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Décisions

CJUE, 3e ch., 3 février 2021, n° C-555/19

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Fussl Modestraße Mayr GmbH

Défendeur :

SevenOne Media GmbH, ProSiebenSat.1 TV Deutschland GmbH, ProSiebenSat.1 Media SE

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président de chambre :

A. Prechal (rapporteure)

Juge :

K. Lenaerts

Avocat général :

M. Szpunar

Avocats :

N. Wahl, F. Biltgen , L.S. Rossi

CJUE n° C-555/19

3 février 2021

LA COUR (troisième chambre)

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 56 TFUE, de l’article 11 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), du principe général d’égalité de traitement et de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 10 mars 2010, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive « Services de médias audiovisuels ») (JO 2010, L 95, p. 1).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Fussl Modestraße Mayr GmbH, société de droit autrichien (ci-après « Fussl »), à SevenOne Media GmbH, ProSiebenSat.1 TV Deutschland GmbH et ProSiebenSat.1 Media SE, sociétés de droit allemand, au sujet du refus de SevenOne Media d’exécuter un contrat conclu avec Fussl et ayant pour objet la diffusion, sur le territoire du seul Freistaat Bayern (Land de Bavière, Allemagne), de publicité télévisée pour des produits de mode vendus par cette dernière société, au motif qu’une telle publicité, dès lors qu’elle est destinée à s’insérer dans des programmes de télévision diffusés sur l’ensemble du territoire allemand, est contraire au droit national applicable.

 Le cadre juridique

 Le droit de l’union

3 Les considérants 5, 8, 41 et 83 de la directive 2010/13 énoncent :

« (5) Les services de médias audiovisuels sont des services autant culturels qu’économiques. L’importance grandissante qu’ils revêtent pour les sociétés, la démocratie – notamment en garantissant la liberté d’information, la diversité d’opinions et le pluralisme des médias –, l’éducation et la culture justifie l’application de règles particulières à ces services.

[...]

(8) Il est essentiel que les États membres veillent à ce que soient évités des actes préjudiciables à la libre circulation et au commerce des émissions télévisées ou susceptibles de favoriser la formation de positions dominantes qui imposeraient des limites au pluralisme et à la liberté de l’information télévisée ainsi que de l’information dans son ensemble.

[...]

(41) Les États membres devraient pouvoir appliquer aux fournisseurs de services de médias relevant de leur compétence des règles plus spécifiques ou plus strictes dans les domaines coordonnés par la présente directive, en veillant à ce que ces règles soient en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union. [...]

[...]

(83) Pour assurer de façon complète et adéquate la protection des intérêts des consommateurs que sont les téléspectateurs, il est essentiel que la publicité télévisée soit soumise à un certain nombre de normes minimales et de critères, et que les États membres aient la faculté de fixer des règles plus strictes ou plus détaillées et, dans certains cas, des conditions différentes pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence. »

4 L’article 1er de cette directive, faisant partie du chapitre I de celle-ci, intitulé « Définitions », dispose, à son paragraphe 1 :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

a) “service de médias audiovisuels” :

i) un service tel que défini aux articles 56 et 57 [TFUE], qui relève de la responsabilité éditoriale d’un fournisseur de services de médias et dont l’objet principal est la fourniture de programmes dans le but d’informer, de divertir ou d’éduquer le grand public, par des réseaux de communications électroniques au sens de l’article 2, point a), de la directive 2002/21/CE [du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive “cadre”) (JO 2002, L 108, p. 33)]. Un service de médias audiovisuels est soit une émission télévisée au sens du point e) du présent paragraphe, soit un service de médias audiovisuels à la demande au sens du point g) du présent paragraphe ;

ii) une communication commerciale audiovisuelle ;

b) “programme” : un ensemble d’images animées, combinées ou non à du son, constituant un seul élément dans le cadre d’une grille ou d’un catalogue établi par un fournisseur de services de médias et dont la forme et le contenu sont comparables à ceux de la radiodiffusion télévisuelle. Un programme est, à titre d’exemple, un film long métrage, une manifestation sportive, une comédie de situation, un documentaire, un programme pour enfants ou une fiction originale ;

