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Décisions

CCE, 26 mars 2010, n° M.5701

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

VINCI /CEGELEC

CCE n° M.5701

26 mars 2010

Messieurs, Mesdames,

Objet : Affaire n° COMP/M.5701 – VINCI / CEGELEC
Votre notification du 24 février 2010 conformément à l'article 4 du règlement du Conseil n° 139/2004.

1.  Le 24 février 2010, la Commission a reçu notification, conformément à l'article 4 et à la suite  d’un  renvoi  en  application  de  l’article  4,  paragraphe  5,  du  règlement  (CE)   n° 139/2004 du Conseil1, d’un projet de concentration par lequel l'entreprise Vinci, appartenant au groupe Vinci (France), acquiert, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du règlement du Conseil, le contrôle de l'ensemble de l'entreprise Cegelec (France), filiale de Qatari Diar Real Estate Investment ("Qatari Diar", Qatar), par achat d'actions.

I. LES PARTIES

2. Vinci SA ("Vinci", France) est active principalement dans les domaines suivants: génie électrique, génie climatique et génie mécanique; bâtiment et travaux publics; concessions d'infrastructures routières, autoroutières et travaux routiers.

3. Cegelec ("Cegelec", France) est présent principalement dans le secteur des travaux d'installation et maintenance pour le génie  électrique,  climatique  et mécanique.  Cegelec est aussi active dans le domaine des automatismes, instrumentation et contrôle (système  de détection d'incendie, contrôle d'accès…) et des technologies d'information et de communication (installation du réseau d'infrastructures pour les opérateurs des télécom).

II. LA CONCENTRATION

4. La transaction proposée concerne l'acquisition du contrôle exclusif par Vinci de la société Cegelec. Cegelec est actuellement une filiale de Quatari Diar, ce dernier étant une filiale à 100% de Qatar Investment Authority, fonds d'investissement (Qatar). A l'issue de l'opération, VINCI détiendra 100 % du capital et des droits de vote de Cegelec, ce qui lui en confèrera le contrôle exclusif.

5. L'opération constitue donc une concentration au sens de l'Article 3(1)(b) du Règlement sur les concentrations.

III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE

6. Les entreprises concernées réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus   de 5 000 millions d’euros [33.457 millions d'euros pour Vinci et 3.002 millions d'euros pour Cegelec]2. Chacune d'entre elles réalise un chiffre d'affaires dans l'Union de plus de 250 millions d’euros [29.193 millions d'euros pour Vinci et 2.449 millions d'euros pour Cegelec]. Les deux entreprises ont plus des deux tiers de leur activité dans un seul Etat membre (France) et, par conséquent, la présente transaction n'a pas de dimension communautaire.

7. Dans ce contexte, l'opération étant notifiable dans 7 Etats membres, c'est à l'issue d'un renvoi conformément à l'article 4 paragraphe 5 du Règlement sur les concentrations que cette transaction a été notifiée à la Commission.

IV. DEFINITION DES MARCHES

8. L'opération envisagée concerne le secteur du génie électrique, mécanique et climatique ainsi que le secteur de la pose de caténaires et lignes aériennes de contact notamment en France3.

1) Le secteur du génie électrique, mécanique et climatique

Marché de produit

9. Les parties considèrent que l'opération concerne trois marchés de produits: (i) le génie électrique (réseaux d'énergie et de télécommunication, etc.), (ii) le génie climatique (chauffage, climatisation et traitement de l'air froid etc.) et le génie mécanique (automatismes, instrumentation, contrôle-commande, etc.).

10. Les parties mentionnent la possibilité d'une sous segmentation en fonction du type de travaux, selon qu'il s'agit de prestations d'installation ou de prestations de maintenance. Selon les parties, qu'il s'agisse de génie électrique, mécanique ou climatique, les travaux d'installation incluent la première installation de l'équipement, son entretien, et le cas échéant sa réparation (soit les travaux ponctuels qui ne sont pas couverts par la maintenance proprement dite, voir ci-après) et sa modernisation (soit la modification d'organes des appareils à des fins de performance et de prise en compte des évolutions techniques). De la même manière, pour les trois types de génie, l'offre de maintenance se distingue de l'installation en ce qu'elle correspond à l'organisation de visites de contrôle périodiques, dans le cadre de contrats annuels ou pluriannuels.

11. Au-delà du type de génie (climatique, électrique, mécanique) et du type de travaux (installation ou maintenance), une distinction peut également être opérée en fonction de la clientèle (résidentielle et non résidentielle).

12. Les parties ne sont actives sur le marché résidentiel que de manière résiduelle, avec des parts de marché inférieures à [0-5]% au niveau national en France.

