuel qui devra être indemnisé.

Ils rappellent, par ailleurs, que la banque qui a procédé à la vente forcée du bien a déjà retranché ce prix des sommes réclamées et que l'autre banque s'est abstenue d'obtenir la vente forcée du second bien car celui-ci est de faible valeur et doit être démoli.

Ils indiquent qu'ils perçoivent le revenu de solidarité active depuis plusieurs années des suites de cette affaire et que leur surendettement consécutivement aux ventes litigieuses les poursuivra toute leur vie.

Ils sollicitent également la réparation intégrale de la perte de toute chance d'obtenir réparation sur le terrain de la responsabilité délictuelle, si la restitution laissait subsister un préjudice.

Ils affirment qu'ils auraient pu obtenir la somme de 40.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral subi et lié à la situation financière désastreuse dans laquelle ceux-ci se sont trouvés en raison de la perte du revenu locatif des bien déclarés insalubres et de l'interdiction bancaire dont ils ont fait l'objet.

Ils font également état des désagréments liés aux diverses procédures et mesures de recouvrement mises en œuvre par les banques prêteuses.

Ils font enfin état d'un préjudice économique lié à la liquidation judiciaire de la société familiale de transport de marchandises dont M. M. était le gérant suite à l'interdiction bancaire et la perte de la confiance des banques.

Ils invoquent donc un préjudice économique de 40.000 euros qui aurait pu être indemnisé au titre de la réparation de leur préjudice intégral que la restitution ne couvre pas.

A titre subsidiaire, ils invoquent la perte de toute chance d'obtenir la condamnation du notaire à réparer l'intégralité de leur préjudice, cette action étant prescrite.

Ils estiment, au vu de leurs développements ci-dessus, que l'action en responsabilité à l'encontre du notaire avait toutes les chances de prospérer et qu'ils auraient pu obtenir sa condamnation à réparer l'intégralité de leur préjudice.

Ils déclarent que, par sa faute, Maître S. les a privés définitivement de toute chance d'obtenir la moindre somme du notaire dans mesure où cette action est prescrite.

Ils font valoir qu'à supposer que l'action au fond à l'encontre du vendeur soit toujours possible, cette action ne leur permettrait d'obtenir que la nullité des actes de ventes et la restitution du prix, laissant sans réparation tous les autres chefs de préjudice, dont la dette bancaire, aucune action ne pouvant être engagée contre les banques en raison de la prescription.

Ils ajoutent que, compte tenu de l'importance des sommes en jeu et de l'ancienneté des faits, il est fort probable que le vendeur soit insolvable et qu'aucune somme ne pourra être recouvrée auprès de lui.

Ils affirment que s'ils avaient conservé la possibilité d'agir à l'encontre du notaire sur le fondement de sa responsabilité professionnelle, ils auraient disposé d'une action à l'encontre d'un deuxième débiteur qui est solvable.

Ils en infèrent que la perte de chance d'assigner le notaire a eu pour conséquence de leur faire perdre toute possibilité de recouvrer leur créance de réparation auprès de ce débiteur ce qui justifie leurs demandes.

A titre infiniment subsidiaire, ils invoquent la perte de chance d'obtenir la nullité des conventions de crédit, cette action étant prescrite.

Ils rappellent que les établissements bancaires continuent de solliciter le paiement des sommes de 426.928,30 euros et de 377.555,88 euros et qu'ils ont perdu toute chance d'obtenir la nullité de ces conventions et l'effacement rétroactif de leur dette.

Ils font valoir qu'ils sont obligés de subir cet endettement toute leur vie, font l'objet depuis plusieurs années de toute sortes de mesures de recouvrement et ne peuvent ni emprunter, ni même ouvrir un compte bancaire.

Ils soulignent que, compte tenu de leur faible revenu et de leur âge, il leur est impossible de désintéresser les banques et que leur état de santé ne fait que se dégrader.

Ils précisent leurs demandes de ce chef.

En réponse à l'intimé, ils affirment que l'arrêt du 2 février 1994 fait référence à d'autres actions civiles possibles s'agissant d'un litige relatif à des malfaçons et inachèvement de travaux, et en aucun cas à une action pénale.

Ils ajoutent que l'action pénale a pour finalité première de réprimer l'auteur d'une infraction alors que la finalité de l'action civile est d'obtenir réparation.

Ils soulignent qu'ils avaient précisément engagés Maître S. pour porter leurs demandes en réparation devant les juridictions civiles.

