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Décisions

CCE, 8 septembre 2009, n° M.5605

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

Crédit Mutuel/ Monabanq

CCE n° M.5605

8 septembre 2009

Messieurs, Mesdames,

Objet: Affaire COMP/M.5605 – Crédit Mutuel/ Monabanq
Votre notification du 4 août 2009 en application de l'article 4 du Règlement (CE) n 139/2004 du Conseil1

(1) Le 4 août 2009, la Commission a reçu notification, conformément à l’article 4 du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil ("le Règlement"), d’un projet de concentration par lequel l'entreprise Banque Fédérative du Crédit Mutuel S.A. («Crédit Mutuel», France), acquiert, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b) du Règlement, le contrôle exclusif de l’entreprise Monabanq («Monabanq», France) par achat d’actions.

I. LES PARTIES

(2) Crédit Mutuel est la société holding d'un group bancaire mutualiste français dont le siège social est à Strasbourg et qui est actif dans le secteur bancaire et plus particulièrement dans le secteur de la banque de détail ainsi que de l'assurance, essentiellement en France et accessoirement dans d'autres États membres.

(3) Monabanq est principalement active dans les services bancaires de détail ainsi que, dans une moindre mesure, dans les assurances, principalement en France. Monabanq est actuellement une filiale du groupe 3 Suisses International ("3SI"), une société holding française d'entreprises spécialisées dans la vente par correspondance et les achats en ligne.

II. L’OPÉRATION ET LA CONCENTRATION

(4) L'opération consiste en l'acquisition par Crédit Mutuel du contrôle exclusif de Monabanq.

(5) Il s’agit donc d’une concentration au sens de l’article 3, paragraphe 1 (b), du Règlement CE n° 139/2004.

III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

(6) La présente transaction fait suite à l'acquisition par le Crédit Mutuel de la société Cofidis, cédée également par le groupe 3SI, une transaction qui releva de la compétence de la Commission car elle avait une dimension communautaire au titre de l'article 1 (2) du Règlement. La Commission a adopté une décision d'autorisation inconditionnelle de cette transaction conformément à l'article 6 (1) (b) du Règlement en date du 24 février 20092.

(7) La présente transaction est donc également soumise à la compétence de la Commission en vertu de l'article 5 (2) du Règlement, pour autant qu'elle constitue une opération impliquant les mêmes entreprises en tant qu'acheteur et vendeur, et a lieu dans une période de moins de deux ans de la transaction initiale. La présente transaction et celle autorisée auparavant sont donc, aux fins du calcul du chiffre d'affaires, considérées comme une seule et même concentration.

IV. ANALYSE CONCURRENTIELLE

(8) Les activités des parties se chevauchent en France et aussi, bien que dans une mesure très limitée, en Belgique.

(9) Le Crédit Mutuel est actif en France dans la fourniture d'un certain nombre de services financiers tels que la banque de détail, le crédit à la consommation et les assurances. En Belgique, son activité antérieure à l'acquisition de la Cofidis a été très limitée et exclusivement liée au crédit à la consommation. À la suite de cette acquisition, et comme expliqué dans la précédente décision de la Commission, le Crédit Mutuel a également acquis de nouvelles activités dans le domaine du crédit à la consommation ainsi que des activités très limitées par rapport à la distribution de produits d'assurance.

(10) Monabanq est principalement active dans le secteur du crédit à la consommation en France, où elle a également une présence mineure dans la distribution de produits d'assurance. En Belgique, Monabanq a seulement une présence, qui est mineure,  dans l'émission de cartes de paiement ("card issuing"); elle n'est pas active dans le domaine de l'assurance.

Marchés en cause

Crédit à la consommation

(11) La Commission a constaté à plusieurs reprises que le secteur des services bancaires de détail, qui forme un segment des services bancaires, peut être divisé en un certain nombre de prestations, comprenant, entre autres, la gestion de comptes courants personnels, de comptes d’épargne, l'octroi de crédits à la consommation, de crédits hypothécaires,  la  distribution  de  fonds  communs  de  placement  (SICAVs)  et les services de banque privée3.

(12) Le crédit à la consommation est une forme de crédit aux particuliers, destiné à financer l'acquisition, par les ménages, de biens de consommation. Dans le segment du crédit à la consommation, dans ses dernières décisions dans les affaires COMP/M.5384 BNP Paribas / Fortis et COMP / M. 5432 Crédit Mutuel / Cofidis, la Commission a examiné l'offre de crédit renouvelable séparément des autres types de crédit à la consommation, et une segmentation supplémentaire entre le crédit renouvelable lié à une carte de paiement et d'autres formes de crédit renouvelable a été également retenue. En outre, la Commission s'est également posé la question de savoir si le crédit renouvelable liée a une carte de paiement devait encore être subdivisé entre le crédit basé sur des cartes de paiement universelles, par opposition à des cartes de paiement valables uniquement dans un réseau limité de commerces acceptant les cartes en question. La Commission n'a pourtant pas conclu sur le bien- fondé de cette dernière subdivision et a finalement laissé la question ouverte.

