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Décisions

CA Versailles, 3e ch., 21 janvier 2021, n° 19/03177

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Bluecar (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bou

Conseillers :

Mme Bazet, Mme Derniaux

TGI Nanterre, 2e ch., du 4 avr. 2019

4 avril 2019

La société Bluecar, constructeur de véhicules électriques s'appuyant sur une technologie dont le projet a été initié par le groupe Bolloré, a établi le 20 décembre 2013 une facture pour l'acquisition par M. Jean-Paul N. de trois véhicules électriques moyennant le prix de 38 665 euros.

Le 30 mai 2014, M. N. a signé trois bons portant commande de ces véhicules et demande de location de batterie.

Trois engagements de location de longue durée de batteries électriques lui ont aussi été adressés par la société Bluecar.

Le 10 juin 2014, les véhicules ont été livrés à Saint Barthélémy à M. N..

Des difficultés liées aux batteries sont apparues quelques temps après.

En février 2015, deux véhicules ont été mis en réparation au garage FBM par la société Bluecar.

Le 20 mars 2015, cette dernière a proposé de reprendre ces deux véhicules au prix de 21 280 euros, frais de remise en état déduits, proposition refusée le 23 mars 2015 par M. N. qui a demandé le remboursement de la totalité des trois véhicules.

Dans le courant de l'été 2015, la société FBM a remis les véhicules à la société Henry's Car Rental - Hertz Saint Barth.

Le 23 juin 2015, la société Bluecar a proposé de reprendre les véhicules contre remboursement après remise en état.

Le 6 août 2015, M. N. s'est plaint du défaut de remboursement et de la mise à disposition des véhicules auprès de Hertz.

Par lettre recommandée du 21 octobre 2015, le conseil de M. N. a mis en demeure la société Bluecar de restituer à son client le prix d'achat des trois véhicules et de procéder aux démarches nécessaires pour la mutation de leur propriété.

Le 20 novembre 2015, la société Bluecar a proposé la reprise des véhicules moyennant la restitution de la somme de 32 199 euros, soit après déduction de la moitié des frais de transport et du coût de location des batteries.

Le 8 décembre 2015, le conseil de M. N. a accepté la reprise moyennant le versement de la somme de 35 943 euros, soit sans déduction des frais de location des batteries.

Le 26 janvier 2016, la société Bluecar a formulé une contre proposition de reprise des véhicules moyennant le versement de la somme de 31 568 euros.

Ces échanges n'ayant pas permis d'aboutir à une solution amiable, M. N. a, par acte du 10 mars 2016, assigné la société Bluecar devant le tribunal de grande instance de Nanterre en résolution de la vente, restitution du prix d'achat des véhicules et indemnisation de ses préjudices.

Par jugement du 4 avril 2019, le tribunal a :

- dit que M. N. n'est pas un consommateur au sens du code de la consommation,

- dit que les demandes de M. N. sont recevables,

- dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation d'information de la part de la société Bluecar,

- dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation de délivrance conforme de la part de la société Bluecar,

- débouté en conséquence M. N. de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Bluecar,

- enjoint à M. N. de reprendre les véhicules 621 h et 622 h gardés en dépôt auprès de la société Henry's Car Rental,

- débouté la société Bluecar de ses demandes relatives aux frais de gardes des véhicules 621 h et 622 h, au solde impayé du prix de vente, aux loyers impayés des batteries, aux frais de remise en état desdits véhicules, à la procédure abusive,

- condamné M. N. à payer à la société Bluecar la somme de 76 700 euros au titre de la perte des batteries imputable au manquement du demandeur à son obligation d'entretien,

- condamné M. N. à payer à la société Bluecar la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. N. aux dépens,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Selon déclaration du 29 avril 2019, M. N. a interjeté appel du jugement sauf en ce qu'il a déclaré ses demandes recevables et débouté la société Bluecar de certaines de ses demandes.

Il prie la cour, par dernières écritures du 26 octobre 2020, de :

- déclarer M. N. recevable et fondé en son appel,

y faisant droit,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

. dit que M. N. n'est pas un consommateur au sens du code de la consommation,

. dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation d'information de la part de la société Bluecar,

. dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation de délivrance de la part de la société Bluecar,

. débouté en conséquence M. N. de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Bluecar,

. enjoint à M. N. de reprendre les véhicules 621 h et 622 h gardés en dépôt auprès de la société Henry's Car Rental,

. condamné M. N. à payer à la société Bluecar la somme de 76 700 euros au titre de la perte des batteries imputables au manquement du demandeur à son obligation d'entretien,

. condamné M. N. à payer à la société Bluecar la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

statuant à nouveau,

- dire que M. N. est un consommateur au sens du code de la consommation,

- juger que la société Bluecar a manqué à son obligation d'information et de conseil,

- juger que la société Bluecar a manqué à son obligation de délivrance conforme,

- constater que la société Bluecar a expressément accepté le principe de la résolution de la vente en reprenant les véhicules,

