Commission, 19 septembre 2014, n° M.7011
COMMISSION EUROPÉENNE
Décision
SNCF / SNCB / THALYS JV
Madame, Monsieur,
Objet: Affaire M.7011– SNCF/SNCB/Thalys JV
Décision de la Commission en application de l’article 6(1)(b) du règlement (CE) n°139/2004 du Conseil1
1. Le 14 août 2014, la Commission européenne a reçu notification, conformément à l’article 4 du Règlement sur les concentrations, d’un projet de concentration par lequel la Société Nationale des Chemins de fer Français (« SNCF ») et la Société Nationale des Chemins de fer Belges (« SNCB ») acquièrent, au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du Règlement sur les concentrations, le contrôle en commun, par achat d'actions, d'une entreprise ferroviaire nouvellement créée constituant une entreprise commune, « Thalys JV ».
1. LES PARTIES
2. La SNCF est l'entreprise ferroviaire française historique. Ses activités comprennent le transport par rail de passagers et de marchandises, la gestion des gares et de l'infrastructure ainsi que des activités d'ingénierie.
3. La SNCB est l'entreprise ferroviaire belge historique. Ses activités comprennent le transport par rail de passagers et de marchandises, ainsi que la gestion des gares depuis le 1er janvier 2014.
4. Thalys JV sera le véhicule permettant à la SNCF et la SNCB de regrouper leurs intérêts dans la Coopération Thalys. Thalys JV opérera les services Thalys2 sur les territoires français et belges et représentera les intérêts de ses mères vis-à-vis de la DB et des NS, les opérateurs ferroviaires historiques respectivement allemand et néerlandais.
5. Dans la suite, la SNCF et la SNCB sont dénommées les Parties.
2. LA CONCENTRATION
2.1. Situation actuelle
6. La SNCF, la SNCB, la DB et les NS opèrent des services de transport ferroviaire de passagers entre la France, la Belgique, l'Allemagne et les Pays-Bas au sein de la Coopération Thalys.
7. La gouvernance de la Coopération Thalys est assurée par un Comité de Pilotage Paris/Bruxelles/Köln/Amsterdam, (« Copil PBKA »). Au sein de ce Copil PBKA, les décisions sont prises à l'unanimité de la SNCF, la SNCB, les NS et la DB.3 La SNCF, la SNCB et la DB ont par ailleurs constitué une filiale commune, Thalys International (« THI »), qui a pour vocation de développer la politique commerciale de l'offre Thalys sur le marché, ainsi que le marketing.4 Aux termes des accords qui régissent la gouvernance de THI, les décisions les plus importantes de THI nécessitent l’accord des représentants d’au moins [Confidentiel] des [Confidentiel] actionnaires.5
8. Depuis 2011, la DB se retire progressivement de la Coopération Thalys afin de se concentrer sur sa propre offre. Son retrait total devrait intervenir au plus tard en [Confidentiel]. Dans la période transitoire, la DB est un partenaire [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].6
9. Il apparaît qu'en pratique la coexistence du Copil PBKA et de THI implique que: [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].7 8
10. La production du service (conduite, accompagnement, commande de sillons, escale, gestion des situations perturbées, remonte, accès en gares, avitaillement) est assurée par les quatre partenaires, chacun dans son pays respectif. Les partenaires assurent aussi la distribution des services Thalys.9
2.2. L'opération en cause
11. Le 11 juillet 2013, la SNCF et la SNCB ont signé un Protocole d'Accord prévoyant la création de Thalys JV, détenue à 60% par la SNCF et à 40% par la SNCB.
2.2.1. Nature du contrôle exercé par la SNCF et la SNCB sur Thalys JV
12. Aux termes du Protocole d'Accord, le conseil d'administration de Thalys JV est composé de 7 membres: 4 nommés sur proposition de la SNCF et 3 sur proposition de la SNCB
13. Par défaut, les décisions sont prises au sein du conseil d'administration à la majorité simple.
2.2.1.1. Droits de véto de la SNCB
14. Certaines décisions sont toutefois soumises à une majorité qualifiée de [Confidentiel] voix sur [Confidentiel]. Ces décisions incluent notamment (i) l'approbation du budget, (ii) l'approbation du plan d'affaires, y compris tout changement ou modification au plan d'affaires initial ayant un impact financier supérieur à EUR [Confidentiel] ainsi que (iii) toute décision d'investissement supérieur à [Confidentiel] ce qui couvre [Confidentiel] et (iv) les transactions ou accords avec une des deux Parentes et/ou avec un Affilié d’une des Parentes d'un montant supérieur à [Confidentiel].10
15. Compte tenu du champ des décisions sur lesquels s'exerce le droit de véto de la SNCB, la Commission conclut que ce dernier va au-delà des droits de véto normalement consentis aux actionnaires minoritaires pour la protection de leurs intérêts.
2.2.1.2. Mécanisme de résolution des situations de blocage
16. Le Protocole d'Accord prévoit également un mécanisme de résolution des situations de blocage en cas d'absence de majorité qualifiée pour la prise d'une décision nécessitant une telle majorité. Ce mécanisme comporte deux types de résolution des blocages: l'une dite « courte » d'une durée d'environ 25 jours ouvrés et l'une dite « longue » d'une durée d'environ 45 jours ouvrés. Les procédures (courte et longue) comportent plusieurs étapes. Si et seulement si à aucune de ces étapes un accord n'est trouvé, la SNCF pourra convoquer un nouveau conseil d'administration qui statuera à la majorité simple sur la décision objet du blocage. Dans cette hypothèse, la SNCB disposera d'un délai de dix jours pour exercer une option de vente, lui permettant de vendre à la SNCF l'intégralité de sa participation dans Thalys JV, pour un prix correspondant à sa valeur marchande.11 Prima facie, il semblerait donc que la SNCF dispose d'une voix prépondérante par rapport à la SNCB quant aux décisions stratégiques relatives à Thalys JV.
17. Toutefois, afin d'apprécier la nature exacte du contrôle exercé par la SNCF et la SNCB sur Thalys JV, il convient de déterminer la probabilité d'exercice par la SNCF de sa voix prépondérante. En effet, le paragraphe 82 de la Communication juridictionnelle12 pose quatre critères alternatifs afin d'évaluer cette probabilité: « Il peut néanmoins y avoir contrôle commun si, dans la pratique, la pertinence et l'efficacité de cette voix prépondérante sont limitées. Ce peut être le cas si cette voix prépondérante ne peut être exprimée qu'à l'issue d'une longue procédure d'arbitrage ou de plusieurs tentatives de conciliation, si elle ne porte que sur un domaine très restreint, si son utilisation déclenche une option de vente entraînant une lourde charge financière ou encore si l'interdépendance des sociétés mères rend cette utilisation improbable ». Ainsi la logique du paragraphe 82 est d'identifier les situations où l'usage de la voix prépondérante est si encadré que le titulaire de cette voix, craignant de lourdes conséquences, s'abstiendra de l'exercer, de telle sorte que l'autre partie détient un droit de véto réel et efficace.