13. Au sein du marché non résidentiel, les parties relèvent la possibilité de distinguer entre les segments infrastructure, industrie et tertiaire.

14. Au total, les segmentations de marché de produit proposées par les parties font bien référence à l'approche retenue par la Commission dans sa pratique décisionnelle concernant la distinction éventuelle des services du génie en fonction (i) de la nature du service (génie électrique, génie mécanique et génie climatique) (ii) du type des travaux (installation ou maintenance)4, (iii) puis du type de clientèle (résidentiel ou non-résidentiel, avec une sous-segmentation du secteur non-résidentiel entre le tertiaire, l'infrastructure  et l'industrie).5 Ces mêmes segmentations éventuelles ont aussi été retenues par les autorités françaises de concurrence dans des décisions plus récentes6.

15. L'enquête de marché a confirmé que la segmentation envisagée dans la pratique décisionnelle de la Commission était pertinente pour l'examen  de  la  transaction considérée.

16. Du coté de l'offre les opérateurs sont présents sur tel ou tel type de génie (climatique, électrique, mécanique), s'adressent de manière plus marquée à certains types de clients (industriels, tertiaires, infrastructures), voire interviennent majoritairement dans l'un ou l'autre des types de travaux (ainsi Vinci est plus fort dans le domaine de l'installation que dans celui de la maintenance quel que soit le type de génie ; Cegelec, pour ce  qui  concerne les génies climatique et mécanique est significativement plus présent en maintenance qu'en installation). Si certains opérateurs – dont les parties à la transaction - sont capables de fournir tous les types de génie, ce n'est pas le cas de la majorité des acteurs, le marché se caractérisant par un nombre élevé d'acteurs de petite taille plus spécialisés, présents au niveau régional.

17. Du coté de la demande, les clients émettent généralement des appels d'offres par type de prestation, selon une segmentation fine. Si de rares clients de grande taille ont fait état d'appels d'offres groupés, les mêmes clients s'adressent également aux fournisseurs sur la base d'une segmentation fine.

18. En outre, une part importante des clients n'émettent d'appel d'offre que pour un seul type de génie ou de prestation liée au génie.

19. Dans ce contexte, l'appréciation des effets de la transaction conduit à opérer des distinctions selon le type de génie (mécanique/climatique/électrique), le type de travaux (maintenance/installation) et le type de client (industriel/tertiaire/infrastructures).

20. L'enquête de marché a ponctuellement soulevé la question d'une distinction à opérer entre les grands projets d'investissement, et les projets de taille réduite. En effet, quelques répondants à l'enquête de marché ont fait état d'une crainte liée à la disparition d'un des acteurs capables de répondre à des projets de taille importante. L'enquête de marché n'a cependant pas fourni d'indications claires permettant d'individualiser les grands projets d'investissement. A contrario, elle a fourni des indications montrant qu'il existait un continuum dans la taille des projets, et que la capacité des acteurs à répondre à des appels d'offres n'était pas strictement proportionnelle à leur taille.

21. L'enquête de marché a enfin soulevé la question de l'existence, au sein du génie électrique, de trois segments distincts liés (i) aux télécommunications, (ii) aux sous-stations électriques, (iii) aux lignes haute tension. Les parties à l'opération ne considèrent pas qu'il s'agisse de marchés pertinents.

22. En ce qui concerne les industries de réseaux télécommunications l'existence d'un marché de  produit  distinct  été  posée  ponctuellement.  En  l'absence  d'éléments substantiels de nature à étayer l'existence d'un tel marché et au vu de l'absence de doutes sérieux sur un  tel marché distinct, pour la présente décision, il n'apparait pas nécessaire de conclure sur l'existence d'une telle sous-segmentation comme pertinente pour l'analyse concurrentielle de l'opération.

23. En ce qui concerne les sous-stations, il s'agit d'installations dont l'objet est de réduire la tension électrique recueillie sur le réseau électrique (il s'agit généralement d'une haute voire d'une très haute tension), afin de la rendre compatible avec l'alimentation des transports ferroviaires via les caténaires. Plusieurs répondants à l'enquête de marché ont fait état du caractère spécifique de ce type de génie électrique.

24. En ce qui concerne enfin l'installation des lignes haute tension, il s'agit d'équipements et de savoirs-faire spécifiques, devant permettre de fournir dans le cadre de marché bi-annuels (ou "marchés cadres"), des prestations d'installation de lignes de transport d'énergie dites "HTB", correspondant à plus de 50.000 volts.

