CJUE, 1re ch., 20 janvier 2021, n° C-484/19
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Lexel AB
Défendeur :
Skatteverket, Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
J. C. Bonichot
Juges :
L. Bay Larsen, C. Toader, M. Safjan, N. Jääskinen (rapporteur)
Avocat général :
M. Bobek
Avocat :
M. Larsén
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 49 TFUE.
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Lexel AB, une société de droit suédois, au Skatteverket (administration fiscale, Suède) au sujet du refus de ce dernier de lui accorder la déduction de certaines charges d’intérêts versés à une société du même groupe établie en France.
Le cadre juridique
Les dispositions relatives aux charges d’intérêts
3 En vertu du principe prévu à l’article 1er du chapitre 16 de l’inkomstskattelagen (1999:1229) (loi n° 1229 de 1999 relative à l’impôt sur le revenu), dans sa version applicable aux faits au principal (ci après la « loi relative à l’impôt sur le revenu »), les charges d’intérêts sont déductibles dans le cadre de l’imposition des activités commerciales d’une entreprise.
4 Conformément à l’article 10a du chapitre 24 de la loi relative à l’impôt sur le revenu, lors de l’application des articles 10b à 10f de ce chapitre, les entreprises concernées sont réputées avoir des intérêts communs si l’une d’entre elles exerce, directement ou indirectement, au moyen de participations ou d’une autre manière, une influence notable sur l’autre entreprise ou si ces entreprises sont placées essentiellement sous une direction unique. Par entreprises, on entend des personnes morales.
5 Selon l’article 10b du chapitre 24 de la loi relative à l’impôt sur le revenu, une entreprise liée par une communauté d’intérêts à d’autres entreprises ne peut, sauf disposition contraire de l’article 10d ou de l’article 10e de ce chapitre, déduire des charges d’intérêts relatives à une dette envers une entreprise associée.
6 L’article 10d, paragraphe 1, du chapitre 24 de la loi relative à l’impôt sur le revenu dispose que les charges d’intérêts relatives aux dettes visées à l’article 10b de ce chapitre sont déductibles si le revenu correspondant aurait été soumis à imposition à un taux d’imposition nominal d’au moins 10 % conformément à la législation de l’État d’établissement de l’entreprise associée, bénéficiaire effective de ce revenu, si cette entreprise n’avait perçu que ledit revenu (ci après la « règle des 10 % »).
7 L’article 10d, paragraphe 3, du chapitre 24 de la loi relative à l’impôt sur le revenu prévoit que, si le bénéfice d’un avantage fiscal substantiel pour les entreprises associées constitue le principal motif de l’obligation qu’elles ont contractée, les charges d’intérêts ne sont alors pas déductibles (ci-après la « clause dérogatoire »).
8 L’article 10e, paragraphe 1, de ce chapitre dispose que, même s’il n’est pas satisfait à la condition de la règle des 10 %, les charges d’intérêts relatives aux dettes visées à l’article 10b dudit chapitre sont déductibles si l’obligation qui les sous-tend est principalement justifiée par des raisons commerciales. Cela ne vaut toutefois que si l’entreprise associée bénéficiaire effective du revenu correspondant aux charges d’intérêts est établie dans un État de l’Espace économique européen (EEE) ou dans un État avec lequel le Royaume de Suède a conclu des conventions fiscales.
Les travaux préparatoires relatifs à la clause dérogatoire
9 Les travaux préparatoires relatifs à la clause dérogatoire fournissent les indications suivantes concernant l’interprétation de cette clause :
– Il incombe à l’entreprise qui sollicite la déduction de démontrer que la dette n’a pas été contractée principalement pour des raisons fiscales. Le terme « principalement » fait référence à un pourcentage d’environ 75 % ou plus. L’appréciation doit être faite au niveau des entreprises associées et il y a lieu de prendre en compte la situation fiscale du prêteur ainsi que celle de l’emprunteur.
– Lors de l’application de la clause dérogatoire, il convient de procéder à une appréciation du cas d’espèce, en tenant compte de toutes les circonstances pertinentes, afin de déterminer si l’avantage fiscal substantiel obtenu par les entreprises associées constitue le principal motif des opérations réalisées et des conditions contractuelles.