18. Tout d'abord, il convient de remarquer qu'une procédure de résolution des blocages d'une durée maximale de 45 jours n'apparaît pas à première vue comme particulièrement longue. En tout état de cause, une analyse en l'espèce montre l'existence d'une interdépendance réelle entre la SNCF et la SNCB dans le cadre du projet Thalys. En effet, ces dernières coopèrent depuis plus de 20 ans dans le cadre de la Coopération Thalys. Au cours de ces années, elles ont fait des investissements très importants pour la création et le développement de l'offre Thalys. Par ailleurs, la création de Thalys JV est le fruit de leur volonté commune de rendre la gestion des services Thalys plus efficace ce qui démontre leur intérêt commun et à long terme.13 Enfin, elles partagent des objectifs communs: le succès commercial de la Coopération Thalys14 et [Information confidentielle sur la stratégie des parties quant aux nouveaux entrants]. En outre, la SNCF et la SNCB coopèrent aussi dans le cadre des services Eurostar, un autre élément soulignant leurs intérêts communs en ce qui concerne les services ferroviaires internationaux.15
19. Par ailleurs, les deux Parties font des apports et prennent des engagements qui sont indispensables à l'activité de Thalys JV. La valeur provisoire des apports des Parties à la date de signature du Protocole d’Accord s’élevait à [Confidentiel] pour la SNCF et [Confidentiel] pour la SNCB. En sus des actifs transférés en propre, tels que les droits de propriété intellectuelle que la SNCB détient dans la marque Thalys, les deux Parties vont mettre à disposition de Thalys JV sur la base de conditions commerciales normales notamment des rames, des conducteurs et accompagnateurs de train; elles distribueront les billets Thalys dans leur pays respectif et fourniront des services de maintenance.
20. Enfin, l'interdépendance [Information confidentielle].
21. Ainsi, au regard des éléments qui précèdent, il peut être conclu que la voix prépondérante de la SNCF est d'une pertinence et d'une efficacité limitée.
22. En conclusion, Thalys JV sera contrôlée conjointement par la SNCF et la SNCB.
2.2.2. Caractère de plein exercice de Thalys JV
23. Thalys JV disposera par ailleurs de tous les moyens nécessaires à son activité de transport de passagers par rail en France et en Belgique. En effet, elle disposera à cette fin de son propre certificat de sécurité, de son propre personnel (personnel d'encadrement, de même que les conducteurs de train et le personnel d'accompagnement à bord), de ses propres ressources financières, de ses propres actifs (en particulier les locaux et les trains).
24. Thalys JV sera donc une entreprise commune de plein exercice au sens du Règlement sur les concentrations.
25. Au regard des éléments qui précèdent, l'opération notifiée se traduit par une concentration au sens de l'article 3, paragraphe 1, point b), du Règlement sur les concentrations. Dans la suite, elle est nommée l'Opération.
2.2.3. Clause de non-concurrence
26. La SNCF et la SNCB ont inclus une clause de non-concurrence dans l'accord constituant Thalys JV. De par cette clause, la SNCF et la SNCB s'engagent à ne pas commencer l'exploitation, la gestion ou la mise en œuvre de nouveaux services ferroviaires à grande vitesse sur les routes aujourd'hui exploitées par la Coopération Thalys. Par ailleurs, la clause de non-concurrence vise à [Information confidentielle (contenu de la clause de non-concurrence)]. Enfin, la clause de non-concurrence n'interdit ni la location de matériel roulant à un tiers, ni l'offre de services de transporteur substitué16, tant que la rémunération de ces services n'inclut pas de participation au bénéfice du service de transport mis en œuvre.
27. En conséquence, l'objet principal de la clause est de permettre à Thalys JV d'opérer dans un paysage concurrentiel similaire à celui qui prévalait avant la création de l'entreprise commune. Il appartient aux Parties d'apprécier elles-mêmes si et dans quelle mesure cette clause peut être considérée comme accessoire à l'Opération.17 En tout état de cause, quel que soit le résultat d'une telle évaluation, la clause de non- concurrence entraîne une perte de concurrence potentielle et sera reprise dans l'analyse concurrentielle.
3. DIMENSION UE
28. Les entreprises concernées réalisent un chiffre d’affaires mondial consolidé de plus de EUR 5 milliards (SNCF: EUR 33 820 millions; SNCB: [Confidentiel]18. Chacune d’entre elles réalise un chiffre d’affaires dans l’Union de plus de EUR 250 millions (SNCF: [Confidentiel]; SNCB: [Confidentiel]). Enfin même si chacune d'entre elles réalise plus des deux tiers de son chiffre d’affaires total dans un seul État membre, il ne s'agit pas du même Etat membre (la SNCF en France et la SNCB en Belgique).
29. L’Opération a donc une dimension européenne selon l’article 1(2) du Règlement sur les concentrations.
4. DEFINITION DES MARCHES PERTINENTS
30. Thalys JV opérera des services à grande vitesse de transport ferroviaire de passagers. En particulier, Thalys JV exploitera 7 axes principaux ("Routes"), à savoir: (i) Paris-Bruxelles, (ii) Paris-Pays-Bas, (iii) Bruxelles-Pays-Bas, (iv) Paris- Allemagne, (v) Bruxelles-Allemagne (vi) Lille-Pays-Bas et (vii) Lille-Bruxelles. Le Schéma 1 ci-dessous présente ces Routes ainsi que les arrêts intermédiaires le long de celles-ci.
Schéma 1 - Routes exploitées par la Coopération Thalys avant l'Opération
Source: Site internet Thalys
4.1. Analyse par Route internationale concernée
31. Dans sa pratique décisionnelle concernant le transport international par rail de passagers, la Commission a analysé les marchés sur la base du trajet entre le point d'origine et le point de destination ("O&D").19 Cette approche correspond aux considérations selon lesquelles différentes combinaisons de points d'origine et de points de destination ne sont pas substituables du point de vue de la demande.
4.1.1. Position des Parties
32. Au cas d'espèce, les Parties considèrent que les effets de l'Opération doivent s'analyser sur les 7 Routes listées au paragraphe 30.
4.1.1.1. Absence de pertinence d'une analyse des effets de l'Opération sur les segments nationaux opérés par Thalys JV
33. Les Parties considèrent qu'une application stricte de l'approche O&D au niveau national ne semble pas être pertinente au moins pour les raisons suivantes.
34. Tout d'abord, pour autant que la mise en œuvre le 1er janvier 2010 du troisième paquet ferroviaire20 a créé la possibilité pour une seule entreprise ferroviaire de fournir un service de transport international de passagers, les services domestiques de transport par rail de passagers restent pour l'essentiel des monopoles détenus par les opérateurs historiques et ne sont pas actuellement libéralisés au niveau européen. Toutes les O&D nationales desservies par les opérateurs étrangers, comme par exemple ICE en Belgique entre Liège et Bruxelles, sont en effet des produits secondaires le long des sept Routes principales.