25. En conclusion, il n'est pas nécessaire d'adopter une position définitive quant à la définition du marché de produit, l'opération n'étant pas susceptible de soulever des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, quelle que puisse être la définition retenue.

Marché géographique

26. En ce qui concerne la dimension géographique de ces marchés, les parties considèrent que chaque secteur du génie (climatique, mécanique, électrique) doit être examiné au niveau national.

27. La Commission a analysé dans le passé le marché du génie électrique, en retenant le plus souvent une approche nationale, sans toutefois se prononcer définitivement sur la dimension géographique du marché du génie électrique7. L'autorité de concurrence française, pour sa part, a examiné le marché des travaux électriques tant au niveau national que régional8.

28. Pour le génie climatique et mécanique, dans les décisions précédentes de la Commission ainsi que celles des autorités de concurrence françaises, l'analyse concurrentielle a été faite au niveau national et régional. Toutefois, la question de la délimitation géographique a été laissée ouverte.

29. L'enquête de marché n'a pas permis de tirer des conclusions définitives quand à la délimitation précise du marché géographique.

30. L'enquête a certes confirmé que dans un nombre important de situations, la concurrence s'exerce à un niveau régional. Sur un marché très atomisé, il existe un nombre important de transactions qui font intervenir soit des acteurs régionaux, soit les établissements en région d'entreprises de taille plus importante, telles que les parties.

31. Toutefois, dans certains cas, notamment pour ce qui concerne les clients de grande taille, la rencontre de l'offre et la demande de génie peut s'opérer à un niveau national, permettant au client de faire jouer les économies d'échelle.

32. Il n'est cependant pas nécessaire d'adopter une position définitive quant à la définition du marché géographique, l'opération n'étant pas susceptible de soulever des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, quelle que puisse être la définition retenue.

33. En ce qui concerne l'installation de lignes haute tension "HTB" et les sous-stations, il s'agit de domaines dans lesquels les normes sont définies au niveau national. Dans ce contexte, c'est à ce niveau que l'analyse concurrentielle est réalisée.

2) Le secteur de la pose de caténaires et lignes aériennes de contact

Marché de produits

34. Le marché en cause concerne la pose et l'installation de caténaires et lignes aériennes de contact. Il s'agit de l'alimentation électrique au sein du secteur de transport ferroviaire.

35. Dans le passé, la Commission ne s'est pas prononcée sur la délimitation exacte du marché de la pose de caténaires9. Dans sa pratique décisionnelle, l'autorité de concurrence française a pour sa part envisagé une distinction en fonction des utilisateurs  finaux (chemins de fer locaux ou grandes lignes) et du système utilisé (ligne  aérienne  ou  troisième rail) 10.

36. L'enquête de marché a confirmé la spécificité de l'activité de pose de caténaires et lignes de contact aériennes.

37. Si certains acteurs sont actifs tant au stade de la fabrication qu'au stade de la pose, ces deux activités constituent deux métiers différents.

38. En effet, la fabrication requiert des moyens de production importants (ainsi en matière de câblerie et de fonderie) dont la simple activité de pose est exempte.

39. Par ailleurs, le client final compte tenu de ses besoins spécifiques, peut décider de concevoir lui-même le système de caténaire et en faire assurer la fabrication des composants par une ou plusieurs entreprises (ainsi la SNCF fait appel à plusieurs fabricants de composants). Ce n'est alors qu'en dernier ressort qu'il fait appel à un spécialiste pour procéder à la pose proprement dite.

40. Dans ce contexte, il convient de souligner que les parties notifiantes ne sont actives qu'en matière de pose et que ce n'est qu'occasionnellement qu'elles sont amenée, pour le compte du client final, à acheter les lignes et caténaires auprès du producteur.

41. Au total, l'activité de pose de caténaires et de lignes de contact aériennes constitue un métier spécifique, qui fait appel à des matériels particuliers, et qui requiert un savoir-faire qui le distingue clairement des autres types de travaux de génie électrique.

42. Pour ces raisons, l'analyse de l'impact concurrentiel de l'opération s'effectuera sur le marché de la pose de caténaires et lignes aériennes de contact.

Marché géographique

43. Les parties considèrent que le marché est de dimension nationale, tout comme la pratique décisionnelle de la Commission11, et celle des autorités de concurrence françaises12.

44. L'enquête de marché a confirmé la dimension nationale de ce marché. En effet, la réglementation concernant la sécurité liée à la pose de caténaires et lignes aériennes de contact est nationale, et repose sur des systèmes de normes qui diffèrent d'un  Etat membre à l'autre. De plus, les technologies utilisées font l'objet de standards qui sont définis sur une base nationale.