[...]

d) “fournisseur de services de médias” : la personne physique ou morale qui assume la responsabilité éditoriale du choix du contenu audiovisuel du service de médias audiovisuels et qui détermine la manière dont il est organisé ;

e) “radiodiffusion télévisuelle” ou “émission télévisée” (c’est-à-dire un service de médias audiovisuels linéaire) : un service de médias audiovisuels fourni par un fournisseur de services de médias pour le visionnage simultané de programmes sur la base d’une grille de programmes ;

f) “organisme de radiodiffusion télévisuelle” : un fournisseur de services de médias de radiodiffusion télévisuelle ;

g) “service de médias audiovisuels à la demande” (c’est-à-dire un service de médias audiovisuels non linéaire) : un service de médias audiovisuels fourni par un fournisseur de services de médias pour le visionnage de programmes au moment choisi par l’utilisateur et sur demande individuelle sur la base d’un catalogue de programmes sélectionnés par le fournisseur de services de médias ;

h) “communication commerciale audiovisuelle” : des images, combinées ou non à du son, qui sont conçues pour promouvoir, directement ou indirectement, les marchandises, les services ou l’image d’une personne physique ou morale qui exerce une activité économique. Ces images accompagnent un programme ou y sont insérées moyennant paiement ou autre contrepartie, ou à des fins d’autopromotion. La communication commerciale audiovisuelle revêt notamment les formes suivantes : publicité télévisée, parrainage, téléachat et placement de produit ;

i) “publicité télévisée” : toute forme de message télévisé, que ce soit moyennant paiement ou autre contrepartie, ou de diffusion à des fins d’autopromotion par une entreprise publique ou privée ou une personne physique dans le cadre d’une activité commerciale, industrielle ou artisanale ou d’une profession dans le but de promouvoir la fourniture, moyennant paiement, de biens ou de services, y compris de biens immeubles, de droits et d’obligations ;

[...] »

5 L’article 4, paragraphe 1, de ladite directive est libellé comme suit :

« Les États membres ont la faculté, en ce qui concerne les fournisseurs de services de médias qui relèvent de leur compétence, de prévoir des règles plus détaillées ou plus strictes dans les domaines couverts par la présente directive, sous réserve que ces règles soient conformes au droit de l’Union. »

 Le droit allemand

6 Les Länder ont conclu, le 31 août 1991, le Staatsvertrag für Rundfunk und Telemedien (traité d’État sur la radiodiffusion et les télé-médias, GBI. 1991, p. 745). La version de ce traité applicable à l’affaire au principal est celle issue de sa modification par l’Achtzehnter Rundfunkänderungsstaatsvertrag (dix-huitième traité d’État modificatif relatif à la radiodiffusion), du 21 décembre 2015, entré en vigueur le 1er janvier 2016 (ci-après le « RStV »).

7 L’article 2 du RStV, intitulé « Définitions », prévoit, à son paragraphe 1 :

« La radiodiffusion est un service d’information et de communication linéaire ; elle consiste en l’organisation et la diffusion d’offres sous forme d’images animées ou de sons destinées à la collectivité et à être réceptionnées simultanément, sur la base d’une grille de programmes et moyennant l’utilisation d’ondes électromagnétiques.

[...] »

8 L’article 7 du RStV, intitulé « Principes de communication commerciale, Obligations d’indication du caractère publicitaire », dispose, à ses paragraphes 2 et 11 :

« (2) La publicité fait partie intégrante du programme. [...]

[...]

(11) La diffusion dans une partie seulement du territoire national de publicité ou d’autres contenus dans un programme désigné ou autorisé pour une diffusion au niveau national n’est licite que si et dans la mesure où le droit du Land dans lequel s’opère la diffusion l’autorise. La publicité ou tout autre contenu d’opérateurs privés diffusés dans une partie seulement du territoire national nécessitent une autorisation spécifique au titre du droit du Land concerné ; cette autorisation peut être assortie de conditions de contenu à définir par la loi.

[...] »

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

9 Fussl, dont le siège est situé à Ort im Innkreis (Autriche), gère un ensemble de magasins de mode établis en Autriche ainsi que dans le Land de Bavière.