35. En Belgique, les dorsales flamandes (routes domestiques de Bruxelles à Ostende) et wallonnes (routes domestiques de Liège à Mons) desservies par les services Thalys correspondent à des obligations de service public imposées à la SNCB par l'État belge. [Information confidentielle (financement de certaines routes)].21
36. En France, les O&D nationales correspondent aux services saisonniers offerts pas Thalys à destination de Bourg Saint Maurice (comprenant les gares de Chambéry, Albertville, Moûtiers Salins, Aime-la-Plagne, Landry et Bourg Saint Maurice) et de Marseille (comprenant les gares de Valence, Avignon, Aix en Provence et Marseille). Ces trains "neige" et "soleil" [Information commerciale sensible (décision stratégique)].22
37. En outre, la plupart des arrêts intermédiaires le long des segments principaux opérés par les services Thalys correspondent aux sillons faisant traverser ces villes. Ces arrêts sont donc imposés par l'infrastructure plus qu'ils ne sont choisis pour des raisons commerciales.
38. Les Parties soulignent aussi que les services Thalys sont sensiblement plus onéreux que les services domestiques opérés par les opérateurs nationaux, sans apporter de gain de temps appréciable.
39. Enfin, les Parties précisent que les services Thalys ont été conçus comme des services de transport à grande vitesse international de passagers, en vue de relier les grandes villes que sont Paris, Bruxelles, Amsterdam et Cologne et il n'a pas de vocation à desservir des O&D purement domestiques, ni des liaisons internationales de villes de moindre importance.
40. En conclusion, les Parties considèrent que les O&D nationales, c'est-à-dire dont le point d'origine et de destination appartiennent au même pays, ne constituent pas des marchés pertinents dans le cas d'espèce.
4.1.1.2. Pertinence d'une analyse des effets de l'Opération au niveau des Routes internationales opérées par Thalys JV
41. Au regard des éléments qui précèdent, les Parties considèrent qu’il y a donc lieu d'analyser les effets de l'Opération sur les principales Routes desservies par les services Thalys qui constituent leur cœur d'activité. Chacune de ces Routes incluent l'ensemble des O&D internationales et nationales qui la composent en combinant les arrêts desservis sur cette Route.
42. Par ailleurs, les Parties soutiennent que les gares de Paris Nord, Roissy-Charles de Gaulle et Marne-La-Vallée doivent être considérées comme substituables pour les besoins de l'Opération. En effet, ces gares se situent au sein de la même région Ile- de-France et les distances entre le centre de Paris et les gares concernées sont limitées.23 Concernant les Pays-Bas et l'Allemagne, les Parties estiment par ailleurs que plusieurs gares Thalys doivent être considérées comme faisant partie de la même zone de chalandise pour les besoins de l'Opération. Ainsi, les arrêts des services Thalys aux Pays-Bas (gares d'Amsterdam, Rotterdam et Schiphol) seraient compris dans la même zone de chalandise que l'aéroport de Schiphol, ce dernier desservant aussi bien Amsterdam que Rotterdam, et seraient donc substituables.24 De même, les gares allemandes d'Aix-la-Chapelle, Cologne, Düsseldorf, Duisburg, Essen et l'aéroport de Düsseldorf seraient dans la zone de chalandise de l'aéroport, et seraient donc également substituables.25
4.1.2. Analyse de la Commission
43. Tout d'abord, du point de vue de la pression concurrentielle exercée par d'autres services ferroviaires, il apparaît que sur la plupart des segments au sein d'une même Route, les conditions soient similaires:
- sur les Routes Bruxelles-Allemagne et Paris-Allemagne, Thalys JV fera face au train ICE entre la Belgique et l'Allemagne, soit la majeure partie du trajet.
- sur les Routes Bruxelles-Pays-Bas et Paris-Pays-Bas, Thalys JV fait face à la menace d'une nouvelle entrée des NS, via leur train Fyra,26 entre la Belgique et les Pays-Bas, soit la majeure partie du trajet;
- sur les Routes Lille-Bruxelles et Lille-Pays-Bas, Thalys JV, la SNCF et Eurostar sont présentes sur le segment Lille-Bruxelles;
- sur les dorsales wallonnes et flamandes, seules Thalys JV et la SNCB sont actives quelle que soit le segment considéré.
44. En outre, la DB a annoncé publiquement son intention de prolonger ses services entre Bruxelles et l'Allemagne jusqu'à Paris. De même, dans l'hypothèse où Travelteq commencerait à opérer la Route Paris-Amsterdam, la société avait annoncé son intention de le faire sur l'entièreté de la Route et non sur une partie seulement. Enfin et de la même façon, il convient de noter que Fyra était un train à grande vitesse reliant Bruxelles à Amsterdam et non simplement des segments au sein de cette Route. Il apparaît donc que du côté de l'offre de services ferroviaires internationaux, les opérateurs envisagent les opérations sur la Route dans son ensemble, plutôt que sur des segments au sein de celle-ci.
45. En outre, les résultats de l'enquête de marché vont dans le sens d'une analyse Route par Route. En effet, la majorité des clients et des concurrents considère que l'Opération doit s'analyser au niveau des 7 Routes telles que définies par les Parties.27 Au surplus, à la question concernant la répartition des achats de tickets Thalys, la majorité des réponses exploitables fournies par les clients interrogés confirme que ces derniers achètent principalement des tickets entre les gares situées d'un bout à l'autre de la Route en question.28
46. Au regard des éléments qui précèdent, la Commission conclut que les effets de l'Opération doivent s'analyser pour les besoins de la présente décision au niveau des Routes (i) Paris-Bruxelles, (ii) Paris-Pays-Bas, (iii) Bruxelles-Pays-Bas, (iv) Paris-Allemagne, (v) Bruxelles-Allemagne, (vi) Lille-Pays-Bas et (vii) Lille- Bruxelles.
4.2. Distinction par catégorie de voyageurs
47. Dans ses décisions SNCF/LCR/Eurostar29 et Veolia Transport/Trenitalia/JV,30 la Commission a envisagé de distinguer entre deux catégories de voyageurs, (i) les voyageurs sensibles au facteur temps et (ii) les voyageurs non sensibles au facteur temps. Dans les deux affaires, la Commission a finalement laissé la question ouverte, l'issue de l'examen restant inchangée quelle que soit la définition de marché retenue.
4.2.1. Position des Parties
48. A titre principal, les Parties considèrent qu'une distinction par catégorie de voyageurs n'est pas pertinente. En effet, le nombre et la diversité des critères qui interviennent lors du choix d’un mode de transport ou d’un type de billet rendrait toute catégorisation approximative. Ainsi, si la durée du voyage en lui-même est un critère, le voyageur prend aussi en compte le temps de parcours porte-à-porte, le coût, la flexibilité du ticket, etc. En outre, le poids attribué à chacun de ces critères varie en fonction du motif du voyage, professionnel ou loisir, et des conditions du voyage, seul ou en famille, préférences de l'employeur, etc.