45. Pour ces raisons, l'analyse de l'impact concurrentiel de l'opération s'effectuera sur une base nationale.

V. ANALYSE CONCURENTIELLE

A.  LES EFFETS HORIZONTAUX

46. La présente opération emporte des effets horizontaux dans la mesure où les parties sont toutes deux actives de manière significative sur les marchés du génie électrique, mécanique et climatique pour le segment non-résidentiel, ainsi que dans le secteur de la pose des caténaires. Comme déjà mentionné, les parties ne sont actives sur le marché résidentiel que de manière résiduelle, avec des parts de marché inférieures à [0-5]% au niveau national en France. L'analyse concurrentielle ci-dessous et les conclusions qui découlent de l'enquête de marché concernent uniquement  le segment non-résidentiel.

47. A titre liminaire, il y a lieu de noter, en ce qui concerne tous ces marchés, que la concurrence s'exerce entre les opérateurs à titre principal par le biais de procédures d'appels d'offres, ce qui a été confirmé par l'enquête de marché.

1) Le secteur du génie électrique, mécanique et climatique

48. La nouvelle entité sera présente en France dans les trois types de génie. A cet égard, les estimations de taille respective des marchés du génie électrique, mécanique et climatique, en 2008 sont les suivantes: [20.000-25.000] millions d'euros pour le génie électrique, [5.000-10.000] millions d'euros pour le génie mécanique, [5.000-10.000] millions d'euros pour le génie climatique13.

49. Sur ces marchés, la nouvelle entité se trouvera en concurrence avec un nombre important d'entreprises. L'étude LEK, sur laquelle les parties fondent leurs analyses, fait état des parts de marchés suivantes pour les principaux acteurs :

 

 

Génie électrique

Génie mécanique

Génie climatique

VINCI

[10-20]%

[5-10]%

[5-10]%

CEGELEC

[5-10]%

[0-5]%

[0-5]%

VINCI+CEGELEC

[10-20]%

[10-20]%

[5-10]%

GDF

[5-10]%

[5-10]%

[5-10]%

SPIE

[5-10]%

[0-5]%

[0-5]%

Forclum

[5-10]%

[0-5]%

[0-5]%

ETDE

[0-5]%

[0-5]%

[0-5]%

Clemessy

[0-5]%

[0-5]%

-

50. Les éléments qui suivent analysent marché par marché, les effets de la transaction.

51. En ce qui concerne le marché du génie électrique en France, où la position combinée de Vinci et Cegelec est la plus forte, la part de marché cumulée des deux entreprises est supérieure à 15% au niveau national ([15-20]%). Le marché du génie électrique, ainsi que le démontre l'étude LEK citée à plusieurs reprises par les les parties, est très peu concentré. D'autres acteurs importants que les parties y sont actifs, tels que GDF Suez ([5-10]%), Spie ([5-10]%) ou encore Forclum ([5-10]%).

52. Pour ce qui concerne plus spécifiquement le marché national du génie électrique- installation-infrastructure, segment sur lequel les parties sont particulièrement fortes, la part de marché cumulée au niveau national atteint [20-30]%. La nouvelle entité devra faire face à la concurrence d'entreprises comme GDF Suez ([10-20]%), Forclum ([10- 20]%) ou Spie ([5-10]%).

53. Une analyse au niveau régional indique que la part de marché cumulée sur le marché du génie électrique ne sera supérieure à 25% que dans quatre régions (Normandie [25-30]%, Picardie [25-30]%, Guyane [20-30]% et Réunion [20-30]%14) et supérieure à 15% dans douze régions15. Toutefois, dans ces régions, le nouvel ensemble devra faire face à des concurrents puissants, en particulier en Normandie (Forclum [10-20]%, Spie [10-20]%), en Picardie (Ineo [10-20]%, Forclum [10-20]%), et dans les Départements d'Outre-Mer (Forclum [5-10]%).

54. Une analyse plus fine des marchés du génie électrique régionaux, par type de client (infrastructures, industriels, tertiaire), permet d'établir qu'une vingtaine de régions  peuvent être considérées comme affectées. Si la part de marché de la nouvelle entité excède en effet 15% dans vingt régions pour le secteur des infrastructures, elle demeure toutefois toujours inférieure à [30-40]% (Guyane [30-40]%)16, En ce qui concerne le secteur industriel, cinq régions sont affectées, mais la part de marché du nouvel ensemble demeure toujours inférieure à [20-30]% (Picardie [20-30]%)17 . Enfin, en ce qui concerne le secteur tertiaire, cinq régions sont affectées, mais la part de marché n'excède nulle part [30-40]%  (Guyane [30-40]%)18.