Ils font donc valoir que leur demande de réparation dans le cadre de cette instance porte sur la perte de cette chance de voir leur procès prospérer devant le juge civil et de pouvoir invoquer les règles de réparation intégrale telles que définies par le code civil et la jurisprudence développées par les juridictions civiles.

Aux termes de ses écritures précitées, Maître S. rappelle l'opération immobilière et la radiation intervenue.

Il expose que, décidés à privilégier la procédure pénale, les époux M. ont ensuite dessaisi Maître C. au profit de la SCP Henri L. et associés, cabinet d'avocat réputé pour son expertise en droit pénal, au sein duquel Maître S., associé, traitait le dossier, la succession entre les avocats ayant eu lieu en décembre 2013.

Il précise qu'il a ensuite quitté la SCP et a poursuivi la mission qui lui avait été confiée dans le cadre d'un exercice individuel de la profession d'avocat.

Il affirme qu'il pensait, comme les époux, que la voie pénale était mieux à même d'aboutir à une réparation de leur préjudice, l'action engagée devant la juridiction civile apparaissant vaine sans les pièces recueillies dans la procédure pénale.

Il déclare que M. et Mme M. ont changé de stratégie, en janvier 2015, soit environ deux ans après l'ordonnance de radiation, en lui demandant de faire le nécessaire pour que la procédure civile soit réinscrite au rôle.

Il précise qu'il leur a alors indiqué, par courriel du 15 janvier 2015, que cette action était probablement périmée, qu'il a toutefois déposé des conclusions aux fins de rétablissement et que la péremption a été prononcée.

Il affirme que, sur le moment, les époux ne lui ont fait part d'aucune surprise sur le résultat, qui n'était que la conséquence logique de leur choix de se concentrer sur la procédure pénale.

Il ajoute, s'agissant de la procédure pénale, qu'il a déposé une plainte avec constitution de partie civile le 12 juin 2015 afin d'obtenir non pas l'annulation du contrat litigieux mais la réparation du dommage issu de l'escroquerie alléguée.

Il indique que les époux l'ont dessaisi des dossiers qu'ils lui avaient confié le 16 juin 2016.

Il relate la procédure.

Il conteste toute faute.

Il affirme, critiquant le jugement, que ses agissements ont toujours été conformes à ses obligations contractuelles et que les époux M. lui reprochent en fait leur propre décision de privilégier la voie pénale alors que rien, rétroactivement ne permet de considérer que ce choix n'était pas pertinent.

Il rappelle que si une juridiction pénale a, par décision définitive, alloué une indemnisation à la partie civile au titre de la réparation de l'ensemble de ses préjudices, la nouvelle demande devant le juge civil visant à indemniser les mêmes préjudices se heurte à l'autorité de chose déjà jugée.

Il en infère que le choix de la juridiction pénale ne constitue pas une perte de chance d'obtenir réparation devant la juridiction civile.

Il rappelle que M. et Mme M. avaient saisi, par l'intermédiaire de Maitre C., les juridictions civiles afin d'obtenir l'annulation du contrat de vente litigieux. Il affirme que, désirant privilégier la juridiction répressive, ils avaient demandé à Maître S., associé d'un cabinet, réputé pour son expertise en droit pénal, de déposer une plainte avec constitution de partie civile non plus pour rechercher la nullité des contrats mais pour obtenir réparation du préjudice issu de l'infraction du notaire et du vendeur.

Il en conclut que, logiquement, la procédure civile devait alors être abandonnée car on ne peut tout à la fois prétendre à l'annulation d'une vente d'immeuble et réclamer réparation du préjudice lié à l'acquisition dudit immeuble.

Il admet que ces demandes sont différentes mais considère qu'en termes de réparation, les deux actions ne sont pas compatibles dans la mesure où l'annulation de la vente fait rétroactivement disparaitre le préjudice lié à la différence alléguée entre la valeur du bien acheté et sa valeur réelle et où la demande de dommages et intérêts devant le juge pénal rend sans objet la demande visant à obtenir l'annulation de la vente.

Il soutient donc que l'abandon de la procédure engagée devant les juridictions civiles est la conséquence logique de la décision stratégique des époux M. de privilégier la voie pénale et ne saurait donc lui être reproché.

Il conteste le dommage allégué et le lien de causalité.

Il fait valoir que la prescription n'est pas acquise de sorte que les époux peuvent réintroduire la procédure initiale.