49. A titre accessoire, dans l'hypothèse où une distinction par catégorie de voyageurs devait tout de même être faite, les Parties soutiennent que seule serait pertinente une différenciation basée sur le motif du voyage: professionnel ou loisir.
50. En effet, les billets Thalys sont commercialisés selon 3 catégories tarifaires différentes: Flex, Semi-Flex et No-Flex. Le prix, le type de classe (1ère ou 2nde) et la flexibilité quant à la date et aux horaires de départ sont les principales différences entre ces 3 catégories. Appliquer une distinction entre voyageurs sensibles au facteur temps et voyageurs non sensibles au facteur temps calquée sur l'offre commerciale des services Thalys ne reflèterait la réalité commerciale que dans une mesure limitée. En effet, il apparaît que ce soit le motif du voyage plus que la sensibilité au facteur temps qui influe sur la décision d'achat entre un billet Flex ou No-Flex. Par exemple, un voyageur « loisir » privilégiant le confort optera pour un billet Flex/1ère classe alors même que le facteur flexibilité n'entrera pas en ligne de compte. A l'inverse, un voyageur « professionnel » pourrait acheter un billet No- Flex à la dernière minute.
51. Bien que la distinction « professionnel/loisir » ne recoupe que partiellement la distinction entre passagers sensibles et passagers non-sensibles au facteur temps, les Parties considèrent qu’il s’agit de la distinction la plus proche dont elles disposent et soutiennent qu'il s'agit d'un bon critère d'approximation pour la position des services Thalys selon la segmentation traditionnelle de la Commission « voyageurs sensibles au facteurs/voyageurs non sensibles au facteur temps ».
4.2.2. Analyse de la Commission
52. Tout d'abord, il convient de remarquer que les documents internes servant de base à la détermination de la politique commerciale, tels que le « Plan stratégique New Thalys » et l'étude « Market Sizing », distinguent et analysent systématiquement le comportement des voyageurs en fonction du motif du voyage, professionnel ou loisir. En particulier, les Parties analysent la pression exercée par les modes de transport concurrents ainsi que la réponse à y apporter à l'aune de cette distinction. Mener une analyse concurrentielle en distinguant voyageurs « professionnels » et voyageurs « loisirs » refléterait ainsi au mieux la réalité du marché et du comportement de l'entreprise en cause.
53. Par ailleurs, dans les décisions relatives à des fusions dans le secteur aérien, la distinction entre voyageurs « sensibles au facteur temps/premium » et voyageurs « non sensibles au facteur temps/non premium » est utilisée comme critère d'approximation pour distinguer entre les voyageurs « professionnels » et « loisirs », les premiers étant considérés comme prêts à payer plus afin de jouir d'une flexibilité accrue par rapport aux seconds. Toutefois, lors de l'examen de deux transactions récentes dans le secteur aérien,31 des participants à l'enquête de marché ont remis en cause la pertinence d'une distinction entre voyageurs sensibles au facteur temps et les voyageurs non sensibles au facteur temps, soulignant que cette différenciation entre les deux catégories devenait de plus en plus floue.
54. Il apparaît ainsi que les Parties privilégient la distinction « loisir/professionnel » dans leur stratégie commerciale, notamment au regard des données qu'ils recueillent afin de définir leur offre commerciale. Ce parti pris se reflète dans la grille tarifaire des services Thalys et vient au soutien d'une segmentation du marché entre voyageurs « loisirs » et voyageurs « professionnels ».
55. Enfin, la majorité des participants à l'enquête de marché menée par la Commission, que ce soient des concurrents32 ou des clients33, a confirmé la validité d'une distinction entre voyageurs selon le motif du voyage.
56. Au regard des éléments qui précèdent, la Commission conclut que les effets de l'Opération doivent s'analyser en distinguant d'une part les voyageurs « professionnels » et d'autre part les voyageurs « loisirs ». En tout état de cause, il n'y a pas lieu de prendre une position définitive sur la question, les résultats de l'analyse concurrentielle restant inchangés quelle que soit la définition de marché retenue.
4.3. Concurrence exercée par les services ferroviaires indirects
57. Dans sa décision Veolia Transport/Trenitalia/JV,34 la Commission a considéré que les services ferroviaires indirects ne constituaient pas une alternative crédible aux services directs sur les routes internationales qu'elle était amenée à analyser.
4.3.1. Position des Parties
58. A contrario, les Parties considèrent qu'au cas d'espèce les services indirects de train existants sur les routes desservies par les services Thalys (i.e. Route Paris- Bruxelles, Routes néerlandaises et Routes allemandes) pourraient constituer une alternative crédible aux services Thalys directs pour des raisons tenant à la durée, aux prix et aux fréquences de ces services.
4.3.2. Analyse de la Commission
59. Il convient de noter que sur la plupart des Routes examinées, ou à tout le moins sur une partie de leurs segments, les services indirects sont opérés par l'une ou l'autre des mères de Thalys JV: en France par la SNCF et en Belgique par la SNCB. Dans une telle hypothèse, la question de la concurrence exercée par les services indirects ne se pose donc pas.
60. En tout état de cause, la majorité des répondants à l'enquête de marché, clients35 et concurrents36 confondus, a considéré que les services ferroviaires indirects ne constituaient pas une alternative crédible aux services directs, en particulier pour les voyageurs « professionnels » qui sont attachés à garder la durée de parcours la plus restreinte possible.
61. Au regard des éléments qui précèdent, la Commission conclut qu'il n'y a pas lieu de prendre une position définitive sur la question, les résultats de l'analyse concurrentielle restant inchangés quelle que soit la définition de marché retenue.
4.4. Concurrence intermodale
62. Dans ses décisions SNCF/LCR/Eurostar37 et Veolia Transport/Trenitalia/JV,38 la Commission a plus particulièrement analysé la contrainte concurrentielle représentée par les transports aériens. Dans les deux décisions, la Commission a reconnu que l'avion était une alternative valable et exerçait une pression réelle sur les trains, sans pour autant trancher de manière définitive la question de l'inclusion ou non de l'avion dans le même marché que le train. De la même façon dans la décision SNCF/LCR/Eurostar39, la Commission a examiné sans toutefois prendre position la pression exercée par les autres modes de transport tels que la voiture.
4.4.1. Position des Parties
63. Les Parties considèrent que les différents modes de transport opérant sur les Routes examinés concurrencent les services Thalys. En effet, si la nature de la concurrence exercée par chacun d'entre eux peut varier significativement d’une Route à l’autre, chaque Route serait soumise à une forte pression concurrentielle d’un ou plusieurs autres modes de transport, selon le degré de maturité de la liaison.