- constater la résolution de la vente des véhicules Bluecar immatriculés, 621h et 622h avec toutes conséquences que de droit,

- en tant que de besoin, prononcer la résolution de la vente des véhicules Bluecar immatriculés, 621h, 622h et des deux contrats de location de batteries indissociables et ce avec toutes conséquences que de droit,

- constater qu'aucune restitution de véhicule n'est possible en raison de la destruction des véhicules 621h et 622h par la société Henry's Car Rental (Hertz), dépositaire des véhicules,

- condamner la société Bluecar à lui restituer le prix payé pour l'acquisition des deux véhicules soit la somme de 25 776,66 euros,

- condamner la société Bluecar à lui payer les sommes de :

. préjudice matériel subi 8 865 euros,

. préjudice de jouissance 15 000 euros,

. vignette sur les véhicules 2016/2017 1 080 euros,

. article 700 du code de procédure civile 10 000 euros,

- débouter la société Bluecar de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner la société Bluecar aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par dernières conclusions du 3 novembre 2020, la société Bluecar prie la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

. dit que M. N. n'est pas un consommateur au sens du code de la consommation,

. dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation d'information de la part de la société Bluecar,

. dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation de délivrance conforme de la part de la société Bluecar,

. débouté en conséquence M. N. de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Bluecar,

- l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau,

- constater que M. N. n'a pas réglé le solde du prix d'acquisition des véhicules Bluecar immatriculés 620h, 621h et 622h,

- constater que M. N. n'a pas réglé le prix de location des batteries LMP incorporées aux véhicules Bluecar immatriculés 620 h, 621 h et 622 h,

- constater que M. N. a manqué à son obligation d'entretien des batteries LMP incorporées aux véhicules Bluecar immatriculés 620 h, 621 h et 622 h placés sous sa garde,

- dire que M. N. a manqué à ses obligations de locataire des batteries incorporées aux véhicules Bluecar immatriculés 620 h, 622 h et 622 h,

en conséquence,

- condamner M. N. à lui payer la somme de 384 euros au titre du solde impayé du prix de vente des véhicules Bluecar,

- condamner M. N. à lui payer la somme de 4 160 euros au titre des loyers impayés au titre des contrats de location des batteries LMP incorporées aux véhicules Bluecar immatriculés 620 h, 621 h et 622 h,

- condamner M. N. à lui payer la somme de 160 euros au titre des frais de réparation des véhicules Bluecar qu'il a dégradés,

- condamner M. N. à lui payer la somme de 191 050 euros au titre de la perte des batteries LMP imputable au manquement à son obligation d'entretien,

- condamner M. N. à lui payer la somme de 5 000 euros pour procédure abusive,

en tout état de cause,

- condamner M. N. à lui payer la somme de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. N. aux entiers dépens.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 novembre 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

La cour n'est pas saisie des dispositions du jugement ayant déclaré recevables les demandes de M. N. et ayant débouté la société Bluecar de sa demande au titre des frais de garde.

Sur l'application des dispositions du code de la consommation

Le tribunal a relevé que si les bons de commande mentionnaient que les trois véhicules vendus étaient destinés à un usage privé, M. N. précisait dans ses écritures que cette commande était un test préalable à un partenariat, ce que confirmaient des courriels de sa part. Il a ainsi retenu, au visa de l'article préliminaire du code de la consommation, que les contrats avaient été conclus en vue de l'exercice d'une activité professionnelle non actuelle mais future et que M. N. ne pouvait être considéré comme un consommateur.

Soutenant que les dispositions du code de la consommation doivent s'appliquer, M. N. fait valoir que la lettre dans laquelle il envisageait un partenariat n'a jamais été suivie d'une acceptation de sorte qu'aucun contrat de partenariat n'a été signé entre les parties, ni même projeté. Il rappelle avoir vendu l'hôtel qu'il exploitait à Saint-Barthélemy et fait valoir ses droits à la retraite. Il soutient ne rien connaître aux véhicules électriques. Il prétend qu'il a procédé à l'achat des véhicules pour un usage privé, pour lui et ses deux enfants, et relève que les bons de commande mentionnent qu'il s'agit de véhicules particuliers, pour un usage privé.

La société Bluecar rétorque que M. N. ne saurait prétendre à l'application des dispositions du code de la consommation dès lors qu'il a indiqué dans une lettre, qualifiée par lui-même de lettre d'intention, qu'il avait l'intention d'acquérir au moins 50 véhicules, dans l'objectif d'un partenariat. Elle en déduit qu'il a agi à des fins entrant dans le cadre d'une activité commerciale.

La définition du consommateur a été introduite en droit interne par la loi du 17 mars 2014 transposant la directive du 25 octobre 2011 relative aux droits des consommateurs, ladite loi étant entrée en vigueur sur ce point à compter de sa publication. Selon l'article préliminaire du code de la consommation dans sa version issue de cette loi, est considéré comme consommateur toute personne physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale.