55. Comme expliqué ci-dessous, compte tenu de leur niveau relativement limité, les parts de marché ne constituent qu'un indicateur de la situation concurrentielle, telle qu'elle résultera de la transaction. A cet égard, l'enquête de marché a permis d'établir qu'un nombre significatif d'acteurs nationaux seront capables de répondre aux appels d'offres (notamment Forclum (Eiffage), Inéo (GDF Suez), Snef, Spie, Clemessy et ETDE). Elle a également confirmé qu'outre ces acteurs de dimension nationale, un nombre suffisant d'offreurs de dimension régionale (notamment Soparel, OET, Télécoise et IEM) aura également la capacité de répondre aux appels d'offres et d'offrir ainsi une alternative concurrentielle aux offres de la nouvelle entité.

56. Concernant un possible marché pertinent du génie électrique destiné aux technologies de l'information et de la télécommunication, les parts de marché au niveau national, telles qu'estimées par les parties, n'excèderont que légèrement celles dont elles bénéficieront sur le marché global du génie électrique, à savoir au maximum [20-30]% pour les infrastructures de télécommunication. Si le test de marché n'a pas fourni d'indication précise quant à la part de marché, il a cependant confirmé que l'opération n'était pas susceptible de soulever des risques concurrentiels.

57. Même en considérant la segmentation la plus fine pour laquelle la nouvelle entité détient les parts de marché les plus élevées, c'est-à-dire le segment des travaux d'installations en matière du génie électrique pour le secteur des infrastructures analysé au niveau régional, l'enquête de marché confirme l'existence d'une concurrente forte.

58. En ce qui concerne le marché du génie climatique en France, la part de marché cumulée  au niveau national est inférieure à 15% ([5-10]%). Le marché est peu consolidé, et comprend d'autres concurrents, parmi lesquels de grandes entreprises telles que GDF Suez ([5-10]%), Spie ([0-5]%), Forclum ([0-5]%), ainsi qu'un nombre important d'acteurs régionaux de taille plus modeste, qui concurrencent les parties pour des projets spécialisés au niveau local. Vinci et Cegelec ont une part de marché cumulée supérieure à 15% au niveau   national   dans   le   sous-segment   concernant   le   génie climatique-maintenance- industrie ([15-20]%). Au niveau régional, la part de marché cumulée en génie climatique est supérieure à 15% dans deux régions (Ile de France [20-30]% et Réunion [15-20]%).

59. L'enquête de marché a confirmé la présence de concurrents capables de répondre aux appels d'offre spécialisés pour les travaux de génie climatique.C'est le cas de grandes entreprises telles que Dalkia, Axima, Cofely, Spie et Seitha (GDF Suez). C'est également le cas des nombreux concurrents de plus petite taille qui sont actifs au niveau régional, tels que Balas et Rougnon en Ile–de-France, lesquels exercent une pression  concurrentielle significative

60. Enfin, en ce qui concerne le marché du génie mécanique, la part de marché cumulée au niveau national est également inférieure à 15% puisqu'elle s'établit à [10-15]%. Le marché est peu concentré, puisque sont présents de nombreux concurrents, tels que GDF Suez ([5-10]%), Forclum ([0-5]%), Spie ([0-5]%). Vinci et Cegelec ont une part de marché cumulée supérieure à 15% au niveau national dans le sous-segment concernant le génie mécanique-maintenance-infrastructure ([15-20]%). Au niveau régional, la part de marché cumulée en génie mécanique est supérieure à 15% dans quatre régions (Alsace [15-20]%, Haute Normandie [20-30]%, Picardie [15-20]% et Rhône-Alpes [15-20]%).

61. L'enquête de marché a confirmé la part de marché relativement faible de la nouvelle entité sur le marché du génie mécanique ainsi que la présence de grands acteurs nationaux tels que Endel, Snef, Alstom et Inéo.

62. Plus généralement, les parts de marché, limitées, n'indiquent pas que l'opération soit susceptible d'entraîner une réduction significative de la concurrence effective. L'opération, plus largement, doit être replacée dans le cadre de marchés fonctionnant pour l'essentiel par appels d'offres. Dans ce contexte, il est essentiel d'examiner le nombre d'acteurs présents sur le marché, qui sont, de fait, nombreux, tant au niveau national que régional. Au nombre des concurrents crédibles au niveau national peuvent ainsi être mentionnés Eiffage, Clemessy, Spie, GDF Suez et Bouygues. Ces acteurs sont présents sur l'ensemble du territoire, notamment à travers leurs filiales régionales. De plus, de nombreux acteurs de taille plus modeste ou régionale, une cinquantaine, sont également présents sur ces différents marchés (notamment Sobeca, JP Fauché etc.). Les parties relèvent également le fort pouvoir de négociation des autorités adjudicatrices des marchés.