– Plusieurs éléments plaident en faveur de l’application de la clause dérogatoire. À cet égard, il convient par exemple de vérifier si le prêt a été contracté auprès d’une autre entreprise associée pour financer l’acquisition par une entreprise associée de participations. Dans ce contexte, le niveau élevé des taux d’intérêt peut constituer un indice important. Il importe également de déterminer si le financement aurait pu être réalisé par injections de capital plutôt que par un prêt. En outre, il doit être tenu compte d’éventuels transferts injustifiés de paiements d’intérêts par l’intermédiaire d’autres entreprises associées, mais également des situations où les entreprises associées constituent, en lien avec l’acquisition de droits d’actionnaires, de nouvelles sociétés dont la fonction principale est de détenir une créance d’emprunt. Enfin et à titre non exhaustif, une attention particulière est aussi portée sur l’origine du capital ainsi que sur le niveau d’imposition du bénéficiaire des intérêts.
– En tout état de cause, la clause dérogatoire ne s’applique pas aux paiements d’intérêts sur des emprunts internes entre sociétés anonymes imposées de manière conventionnelle entre lesquelles existe un droit de transfert financier intragroupe.
Les dispositions relatives aux transferts intragroupes
10 Les articles 1er et 3 du chapitre 35 de la loi relative à l’impôt sur le revenu prévoient qu’un transfert financier intragroupe d’une entreprise mère à une filiale détenue à 100 % ou d’une filiale détenue à 100 % à une entreprise mère est déductible sous certaines conditions. Le transfert financier intragroupe doit être intégré dans les revenus du bénéficiaire.
11 L’article 2, premier alinéa, de ce chapitre précise qu’une entreprise mère est une société anonyme suédoise détenant plus de 90 % des actions d’une autre société anonyme suédoise. Le deuxième alinéa de cet article souligne qu’on entend par filiale détenue entièrement, l’entreprise détenue par l’entreprise mère.
12 En vertu de l’article 2a dudit chapitre, aux fins de l’application des dispositions relatives aux transferts financiers intragroupes, une société établie dans un État membre de l’EEE et analogue à une société anonyme établie en Suède doit être traitée comme cette dernière. Toutefois, cela ne vaut que si le bénéficiaire du transfert financier intragroupe est assujetti à l’impôt en Suède pour l’activité économique à laquelle ce transfert financier se rapporte.
13 Les articles 4 à 6 du chapitre 35 de la loi relative à l’impôt sur le revenu comportent des dispositions en vertu desquelles il convient également d’autoriser la déduction des transferts intragroupes effectués en faveur d’une filiale détenue indirectement au moyen d’une autre filiale ainsi que la déduction des transferts financiers intragroupes entre deux filiales détenues directement ou indirectement.
Le litige au principal et la question préjudicielle
14 Lexel est une société suédoise du groupe Schneider Electric. La société mère de ce groupe, présent dans plusieurs États tiers et États membres, est Schneider Electric SE, une société établie en France.
15 Avant l’opération en cause au principal, Schneider Electric Services International SPRL (ci-après « SESI »), une société établie en Belgique, était détenue à hauteur de 85 % par Schneider Electric Industries SAS, société du groupe Schneider Electric établie en France, et à hauteur de 15 % par Schneider Electric España SA (ci-après « SEE »), société de ce groupe établie en Espagne.
16 Au mois de décembre 2011, Lexel a acquis les 15 % des actions de SESI détenues par SEE en contractant, au préalable, un prêt auprès de Bossière Finances SNC (ci-après « BF »), une banque interne du groupe Schneider Electric. À la date des faits au principal, BF faisait partie d’une entité fiscale composée d’environ 60 sociétés de ce groupe établies en France.
17 Lexel, BF, SESI et SEE sont toutes, directement ou indirectement, des filiales de Schneider Electric Industries.
18 Lexel a versé à BF des intérêts sur le prêt contracté à hauteur de 58 millions de couronnes suédoises (SEK) (environ 5,5 millions d’euros) au titre de l’année 2013 et de 62 millions de SEK (environ 5,9 millions d’euros) au titre de l’année 2014. BF a utilisé les intérêts perçus pour compenser des déficits apparus dans les activités des sociétés établies en France composant l’entité fiscale.
19 Lexel a déclaré qu’elle avait racheté les actions de SESI à SEE car cette dernière avait besoin de capitaux pour financer l’acquisition d’une société externe au groupe Schneider Electric, cette acquisition ayant été financée principalement par des emprunts. Dans ce contexte, et afin de réduire ses coûts de financement, SEE avait décidé de vendre les actions de SESI qu’elles possédaient et de rembourser les emprunts qu’elle avait contractés dans ce cadre.