Avant la loi précitée, les règles protectrices relatives au consommateur s'appliquaient en l'absence d'un rapport direct entre le contrat et l'activité professionnelle, même future, de celui qui l'avait conclu.

Au cas d'espèce, la facture d'achat a été établie le 20 décembre 2013 et il est constant que la quasi-totalité du prix, a été payée dans les jours qui ont suivi, au plus tard en janvier 2014 ainsi que l'admet la société Bluecar.

Un accord sur la chose et le prix, rendant la vente parfaite, est donc survenu dès la fin de l'année 2013 ou au tout début de l'année 2014.

Comme l'a relevé le tribunal, dans un courriel du 8 novembre 2013 adressé à un membre du groupe Bolloré dont dépend la société Bluecar, courriel qu'il a qualifié expressément de lettre d'intention, ce qui fait référence à des négociations commerciales, M. N. a fait part de sa volonté d'acquérir au moins 50 véhicules, notant qu'il serait possible de représenter les véhicules Bolloré à Saint Barthélémy et à Saint Martin. « Compte tenu du volume envisagé et de l'ouverture vers les COM de Saint Barthelemy et Saint Martin, je suis sûr que tu pourras me communiquer les meilleures conditions et m'indiquer toutes les formalités nécessaires à leur importation ». Contrairement à ce que soutient M. N., cette lettre démontre incontestablement un projet de partenariat commercial au titre d'une activité commerciale, même future, étant observé d'ailleurs que l'appelant ne justifie pas qu'il était alors retraité et que l'extrait du registre du commerce et des sociétés produit par l'intimée révèle que M. N. est un entrepreneur installé à Saint Barthelemy.

La facture d'achat des trois véhicules et leur paiement datent d'à peine quelques semaines après ce courriel.

De plus, en réponse à un courriel du groupe Bolloré du 9 avril 2014 lui indiquant que les véhicules Bluesummer étaient annoncés pour le mois d'août suivant avec une livraison envisagée à Saint Barthélémy pour septembre 2014, M. N. a indiqué qu'il verrait si le test réalisé avec les trois premières voitures serait concluant, ce qui confirme que le contrat litigieux a un rapport direct avec cette activité professionnelle même future.

La seule mention des bons de commande selon laquelle il s'agit de « véhicule particulier » et d'un « usage privé » ne contredit pas l'existence d'un rapport direct entre le contrat et l'activité professionnelle future de M. N., lequel ne peut dès lors être considéré comme un simple consommateur.

Quand bien même il serait retenu que les contrats de vente n'ont été conclus qu'à la date de signature des bons de commande, le 30 mai 2014, postérieure à l'entrée en vigueur de la définition résultant de la loi du 17 mars 2014, la solution serait identique. En effet, dans la mesure où il existe un rapport direct entre l'acquisition du matériel litigieux et l'activité professionnelle de celui qui conclut, ce dernier agit à des fins qui entrent dans le cadre de son activité professionnelle au sens de l'article préliminaire précité, que celle-ci soit déjà en exercice ou à exercer.

En conséquence, il ne saurait être fait application des dispositions du code de la consommation revendiquées par M. N. mais du droit commun des contrats et de la vente également invoqué par l'appelant.

Sur l'obligation d'information et de conseil

Le tribunal a énoncé que sur le fondement de l'article 1134 ancien du code civil, le vendeur professionnel est tenu à une obligation de d'information et de conseil. Il a retenu que la société Bluecar avait informé le demandeur de la nécessité de vérifier la conformité de l'installation électrique et avait attiré son attention sur les précautions d'emploi et d'utilisation des charges des véhicules. Il a aussi observé qu'il avait été, tout au long du processus, accompagné par la société pour lui permettre de faire face aux difficultés rencontrées. Il a enfin noté que M. N. ne démontrait pas avoir fait intervenir, comme il avait l'obligation de le faire, un professionnel pour s'assurer de la conformité de son réseau électrique.

M. N. prétend qu'il n'a aucune connaissance en matière de véhicules électriques et que le vendeur aurait dû attirer son attention sur les prérequis en matière de charge des batteries et d'installation électrique compte tenu de la spécificité de l'île, sur les risques encourus en cas de non-compatibilité ainsi que sur les contraintes induites par la charge des batteries de trois voitures en même temps sur une installation électrique domestique. Il fait valoir qu'aucune information ne lui a été fournie par la société Bluecar ni avant l'acquisition du 20 décembre 2013, ni entre cette date et la signature des bons de commande, ni même à la livraison sur d'éventuels travaux d'aménagement nécessaires pour la mise en charge des véhicules. Il ajoute que techniquement, il lui était impossible de mettre en charge les trois véhicules en même temps alors que les batteries doivent rester branchées sous peine de se dégrader, difficulté non abordée par le vendeur. Il invoque que les éléments sur lesquels se fonde la société sont postérieurs de plusieurs mois à son achat et qu'elle n'a pas rempli son obligation d'information, ni son devoir de conseil.