63. En outre, sans préjudice du type de génie (mécanique, électrique, climatique), s'il devait être considéré qu'il existe un marché spécifique correspondant à des appels d'offre pour des projets d'investissement de taille significative, l'opération ne se traduirait pas par une réduction significative de la concurrence. En effet, outre la nouvelle entité, plusieurs concurrents de taille nationale seraient en mesure de répondre à de tels appels d'offre (GDF Suez-Ineo, Forclum, Spie, Etde). De surcroît, des entreprises de taille plus réduites sont capables soit de répondre directement à de tels appels d'offre, soit de se réunir afin d'y pouvoir19.

64. En ce qui concerne l'installation de lignes haute tension "HTB", marché estimé par les parties à [500 – 1.000] millions d'euros, l'opération n'est pas susceptible de se traduire par une réduction  significative  de la concurrence. A l'issue  de l'opération,  la nouvelle entité détiendra une part de marché de [20-30]% selon les estimations des parties, mais cette part de marché pourrait selon l'enquête s'avérer supérieure, faisant de la nouvelle entité le leader du marché. Néanmoins, sur cet éventuel marché, l'unique acheteur est le gestionnaire du Réseau de Transport d'Electricité (RTE), lequel dispose d'un important pouvoir de négociation. De surcroît d'autres acteurs importants tels qu'Ineo (GDF-Suez), Forclum (Eiffage) ou ETDE (Bouygues) sont présents, de même que des entreprises non résidentes qui, à l'instigation du RTE, ont fait leur entrée sur le marché. Pour ces raisons, tout risque de réduction significative de la concurrence peut être écarté.

65. En ce qui concerne les sous-stations électriques, les parties estiment leur part de marché à [20-30]% au niveau national. Si l'enquête de marché n'a pas permis de corroborer cette estimation, elle n'a pas permis non plus d'établir que la nouvelle entité détiendrait un pouvoir de marché sur un éventuel marché des sous-stations électriques. En effet, à l'issue de la transaction, un nombre significatif d'acteurs seront capables de fournir de tels services, qu'il s'agisse d'acteurs nationaux (Colas, Forclum, Alstom, Ineo, Spie) ou internationaux (Electren, Sifel). De surcroît, sur un tel marché, la demande est très concentrée entre un petit nombre d'acteurs, à titre principal la SNCF et le gestionnaire du Réseau Ferré de France (RFF). Pour ces raisons, tout risque de réduction significative de la concurrence peut être écarté.

66. En conclusion, l'enquête de marché de marché a confirmé que l'opération ne soulève pas de doutes sérieux ni au niveau national, ni au niveau  régional,  que l'on considère  le marché globalement ou par segment d'activité.

2) Le secteur de la pose des caténaires et de lignes aériennes de contact

67. En ce qui concerne le marché de la pose des caténaires et lignes aériennes de contact, la part de marché cumulée des parties représente selon ces dernières [10-20]% au niveau national (soit [5-10]% pour Vinci, [10-20]% pour Cegelec). Le volume de ce marché est estimé par les parties à [100 – 200] millions d'euros en 2008 en France.

68. Tout risque de réduction significative de la concurrence effective peut être écarté pour les raisons suivantes.

69. Premièrement, le nouvel ensemble devra faire face, après transaction, à une série de concurrents puissants. A cet égard, l'enquête de marché a confirmé qu'à l'issue de l'opération, du coté de l'offre, Colas Rail et le nouvel ensemble seraient les deux acteurs principaux, la part de marché du nouvel ensemble s'établissant autour de [20-30]%. Elle a également confirmé que d'autres acteurs, de moindre taille, seraient également présents et capables d'animer la concurrence (GDF Suez-Ineo, TSO Caténaires, Alstom).

70. Deuxièmement, les parties soulignent que bien qu'absents en l'état du marché, des concurrents étrangers tels que Siemens seront en mesure d'exercer également une pression concurrentielle

71. Troisièmement, il doit être souligné que sur ce marché, qui fonctionne par procédures d'appel d'offre, le principal client, Réseau Ferré de France, dispose d'un important contre- pouvoir compte tenu de l'ampleur de ses achats, que ses concurrents sur ce marché estiment être de l'ordre des ¾ du marché (et 76% du chiffre d'affaires des parties en  2008). RFF, estime pour sa part que ses achats représentent 95% du marché, ce qui lui confère une marge de manœuvre certaine en matière d'animation de la concurrence.