10 SevenOne Media, société dont le siège est établi à Unterföhring (Allemagne), est l’entreprise de commercialisation du groupe ProSiebenSat.1, un organisme privé de radiodiffusion télévisuelle établi en Allemagne.

11 Le 25 mai 2018, Fussl a conclu un contrat avec SevenOne Media portant sur la diffusion, dans le seul Land de Bavière, de publicité télévisée destinée à être insérée dans les programmes de la chaîne nationale ProSieben en utilisant les réseaux câblés bavarois de Vodafone Kabel Deutschland GmbH.

12 Par la suite, SevenOne Media a refusé d’exécuter ce contrat au motif que l’insertion, dans les programmes diffusés sur l’ensemble du territoire allemand, de publicité télévisée dont la diffusion est limitée à un niveau régional lui est interdite par l’article 7, paragraphe 11, du RStV.

13 Fussl a alors saisi la juridiction de renvoi, le Landgericht Stuttgart (tribunal régional de Stuttgart, Allemagne), afin que celle-ci enjoigne à SevenOne Media de se conformer à ses obligations découlant dudit contrat.

14 La juridiction de renvoi relève qu’il est constant entre les parties que, d’un point de vue technique, SevenOne Media, dans le cadre de ses émissions nationales, est en mesure de limiter la diffusion de la publicité télévisée en cause au territoire du seul Land de Bavière.

15 S’agissant des différents arguments soulevés devant elle, cette juridiction doute, en premier lieu, du fait que la restriction à la libre prestation de services garantie par l’article 56 TFUE qu’entraîne l’interdiction prévue à l’article 7, paragraphe 11, du RStV puisse être justifiée au regard de la raison impérieuse d’intérêt général que poursuit cette disposition, à savoir la protection du pluralisme des médias.

16 D’une part, elle considère qu’il n’est pas certain que cet objectif soit poursuivi de manière cohérente et systématique, dès lors que ladite interdiction ne s’applique pas à la publicité diffusée au seul niveau régional sur des sites Internet.

17 D’autre part, le caractère proportionnel de l’interdiction prévue à l’article 7, paragraphe 11, du RStV pourrait également être mis en doute, dès lors que les organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux ne profitent que dans une moindre mesure de cette interdiction, alors que des opérateurs économiques tels que Fussl se voient limiter de manière significative leurs possibilités de promouvoir leurs produits.

18 La juridiction de renvoi estime, en deuxième lieu, que l’article 7, paragraphe 11, du RStV peut constituer une atteinte illicite à la liberté d’opinion et à la liberté de recevoir ou de communiquer des informations, garanties par l’article 11 de la Charte et par l’article 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après la « CEDH »).

19 En troisième lieu, cette juridiction considère que l’article 7, paragraphe 11, du RStV pourrait être contraire au principe d’égalité de traitement, principe général du droit de l’Union.

20 Dans ces conditions, le Landgericht Stuttgart (tribunal régional de Stuttgart) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Convient-il d’interpréter [...] l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13, [...] le principe d’égalité [de traitement] du droit de l’Union et [...] les dispositions de l’article 56 TFUE relatives à la libre circulation des services en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale qui interdit la diffusion régionale de publicité dans des programmes de radiodiffusion autorisés pour l’État membre dans son ensemble ?

2) L’appréciation de la première question est-elle différente lorsque le droit national admet des dispositions législatives selon lesquelles la diffusion régionale de publicité peut être légalement autorisée et nécessite, dans ce cas, une autorisation administrative supplémentaire ?

3) L’appréciation de la première question est-elle différente si la possibilité d’autoriser une publicité régionale, décrite dans la deuxième question, n’a pas été effectivement utilisée et que, par conséquent, la publicité régionale est toujours interdite ?