(13) La question de savoir si le crédit renouvelable lié à des cartes de paiement doit être subdivisé entre les cartes dites universelles et les cartes à usage plus limité peut aussi être laissée ouverte dans le cadre de la présente procédure, car quelle que soit la définition de marché retenue, l’opération notifiée ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun.

(14) Quant à la dimension géographique du marché du crédit à la consommation, la Commission a confirmé à plusieurs reprises qu'aussi bien ce marché que ses segments potentiels sont d'envergure nationale.4 La Partie notifiante ne conteste pas  la dimension nationale des marchés en cause dans la présente affaire.

Assurance

(15) Crédit Mutuel offre des produits d'assurance vie et non-vie en France,  principalement par le biais de ses filiales bancaires. En revanche, Monabanq n'offre pas de produits d'assurance propres, mais distribue seulement des produits d'assurance comme activité accessoire à son activité de crédit à la consommation en France.

(16) Dans ses dernières décisions, la Commission a constaté que les marchés de l'assurance peuvent, en principe, être subdivisés en autant de marchés qu'il y a de types de risques assurés, puisque du côté de la demande ces produits ne sont pas substituables. Toutefois, la Commission a également remarqué que, du côté de l'offre, les conditions d'assurance de nombreux risques sont similaires et que la plupart des grands assureurs offrent une couverture pour l'ensemble des types de risque les plus communs5. Dans un cas récent, la Commission a néanmoins été amenée à considérer le marché de l'assurance automobile comme marché individuel en cause, en laissant ouvert si ce marché devait être encore subdivisé entre  l'assurance obligatoire couvrant la responsabilité civile et l'assurance étendue de dommages et vol au véhicule (assurance coque)6.

(17) La Commission, dans certaines décisions récentes, a également identifié un marché distinct pour la distribution de produits d'assurance par des intermédiaires indépendants, couvrant tous les canaux de distribution à l'exception de la distribution directe par les compagnies d'assurance et de la bancassurance7 .

(18)  Quant à l'étendue géographique des différents marchés de l'assurance, la  Commission a indiqué dans des précédentes décisions que l'ensemble de ces marchés sont de dimension nationale8 , à l'exception de l'assurance de certaines catégories de grands risques industriels qui ne sont pas concernées par la présente transaction.

(19)  En tout état de cause, les définitions exactes des marchés en cause peuvent être laissées ouvertes aux fins de la présente décision, car quelles que soient les définitions retenues, l’opération proposée ne soulève pas de doutes sérieux quant à  sa compatibilité avec le marché commun.

Analyse concurrentielle

(20) Dans un certain nombre de marchés, il existe des chevauchements horizontaux en raison de l'acquisition proposée de Monabanq. Ces chevauchements se réalisent pour l'essentiel en France, avec seulement un chevauchement en Belgique dans l'activité d'émission de cartes de paiement. Dans tous les cas, sauf dans un seul des segments possibles, les parties détiennent des parts de marché inférieures à [10-20]%. Ainsi, le seul marché potentiellement affecté serait dans le segment des crédits à la consommation en France, plus précisément dans le sous-segment de crédit renouvelable. En tout état de cause, quel que soit la définition du marché retenue, les parts de marché cumulées des parties sont inférieures à [20-30]%.

Relations horizontales

(21) En Belgique, le seul chevauchement entre les Parties se manifeste dans le segment  de l'émission de cartes de paiement où les deux parties auraient une part de marche cumulée de moins de [0-5]% sur base du nombre de cartes émises.

(22) Sur le marché de la banque de détail en France, Crédit Mutuel estime sa part de marché à environ [10-20]% et celle de Monabanq à environ [0-5]%9. En considérant le segment du crédit à la consommation en France, les Parties ont aussi réalisé en 2008, calculé sur base de l'encours des crédits contractés, des parts de marchés bien inférieures à [10-20]%, c'est-à-dire de [10-20]% (Crédit Mutuel [10-20]% et Monabanq [0-5]%).

(23) Les seuls segments où les deux Parties détiennent une part de marché cumulée supérieure à [10-20]% du marché, et qui pourraient dès lors être considérés comme des marchés affectés, se situent dans le domaine du crédit renouvelable en France.

(24) Sur base de l'encours des crédits contractés, les Parties auraient [10-20]% de part de marché du segment du crédit renouvelable dans son ensemble (Crédit Mutuel [10-20]% et Monabanq [0-5]% en 2008). Si les parts de marché pour le segment du crédit renouvelable sont calculées sur la base du nombre de lignes de crédit ouvertes, les Parties ne détiendraient que [5-10]% du marché (Crédit Mutuel [5-10]% et Monabanq [0-5]%) en 2008.