20 Selon Lexel, l’acquisition des actions de SESI ne visait pas à faire bénéficier le groupe Schneider Electric d’un avantage fiscal et aucun avantage fiscal ne résultait du fait que BF était en mesure d’utiliser les intérêts perçus pour compenser les déficits liés aux activités de ce groupe en France. À terme, le revenu correspondant à ces intérêts sera imposé, et ce à un taux supérieur à celui appliqué en Suède.
21 À cet égard, le taux de l’impôt sur les sociétés en France pour les années 2013 et 2014 était de 34,43 %. Toutefois, aucun impôt n’a été perçu sur les intérêts perçus au cours de ces années car l’entité fiscale concernée avait alors enregistré un déficit. Au cours des mêmes années, le taux de l’impôt sur les sociétés en Suède s’élevait à 22 %.
22 L’administration fiscale, après avoir confirmé l’applicabilité de la règle des 10 %, a néanmoins refusé la déduction des charges d’intérêts du prêt consenti par BF en invoquant la clause dérogatoire. Selon l’administration fiscale, les opérations en cause ont été réalisées afin de permettre la déduction en Suède plutôt qu’en Espagne des charges d’intérêts liées à l’acquisition des actions de SESI et dans la perspective de bénéficier d’un avantage fiscal substantiel. L’administration fiscale a également considéré que la clause dérogatoire était compatible avec l’article 49 TFUE relatif à la liberté d’établissement.
23 Lexel a formé un recours contre la décision de l’administration fiscale devant le Förvaltningsrätten i Stockholm (tribunal administratif siégeant à Stockholm, Suède).
24 Le Förvaltningsrätten i Stockholm (tribunal administratif siégeant à Stockholm) a confirmé l’appréciation de l’administration fiscale selon laquelle les déductions en cause devaient être refusées sur le fondement de la clause dérogatoire. Toutefois, cette juridiction a relevé que, si BF avait été établie en Suède, cette clause n’aurait pu être mise en œuvre. Dans ce cas de figure, Lexel et BF auraient été en mesure de réaliser des transferts financiers intragroupes, conformément aux dispositions du chapitre 35 de la loi relative à l’impôt sur le revenu, sans que la recherche d’un avantage fiscal substantiel soit déduite d’une telle opération. Dans ce contexte, ladite juridiction a considéré que l’application de la clause dérogatoire entraînait une restriction à la liberté d’établissement qui pouvait, néanmoins, être justifiée dans les circonstances de l’espèce.
25 Lexel a interjeté appel devant le Kammarrätten i Stockholm (cour d’appel administrative de Stockholm, Suède). Cette juridiction a considéré que la clause dérogatoire s’appliquait aux opérations en cause, tout en estimant, à l’instar du Förvaltningsrätten i Stockholm (tribunal administratif siégeant à Stockholm), que l’application de cette clause entraînait une restriction à la liberté d’établissement, cette restriction pouvant toutefois être justifiée au nom de la lutte contre l’évasion fiscale et dans la perspective de maintenir une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.
26 Lexel s’est pourvue devant le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour suprême administrative, Suède), qui a admis le pourvoi pour autant qu’il concerne la liberté d’établissement et, plus précisément, le fait de savoir si l’application de la clause dérogatoire est contraire au droit de l’Union. Dans le cadre du pourvoi autorisé, la question visant à déterminer si les conditions de l’application de cette clause sont remplies en l’espèce n’a pas vocation à être examinée, cette question étant suspendue en attendant la réponse au renvoi préjudiciel. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi souhaite savoir si l’application de ladite clause est constitutive d’une restriction à la liberté d’établissement au regard de l’article 49 TFUE et, dans l’affirmative, s’il existe d’éventuelles justifications à une telle restriction.
27 En s’appuyant sur les travaux préparatoires relatifs à la clause dérogatoire, la juridiction de renvoi souligne que l’objectif général de cette clause vise à prévenir toute planification fiscale agressive au moyen de déductions d’intérêts. Cet objectif, en lien avec la lutte contre la fraude fiscale, constituerait une justification admise, sous certaines conditions, par la jurisprudence de la Cour.
28 En outre, la juridiction de renvoi fait observer que la Cour a, dans plusieurs arrêts, jugé conforme à la liberté d’établissement l’exclusion de sociétés établies en dehors de l’État membre concerné, apparentées au même groupe, du champ d’application des dispositions relatives à la péréquation intragroupe. Cependant, dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 22 février 2018, X et X (C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110, points 39 à 42), relative aux règles néerlandaises sur la déduction des intérêts, la Cour a jugé que les sociétés d’un groupe établies en dehors de l’État membre concerné ne pouvaient être exclues du bénéfice d’avantages fiscaux non spécifiquement liés à de tels systèmes de péréquation et a estimé que la différence de traitement imposée par lesdites règles constituait une entrave injustifiée à la liberté d’établissement.