64. Ainsi, les Parties soutiennent qu'il ressort très clairement d’une étude poussée du marché que sur les Routes Paris-Bruxelles, Bruxelles-Pays-Bas et Bruxelles- Allemagne, la voiture constitue une contrainte concurrentielle très forte sur les services Thalys, en raison des distances limitées ce qui rend le temps de parcours relativement similaire entre le train et la voiture, d'un prix attractif, en particulier lors d’un départ proche dans le temps, ainsi que d’une plus grande flexibilité concernant le point précis de départ et d’arrivée. Cette pression concurrentielle se renforcerait d’autant plus depuis la mise en place d’offres de plus en plus structurées et accessibles de covoiturage, ce qu'illustre l’essor considérable de ces offres sur les derniers mois. Ceci serait également vrai en ce qui concerne les autres modes de transport comme les liaisons en autocars. Enfin, sur ces Routes, le train conventionnel demeurerait une alternative aux services Thalys, notamment en raison de la différence peu importante de temps de parcours. Ainsi, en 2012, le train conventionnel « IC Benelux »40 a transporté 2,3 millions de passagers entre Bruxelles et Amsterdam.
65. Sur les Routes Paris-Pays-Bas et Paris-Allemagne, l’avion constituerait la principale contrainte concurrentielle pesant sur les services Thalys, après la voiture. Ceci résulterait notamment des temps de parcours comparables et de fréquences parfois plus élevées que les services Thalys. Les autres modes de transport seraient également présents de façon significative sur ces Routes longues, comme le montrerait la part que représente le train conventionnel sur ces routes, ainsi que le développement croissant de l’autocar et du covoiturage.
4.4.2. Analyse de la Commission
66. Tout d'abord, il apparaît clairement dans les documents internes des Parties relatifs aux services Thalys que la voiture et l'avion sont vus comme des concurrents. La voiture est citée comme le « concurrent principal sur l'ensemble des routes (…) avec une pénétration plus forte sur les loisirs de manière générale ».41 De même, l'avion est « le concurrent le plus sérieux sur les OD longues ».42
67. En outre, une majorité de clients43 et de concurrents44 ayant répondu à l'enquête de marché confirme que les services Thalys subissent la concurrence d'autres modes de transport. Les autres services à grande vitesse, tels qu'ICE, et l'avion sont ceux majoritairement cités par les clients comme alternative crédible aux services Thalys. De plus, deux tendances se dégagent des réponses des clients45 et des concurrents:46 (i) sur les Routes courtes, telles que Paris-Bruxelles et Lille- Bruxelles, la voiture et les services de train conventionnels représentent la meilleure alternative, notamment pour les voyageurs « loisirs » et (ii) sur les Routes longues, telles que Paris-Allemagne et Paris-Pays-Bas, l'avion est le concurrent principal des services Thalys, en particulier pour les voyageurs « professionnels ».
68. Au surplus, il apparaît qu'au moins une compagnie aérienne interrogée dans le cadre de l'enquête de marché surveille les prix pratiqués pour les services Thalys sur les Routes examinées.47
69. Au regard des éléments qui précèdent, il apparaît que les autres modes de transport exercent une pression concurrentielle à géométrie variable sur les services Thalys selon la Route en question. En tout état de cause, il n'y a pas lieu de prendre une position définitive sur la question, les résultats de l'analyse concurrentielle restant inchangés quelle que soit la définition de marché retenue.
5. ANALYSE CONCURRENTIELLE
5.1. Cadre d'analyse
70. Sur toutes les Routes aujourd'hui exploitées par la Coopération Thalys, Thalys JV se substituera à la SNCF et à la SNCB dans sa coopération avec les NS et la DB. Il convient de souligner que l'Opération consiste donc essentiellement en une restructuration des relations existantes entre la SNCF et la SNCB au sein de la Coopération Thalys, ce qui a été confirmé par la DB48 et les NS49. En conséquence, la création de Thalys JV n'entraîne en pratique pas de changement dans la structure actuelle du marché.50
71. Le seul changement est apporté par la clause de non-concurrence telle que décrite dans la Section 2.2.3 ci-dessus. L'impact de l'Opération sur le paysage concurrentiel réside donc essentiellement en une perte de concurrence potentielle suite à l'impossibilité pour la SNCB ou la SNCF de lancer des services concurrents de Thalys. Cette perte de concurrence semble néanmoins limitée étant donné que ni la SNCF, ni la SNCB n'ont lancé seules des services concurrents aux services Thalys par le passé, compte tenu de la mobilisation très significative en termes de ressources humaines et financières impliquée par le lancement d’un service concurrent.
72. En tout état de cause, comme sera expliqué dans la Section 5.2 ci-dessous, l'Opération n'est pas de nature à soulever de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché intérieur au regard de la contrainte concurrentielle suffisante exercée par les nouveaux entrants et la concurrence intermodale.
5.2. Analyse route par route
5.2.1. Routes Paris-Allemagne, Bruxelles-Allemagne et Lille-Bruxelles51
73. En 2011, la Coopération Thalys a transporté [plus de 2 millions] de passagers sur la Route Paris-Allemagne et [plus de 1 millions] de passagers sur la Route Bruxelles- Allemagne.
5.2.1.1. Position des Parties
74. Sur la Route Bruxelles-Allemagne, les Parties soulignent que Thalys JV devra affronter la concurrence des trains ICE opérés de manière indépendante par la DB.52
75. Sur ces Routes, les Parties affirment que Thalys JV devra affronter la concurrence des autres modes de transport que sont principalement la voiture et le transport aérien. Les tableaux 1 et 2 ci-dessous présentent la structure du marché actuelle sur les Routes Paris-Allemagne et Bruxelles-Allemagne, prenant en compte cette concurrence intermodale.
78. La majorité des participants à l'enquête de marché menée par la Commission, que ce soient des concurrents et des clients ont confirmé la possibilité pour ces derniers d'envisager de passer à d'autres modes de transport si Thalys JV venait à augmenter ses prix de 5% à 10% après l'Opération. En effet, les Routes Paris-Allemagne, Bruxelles-Allemagne et Lille-Bruxelles, sont notamment desservies par l'avion,58 ainsi que l’autocar59 et le covoiturage,60 ce qui laisse ainsi ouverte la possibilité tant pour les voyageurs « professionnels » que pour les voyageurs « loisirs » de passer à d'autres modes de transport si Thalys JV venait à augmenter ses prix. Par ailleurs, la voiture, qu'elle soit personnelle ou de fonction, peut aussi constituer une alternative aux services fournis par Thalys JV au regard de la flexibilité qu'elle offre et de son attractivité en termes de prix.61
79. De plus, il est important de mentionner que la DB offre déjà des services de transport international de passagers par train à grande vitesse sur la Route Bruxelles-Allemagne (entre Bruxelles et Frankfort via Liège, Aix-la-Chapelle et Cologne) avec quatre fréquences journalières.62 Par ailleurs, la DB63 a manifesté son intention d'entrer indépendamment sur la Route Paris-Allemagne (via Bruxelles) en fournissant des services de transport international de passagers par train à grande vitesse. Actuellement, la DB opère un service transfrontalier de transport à grande vitesse au moyen de ses trains ICE sur une partie de la Route Paris-Allemagne, notamment sur la ligne Frankfort-Bruxelles (via Cologne et Aix- la-Chapelle).64 De plus, dès que les nouveaux trains Siemens Velaro 407 seront homologués et livrés, et que la DB obtiendra ses certificats de sécurité dans les pays respectifs,65 la DB pourra entrer sur l'ensemble de la Route Paris-Allemagne y compris la Route Paris-Bruxelles. Par conséquent, la DB constituera à terme une contrainte concurrentielle sur Thalys JV.