La société Blue Car réplique qu'elle a pris soin de se renseigner auprès de M. N. sur les normes électriques en vigueur à Saint-Barthélemy afin de vérifier la conformité des véhicules avec son installation électrique. Elle fait aussi valoir qu'elle a livré à M. N. un câble de rechargement adapté aux normes électriques de l'île et a attiré son attention sur la nécessité de faire intervenir son électricien pour procéder à l'installation des équipements. Elle soutient que M. N. s'est toujours présenté auprès d'elle comme un professionnel, censé détenir des connaissances sur la manière dont les véhicules devaient être utilisés et rechargés. Elle nie être tenue à une obligation de conseil s'agissant des travaux à faire réaliser sur une installation domestique, l'électricien de M. N., intervenu au moins à partir de décembre 2013, étant à même de conseiller son client sur ce point. Elle conteste ce faisant tout manquement à son obligation d'information et de conseil.

Comme l'a rappelé le tribunal, le vendeur professionnel est tenu à une obligation d'information et de conseil qui porte tant sur le choix du bien, dont il doit s'assurer de l'aptitude à répondre au besoin de l'acheteur, que sur les précautions d'emploi pour que son utilisation soit conforme à sa destination, outre qu'il doit aviser l'acquéreur de ses contraintes techniques.

Il incombe au vendeur de prouver qu'il a satisfait à son obligation de conseil et d'information.

Au cas d'espèce, s'il a été retenu que M. N. ne pouvait être considéré comme un consommateur et avait agi à des fins professionnelles, à tout le moins futures, il n'est pas établi pour autant que celui-ci avait des compétences techniques particulières en matière de véhicules électriques, portant notamment sur les conditions de charge des véhicules et les prérequis des installations électriques, ou disposait des moyens d'apprécier les caractéristiques techniques propres aux véhicules en cause. M. N. souligne en outre, sans être démenti, que ces voitures reposent sur une technologie innovante basée sur une batterie au lithium métal polymère (LMP) qui présente un haut niveau de sécurité mais doit rester en charge lorsque la voiture ne roule pas, ce qui du reste est confirmé par un courriel du groupe Bolloré du 31 octobre 2014. Le courriel du 8 novembre 2013 de M. N. fait simplement état des autres marques de véhicules électriques présentes sur l'île de Saint Barthelemy ainsi que de l'absence de borne électrique publique de rechargement de ces voitures sur l'île, ce qui ne saurait suffire à justifier des compétences techniques de celui-ci alléguées par l'intimée.

Par ailleurs, la circonstance que M. N. ait indiqué que l'achat des trois véhicules était fait à titre de test, avant une acquisition de plus grande envergure, ne dispensait pas la société Bluecar de son obligation d'information et de conseil.

Il résulte des pièces versées aux débats que :

- en réponse à un courriel de l'assistante de M. N. qui indiquait que le courant était en 50Hz sur l'île et non à 60 et qui souhaitait s'assurer de l'adaptation des câbles à ce courant, le vendeur a, dans des courriels des 18 et 19 décembre 2013, précisé vouloir connaître la forme de la fiche au moyen d'une photographie et il a été convenu que l'électricien de M. N. confirmerait la fréquence Hertz ;

- la photographie a été adressée au vendeur le 20 décembre 2013 ;

- le 7 janvier 2014, le vendeur s'est étonné d'informations contradictoires fournies concernant les caractéristiques électriques de l'île, l'assistante de M. N. ayant répondu le 13 janvier 2014 de faire en fonction des indications données par l'électricien ;

- le 15 mai 2014, M. N. a été informé de la livraison des véhicules ;

- le 30 mai 2014, l'assistante de M. N. s'est interrogée sur divers points à la réception des bons de commande et engagements de location, demandant si le câble était bien loué avec la batterie et si M. N. aurait tous les éléments nécessaires au regard de l'indication figurant dans les engagements de location selon laquelle le locataire déclare avoir été informé que la recharge d'une batterie nécessite un équipement de charge spécifique compatible qui, dans le cas d'une installation privée, doit être installée par un professionnel énergéticien ;

- les véhicules ont été livrés le 10 juin 2014 ;

- le 2 septembre 2014, le vendeur a précisé à M. N. que les véhicules livrés en 10A pouvaient ponctuellement dépasser l'ampérage en question et que son disjoncteur étant en 10A, le courant pouvait sauter en phase de crête ; il a recommandé que chaque véhicule soit branché sur une prise disposant de son propre disjoncteur, disant que l'installation d'un disjoncteur en 16A permettrait d'éviter le problème ; il a sensibilisé M. N. sur l'importance de maintenir les véhicules à un niveau de charge suffisant afin d'éviter que ces derniers ne tombent en « sleep »;

- le 30 septembre 2014, le vendeur a interrogé l'acquéreur sur son projet d'installation de prises avec disjoncteurs associés 20A pour chaque véhicule ;

- le 31 octobre 2014, le vendeur s'est dit navré des problèmes rencontrés avec les véhicules, disant avoir été rarement confronté au problème de batterie survenu sur le V0405 et indiquant pour le V0408, que la batterie annexe de 12 volts était défectueuse en raison d'un problème de branchement ; il a précisé que pour éviter ce type de désagrément, le véhicule à l'arrêt devait être impérativement branché en permanence ; il a rappelé avoir échangé avec l'électricien de M. N. sur ce sujet un mois auparavant, soulignant que les travaux ne semblaient pas avoir été exécutés.