29 En dépit d’une proximité théorique, les règles suédoises relatives aux transferts financiers intragroupes et les règles néerlandaises relatives aux entités fiscales diffèreraient sensiblement dans leurs conséquences pratiques. La juridiction de renvoi estime ainsi que la mise en œuvre de la solution élaborée dans ledit arrêt s’en trouve affectée.
30 C’est dans ces conditions que le Högsta förvaltningsdomstolen (Cour suprême administrative) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« Est-il conforme à l’article 49 TFUE de refuser à une société suédoise le droit de déduire les intérêts versés à une société avec qui elle a des intérêts communs (société associée) établie dans un autre État membre, au motif que l’obligation qui les lie semble avoir été principalement contractée dans le but de faire bénéficier les sociétés associées d’un avantage fiscal substantiel, alors qu’il n’aurait pas été considéré qu’il existe un tel avantage fiscal si les deux sociétés avaient été des sociétés suédoises, puisque les dispositions relatives aux transferts financiers intragroupes leur auraient alors été applicables ? »
Sur la question préjudicielle
31 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 49 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle une société établie dans un État membre n’est pas autorisée à déduire les intérêts versés à une société appartenant au même groupe, établie dans un autre État membre, au motif que l’obligation qui les lie semble avoir été principalement contractée dans l’objectif d’obtenir un avantage fiscal substantiel, alors qu’il n’aurait pas été considéré qu’il existe un tel avantage fiscal si les deux sociétés avaient été établies dans le premier État membre, puisque les dispositions relatives aux transferts financiers intragroupes leur auraient été applicables dans cette hypothèse.
32 En d’autres termes, est posée la question de savoir si une telle réglementation constitue une restriction à la liberté d’établissement contraire à l’article 49 TFUE.
33 À titre liminaire, il convient de rappeler que l’article 49 TFUE impose la suppression des restrictions à la liberté d’établissement des ressortissants d’un État membre sur le territoire d’un autre État membre. Cette liberté comprend, pour les sociétés constituées en conformité avec la législation d’un État membre et ayant leur siège statutaire, leur administration centrale ou leur principal établissement à l’intérieur de l’Union, le droit d’exercer leur activité dans d’autres États membres par l’intermédiaire d’une filiale, d’une succursale ou d’une agence (voir, en ce sens, arrêts du 21 mai 2015, Verder LabTec, C 657/13, EU:C:2015:331, point 32 ; du 2 septembre 2015, Groupe Steria, C 386/14, EU:C:2015:524, point 14, ainsi que du 22 février 2018, X et X, C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110, point 18).
34 Toutefois, une différence de traitement résultant de la législation d’un État membre au détriment des sociétés qui exercent leur liberté d’établissement n’est pas constitutive d’une entrave à cette liberté si elle concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou si elle est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général et proportionnée à cet objectif (arrêts du 12 décembre 2006, Test Claimants in the FII Group Litigation, C 446/04, EU:C:2006:774, point 167 ; du 25 février 2010, X Holding, C 337/08, EU:C:2010:89, point 20, ainsi que du 22 février 2018, X et X, C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110, point 20).
Sur la différence de traitement
35 En vertu de l’article 10b du chapitre 24 de la loi relative à l’impôt sur le revenu, une entreprise qui a des intérêts communs avec d’autres entreprises ne peut, sauf disposition contraire de l’article 10d ou de l’article 10e de ce chapitre, déduire des charges d’intérêts relatives à une dette envers une entreprise associée.
36 En application de la règle des 10 %, les charges d’intérêts relatives aux dettes visées à l’article 10b du chapitre 24 de la loi relative à l’impôt sur le revenu sont déductibles si le revenu correspondant aurait été soumis à imposition à un taux d’au moins 10 % conformément à la législation de l’État d’établissement de l’entreprise associée, bénéficiaire effective des revenus, si cette entreprise n’avait perçu que ce revenu. Toutefois, l’article 10e, paragraphe 1, de ce chapitre dispose que ces charges d’intérêts peuvent être déductibles, malgré le non-respect de la règle des 10 %, si l’obligation qui les sous-tend est principalement justifiée par des raisons commerciales et si l’entreprise associée, bénéficiaire effective du revenu correspondant aux charges d’intérêts, est établie dans un État de l’EEE.