80. Enfin, la majorité des réponses exploitables fournies par les clients interrogés confirme que l'Opération n'aura pas d'impact sur les Routes Paris-Allemagne, Bruxelles-Allemagne et Lille-Bruxelles.66
81. En conclusion, la Commission considère que l'Opération n'est pas de nature à soulever de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché intérieur sur les Routes Paris-Allemagne, Bruxelles-Allemagne et Lille-Bruxelles.
5.2.2. Routes Paris-Pays-Bas, Bruxelles-Pays-Bas et Lille-Pays-Bas
82. En 2011, la Coopération Thalys a transporté [plus de 3 millions] de passagers sur la Route Paris-Pays-Bas et [plus de 3 millions] de passagers sur la Route Bruxelles- Pays-Bas.
86. Sur la route Bruxelles - Pays-Bas, les Parties rappellent que les NS ont déjà démontré leur volonté de concurrencer les services Thalys en lançant un train grande vitesse, le service Fyra, qui a cessé d'opérer pour des raisons techniques.71 En outre, les Parties notent que la société Traveltecq a annoncé son intention d'entrer sur la Route Paris-Pays-Bas. Ils considèrent enfin qu'une entrée de la DB sur les Routes Paris-Pays-Bas et Bruxelles-Pays-Bas est probable.
87. En conséquence, les Parties considèrent que l'Opération ne soulève pas de doute sérieux quant à sa compatibilité avec le marché intérieur sur ces Routes.
5.2.2.2. Analyse de la Commission
88. Lors de l'enquête de marché menée par la Commission, la majorité des concurrents72 et des clients73 ont confirmé la possibilité pour ces derniers d'envisager de passer à d'autres services de transport ferroviaire ou d'autres modes de transport si Thalys JV venait à augmenter ses prix de 5% à 10% après l'Opération. D'autres modes de transport desservent également les Routes Paris- Pays-Bas, Bruxelles-Pays-Bas et Lille-Pays-Bas, notamment le transport aérien74 ainsi que l’autocar75 et le covoiturage,76 laissant ainsi ouverte la possibilité tant pour les voyageurs « professionnels » que pour les voyageurs « loisirs » de passer à d'autres modes de transport si Thalys JV venait à augmenter ses prix. Par ailleurs, la voiture, qu'elle soit personnelle ou de fonction, peut aussi constituer une alternative aux services fournis par Thalys JV au regard de la flexibilité qu'elle offre et de son attractivité en termes de prix.77
89. De plus, il est important de mentionner que les NS, en partenariat avec la SNCB, offrent déjà des services de transport international de passagers par trains Intercités sur la Route Bruxelles-Pays-Bas (entre Bruxelles et Amsterdam) avec seize fréquences journalières.78 En outre, la clause de non-concurrence telle que décrite dans la Section 2.2.3 ne remet pas en cause la continuation de certaines activités concurrentes, en l'occurrence la coopération Fyra.
90. Par ailleurs, un nouvel entrant Travelteq79 a manifesté son intention d'entrer à terme sur la Route Paris-Pays-Bas en fournissant des services de transport international de passagers par train à grande vitesse ce qui constituera une contrainte concurrentielle sur Thalys JV.
97. La majorité des participants à l'enquête de marché menée par la Commission, que ce soient des concurrents et des clients a confirmé la possibilité pour ces derniers d'envisager de passer à d'autres services de transport ferroviaire ou d'autres modes de transport si Thalys JV venait à augmenter ses prix de 5% à 10% après l'Opération. Il est important de mentionner que d'autres modes de transport desservent également la Route Paris-Bruxelles, notamment le transport aérien86 ainsi que l’autocar87 et le covoiturage,88 laissant ainsi ouverte la possibilité tant pour les voyageurs « professionnels » que pout les voyageurs « loisirs » de passer à d'autres modes de transport si Thalys JV venait à augmenter ses prix. Par ailleurs, la voiture peut aussi constituer une alternative aux services fournis par Thalys JV au regard de la flexibilité qu'elle offre et de son attractivité en termes de prix.89
98. Comme expliqué au paragraphe 79 ci-dessus, la DB90 est en train de préparer leur entrée indépendante sur la Route Paris-Bruxelles. De plus, d'autres entrants tels que Thello91 et Travelteq92 ont manifesté leur intention d'entrer à terme sur la Route Paris-Bruxelles en fournissant des services de transport international de passagers par train à grande vitesse ce qui exercera une pression concurrentielle importante sur Thalys JV.
99. Enfin, la majorité des réponses exploitables fournies par les clients interrogés confirme que l'Opération n'aura pas d'impact sur la Route Paris-Bruxelles.93
100. En conclusion, la Commission considère que l'Opération n'est pas de nature à soulever de doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché intérieur sur la Route Paris-Bruxelles.
6. CONCLUSION
101. La Commission européenne a décidé, pour les raisons exposées ci-dessus, de ne pas s’opposer à l’opération notifiée et de la déclarer compatible avec le marché intérieur et avec l’accord EEE. La présente décision est prise sur la base de l’article 6, paragraphe 1, point b), du règlement sur les concentrations.
1 JO L 24 du 29.1.2004, p. 1 («le Règlement sur les concentrations»). Applicable à compter du 1er décembre 2009, le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne («TFUE») a introduit divers changements, parmi lesquels le remplacement des termes «Communauté» par «Union» et «marché commun» par «marché intérieur». Les termes du TFUE seront utilisés dans cette décision.
2 Pour les besoins de la présente décision, «services Thalys» désigne les services ferroviaires opérés par l'un au moins des partenaires à la Coopération Thalys dans le cadre de la Coopération Thalys en France, Belgique, Allemagne ou Pays-Bas.
3 Suite à sa décision de se retirer progressivement de la Coopération Thalys, les droits et obligations de la DB [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].
4 L'activité de THI est essentiellement concentrée sur le marketing et la communication, la conception du plan de transport, la gestion opérationnelle du trafic, le suivi de la qualité du produit, la gestion du contrat de service à bord, l'établissement du compte d'exploitation pro forma du partenariat et du plan d'affaires à long terme.
5 Suite à la décision de la DB de quitter la Coopération Thalys, [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].