72.  Pour ces raisons, la présente opération, au regard de l'analyse de ses effets horizontaux, ne semble pas présenter de sérieux doutes quant à sa compatibilité avec le marché  intérieur.

B. LES EFFETS VERTICAUX ET CONGLOMERAUX

73. La présente opération n'emporte aucun effet vertical ni congloméral.

74. En ce qui concerne les effets verticaux, ni Vinci ni Cegelec ne sont présents sur le marché de la fabrication des installations ou du matériel utilisés dans les domaines du génie électrique, mécanique et climatique, ni sur le marché de la fabrication des caténaires et des lignes aériennes de contact. Les parties fournissent seulement des services de génie et ne sont pas actives sur des marchés en amont ou en aval.

75. En ce qui concerne les effets congloméraux en matière de génie (mécanique, climatique, électrique), l'opération n'est pas susceptible de soulever de doutes sérieux.

76. A cet égard, l'enquête de marché à confirmé que les appels d'offres incluant plusieurs types de génie étaient fréquents, quoique minoritaires. De tels appels d'offre peuvent couvrir deux voire les trois grands types de génie (mécanique, climatique, électrique).

77. Dans la mesure où le nouvel ensemble sera capable de fournir indistinctement tous  les types de prestations liées aux génies climatique, électrique et mécanique, il pourrait bénéficier d'un avantage concurrentiel sur ceux de ses concurrents qui ne sont présents que sur tel ou tel type de génie. Les éléments qui suivent démontrent cependant que la présente transaction ne soulève pas ce type de risque.

78. Tout d'abord, les parts de marché des parties, quelles que soient les définitions de marché retenues (de produit et géographiques), demeureront relativement peu élevées. Comme le montre le tableau ci-après qui récapitule les parts de marché nationales par type de génie, la nouvelle entité sera loin d'être la seule en mesure de proposer les trois types de services de génie, dans la mesure où un nombre significatif de concurrents puissants sont capables de fournir les trois types de génie en France.

 

 

Génie électrique

Génie mécanique

Génie climatique

VINCI

[10-20]%

[5-10]%

[5-10]%

CEGELEC

[5-10]%

[0-5]%

[0-5]%

VINCI+CEGELEC

[10-20]%

[10-20]%

[5-10]%

GDF

[5-10]%

[5-10]%

[5-10]%

SPIE

[5-10]%

[0-5]%

[0-5]%

Clemessy

[0-5]%

[0-5]%

-

Forclum

[5-10]%

[0-5]%

[0-5]%

ETDE

[0-5]%

[0-5]%

[0-5]%

 

79. Plus généralement, ainsi qu'il a été souligné, les marchés du génie fonctionnent dans la très grande majorité des situations par procédures d'appel d'offre. Les clients sont libres de procéder à des appels d'offre de la taille qu'ils souhaitent, incluant un ou plusieurs types de génie. Ils peuvent ainsi contracter auprès de fournisseurs différents les prestations qu'ils achètent pour chaque type de génie.

80. De surcroît, l'enquête de marché a confirmé que des acteurs de taille moyenne et/ou présents dans un type de génie peuvent présenter une offre conjointe capable d'emporter l'appel d'offre vis-à-vis de concurrents intégrés.

81. Enfin, il y a lieu de souligner que préalablement à l'opération, à quelques très rares exceptions près (Vinci n'est pas actif en génie climatique/maintenance/infrastructures) Vinci et Cegelec étaient déjà présents sur toute la gamme des types de génie. Dans ce contexte, la transaction ne modifie pas les conditions de marché.

82. Des craintes ponctuelles ont également été exprimées lors de l'enquête de marché portant sur un éventuel avantage concurrentiel qui pourrait résulter de la capacité de proposer conjointement une offre en matière de génie civil (mécanique, électrique, climatique, immobilier), et une offre en matière d'installation et de pose de caténaires et lignes de contacts aériennes. Un tel modèle correspond à la situation de Colas, ainsi qu'à celle de la nouvelle entité.

83. A cet égard, tout risque de réduction significative de la concurrence effective peut être écarté. En effet, Vinci étant déjà présent à la fois en génie civil et en pose de caténaires et lignes aériennes de contact, l'opération est dès lors sans impact significatif. Surtout, la pratique commerciale en matière de pose de caténaires et de lignes de contact aériennes est en général d'émettre des appels d'offres pour ces prestations distincts de toute autre opération. Dans ce contexte, la capacité à offrir d'autres prestations n'est pas de nature à conférer un avantage concurrentiel.

84. Au total, les risques d'effet congloméraux générés par le nouvel ensemble apparaissent donc limités dans le cas présent.