Il s'évince de ces éléments qu'alors que la vente est intervenue fin décembre 2013/début janvier 2014, ce n'est que sur la base d'une interrogation de l'assistante de M. N. en date du 18 décembre 2013 que la société Bluecar a cherché à obtenir des informations sur son installation électrique. Elle ne justifie pas avoir informé celui-ci de la nécessité d'une installation d'un équipement particulier par un électricien avant le 30 mai 2014, étant observé qu'il n'est pas justifié de la date à laquelle les engagements de location ont été signés, les exemplaires versés aux débats ne l'étant pas, et qu'auparavant, il avait seulement été convenu que l'électricien avise Bluecar des caractéristiques de l'installation de M. N.. Or, au 30 mai 2014, la vente était conclue depuis plusieurs mois et la livraison était d'ores et déjà fixée. A supposer même que la vente soit considérée comme conclue le 30 mai 2014, une telle information délivrée le jour même de la vente, sans autre détail et précision, était insuffisante. Il sera d'ailleurs observé qu'il n'est pas justifié de réponse particulière apportée au mail du 30 mai 2014. De plus, la recommandation de l'installation de disjoncteurs spéciaux n'a pas été fournie à M. N. avant le mois de septembre 2014.

Contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, il est ainsi avéré que la société Bluecar a manqué à son obligation d'information et de conseil, le jugement étant infirmé en ce sens.

Sur l'obligation de délivrance conforme

Le tribunal a, au visa de l'article 1604 du code civil, retenu que le demandeur échouait à démontrer que les véhicules livrés présentaient un défaut de conformité en ce qu'ils étaient équipés de batteries défectueuses ou à tout le moins inadaptées au réseau électrique de Saint Barthélémy et qu'il était établi que les problèmes rencontrés étaient en lien avec une installation au domicile du demandeur non conforme pour recevoir la charge de tels véhicules.

M. N. fait valoir que les véhicules ne présentaient pas les caractéristiques d'un bien conforme au contrat et à l'usage habituellement attendu d'un bien semblable dès lors qu'ils n'ont jamais pu être utilisés normalement. Il fait valoir qu'il a dû effectuer des travaux sur son installation électrique endommagée et prévoir un groupe électrogène en complément du réseau EDF pour pouvoir alimenter en charge un véhicule et qu'eu égard au temps de charge à Saint Barthélémy, il était strictement impossible d'avoir plusieurs véhicules en charge en même temps. Il souligne que le 31 octobre 2014, les trois véhicules présentaient des problèmes dont deux relatifs aux batteries et l'autre sans rapport avec la mise en charge et qu'ensuite, les problèmes se sont poursuivis justifiant sa demande de remboursement.

La société Bluecar observe que les griefs allégués par M. N. sont exclusivement relatifs aux batteries louées avec les véhicules et ne relèvent donc pas de l'obligation de délivrance conforme du vendeur. En tout état de cause, elle fait valoir qu'au jour de la livraison des véhicules, ceux-ci fonctionnaient parfaitement, de même que les batteries incorporées. Elle soutient qu'en réalité, les griefs allégués relèvent exclusivement du propre manquement de M. N. à son obligation d'entretien des batteries qui lui avaient été données en location, et que ce dernier n'a jamais fait procéder aux aménagements électriques nécessaires pour assurer l'entretien des batteries.

En application de l'article 1604 du code civil, le vendeur est tenu de délivrer une chose conforme à celle prévue contractuellement.

Il résulte du courriel du 11 juin 2014 envoyé lors de la réception des véhicules sur l'île et il n'est d'ailleurs pas contesté par l'appelant que ceux-ci fonctionnaient normalement à l'occasion des essais effectués après la livraison.

Comme l'a relevé le tribunal, les premières pièces faisant état de problèmes rencontrés par les véhicules en lien avec les batteries remontent au début du mois de septembre 2014, près de trois mois après la livraison, les factures d'intervention d'un électricien au domicile de M. N. fin juin 2014 portant notamment sur le changement d'un disjoncteur ne permettant pas d'en déduire la réalité de problèmes affectant les véhicules ou batteries avant début septembre 2014.

S'agissant de l'un des véhicules, le vendeur a, dans son courriel de la fin du mois d'octobre 2014, imputé le dysfonctionnement à un problème de branchement, ce qui n'est pas utilement contredit par M. N.. Une telle difficulté ne caractérise pas un défaut de conformité. S'agissant de l'autre véhicule qui dysfonctionnait, le vendeur, dans ce même courriel, n'a pas déterminé l'origine de la difficulté sauf à dire qu'il s'agissait d'un problème de batterie. Cependant, un tel problème qui n'est apparu que près de trois mois après la livraison ne suffit pas non plus à caractériser une non-conformité.