4) L’article 11 de la Charte doit-il être interprété, eu égard à l’article 10 de la CEDH ainsi qu’à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, en particulier au regard du principe de pluralité de l’information, en ce sens qu’il s’oppose à une disposition nationale comme celle décrite dans les première, deuxième et troisième questions ? »

 Sur la demande tendant à la réouverture de la phase orale de la procédure

21 À la suite du prononcé des conclusions de M. l’avocat général, SevenOne Media, ProSiebenSat.1 TV Deutschland et ProSiebenSat.1 Media, ont, par acte parvenu au greffe de la Cour le 27 octobre 2020, demandé à ce que soit ordonnée la réouverture de la phase orale de la procédure, en application de l’article 83 du règlement de procédure de la Cour.

22 À l’appui de leur demande, lesdites sociétés font valoir que les conclusions présentées par M. l’avocat général comportent un nombre d’erreurs factuelles qui devraient être corrigées, dès lors que l’arrêt à intervenir ne saurait être fondé sur des éléments erronés. Elles soutiennent, notamment, que l’affirmation contenue au point 57 de ces conclusions, selon laquelle la publicité sur Internet serait totalement différente de la publicité télévisée, est incorrecte à différents égards.

23 Il convient de rappeler que, en vertu de l’article 252, second alinéa, TFUE, l’avocat général a pour rôle de présenter publiquement, en toute impartialité et en toute indépendance, des conclusions motivées sur les affaires qui, conformément au statut de la Cour de justice de l’Union européenne, requièrent son intervention. La Cour n’est liée ni par les conclusions de l’avocat général ni par la motivation au terme de laquelle il parvient à celles-ci (arrêt du 25 juillet 2018, Société des produits Nestlé e.a./Mondelez UK Holdings & Services, C 84/17 P, C 85/17 P et C 95/17 P, EU:C:2018:596, point 31).

24 En outre, ni le statut de la Cour de justice de l’Union européenne ni le règlement de procédure ne prévoient la possibilité, pour les parties ou les intéressés visés à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, de présenter des observations en réponse aux conclusions présentées par l’avocat général (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2016, Commission/Aer Lingus et Ryanair Designated Activity, C 164/15 P et C 165/15 P, EU:C:2016:990, point 31 ainsi que jurisprudence citée).

25 Par conséquent, le désaccord d’une partie avec les conclusions de l’avocat général, quelles que soient les questions qu’il examine dans celles-ci, ne peut constituer en soi un motif justifiant la réouverture de la phase orale de la procédure (arrêt du 28 février 2018, mobile.de/EUIPO, C 418/16 P, EU:C:2018:128, point 30).

26 Cela étant, la Cour peut, à tout moment, l’avocat général entendu, ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure, conformément à l’article 83 de son règlement de procédure, notamment si elle considère qu’elle est insuffisamment éclairée ou lorsqu’une partie a soumis, après la clôture de cette phase, un fait nouveau de nature à exercer une influence décisive sur la décision de la Cour, ou encore lorsque l’affaire doit être tranchée sur la base d’un argument qui n’a pas été débattu entre les parties ou les intéressés visés à l’article 23 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne.

27 En l’occurrence, tel n’est pas le cas.

28 En effet, SevenOne Media, ProSiebenSat.1 TV Deutschland et ProSiebenSat.1 Media fondent leur demande de réouverture de la phase orale de la procédure sur un ensemble d’erreurs de nature factuelle dont seraient entachées les conclusions.

29 Or, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, dans le cadre de la procédure visée à l’article 267 TFUE, fondée sur une nette séparation des fonctions entre les juridictions nationales et la Cour, le juge national est seul compétent pour constater et apprécier les faits du litige au principal ainsi que pour interpréter et appliquer le droit national (arrêt du 18 février 2016, Finanmadrid EFC, C 49/14, EU:C:2016:98, point 27 et jurisprudence citée).

30 En l’occurrence, il appartient dès lors à la seule juridiction de renvoi d’apprécier les faits qu’invoquent SevenOne Media, ProSiebenSat.1 TV Deutschland et ProSiebenSat.1 Media à l’appui de leur demande de réouverture de la phase orale de la procédure si cette juridiction devait estimer qu’une telle appréciation est nécessaire pour la solution du litige au principal au regard, notamment, de l’interprétation du droit de l’Union fournie par la Cour dans le cadre de sa réponse à la présente demande de décision préjudicielle.