(25) En limitant l'analyse au segment du crédit renouvelable lié à une carte de paiement, et bien qu'il ne soit pas possible de calculer la part de marché cumulée des Parties basée sur l'encours avec exactitude, le fait que ce segment représente environ 80%  du total du crédit renouvelable10 signifie qu'il est possible de conclure avec une certitude élevée que la part de marché cumulée des Parties reste inférieure à [20- 30]%. Les Parties sont présentes de façon très marginale sur le crédit renouvelable non lié à une carte de paiement.

(26) Si les parts de marché dans le segment du crédit lié à une carte sont estimées sur la base du nombre de cartes, les Parties auraient une part de marché cumulée de [10- 20]% (Crédit Mutuel [10-20]% et Monabanq [0-5]%)11.

(27) En considérant une éventuelle segmentation entre le crédit renouvelable lié à des cartes de paiement universelles, d'une part, et le crédit renouvelable lié à des cartes valables uniquement dans un réseau de commerces associés, on constate que Monabanq est seulement active dans le segment de cartes de paiement   universelles.
En considérant que Monabanq n'avait que […] cartes en circulation en fin 2008 sur un total de 4,2 million – c'est-à-dire environ [0-5]%, le chevauchement ne serait pas significatif.

(28) En tout état de cause, il existe un certain nombre d'acteurs qui sont actifs dans le segment du crédit renouvelable en France et qui sont les concurrents des parties dans la présente transaction, y compris des acteurs comme BNP Paribas (23,1%), Sofinco (15,9%), et Cofinoga (8,7%)12 , ainsi qu'une série d'acteurs ayant des parts de marché plus réduites.

(29) Enfin, les activités des Parties se chevauchent en France aussi dans le segment des prêts personnels, mais leur part de marché combinée basée sur l'encours est seulement de [5-10]% (Crédit Mutuel [5-10]% et Monabanq [0-5]%) pour les prêts non affectés et les prêts accordés au point de vente considérés dans leur ensemble.

(30) Il en résulte que l'opération envisagée ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun.

Relations verticales

(31) Étant donné que Crédit Mutuel est actif dans le secteur de l'assurance et que Monabanq distribue certains produits d'assurance, une relation verticale existe. Toutefois, les Parties détiennent des parts de marché cumulées significativement inférieures à [20-30]% sur les marchés en amont et en aval, quelle que soit la définition du marché en cause retenue. Par conséquent, ce marché n'est pas à considérer comme étant verticalement affecté.

(32) Plus particulièrement, Monabanq détient une part de marché dans la distribution de produits d'assurance en France qui est significativement inférieure à [0-5]%. Même  si le marché de la distribution de l'assurance était limité à la distribution par des tiers (c'est-à-dire à l'exclusion de la distribution directe et de la bancassurance), ces parts de marché resteraient très limitées.

(33)  D'autre part, tandis que Crédit Mutuel vend un certain nombre de produits d'assurance en France, ses parts de marché sont de moins de [5-10]% dans chacun  des segments de type de risque.

(34)  Il en résulte que l'opération envisagée ne soulève pas de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun.

VI. CONCLUSION

(35) Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et de la déclarer compatible avec le marché commun. Cette décision est prise sur la base de l'article 6, paragraphe 1, point b, du Règlement du Conseil n° 139/2004.

 

1 JO L 24 du 29.1.2004, p.1.

2  Affaire M. 5432 Crédit Mutuel / Cofidis 

3  Voir l’affaire COMP/M.4844 Fortis/ABN Amro Assets. 

4  Voir, par exemple, la décision de la Commission dans les affaires COMP/ M.5222 Sofinco / Banco 
Popolare / Agos et M. 5384  BNP Paribas / Fortis. 

5  Voir décision dans l'affaire COMP/M.4284  Axa/Winterthur, §§ 8 et 9. 

6  Voir décision dans l'affaire COMP/M.5075 Vienna Insurance Group/EBV, §51. (L'assurance dite 
"omnium" dans les pays francophones regroupe ces deux types de couverture dans une seule et même 
police.) 

7  Voir, par exemple, l'affaire COMP/M.4284 Axa/Winterthur et COMP/M.5075 Vienna Insurance 
Group/EBV. 

8  Voir, par exemple, l'affaire COMP/ M.4284  Axa / Winterthur. 

9   Les chiffres de part de marché cités pour Crédit Mutuel dans la présente décision comprennent le cas 
échéant ceux de Cofidis. 

10  Selon Crédit Mutuel basée sur le rapport réalisé par Athling Management, la part de comptes de 
crédits renouvelables actifs utilisés avec une carte s'élevait à fin 2007 à environ 85,4%.  

11  Estimation sur la base de l'étude "Payment Cards Western Europe 2008", pour l'année 2006 et 
extrapolée par la Partie notifiante pour l'année 2008.

12  Toutes les parts de marché calculées sur la base de l'encours des crédits contractés