En conséquence, le tribunal sera approuvé d'avoir dit que M. N. ne démontrait pas un manquement à l'obligation de délivrance conforme.

Sur la résolution de la vente

Le tribunal, qui a écarté tout manquement du vendeur, a considéré que la société Bluecar n'avait pas souhaité résoudre la vente en raison d'un manquement de sa part mais plutôt pour mettre fin du litige.

M. N. fait valoir que par courriel du 24 mars 2015, la société Bluecar a souhaité en terminer avec les polémiques, reprendre les véhicules et le rembourser. Il note que deux véhicules furent repris par elle mais sans qu'il ait été remboursé. Ainsi, selon lui, il ressort clairement des échanges que la société avait accepté le principe de la résolution des contrats. Il sollicite en tant que de besoin le prononcé de la résolution de la vente des véhicules 621 H et 622 H.

La société Bluecar rétorque qu'il n'est pas démontré l'inadaptation des véhicules à l'île, que si elle a proposé de reprendre les véhicules, c'était uniquement dans le but de parvenir à une solution amiable et rapide du litige et que la demande de résolution de M. N. est aujourd'hui sans objet puisque les véhicules précités ont été détruits.

Il convient tout d'abord d'observer que si M. N. a ajouté manuscritement sur les bons de commande que si les véhicules n'étaient pas en mesure de fonctionner normalement à Saint Barthelemy, la vente serait annulée et le prix payé remboursé, cette inadaptation des véhicules aux configurations locales n'est nullement démontrée, étant observé d'ailleurs qu'il est constant que M. N. continue à utiliser un des trois véhicules.

En outre, il n'est pas justifié d'un accord des parties sur une résolution des contrats portant sur les deux véhicules précités, les parties n'étant justement pas parvenues à s'accorder sur les modalités précises de la reprise, spécialement sur la somme à restituer par la société Bluecar.

Enfin, en application de l'article 1184 du code civil dans sa version applicable, la résolution judiciaire du contrat doit être prononcée en cas d'inexécution suffisamment grave.

Au cas d'espèce, la non-conformité invoquée n'est pas avérée.

S'il a en revanche été retenu un manquement à l'obligation d'information et de conseil contre la société Bluecar, force est de constater que ce manquement, identique pour les trois véhicules, n'a en tout état de cause pas empêché M. N. de jouir paisiblement de l'un de ces véhicules et qu'il ne sollicite pas d'ailleurs la résolution de la vente et du contrat de location de batterie pour cette voiture alors que l'inexécution imputable au vendeur concernant ces matériels est exactement la même. Il s'ensuit que ce seul manquement n'est pas d'une gravité suffisante pour justifier la résolution des contrats.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. N. de ses demandes visant à constater ou prononcer la résolution des contrats et en sa demande subséquente de restitution du prix. Il sera en revanche infirmé en ce qu'il a enjoint à M. N. de reprendre les véhicules 621 H et 622 H gardés en dépôt chez Hertz, ceux-ci ayant été détruits en octobre 2018.

Sur les dommages et intérêts sollicités par M. N.

Le tribunal, qui n'a retenu aucun manquement commis par la société Bluecar, a débouté M. N. de ces demandes.

M. N. prétend que la mise en charge des batteries sur son installation domestique a entraîné des dommages sur son installation électrique et sur certains équipements, comme les climatiseurs. Il sollicite la somme de 8 865 euros au titre des frais de remise en état exposés. Il invoque un préjudice de jouissance de juin 2014 à ce jour dont il demande réparation à hauteur de 15 000 euros, contestant la clause du contrat l'empêchant de réclamer une telle indemnisation au motif de son caractère abusif. Enfin, il réclame la somme de 1 080 euros au titre de la vignette sur les véhicules 2016/2017.

La société Bluecar s'oppose à la demande au titre des frais de remise en état, faute de preuve d'un lien de causalité entre les interventions de l'électricien de M. N. et son prétendu manquement. Elle argue de la mauvaise foi de ce dernier qui tente de mettre à sa charge un climatiseur installé trois mois après la livraison des voitures. Elle fait valoir que l'article 6.2.4 des contrats de location ne permet pas à M. N. d'être indemnisé du préjudice de jouissance résultant de l'immobilisation des véhicules pour faire procéder au remplacement de leur batterie. Elle prétend que c'est M. N. qui a pris l'initiative d'abandonner les véhicules. En tout état de cause, elle conteste la réalité de ce préjudice non justifié. Elle argue que le paiement d'un impôt auquel un contribuable est normalement tenu n'est pas réparable.