Il excipe du jugement.

Il rappelle que s'applique la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil.

Il cite l'article 2241 du code civil et souligne qu'une demande d'expertise interrompt la prescription jusqu'à l'ordonnance de désignation d'expert.

Il cite également l'article 2239 du code civil et souligne que, dans le cadre d'une expertise, les juridictions font ainsi recommencer le cours du délai à compter de la date du rapport, qui est au sens du texte, le « jour où la mesure a été exécutée ».

Il expose que les appelants ont saisi le juge des référés qui a, par une ordonnance du 10 mai 2010, désigné un expert afin qu'il effectue une expertise sur le véritable prix de l'appartement.

Il déclare que l'expert n'a pas rendu son rapport.

Il en conclut que la mesure d'instruction n'a pas été exécutée au sens de l'article 2239 du code civil.

Il soutient donc que la prescription de l'affaire civile a été interrompue par l'ordonnance de désignation de l'expert et est depuis suspendue et ce jusqu'à la remise du rapport de celui-ci.

Il affirme ainsi que la prescription n'est pas acquise.

Il rappelle également que la constitution de partie civile a, selon la jurisprudence, un effet interruptif de prescription dès lors qu'elle manifeste une volonté d'obtenir réparation.

Il fait valoir qu'il a déposé une plainte avec constitution de partie civile le 9 juin 2015, manifestant ainsi la volonté des époux d'obtenir réparation.

Il indique, en réponse aux appelants, que l'objet de la juridiction d'instruction n'est pas de se prononcer sur un éventuel préjudice mais d'enquêter sur les faits qui lui sont dénoncés et en conclut qu'il est inutile de détailler son préjudice à ce stade, même si l'objet final de la procédure est la réparation du dommage.

Il précise que la plainte avec constitution de partie civile du 9 juin 2015, si elle ne détaille pas le préjudice, en fait état et met en cause tous ceux qui étaient partie au procès civil, notamment le vendeur, les banques et le notaire.

Il ajoute que la question du préjudice ne nécessitait aucune investigation particulière dans la mesure où ses principaux éléments sont connus.

Il affirme que les époux ne peuvent soutenir que la plainte avec constitution de partie civile n'avait pas pour objet d'obtenir la réparation de leur préjudice.

Il en conclut que cet acte a donc également interrompu la prescription.

Il soutient donc que les époux peuvent assigner à nouveau les défendeurs dans l'instance périmée et, ainsi, que la péremption n'a pu leur causer de dommage.

L'intimé estime que, même si la prescription n'a pas été suspendue, M. et Mme M. disposent de recours pour obtenir réparation du préjudice qu'ils invoquent. Il fait valoir, citant un arrêt, que les clients ne peuvent obtenir réparation pour un manquement de leur avocat s'ils ne démontrent pas l'épuisement des recours contre le véritable responsable de leur dommage.

Il réitère qu'ils ont décidé de privilégier la procédure pénale et que cette procédure va aboutir à ce qu'une juridiction pénale statue sur leur préjudice.

Il soutient que, leur demande étant toujours susceptible de prospérer, et, même si l'on considère que le choix de favoriser la procédure pénale est fautif, sa responsabilité ne peut être engagée à défaut de préjudice et de lien de causalité.

Il invoque une base indemnitaire surévaluée.

Il affirme que le tribunal a statué ultra petita en caractérisant un préjudice- la perte de chance d'un traitement plus rapide de leur action- qui n'était pas demandé dans les dernières conclusions des époux ce qui justifie son appel incident.

Il ajoute qu'il n'aurait pas dû le condamner à restituer des honoraires et des frais de justice engagés dans le cadre de la procédure civile périmée.

Il rappelle que, selon l'article 174 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, les honoraires relèvent du seul bâtonnier, de sorte que le tribunal de grande instance n'était pas compétent pour en connaître.

Il fait également valoir que ces frais et honoraires auraient dû être engagés en tout état de cause pour obtenir réparation auprès du vendeur, de l'intermédiaire, du notaire et des banques, dans la mesure où ces derniers ne se seraient jamais exécutés spontanément.

Il affirme enfin que les factures invoquées ont été payées à la SCP et non à lui qui n'a perçu aucun honoraire au titre de la procédure civile. Il en conclut que c'est la SCP qui aurait dû être mise en cause de ce chef.

Il précise, concernant ses factures personnelles au titre de la procédure pénale, qu'il leur a, sur l'une d'elles, accordé une réduction de son taux horaire de 40%.