31 Ainsi, la Cour considère, l’avocat général entendu, qu’elle est suffisamment éclairée par les différents arguments qui ont été dûment débattus devant elle.

32 Eu égard aux considérations qui précèdent, il n’y a pas lieu d’ordonner la réouverture de la phase orale de la procédure.

 Sur les questions préjudicielles

33 Par ses quatre questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13, le principe d’égalité de traitement, l’article 56 TFUE ainsi que l’article 11 de la Charte doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale qui interdit aux organismes de radiodiffusion télévisuelle d’insérer dans leurs programmes émis sur l’ensemble du territoire national des publicités télévisées dont la diffusion est limitée à un niveau régional.

 Sur la conformité à la directive 2010/13

34 S’agissant, en premier lieu, de l’éventuelle incidence de la directive 2010/13 sur la réponse à apporter aux questions préjudicielles telles que reformulées au point précédent, le gouvernement allemand soutient que l’article 1er, paragraphe 1, sous e), de cette directive, tel que transposé en droit allemand par l’article 2, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphes 2 et 11, du RStV, consacre le « principe de la simultanéité du visionnage », de sorte que le RStV ne comporte pas de dispositions « plus strictes ou plus détaillées », au sens de l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive, dont la conformité au droit de l’Union serait susceptible d’être examinée.

35 Toutefois, une telle interprétation de l’article 1er, paragraphe 1, sous e), de la directive 2010/13 ne saurait être retenue.

36 En effet, la référence, à l’article 1er, paragraphe 1, sous e), de la directive 2010/13, à la notion de « visionnage simultané de programmes » ne saurait être comprise en ce sens qu’elle impliquerait l’obligation, pour les États membres, de veiller à ce que les publicités ou autres contenus dans un programme télévisé désigné ou autorisé pour une diffusion au niveau national soient, en l’absence d’autorisation, systématiquement diffusées sur l’ensemble de leur territoire, comme le prévoit en l’occurrence l’article 7, paragraphe 11, du RStV.

37 Outre le fait que l’article 1er, paragraphe 1, sous e), de la directive 2010/13 se limite à définir la notion de « radiodiffusion télévisuelle » ou d’« émission télévisée » en se référant expressément au visionnage simultané de « programmes » et n’impose donc, en tant que telle, pas d’obligation en matière de publicité télévisée, il découle du système de cette directive que la notion de « visionnage simultané » doit être comprise au regard de la distinction sur laquelle repose ladite directive entre les services de médias audiovisuels dits « linéaires », visés à cette disposition, et les services de médias audiovisuels dits « non linéaires » que sont les « services de médias audiovisuels à la demande », tels qu’ils sont définis à l’article 1er, paragraphe 1, sous g), de la même directive en référence au fait que, pour ces services, le « visionnage des programmes » a lieu « au moment choisi par l’utilisateur et sur demande individuelle sur la base d’un catalogue de programmes sélectionnés par le fournisseur de services de médias ».

38 La notion de « visionnage simultané », au sens de l’article 1er, paragraphe 1, sous e), de la directive 2010/13, doit donc être appréhendée au regard du caractère linéaire du service de médias audiovisuels que constitue la radiodiffusion télévisuelle qui implique que tous les spectateurs auxquels un programme est destiné le visionnent simultanément sur la base d’une grille chronologique de programmes, indépendamment du choix et d’une demande de l’utilisateur.

39 Cette notion n’implique donc pas, en elle-même, que la diffusion de la publicité télévisée ne saurait faire l’objet de différenciations, notamment en limitant cette diffusion à une partie du territoire d’un État membre.

40 Ensuite, quant à l’éventuelle incidence de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13 sur la réponse à apporter aux questions préjudicielles telles que reformulées au point 33 du présent arrêt, il y a lieu de rappeler qu’il ressort de cette disposition, ainsi que des considérants 41 et 83 de cette directive, que, aux fins d’assurer de façon complète et adéquate la protection des intérêts des consommateurs que sont les téléspectateurs, les États membres ont la faculté, en ce qui concerne les fournisseurs de services de médias qui relèvent de leur compétence, de prévoir des règles plus détaillées ou plus strictes et, dans certains cas, des conditions différentes, dans les domaines couverts par ladite directive, sous réserve que ces règles soient conformes au droit de l’Union et, en particulier, à ses principes généraux (arrêt du 18 juillet 2013, Sky Italia, C 234/12, EU:C:2013:496, point 13).