S'il est établi par les factures produites qu'un électricien est intervenu au domicile de M. N. pour des travaux de dépannage les 13, 15, 16 et 25 juin 2014 et que des installations et fournitures de climatiseurs ainsi que d'une unité extérieure y ont été effectuées fin juin 2014 ainsi qu'en septembre 2014, ces seuls éléments ne justifient pas de l'existence d'un lien entre, d'une part, ces interventions et installations et, d'autre part, la mise en charge des batteries des véhicules électriques et le manquement de la société Bluecar à son obligation d'information et de conseil. M. N. sera débouté de ce chef.

M. N. ne justifie pas en outre d'un préjudice de jouissance qu'il aurait personnellement éprouvé. Il convient de rappeler que selon un de ses courriels, l'opération était destinée à réaliser un test avec ces trois voitures et il précise, dans ses conclusions, que l'usage de ces véhicules devait en être fait par lui-même et ses deux enfants. Or, il ne dément pas l'affirmation suivant laquelle il a continué à utiliser le véhicule 620 H. Sa demande au titre d'un préjudice de jouissance sera également rejetée.

Un préjudice ne pouvant découler du paiement d'un impôt auquel un contribuable est légalement tenu, la demande de dommages et intérêts formée de ce chef sera aussi rejetée.

Sur les demandes reconventionnelles de la société Bluecar

Le tribunal l'a déboutée de ses demandes relatives à un solde impayé du prix de vente des véhicules et aux loyers impayés au titre des locations des batteries, faute de preuve de sommes non payées. Il a aussi rejeté la demande au titre des frais de remise en état, la société Bluecar n'établissant pas qu'elle ait fait procéder à celle-ci. Il a alloué à la société Bluecar la somme de 76 700 euros pour la perte des batteries, considérant que leur dysfonctionnement était en lien avec l'absence de mise en conformité du réseau électrique chez M. N., en dépit des recommandations figurant dans les contrats de location. Il a estimé que la procédure engagée par M. N. ne présentait pas de caractère abusif.

M. N. conclut à la confirmation du jugement sur le solde du prix et le paiement des loyers, faute de preuve d'un reliquat de prix non réclamé jusqu'alors et au motif que les batteries n'ont pas permis une utilisation normale des véhicules. Il relève qu'aucune facture des frais de remise en état n'est produite. Il s'oppose au paiement des batteries perdues en raison du manquement du vendeur à son obligation d'information portant sur les prérequis en vue d'une utilisation normale de celles-ci et du fait que les recommandations nécessaires lui ont été données tardivement. Il ajoute que l'une des batteries était défectueuse. Il fait encore valoir qu'à compter d'avril 2015, il n'avait plus la garde des véhicules et ne saurait être tenu d'assumer la destruction de celles-ci. Il s'oppose aussi à la demande pour procédure abusive, son action n'étant que la résultante d'un manque de professionnalisme du vendeur.

La société Bluecar réplique que le tribunal a inversé la charge de la preuve sur le solde du prix. Elle soutient que les batteries fonctionnaient parfaitement et qu'elles n'ont été détruites qu'en raison des négligences fautives de M. N.. Elle prétend justifier des frais de remise en état par une facture correspondant aux immatriculations des véhicules litigieux. Elle reproche à M. N. d'avoir manqué à l'obligation de conserver les batteries dont il avait la garde, en ne suivant pas les recommandations prescrites puis en laissant détruire les véhicules en octobre 2018, en toute connaissance de cause. Elle avance que le préjudice subi de ce chef s'élève à 191 500 euros. Elle argue de la négligence de M. N., de l'abandon des véhicules et du fait qu'il les ait laissé détruire pour conclure au caractère abusif de son action.

Il appartient à celui qui se prétend libéré d'une dette d'en rapporter la preuve. M. N. n'établissant pas avoir réglé le solde du prix de vente réclamé d'un montant de 384 euros, il sera condamné au paiement de cette somme, le jugement étant infirmé en ce sens.

M. N. ne justifie pas non plus avoir payé les loyers qui lui sont réclamés, pour trois batteries de juillet 2014 à mars 2015 et une batterie d'avril 2015 à aujourd'hui.

Toutefois, il résulte notamment du courriel du vendeur du 31 octobre 2014 que celui-ci a admis un problème de batterie sur le véhicule V0405, disant avoir été rarement confronté à ce type de difficulté, sans imputer d'une quelconque façon celle-ci à M. N. et en proposant de changer le matériel en cause, ce qui n'apparaît pas avoir été fait, en tout cas pas avant le printemps 2015 puisque Bluecar ne justifie avoir expédié de nouvelles batteries par mer qu'en février 2015. Compte tenu de cette inexécution, la société Bluecar ne saurait réclamer le paiement du loyer de la batterie de ce véhicule au-delà du mois de septembre 2014.

Pour celle équipant le véhicule V0408, le vendeur a, dans ce même courriel, imputé sa défectuosité à un problème de branchement, ce qui n'est pas utilement contredit par M. N.. Cependant, compte tenu du manquement du vendeur à son obligation d'information et de conseil et du fait que, notamment, la recommandation de l'installation de disjoncteurs spéciaux n'a pas été fournie à M. N. avant le mois de septembre 2014, ce problème de branchement et la défectuosité en résultant apparaissent la conséquence du manquement de la société Bluecar qui n'est dès lors pas fondée non plus à réclamer le paiement d'un loyer au-delà du mois de septembre 2014.