37 De même, la clause dérogatoire prévoit que, si le bénéfice d’un avantage fiscal substantiel pour les entreprises associées constitue le principal motif de l’obligation qu’elles ont contractée, les charges d’intérêts ne sont pas déductibles. Selon les travaux préparatoires relatifs à la clause dérogatoire, il incombe à l’entreprise qui sollicite la déduction de démontrer que la dette n’a pas été contractée principalement pour des raisons fiscales, à savoir à concurrence de 75 % ou plus.
38 En parallèle, les dispositions du chapitre 35 de la loi relative à l’impôt sur le revenu prévoient qu’un transfert financier intragroupe d’une entreprise mère à une filiale détenue à 100 % ou d’une filiale détenue à 100 % à une entreprise mère, tout comme un transfert financier intragroupe en faveur d’une filiale détenue indirectement au moyen d’une autre filiale ainsi que celui effectué entre deux filiales détenues directement ou indirectement, est déductible sous certaines conditions. Toutefois, cette règle ne vaut que si le bénéficiaire du transfert financier intragroupe est assujetti à l’impôt en Suède pour l’activité économique à laquelle ce transfert financier se rapporte.
39 En l’occurrence, Lexel a financé l’acquisition d’actions de SESI, appartenant au même groupe qu’elle, au moyen d’un emprunt contracté auprès d’une autre société de ce groupe, BF. Bien que les intérêts versés par Lexel à BF aient respecté la règle des 10 %, l’administration fiscale a refusé à Lexel la déduction des charges d’intérêts liées à cet emprunt, sur la base de la clause dérogatoire, en soulignant que le bénéfice d’un avantage fiscal substantiel en constituait le principal motif.
40 D’après le dossier dont dispose la Cour, Lexel aurait pu, si BF avait été établie en Suède, obtenir la déduction des charges d’intérêts liées audit emprunt. En effet, selon les explications fournies par la juridiction de renvoi, une société peut déduire de son revenu imposable des transferts financiers intragroupes effectués vers une société du même groupe, lorsque cette dernière est assujettie à l’impôt en Suède. Dans cette hypothèse, il est donc inutile de contracter un emprunt auprès d’une autre société du groupe dans le seul but de pouvoir déduire les charges d’intérêts correspondantes. C’est pourquoi la clause dérogatoire n’est jamais opposée à la déduction de charges d’intérêts résultant d’un emprunt contracté auprès d’une autre société du groupe établie en Suède. La clause dérogatoire est en revanche applicable lorsque les titulaires des charges d’intérêts sont établis dans un autre État membre.
41 Au regard de ces éléments, il convient de constater qu’il existe en l’occurrence une différence de traitement ayant une incidence négative sur l’exercice de la liberté d’établissement des sociétés.
42 Une telle différence de traitement peut toutefois être compatible avec l’article 49 TFUE lorsqu’elle concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou lorsqu’elle est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général et proportionnée à cet objectif.
Sur la comparabilité des situations
43 La comparabilité des situations transfrontalière et interne doit être examinée en tenant compte de l’objet et du contenu des dispositions nationales en cause (arrêt du 22 février 2018, X et X, C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110, point 33 ainsi que jurisprudence citée).
44 Il convient de considérer, ainsi que la Commission européenne l’a relevé dans ses observations écrites, que la situation dans laquelle une société établie dans un État membre verse des intérêts pour un emprunt contracté auprès d’une société établie dans un autre État membre appartenant au même groupe n’est pas différente, en ce qui concerne le paiement des intérêts, d’une situation dans laquelle le bénéficiaire des intérêts est une société du groupe établie dans le même État membre, à savoir, en l’espèce, la Suède.
45 Par conséquent, il y a lieu d’examiner si la différence de traitement en cause au principal peut être justifiée par des raisons impérieuses d’intérêt général.
Sur les justifications
46 Selon une jurisprudence constante, une restriction à la liberté d’établissement ne saurait être admise que si elle se justifie par des raisons impérieuses d’intérêt général. Encore faudrait-il, dans une telle hypothèse, qu’elle soit propre à garantir la réalisation des objectifs en cause et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs (voir, notamment, arrêts du 13 décembre 2005, Marks & Spencer, C 446/03, EU:C:2005:763, point 35 ; du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, C 196/04, EU:C:2006:544, point 47, ainsi que du 13 mars 2007, Test Claimants in the Thin Cap Group Litigation, C 524/04, EU:C:2007:161, point 64).
47 À titre de justification, l’administration fiscale, soutenue en ce sens par les gouvernements suédois et néerlandais, souligne que la clause dérogatoire s’insère, d’une part, dans la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales et, d’autre part, dans la nécessité de maintenir une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.