Il soutient que les sommes réclamées sont sans rapport avec les sommes réellement en jeu.

Il expose qu'ils réclament en principal des indemnités pour un montant total de 1 505 526,32 euros alors que le montant demandé dans les dernières conclusions dans l'instance périmée était de 600.000 euros au total et que les immeubles litigieux ont été achetés pour 550.000 euros.

Il soutient qu'ils demandent plusieurs fois la réparation du même préjudice.

Il indique, ainsi, qu'ils réclament 550.000 euros au titre des ventes mais aussi 426.928,30 euros et 377.555,88 euros au titre des prêts, alors qu'il s'agit en réalité des mêmes sommes, puisque l'argent des prêts a été investi dans les biens immobiliers. Il ajoute qu'ils ne prennent pas en compte la valeur des immeubles restés en leur possession ce qui interdit de chiffrer leur préjudice.

Il invoque, en tout état de cause, un faible coefficient de perte de chance.

Il rappelle que doit être reconstituée fictivement la discussion qui se serait instaurée si l'avocat n'avait commis aucune faute et que doivent être estimées les chances de succès de ladite action.

Il souligne, citant des arrêts, que lorsque la faute de l'avocat, même démontrée, n'a causé aucun préjudice au demandeur, aucune indemnisation n'est allouée.

Il soutient qu'ils ne rapportent pas la preuve que la procédure aurait prospéré et réitère qu'une décision sur la procédure pénale a dû intervenir.

S'agissant de la procédure contre l'intermédiaire et le vendeur, il souligne qu'ils n'apportent aucun élément sur le sort de la procédure pénale pour escroquerie, qui est la seule procédure à même de démontrer qu'ils ont fait l'objet d'une quelconque tromperie de la part des cessionnaires.

Il ajoute qu'ils n'indiquent pas le sort de la plainte simple puis de la plainte avec constitution de partie civile déposée en 2015.

Il affirme que ces pièces sont indispensables pour permettre de se prononcer sur un éventuel dol.

Il affirme qu'un classement sans suite ou une ordonnance de non-lieu pourrait donner des indications sur la réalité du dol allégué et que, si des réparations ont été accordées, la présente procédure est sans objet.

S'agissant de la procédure contre les banques, il soutient que la nullité des prêts n'aurait rien changé à leur situation.

Il fait valoir qu'en cas de nullité, le juge, afin de les remettre dans leur situation initiale, aurait dû les condamner à restituer aux banques les sommes perçues au titre du prêt de sorte que l'opération aurait été neutre financièrement.

Il ajoute qu'ils n'auraient pu reprocher aux banques de leur avoir prêté de l'argent au motif qu'elles n'auraient pas vérifié l'état d'un bien immobilier qu'ils avaient eux-mêmes acheté, les banques n'ayant commis aucune faute.

S'agissant de la procédure contre le notaire, il rappelle que sa responsabilité ne peut être engagée en raison de déclarations de l'une des parties s'il n'a aucune raison de penser qu'elles sont fausses.

Il relève qu'ils ont acquis les bien litigieux les 11 juillet et 12 août 2008 et que l'arrêté d'insalubrité a été prononcé par le préfet le 4 février 2009.

Il souligne que le vendeur avait attesté que les biens cédés étaient décents.

Il fait valoir qu'aucune des pièces produites ne permet de démontrer que le notaire a connu l'insalubrité de l'immeuble, prononcée après les cessions litigieuses.

Concernant l'état de l'installation d'électricité, il soutient que son annexion n'est obligatoire que si l'installation a été réalisée depuis plus de quinze ans.

Il affirme que cette ancienneté n'est pas démontrée et relève que le paragraphe sur l'origine de propriété ne remonte que dix ans avant l'acte et que l'arrêté préfectoral indique que le bien immobilier, d'abord destiné à abriter des bureaux, a fait l'objet d'une transformation en huit logements peu de temps avant les faits litigieux.

Il déduit de cette transformation que celle-ci a entraîné une réfection de l'installation électrique.

Il estime que les pièces de la procédure pénale auraient été utiles.

Il conclut que l'action engagée contre le notaire ne pouvait prospérer.

Sur la faute de Maître S.