6 Les « matières réservées » sur lesquelles la DB dispose encore d’un droit de véto [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].
7 Par exemple, [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].
8 Par exemple, [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].
9 Depuis juin 2013, la distribution de l'offre Thalys en Allemagne est assurée par la SNCF pour son compte et celui de la SNCB.
10 Sont notamment concernés par cette disposition [accord confidentiel entre les partenaires dans THI].
11 [Informations confidentielles concernant les modalités de sortie de la SNCB].
12 JO C 95 du 16.4.2008, p.1
13 Réponse au Questionnaire de la Commission du 19 décembre 2013 (QP1), paragraphe 50.
14 Réponse au Questionnaire de la Commission du 19 décembre 2013 (QP1), paragraphe 51.
15 Voir la Décision de la Commission européenne n° M.5655 – SNCF / LCR / Eurostar du 17 juin 2010.
16 Les services de transporteur substitué incluent la traction de trains opérés par un tiers ainsi que l'assistance pour l'obtention d'autorisations d'opérer sur le territoire (en particulier le certificat de sécurité). Il s'agit donc d'une prestation de services pour un tiers, ce dernier étant responsable de la fixation des fréquences, des horaires et des prix, et assumant de ce fait seul le risque financier lié à l'activité.
17 Voir considérant 21 du Règlement sur les concentrations et paragraphe 2 de Communication de la Commission relative aux restrictions directement liées et nécessaires à la réalisation des opérations de concentration. JOUE C 56, 05.03.2005, p. 24.
18 Chiffre d’affaires calculé conformément à l’article 5 du Règlement sur les concentrations.
19 Décisions de la Commission européenne n° M.5655 – SNCF / LCR / Eurostar du 17 juin 2010, paragraphes 15 et 16; et M.6150 – Veolia Transport / Trenitalia / JV du 20 juillet 2011, paragraphes 19 à 22.
20 Ce troisième paquet ferroviaire a été adopté le 23 octobre 2007 tout en étant amputé d’un des deux règlements prévus à l’origine. Furent finalement retenus: la Directive 2007/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 modifiant la directive 91/440/CEE du Conseil relative au développement de chemins de fer communautaires et la directive 2001/14/CE concernant la répartition des capacités d’infrastructure ferroviaire et la tarification de l’infrastructure ferroviaire; la Directive 2007/59/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relative à la certification des conducteurs de train assurant la conduite de locomotives et de trains sur le système ferroviaire dans la Communauté; et le Règlement (CE) n° 1371/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 sur les droits et obligations des voyageurs ferroviaires.
21 Un service Thalys est aussi opéré entre la gare de Bruxelles-Midi et l'aéroport Bruxelles-Zaventem. Il s'agit d'un service qui s'adresse quasi-exclusivement à des passagers aériens en connexion (et pour lesquels la partie du transport en Thalys est proposée directement par la compagnie aérienne et fait partie intégrante de leur billet d'avion). [Confidentiel].
22 Le "train-neige" n'est proposé que pour la saison de ski et ne représente que [0-5]% du chiffre d'affaires total de Thalys. Le "train-soleil" n'est proposé que pendant les périodes de vacances scolaires d'été et représente [0-5]% du chiffre d'affaires total de Thalys. En tout état de cause, il existe sur ces routes des moyens de transports beaucoup plus utilisés tels que la voiture (en particulier pour les destinations "neige") et l'avion.
23 41 km entre Paris et la gare de Marne-La-Vallée (environ 42 minutes) et 33 km entre Paris et la gare de Roissy- Charles de Gaulle (environ 33 minutes).
24 59km entre Schiphol et la gare de Rotterdam (environ 39 minutes) et 19km entre Schiphol et la gare d'Amsterdam (environ19 minutes).
25 97km entre l'aéroport de Düsseldorf et la gare d'Aix-la-Chapelle (environ 61 minutes), 21km entre l'aéroport de Düsseldorf et la gare de Duisbourg (environ 20 minutes), 28km entre l'aéroport de Düsseldorf et la gare d'Essen (environ 26 minutes) et 83km entre l'aéroport de Düsseldorf et l'aéroport de Cologne (environ 52 minutes).
26 A titre d’information, en 2000, les Pays-Bas et la SNCB ont convenu de l’exploitation commune d’une connexion entre les Pays-Bas et la Belgique, au moyen de la Ligne à Grande Vitesse entre Bruxelles et Amsterdam. Néanmoins, le service Fyra a été suspendu dès le 17 janvier 2013 à la suite de graves problèmes techniques liés aux rames.
27 Ibid.
28 Questionnaire Q2-clients.
29 Décision de la Commission européenne n° M.5655 – SNCF / LCR / Eurostar du 17 juin 2010.
30 Décision de la Commission européenne n° M.6150 – Veolia Transport / Trenitalia / JV du 20 juillet 2011.
31 Décisions de la Commission européenne n° M.6828 - Delta Air Lines / Virgin Group / Virgin Atlantic Limited du 20 juin 2013; et M.6607 - US Airways / American Airlines du 5 août 2013.
32 Questionnaire Q1-concurrents, question 8.
33 Questionnaire Q2-clients, question 8.
34 Décision de la Commission européenne n° M.6150 – Veolia Transport / Trenitalia / JV du 20 juillet 2011.
35 Questionnaire Q2-clients, question 10.
36 Questionnaire Q1-concurrents, question 10.
37 Décision de la Commission européenne n° M.5655 – SNCF / LCR / Eurostar du 17 juin 2010.
38 Décision de la Commission européenne n° M.6150 – Veolia Transport / Trenitalia / JV du 20 juillet 2011.
39 Décision de la Commission européenne n° M.5655 – SNCF / LCR / Eurostar du 17 juin 2010.
40 Le train IC Benelux désigne le train international opéré par la SNCB et les NS qui reliait Bruxelles-Midi à Amsterdam par la ligne classique jusqu’au 8 décembre 2012. Ce service a été arrêté à la suite du lancement du service Fyra le 9 décembre 2012.
41 Etude «Market Sizing», slides 11-12.
42 Ibid., slide 13.
43 Questionnaire Q2-clients, question 11.
44 Questionnaire Q1-concurrents, question 11.
45 Questionnaire Q2-clients, question 11.1.2.
46 Questionnaire Q1-concurrents, question 11.1.2.
47 Questionnaire Q1-concurrents, question 12.
48 Voir la version non-confidentielle des minutes de la conférence téléphonique avec les représentants de la DB en pré-notification du 22 avril 2014, paragraphes 13, 15 et 16.
49 Voir la version non-confidentielle des minutes de la conférence téléphonique avec les représentants des NS en pré-notification du 10 avril 2014, paragraphes 13 et 14.