41 Or, comme l’a également relevé, en substance, M. l’avocat général au point 22 de ses conclusions, la règle découlant de l’article 7, paragraphe 11, du RStV, si elle relève d’un domaine couvert par la directive 2010/13, à savoir celui de la publicité télévisée, lequel est réglementé par les articles 19 à 26 de celle-ci qui visent à protéger les consommateurs que sont les téléspectateurs contre la publicité excessive (arrêt du 18 juillet 2013, Sky Italia, C 234/12, EU:C:2013:496, point 17), concerne toutefois une matière spécifique qui n’est pas régie par l’un desdits articles et ne vise d’ailleurs pas ledit objectif de protection des téléspectateurs.

42 Il en découle que la mesure établie par l’article 7, paragraphe 11, du RStV ne saurait être qualifiée de règle « plus détaillée » ou « plus stricte », au sens de l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13, et que celle-ci ne relève pas du champ d’application de ladite directive.

 Sur la conformité à la libre prestation de services garantie par l’article 56 TFUE

 Sur l’existence d’une restriction à la libre prestation de services

43 Pour ce qui concerne, en deuxième lieu, l’examen de la conformité d’une mesure nationale telle que celle en cause au principal au regard de la liberté fondamentale de prestation de services garantie par l’article 56 TFUE, il y a lieu de rappeler que doivent être considérées comme des restrictions à cette liberté toutes les mesures qui interdisent, gênent ou rendent moins attrayant l’exercice de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2017, Vanderborght, C 339/15, EU:C:2017:335, point 61 et jurisprudence citée).

44 La notion de « restriction » couvre, en particulier, les mesures prises par un État membre qui, quoiqu’indistinctement applicables, affectent la libre circulation de services dans les autres États membres (arrêt du 4 mai 2017, Vanderborght, C 339/15, EU:C:2017:335, point 62 et jurisprudence citée).

45 Dans ce contexte, Fussl fait valoir que l’interdiction établie par l’article 7, paragraphe 11, du RStV s’oppose aux besoins publicitaires particuliers d’un opérateur économique non-résident de taille moyenne, tel que le serait cette société, qui vise à pénétrer le marché allemand en se focalisant, dans un premier temps, sur une seule région de chalandise, en l’occurrence le Land de Bavière.

46 D’une part, la diffusion de publicité télévisée dans le cadre de programmes nationaux sur l’ensemble du territoire allemand serait trop coûteuse et pourrait donner lieu à une demande trop importante qui pourrait ne pas pouvoir être honorée.

47 D’autre part, la diffusion de publicité télévisée par des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux aurait un impact publicitaire très limité. Ceci tiendrait surtout au fait que les programmes que diffusent ces chaînes régionales n’atteignent qu’un nombre particulièrement restreint de téléspectateurs, soit environ 5 % du nombre total des téléspectateurs allemands.

48 À cet égard, il y a lieu de constater qu’une mesure nationale telle que celle en cause au principal, en ce qu’elle interdit aux organismes de radiodiffusion télévisuelle de diffuser dans le cadre de leurs programmes nationaux de la publicité télévisée régionale au profit, notamment, d’annonceurs établis dans d’autres États membres tels que, en l’occurrence, Fussl, comporte une restriction à la libre prestation de services au détriment tant des fournisseurs de services publicitaires que sont ces organismes de radiodiffusion télévisuelle que des destinataires de ces services que sont lesdits annonceurs désireux de promouvoir leurs produits ou services dans un autre État membre, tout en limitant cette promotion à un niveau régional (voir, en ce sens, arrêts du 28 octobre 1999, ARD, C 6/98, EU:C:1999:532, point 49, et du 17 juillet 2008, Corporación Dermoestética, C 500/06, EU:C:2008:421, point 33).