48 En premier lieu, il y a lieu d’apprécier si la différence de traitement en cause au principal peut être justifiée par des motifs de lutte contre la fraude et l’évasion fiscales.
49 Pour qu’une restriction à la liberté d’établissement prévue à l’article 49 TFUE puisse être justifiée par ces motifs, l’objet spécifique d’une telle restriction doit être de faire obstacle à des comportements consistant à créer des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national (voir, en ce sens, arrêts du 12 septembre 2006, Cadbury Schweppes et Cadbury Schweppes Overseas, C 196/04, EU:C:2006:544, point 55, ainsi que du 22 février 2018, X et X, C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110, point 46).
50 En outre, d’une part, afin de déterminer si une transaction présente le caractère d’un montage purement artificiel à des seules fins fiscales, le contribuable doit être mis en mesure, sans être soumis à des contraintes administratives excessives, de produire des éléments concernant les éventuelles raisons commerciales pour lesquelles cette transaction a été conclue (arrêt du 13 mars 2007, Test Claimants in the Thin Cap Group Litigation, C 524/04, EU:C:2007:161, point 82).
51 D’autre part, dans l’hypothèse où la vérification de tels éléments aboutit à la conclusion que la transaction en cause correspond à un montage purement artificiel dépourvu de raisons commerciales réelles, le principe de proportionnalité requiert que le refus du droit à déduction se limite à la fraction des intérêts qui dépasse ce qui aurait été convenu en l’absence de relations spéciales entre les parties (arrêt du 13 mars 2007, Test Claimants in the Thin Cap Group Litigation, C 524/04, EU:C:2007:161, point 83).
52 En l’occurrence, il ressort des éléments du dossier dont la Cour dispose que la clause dérogatoire s’inscrit dans la lutte contre la planification fiscale agressive sous forme de déduction de charge d’intérêts et vise explicitement tout « avantage fiscal substantiel ». Dans ce contexte, il incombe à la société qui sollicite une telle déduction de démontrer que la dette n’a pas été contractée principalement pour des raisons fiscales, à savoir à concurrence de 75 % ou plus.
53 L’objectif spécifique de la clause dérogatoire n’est pas de lutter contre des montages purement artificiels et l’application de cette clause ne se limite pas à de tels montages. En effet, ainsi que l’a admis, en substance, l’administration fiscale lors de l’audience, ladite clause concerne des dettes résultant de transactions de droit civil sans pour autant uniquement concerner des montages fictifs. Ainsi, selon l’appréciation des objectifs de la transaction en cause faite par l’autorité fiscale, peuvent également tomber sous le coup de la clause dérogatoire les transactions conclues dans des conditions de pleine concurrence, à savoir dans des conditions analogues à celles qui s’appliqueraient entre des sociétés indépendantes.
54 En d’autres termes, l’aspect fictif de la transaction en cause ne constitue pas une condition déterminante pour refuser le droit à déduction, car l’intention de la société concernée de contracter une dette, principalement pour des raisons fiscales, est suffisante pour justifier le refus du droit à déduction. La qualification d’une transaction comme étant principalement fiscale intervient pour une part excédant un certain pourcentage, à savoir 75 %, dans l’objectif de celle-ci.
55 Or, la seule circonstance qu’une société souhaite procéder à la déduction des intérêts dans une situation transfrontalière en l’absence de tout transfert artificiel ne saurait justifier une mesure portant atteinte à la liberté d’établissement prévue à l’article 49 TFUE.
56 Force est de constater que la clause dérogatoire est susceptible d’inclure dans son champ d’application des transactions conclues dans des conditions de pleine concurrence et qui, par conséquent, ne constituent pas des montages purement artificiels ou fictifs élaborés dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national.
57 Partant, ne peut pas être retenue la justification tirée de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales.
58 En deuxième lieu, il convient d’examiner si la différence de traitement en cause au principal peut être justifiée par la nécessité de préserver la répartition du pouvoir d’imposition entre les États membres.
59 Ainsi que la Cour l’a itérativement jugé, la justification tirée de la nécessité de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres peut être admise lorsque le régime en cause vise à prévenir des comportements de nature à compromettre le droit d’un État membre d’exercer sa compétence fiscale en relation avec les activités réalisées sur son territoire (voir, notamment, arrêts du 13 décembre 2005, Marks & Spencer, C 446/03, EU:C:2005:763, point 46, ainsi que du 31 mai 2018, Hornbach-Baumarkt, C 382/16, EU:C:2018:366, point 43 et jurisprudence citée).