50 L'accès à l'infrastructure, l'accès aux services en gare ainsi que les services de maintenance légère sont soumis à des règles de non-discrimination en application de la Directive 2012/34/UE du Parlement Européen et du Conseil du 21 novembre 2012. Par conséquent, l'Opération n'emportant pas de changement sur la structure du marché, ces activités ne sont pas examinées dans la présente décision. En outre, les participants à l'enquête de marché n'ont pas fait part d'inquiétudes circonstanciées liées à l'Opération sur ce point.
51 Thalys JV opérera aussi des lignes saisonnières (Thalys des neiges et Thalys soleil). Compte tenu de leur caractère temporaire, elles ne représentent qu'une très faible part du chiffre d'affaires pouvant être rapporté à la Coopération.
52 A l'heure actuelle, ces services sont exploités avec une fréquence de 4 services quotidiens.
53 Air France exploite la grande route Paris-Düsseldorf et German Wings exploite les routes Pais-Düsseldorf et Paris - Cologne - Berlin.
54 Une partie des services ferroviaires sur la Route Bruxelles-Allemagne correspond aux services exploités par la DB. Toutefois, il est difficile d'estimer la part de ces services et suivant une approche prudente l'ensemble des passagers ferroviaires sur cette Route sont attribués aux Parties.
55 En raison de l'arrêt récent des connexions aériennes entre Bruxelles et Düsseldorf, les Parties ont considéré que l'avion n'était pas un mode de transport pertinent sur la Route Bruxelles - Allemagne telle que définie pour les besoins de l'opération. Cela étant, dans le cadre de l'Etude "Market Sizing" de 2011, un certain nombre de personnes ont considéré à l'époque que les liaisons aériennes constituaient un mode de transport pertinent entre Bruxelles et la Rhénanie (zone Aix-La-Chapelle, Düsseldorf, Duisbourg, Dortmund, Essen, Hagen, Bonn, Cologne et Coblenz).
56 Questionnaire Q1 - concurrents, question 15
57 Questionnaire Q2 - clients, question 14
58 Air France offre six vols journaliers sur la route Paris-Düsseldorf. Questionnaire Q1-concurrents, question 7.4.1. German Wings exploite les routes Paris-Düsseldorf et Paris-Cologne-Bonn (voir https://www.germanwings.com).
59 Eurolines propose des services sur les Routes Paris-Allemagne, Bruxelles-Allemagne et Lille-Bruxelles (voir http://www.eurolines.com). Megabus exploite la route Bruxelles-Cologne (voir http://freu.megabus.com).
60 BlaBlaCar offre des services de covoiturage sur les Routes Paris-Allemagne, Bruxelles-Allemagne et Lille- Bruxelles. Questionnaire Q1-concurrents, questions 7.4, 7.5 et 7.6.
61 Questionnaire Q1-concurrents, question 15.1 et Questionnaire Q2-clients, question 14.1.
62 Questionnaire Q1-concurrents, question 7.5.1.
63 Voir la version non-confidentielle des minutes de la conférence téléphonique avec les représentants de la DB en pré-notification du 22 avril 2014, paragraphe 12.
64 [Information commerciale sensible (stratégie coomerciale)].
65 Voir la version non-confidentielle des minutes de la conférence téléphonique avec les représentants de la DB en pré-notification du 22 avril 2014, paragraphe 4.
66 Questionnaire Q2-clients, question 16.
67 Air France KLM exploite la route Paris-Amsterdam
68 Une partie de ces services (de l'ordre de [0-5]% du volume total de passagers) sont exploités par iDBUS, filiale de la SNCF. les autres entreprises sont Eurolines, contrôlées par Veolia Transport, et Megabus, contrôlée par Stagecoach.
69 Une partie des services ferroviaires sur la Route Bruxelles - Pays-Bas correspond aux services exploités par les NS. Toutefois, il est difficile d'estimer la part de ces services et suivant une approche prudente l'ensemble des passagers ferroviaires sur cette Route sont attribués aux Parties.
70 KLM exploite la route Amsterdam-Bruxelles.
71 En outre, les NS et la SNCB exploitent également un service de transport par rail de passagers sur la route Bruxelles-Amsterdam (trains InterCity). Le temps de trajet associé à ce service est toutefois sensiblement plus long que celui d'un service à grande vitesse (la durée totale du trajet s'élève à 3 heures pour le premier, une heure et demie pour le second).
72 Questionnaire Q1-concurrents, question 15.
73 Questionnaire Q2-clients, question 14.
74 Air France KLM offre douze vols journaliers sur la route Paris-Amsterdam. Questionnaire Q1-concurrents, question 7.2.1. KLM offre cinq vols journaliers sur la route Bruxelles-Amsterdam. Questionnaire Q1- concurrents, question 7.3.1.
75 Les sociétés Eurolines et Mégabus proposent des services sur les Routes Paris-Pays-Bas, Bruxelles-Pays-Bas et Lille-Pays-Bas (voir http://www.eurolines.com et http://freu.megabus.com).
76 BlaBlaCar offre des services de covoiturage sur les Routes Paris-Pays-Bas, Bruxelles-Pays-Bas et Lille-Pays- Bas. Questionnaire Q1-concurrents, questions 7.2, 7.3 et 7.7.
77 Questionnaire Q1-concurrents, question 15.1 et Questionnaire Q2-clients, question 14.1.
78 Questionnaire Q1-concurrents, question 7.3.1.
79 Questionnaire Q1-concurrents, questions 2 et 17.
80 Questionnaire Q2 - clients, question 16.
81 Les services exploités par la SNCF incluent les services indirects via Lille et les services directs desservant les gares de Roissy-Charles de Gaulle et de Marne-la-Vallée.
82 Bussels Airlines exploite la Route Paris-Bruxelles
83 Une partie de ces services (de l'ordre de [0-5]% du volume total de passagers) sont exploités par iDBUS, filiale de la SNCF. les autres entreprises sont Eurolines, contrôlées par Veolia Transport, et Megabus, contrôlée par Stagecoach.
84 Questionnaire Q1- concurrents, question 15.
85 Questionnaire Q2-clients, question 14.
86 Brussels Airlines exploite la Route Paris-Bruxelles avec deux fréquences quotidiennes. Questionnaire Q1- concurrents, question 7.1.1.
87 Les sociétés Eurolines et Mégabus desservent également la Route Paris-Bruxelles avec plusieurs fréquences quotidiennes (voir http://www.eurolines.com et http://freu megabus.com).
88 BlaBlaCar offre des services de covoiturage sur la Route Paris-Bruxelles. Questionnaire Q1-concurrents, question 7.1.
89 Questionnaire Q1-concurrents, question 15.1 et Questionnaire Q2-clients, question 14.1.
90 Voir la version non-confidentielle des minutes de la conférence téléphonique avec les représentants de la DB en pré-notification du 22 avril 2014, paragraphe 12.
91 Voir la version non-confidentielle des minutes de la conférence téléphonique avec le représentant de Thello en pré-notification du 9 avril 2014, paragraphes 3 et 20.
92 Questionnaire Q1-concurrents, questions 2 et 17.
93 Questionnaire Q2-clients, question 16.