49 En l’occurrence, l’article 7, paragraphe 11, du RStV, en ce qu’il empêche des opérateurs économiques non-résidents, tels que Fussl, de bénéficier de prestations de services de diffusion de la publicité télévisée sur le territoire allemand, est de nature à entraver leur accès au marché de cet État membre.

50 L’existence de cette entrave à la libre prestation de services ne saurait d’ailleurs être remise en cause par la circonstance, à laquelle se réfère la juridiction de renvoi dans le cadre de ses deuxième et troisième questions, que chaque Land peut, en vertu de la « clause d’ouverture » que comporte l’article 7, paragraphe 11, du RStV, prévoir dans sa législation un régime d’autorisation permettant, le cas échéant sous certaines conditions, une telle diffusion de publicité télévisée au niveau régional.

51 Il suffit, en effet, à cet égard de relever qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle qu’il s’agit d’une simple faculté dont aucun Land n’a, à ce jour, fait usage, de sorte qu’il y a lieu de constater que, de lege lata, l’interdiction, pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle, d’insérer dans leurs programmes émis sur l’ensemble du territoire national des publicités télévisées dont la diffusion est limitée à un niveau régional, telle que prévue à l’article 7, paragraphe 11, du RStV, et la restriction de la libre prestation de services en découlant sont avérées.

 Sur l’éventuelle justification de la restriction à la libre prestation de services

52 S’agissant ensuite de l’éventuelle justification d’une telle restriction, il ressort d’une jurisprudence constante de la Cour qu’une restriction à une liberté fondamentale garantie par le traité FUE ne peut être admise qu’à la condition que la mesure nationale en cause réponde à une raison impérieuse d’intérêt général, qu’elle soit propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et qu’elle n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre (voir en ce sens, notamment, arrêts du 4 mai 2017, Vanderborght, C 339/15, EU:C:2017:335, point 65, et du 11 décembre 2019, TV Play Baltic, C 87/19, EU:C:2019:1063, point 37 ainsi que jurisprudence citée).

– Sur l’existence d’une raison impérieuse d’intérêt général susceptible de justifier la restriction

53 Il ressort du dossier soumis à la Cour, de la demande de décision préjudicielle et des observations écrites du gouvernement allemand, ainsi que le confirme d’ailleurs l’exposé des motifs du dix-huitième traité d’État modificatif relatif à la radiodiffusion, que l’article 7, paragraphe 11, du RStV vise à réserver les recettes de la publicité télévisée régionale aux organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux en leur assurant ainsi une source de financement et, partant, leur pérennité, afin de leur permettre de contribuer au caractère pluraliste de l’offre des programmes de télévision par la voie de la fourniture de contenus à caractère régional et local.

54 Or, selon une jurisprudence constante de la Cour, la préservation du caractère pluraliste de l’offre des programmes de télévision qu’entend garantir une politique culturelle peut constituer une raison impérieuse d’intérêt général justifiant une restriction à la libre prestation de services (voir, en ce sens, arrêts du 13 décembre 2007, United Pan-Europe Communications Belgium e.a., C 250/06, EU:C:2007:783, points 41 et 42, ainsi que du 22 décembre 2008, Kabel Deutschland Vertrieb und Service, C 336/07, EU:C:2008:765, points 37 et 38).

55 De même, la Cour a jugé que la sauvegarde des libertés protégées à l’article 11 de la Charte, qui, à son paragraphe 2, vise la liberté et le pluralisme des médias, constitue incontestablement un objectif d’intérêt général, dont il convient de souligner, en particulier, l’importance dans une société démocratique et pluraliste, de nature à justifier une restriction à la liberté d’établissement (arrêt du 3 septembre 2020, Vivendi, C 719/18, EU:C:2020:627, point 57 et jurisprudence citée).

– Sur la proportionnalité de la restriction

56 Si l’objectif tenant au maintien du pluralisme des médias que poursuit l’article 7, paragraphe 11, du RStV est susceptible de constituer une raison impérieuse d’intérêt général, encore faut-il, ainsi qu’il a déjà été rappelé au point 52 du présent arrêt, pour que la restriction à la libre prestation de services que comporte cette disposition nationale puisse être justifiée que celle-ci soit propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre.