60 La préservation de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres peut rendre nécessaire l’application, aux activités économiques des sociétés établies dans l’un desdits États, des seules règles fiscales de celui-ci, pour ce qui est tant des bénéfices que des pertes (arrêts du 15 mai 2008, Lidl Belgium, C 414/06, EU:C:2008:278, point 31, et du 21 janvier 2010, SGI, C 311/08, EU:C:2010:26, point 61).
61 La justification tirée de la préservation de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres a notamment été admise par la Cour lorsqu’une condition de résidence est requise pour accéder à un régime fiscal particulier afin d’éviter que l’assujetti ait le libre choix de déterminer dans quel État un bénéfice est imposé ou une perte est prise en compte et la possibilité de déplacer librement l’assiette imposable entre États membres (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2007, Oy AA, C 231/05, EU:C:2007:439, point 56 ; du 21 janvier 2010, SGI, C 311/08, EU:C:2010:26, point 62 et jurisprudence citée, ainsi que du 25 février 2010, X Holding, C 337/08, EU:C:2010:89, points 29 à 33).
62 Pour ces raisons, la Cour a jugé que la consolidation au niveau de la société mère des bénéfices et des pertes des sociétés intégrées dans une entité fiscale unique représente un avantage qu’il est justifié de réserver aux sociétés résidentes au regard de la nécessité de préserver la répartition du pouvoir d’imposition entre les États membres (voir, en ce sens, arrêt du 25 février 2010, X Holding, C 337/08, EU:C:2010:89, points 29 à 33).
63 Toutefois, en ce qui concerne les avantages fiscaux autres que le transfert des bénéfices ou des pertes à l’intérieur d’un groupe fiscal intégré, la question de savoir si un État membre peut réserver ces avantages aux sociétés faisant partie d’un tel groupe et, partant, les exclure dans des situations transfrontalières doit être examinée de manière séparée (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2015, Groupe Steria, C 386/14, EU:C:2015:524, points 27 et 28).
64 En application de cette jurisprudence, la Cour a considéré, dans son arrêt du 22 février 2018, X et X (C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110, points 40 et 41), auquel fait d’ailleurs référence la juridiction de renvoi, que les règles néerlandaises sur la déduction des intérêts ne pouvaient pas être justifiées par la nécessité de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition. Il en était ainsi notamment puisque, contrairement au cas de figure de la compensation générale des charges et des bénéfices propres à l’entité fiscale unique, dans l’affaire ayant donné lieu audit arrêt était en cause un avantage sans lien spécifique avec le régime fiscal applicable à de telles entités.
65 Ainsi que l’a fait observer la juridiction de renvoi, la différence entre les règles examinées dans le cadre de l’arrêt du 22 février 2018, X et X (C 398/16 et C 399/16, EU:C:2018:110), et celles en cause au principal réside dans le fait que, en vertu des règles en cause dans l’affaire ayant donné lieu audit arrêt, les conditions de déduction différaient selon que la société acquise appartenait ou non à la même entité fiscale que la société acquéreuse. En revanche, dans l’affaire au principal, la différence de traitement est, en pratique, fondée sur une exigence de résidence de la société prêteuse, exigence qui détermine l’inapplicabilité de la clause dérogatoire. Toutefois, l’avantage que revendique en l’occurrence Lexel ne peut pas être confondu avec celui que procure la consolidation au sein d’une entité fiscale unique. Le litige au principal concerne donc la possibilité de déduire une charge d’intérêts et non la compensation générale des charges et des bénéfices propre à l’entité fiscale unique.
66 En tout état de cause, les différences liées à la mise en œuvre des règles en cause dans le cadre des systèmes d’imposition nationaux respectifs ne sauraient avoir une incidence sur l’examen de la question de savoir si la différence de traitement en cause au principal peut être justifiée sur le fondement de la nécessité de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.
67 Dans ce cadre, il y a lieu de préciser que, selon les travaux préparatoires relatifs à la clause dérogatoire, celle-ci vise explicitement à empêcher l’érosion de la base d’imposition suédoise qui pourrait résulter de la planification fiscale liée à la déduction des charges d’intérêts dans une situation transfrontalière. Toutefois, un tel objectif ne saurait être confondu avec la nécessité de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.
68 En effet, il doit être rappelé que la réduction des recettes fiscales ne saurait être considérée comme une raison impérieuse d’intérêt général pouvant être invoquée pour justifier une mesure en principe contraire à une liberté fondamentale (voir, notamment, arrêt du 13 décembre 2005, Marks & Spencer, C 446/03, EU:C:2005:763, point 44 ainsi que jurisprudence citée). Admettre le contraire reviendrait à permettre aux États membres de restreindre, sur le fondement de ce motif, la liberté d’établissement.