Considérant que l'avocat peut voir mettre en cause sa responsabilité contractuelle sur le fondement des dispositions de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable ;

Considérant qu'il doit respecter les principes essentiels de sa profession en toutes circonstances et faire preuve à l'égard de ses clients de compétence, de dévouement, de diligence et de prudence ;

Considérant que, conformément aux dispositions des articles 411 et 412 du code de procédure civile, le mandat de l'avocat dans sa mission de représentation et d'assistance en justice emporte devoir d'accomplir au nom du mandant les actes de la procédure, de conseiller la partie et de présenter sa défense ;

Considérant que ses devoirs de compétence et diligence imposent à l'avocat d'effectuer dans les délais les formalités qui lui incombent, et ce, dans le respect des règles de droit en vigueur ;

Considérant que Maître S. a été mandaté par M. et Mme M. ;

Considérant que, par courriel du 15 novembre 2013, il a écrit aux époux M. : «  je prends acte de ma désignation dans vos deux affaires, pénale et civile » et, par courriel du 25 novembre 2013, a confirmé avoir bien reçu les deux lettres le désignant afin d'intervenir dans le dossier pénal et le dossier civil au lieu et place de Maître C. ;

Considérant qu'il a adressé, le 6 décembre, deux factures d'un montant équivalent aux époux M. et précisé, dans un courriel du même jour, qu'il les remerciait de lui avoir confié « la défense de vos intérêts dans votre dossier pénal ainsi que dans le dossier civil » et qu'il leur adressait « à nouveau ci-joint les deux factures de provision (factures n° 17352 et 17 353) pour chaque dossier » ;

Considérant qu'il résulte de ces échanges dépourvus de toute ambiguïté que Maître S. a été mandaté par les époux tant au titre du dossier pénal que du dossier civil et qu'il perçu des honoraires au titre des deux procédures ;

Considérant qu'il ne peut donc utilement soutenir que la désignation par les époux d'un avocat membre d'une SCP réputée pour son expertise en droit pénal permet de considérer que les époux avaient privilégié la voie pénale ;

Considérant qu'il ne verse aux débats aucune pièce d'où il résulterait que ceux-ci ont choisi prioritairement cette voie ;

Considérant, en tout état de cause, qu'il ne justifie nullement qu'ils ont décidé d'abandonner la voie civile ;

Considérant qu'il lui appartenait donc d'accomplir toutes diligences utiles pour éviter la péremption de l'instance civile ;

Considérant qu'il a été de nouveau mandaté par M. et Mme M. lors de son départ de la SCP ainsi qu'il résulte de ses propres écritures, de son courrier du 16 janvier 2015 et des mandats qui lui ont été adressés ;

Considérant qu'il était donc en charge du dossier avant que la péremption soit encourue ;

Considérant qu'il a, en conséquence, manqué à ses obligations en n'accomplissant pas les diligences nécessaires pour éviter la péremption de l'instance ;

Considérant que le jugement sera confirmé en ce qu'il a retenu sa faute ;

Sur les conséquences de la faute de Maître S.

Considérant que la faute de Maître S. a empêché que la procédure civile initiée par les assignations délivrées les 10 et 15 février 2011 donne lieu à un jugement ; qu'elle a fait perdre une chance aux époux M. de voir leurs demandes être accueillies ;

Mais considérant que M. et Mme M. ont déposé le 9 juin 2015, par l'intermédiaire de Maître S., une plainte avec constitution de partie civile des chefs d'escroquerie, faux en écritures publiques et faux et usage de faux contre toute personne ayant pu participer à la commission des infractions exposées par eux ;

Considérant que les investigations menées peuvent donner des indications sur la chance qu'auraient eue les époux M. de voir leurs demandes aboutir ;

Considérant que le préjudice de M. et Mme M. a pu, le cas échéant, être indemnisé dans le cadre de cette procédure, un risque de double indemnisation étant alors possible ;

Considérant qu'il est donc nécessaire de connaître l'état de cette procédure et d'enjoindre à M. et Mme M. de produire, selon les modalités prévues par le code de procédure pénale, tous éléments sur cette procédure ;

Considérant que les débats seront rouverts à cet effet ;

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition ;

CONFIRME le jugement en ce qu'il a jugé que Maître S. avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité,

Avant-Dire -Droit sur les demandes :

ENJOINT à M. et Mme M. d'indiquer l'état de la procédure pénale et de produire, en respectant les prescriptions du code de procédure pénale, tous éléments sur cette procédure,

INVITE les parties à conclure sur ces éléments,

FIXE au 7 juin 2021 à 9 heures la réouverture des débats,

RÉSERVE les demandes.