VI. CONCLUSION

85. Pour les raisons exposées ci-dessus, la Commission a décidé de ne pas s'opposer à l'opération notifiée et de la déclarer compatible avec le marché intérieur et avec l'accord EEE. Cette décision est prise sur la base de l'article 6, paragraphe 1, point b, du règlement du Conseil n° 139/2004.

 

1 JO L 24 du 29.1.2004, p. 1. A compter du 1er décembre 2009, les articles 81 et 82 du traité CE sont 
devenus respectivement les articles 101 et 102 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne 
("TFUE"). Dans les deux cas, les dispositions sont, en substance, identiques. Aux fins de la présente décision, 
les références faites aux articles 101 et 102 du TFUE s'entendent, s'il y a lieu, comme faites respectivement 
aux articles 81 et 82 du traité CE. Le TFUE a également introduit des modifications terminologiques, telles 
que la substitution de l'expression "Communauté" par "Union" et "marché commun" par "marché intérieur". La terminologie du TFUE sera utilisée tout au long de la décision.

2 Chiffre d’affaires calculé conformément à l’article 5(1) du règlement relatif au contrôle des opérations de 
concentrations

3 Les activités des parties mènent à des chevauchements horizontaux dans plusieurs Etats membres. 
Néanmoins, il n'ya pas de marchés affectés dans d'autres pays que la France. 

4 DécisionComp. M.3004 Bravida/Semco/Prenad

5 Décision Comp M.2447Fabricom/GTI 

6 Décision n° C-2008-117 du 4 décembre 2008 relative à la concentration Eiffage/Clémessy et Crystal et 
décision n° 09-DCC-030 du 29 juillet 2009 relative à l'acquisition des sociétés E.T.C.M. et GER21 
Ensemblier par la société EIFFEL Participations (groupe EIFFAGE).

7Décision Comp M.2447Fabricom/GTI 

8 Décision du Ministère français de l'économie Eiffage/Clemessy et Crystal du 4 décembre 2008 n°C2008-117

9 Décision Comp M. 3653 Siemens VA/Tech (par.165)

10 Décision du Ministre français de l'économie relative à l'acquisition des sociétés CogiferSA et Cogifer TF 
par Vossloh AG du 11 septembre 2002 n°C2003-04.

11Décision COMP M.3653 Siemens/VA Tech (par.167)

12Decision Eurovia/Vossloh Infrastructures services, Ministère français de l'Economie C2008-84

13 La source des ces données est fournie par LEK Consulting dans leur étude réalisée pour les parties en 
octobre 2009. Les évaluations de la taille des secteurs du génie électrique et climatique sont cohérentes 
avec celles des différentes études publiées par la société indépendante Xerfi – Installations électriques 
2009, Génie climatique 2009

14 Les deux seuls Départements d'Outre-Mer sur lesquels les parties sont simultanément présentes en génie électrique sont la Guyane et la Réunion, car Cegelec n’a pas d’activité en Martinique ou en Guadeloupe. 

15 Les douze régions sont: Aquitaine, Auvergne, Basse-Normandie, Bretagne, Haute-Normandie, Ile de 
France, Lorraine, Midi-Pyrénées, Pays de la Loire, Picardie, Réunion et  Guyane.

16 Aquitaine [20-30]%, Auvergne [20-30]%, Basse-Normandie [30-40]%, Bourgogne [20-30]%, Bretagne 
[30-40]%, Centre [20-30]%, Champagne Ardennes [15-20]%, Franche-Comté [20-30]%, Haute-
Normandie [20-30]%, Ile-de-France [20-30]%, Limousin [20-30]%, Lorraine [20-30]%, Midi Pyrénées 
[20-30]%, Nord-Pas-de-Calais [20-30]%, PACA [15-20]%, Pays-de-la-Loire [30-40]%, Picardie [20-
30]%, Rhône Alpes [20-30]%, Réunion [20-30]% et Guyane [30-40]%.

17 Champagne Ardennes [15-20]%, Haute-Normandie [20-30]%, PACA [15-20]%, Picardie [20-30]%, 
Réunion [20-30]%.

18 Auvergne [15-20]%, Basse-Normandie [20-30]%, Ile-de-France [20-30]%, Picardie [30-40]%, Guyane [30-
40]%.

19 A cet égard, les parties notifiantes ont fourni des éléments qui confirment la capacité d'acteurs de plus 
petite taille en concurrence avec Vinci et/ou Cegelec de remporter des appels d'offres portant sur des 
montants importants, et ce qu'il s'agisse de génie climatique, électrique ou mécanique.