69 De surcroît, comme il a été relevé lors de l’audience, les intérêts dont la déduction a été demandée par Lexel auraient été déductibles si BF n’avait pas été une société associée. Or, lorsque les conditions d’une transaction transfrontalière intragroupe et d’une transaction transfrontalière extérieure correspondent aux conditions de pleine concurrence, il n’existe aucune différence entre ces transactions du point de vue de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.
70 Il s’ensuit que la justification fondée sur la préservation d’une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres ne peut être retenue.
71 En troisième lieu, il convient d’examiner si, comme le font en substance valoir l’administration fiscale ainsi que les gouvernements suédois et néerlandais, la réglementation en cause au principal peut être justifiée par la prise en compte conjointe des justifications relatives à la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales et au maintien d’une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres.
72 Certes, la Cour a déjà jugé qu’une législation nationale qui n’a pas pour objet spécifique d’exclure de l’avantage fiscal qu’elle prévoit des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, créés dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités exercées sur le territoire national, peut néanmoins être considérée comme justifiée par l’objectif de prévention de l’évasion fiscale pris conjointement avec l’objectif de préservation de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres (voir, en ce sens, arrêt du 21 janvier 2010, SGI, C 311/08, EU:C:2010:26, point 66 et jurisprudence citée).
73 Toutefois, il y a lieu de souligner que la prise en considération conjointe de ces motifs de justification a été admise par la Cour dans des situations bien spécifiques, à savoir lorsque la lutte contre l’évasion fiscale constitue un aspect particulier de l’intérêt général lié à la nécessité de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2007, Oy AA, C 231/05, EU:C:2007:439, points 58 et 59, ainsi que du 21 janvier 2010, SGI, C 311/08, EU:C:2010:26, point 67).
74 Ainsi que la Cour l’a rappelé, les objectifs de sauvegarde de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres et de prévention de l’évasion fiscale sont liés. En effet, des comportements consistant à créer des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités réalisées sur le territoire national sont de nature à compromettre le droit des États membres d’exercer leur compétence fiscale en relation avec ces activités et à porter atteinte à une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres (arrêt du 18 juillet 2007, Oy AA, C 231/05, EU:C:2007:439, point 62).
75 Sur ce fondement, la Cour a pu considérer que, eu égard notamment à la nécessité de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres, malgré le fait que les mesures en cause ne visent pas spécifiquement des montages purement artificiels, dépourvus de réalité économique, créés dans le but d’éluder l’impôt normalement dû sur les bénéfices générés par des activités exercées sur le territoire national, ces mesures peuvent néanmoins être justifiées (arrêts du 18 juillet 2007, Oy AA, C 231/05, EU:C:2007:439, point 63, et du 21 janvier 2010, SGI, C 311/08, EU:C:2010:26, point 66).
76 Cependant, lorsque, comme dans l’affaire au principal, l’État membre concerné ne peut valablement faire valoir la justification tirée de la nécessité de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres, une mesure, telle que celle en cause au principal, ne saurait être justifiée sur le fondement d’une prise en compte conjointe de la nécessité de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres et de celle de la lutte contre l’évasion fiscale.
77 Par conséquent, ne saurait être admise la justification fondée sur la nécessité de préserver la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre les États membres et la lutte contre l’évasion fiscale, prises ensemble.
78 Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 49 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle une société établie dans un État membre n’est pas autorisée à déduire les intérêts versés à une société appartenant au même groupe, établie dans un autre État membre, au motif que l’obligation qui les lie semble avoir été principalement contractée dans l’objectif d’obtenir un avantage fiscal substantiel, alors qu’il n’aurait pas été considéré qu’il existe un tel avantage fiscal si les deux sociétés avaient été établies dans le premier État membre, puisque les dispositions relatives aux transferts financiers intragroupes leur auraient été applicables dans cette hypothèse.
Sur les dépens
79 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :
L’article 49 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, en vertu de laquelle une société établie dans un État membre n’est pas autorisée à déduire les intérêts versés à une société appartenant au même groupe, établie dans un autre État membre, au motif que l’obligation qui les lie semble avoir été principalement contractée dans l’objectif d’obtenir un avantage fiscal substantiel, alors qu’il n’aurait pas été considéré qu’il existe un tel avantage fiscal si les deux sociétés avaient été établies dans le premier État membre, puisque les dispositions relatives aux transferts financiers intragroupes leur auraient été applicables dans cette hypothèse.