En revanche, l'autre batterie et la voiture qui en était équipée ont continué à fonctionner. Du moins, M. N. ne s'est-il plaint d'aucune défectuosité persistante ou non résolue. La demande en paiement de loyers de ce chef est donc justifiée.

M. N. sera ainsi condamné à payer à la société Bluecar :

- la location de 3 batteries de juillet à septembre 2014 : 3 x 80 x 3 = 720

- la location d'une batterie à partir d'octobre 2014 : 31 x 80 = 2 480

soit la somme totale de 3 200 euros au titre des frais de location, le jugement étant infirmé en ce sens.

Le garage FBM a établi un devis pour des frais de nettoyage et d'entretien à la société Bluecar. Mais celle-ci ne justifie ni de la réalisation de ces travaux, ni de leur paiement par ses soins, ni d'ailleurs des raisons pour lesquelles M. N. devrait les lui rembourser, dans la mesure où elle ne prouve pas avoir agi pour le compte de ce dernier qui était le seul propriétaire des voitures concernées. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

La société Bluecar prétend avoir perdu du fait de M. N. cinq batteries, soit les trois initialement incorporées aux véhicules et deux qui ont été remplacées.

Il n'est pas justifié que la batterie du troisième véhicule qui a continué à fonctionner ait connu des difficultés et ait été changée du fait de M. N., ce qui ne saurait se déduire d'un bon de livraison portant une date du 29 juillet 2015, plus d'une année après la livraison des véhicules.

Il résulte par ailleurs des explications précédentes que le remplacement des deux autres batteries n'est pas imputable à M. N..

Ainsi, la société Bluecar ne saurait faire supporter à M. N. le coût des batteries initialement incorporées.

Il est constant que les deux véhicules 621 H et 622 H ont été détruits en octobre 2018.

Cependant, cela ne suffit pas à établir la destruction de deux batteries, alors que la société Hertz a affirmé dans des conclusions prises à l'occasion d'une procédure l'opposant à M. N. devant une autre juridiction qu'une des batteries avait été retirée du véhicule avant la destruction de celui-ci et remise à son propriétaire, la société Bluecar. Il s'en déduit que celle-ci ne justifie que de la perte d'une batterie lors de cette destruction.

Il résulte des pièces versées aux débats (sommations interpellatives des 1er septembre 2015 et 15 février 2016, liste des véhicules détruits) que les véhicules précités ont été entreposés chez Hertz à la demande de la société Bluecar et que c'est la société Hertz qui les a fait détruire. Si cette dernière a, avant celle-ci, demandé à plusieurs reprises de procéder à l'enlèvement des véhicules à M. N. qui n'y a pas déféré, il n'en demeure pas moins que le dépôt chez Hertz tant du véhicule que de la batterie incorporée qui était restée la propriété de la société Bluecar a été fait par cette dernière. En outre, la société Hertz n'a jamais avisé M. N. de ce qu'elle allait procéder à la destruction des biens déposés, y compris dans sa dernière lettre du 23 août 2018 par laquelle elle a réitéré sa demande d'enlèvement et à laquelle celui-ci a répondu de traiter la question avec la société Bluecar.

La perte de l'autre batterie résulte ainsi de la seule initiative de la société Hertz, après que la société Bluecar, demeurée propriétaire de ce matériel, l'a repris pour le confier avec la voiture dans laquelle il était incorporé à cette société. M. N. est ainsi étranger à cette perte.

Le jugement qui l'a condamné à ce titre sera infirmé, la société Bluecar étant déboutée de sa demande d'indemnisation pour les batteries.

Il résulte des énonciations précédentes, notamment du manquement à son obligation d'information et de conseil retenu contre la société Bluecar, que la procédure engagée par M. N. n'est pas abusive. Le jugement qui a rejeté la demande de dommages et intérêts formée de ce chef sera confirmé.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

M. N., qui succombe au moins pour partie, sera condamné aux dépens de première instance et d'appel. Il n'y a pas lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- dit que M. N. ne démontre pas un manquement à l'obligation d'information de la part de la société Bluecar ;

- enjoint à M. N. de reprendre les véhicules 621 H et 622 H gardés en dépôt auprès de la société Henry's Car Rental ;

- débouté la société Bluecar de ses demandes en paiement du solde du prix de vente et des loyers des batteries ;

- condamné M. N. au paiement de la somme de 76 000 euros au titre de la perte des batteries et à celle de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Confirme le jugement en ses autres dispositions déférées à la cour ;

Statuant à nouveau dans cette limite et ajoutant :

Condamne M. N. à payer à la société Bluecar les sommes de :

- 384 euros au titre du solde du prix de vente ;

- 3 200 euros au titre des loyers des batteries ;

Déboute les parties de toute autre demande ;

Condamne M. N. aux dépens d'appel.