57 Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que, si cet objectif, en ce qu’il est lié au droit fondamental à la liberté d’expression, réserve aux autorités nationales un large pouvoir d’appréciation, il n’en demeure pas moins que les exigences découlant des mesures visant à atteindre cet objectif ne doivent en aucun cas être inappropriées pour garantir la réalisation dudit objectif qu’elles poursuivent ou être disproportionnées par rapport à celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 13 décembre 2007, United Pan-Europe Communications Belgium e.a., C 250/06, EU:C:2007:783, point 44).

58 Dès lors, il y a lieu de vérifier, en premier lieu, si cette interdiction est propre à garantir la réalisation de l’objectif d’intérêt général lié à la garantie d’un pluralisme des médias que poursuit cette mesure.

59 À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante de la Cour, une législation nationale n’est propre à garantir la réalisation de l’objectif recherché que si elle répond véritablement au souci d’atteindre celui-ci d’une manière cohérente et systématique (arrêts du 10 mars 2009, Hartlauer, C 169/07, EU:C:2009:141, point 55, et du 11 juillet 2019, A, C 716/17, EU:C:2019:598, point 24 ainsi que jurisprudence citée).

60 Or, à l’instar de la juridiction de renvoi, les parties au principal ainsi que la Commission européenne doutent de ce que l’article 7, paragraphe 11, du RStV satisfasse à cette exigence de cohérence, principalement dans la mesure où l’interdiction qu’impose cette disposition nationale ne s’applique pas à la publicité fournie au seul niveau d’une région au moyen de différentes plateformes Internet.

61 À cet égard, il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier si les services publicitaires fournis sur des plateformes Internet constituent une concurrence réelle pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux sur le marché de la publicité régionale et une menace pour les revenus qu’ils tirent de cette publicité.

62 Dans ce contexte, la juridiction de renvoi a d’ailleurs considéré que l’article 7, paragraphe 11, RStV met les organismes de radiodiffusion télévisuelle ainsi que les annonceurs résidents et non-résidents souhaitant faire de la publicité télévisée au niveau régional dans une position moins favorable que les autres fournisseurs de services de médias sur des plateformes Internet, dès lors que ces derniers ont le droit de différencier leur offre publicitaire par région, au même titre que les organes de presse nationaux.

63 Par ailleurs, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, il apparaît que les organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux se trouvent en concurrence sur le marché de la publicité régionale avec les fournisseurs de services publicitaires, notamment linéaires, sur Internet, de sorte que les annonceurs sont susceptibles de déplacer leur demande de publicité régionale desdits organismes vers lesdits fournisseurs.

64 Sous réserve également de vérification par la juridiction de renvoi, il n’apparaît pas que le risque de perte de revenus dont sont ainsi susceptibles de souffrir les organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux en conséquence de ce déplacement de la demande et des recettes de services publicitaires vers les fournisseurs de services de publicité, notamment linéaires, sur Internet serait moins important que celui lié à un même déplacement de cette demande et de ces recettes au profit des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux si une interdiction telle que celle prévue à l’article 7, paragraphe 11, du RStV n’était pas d’application.

65 En outre, il y a lieu de constater que, alors qu’il ressort du dossier soumis à la Cour que, selon l’exposé des motifs du dix-huitième traité d’État modificatif relatif à la radiodiffusion, le législateur allemand a fondé l’interdiction établie par l’article 7, paragraphe 11, du RStV sur le risque d’un tel déplacement de la demande et d’une perte des revenus issus des recettes publicitaires au détriment des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux dont l’importance serait telle que la pérennité de ces organismes serait susceptible d’être compromise, l’existence d’un tel risque est mis en doute par les parties au litige au principal.

66 Or, il incombe à la seule juridiction de renvoi de vérifier, sur la base de données actuelles, suffisamment détaillées et étayées, s’il existe un risque réel ou concrètement prévisible d’un déplacement, au détriment des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux, de la demande de services de publicité régionale et des recettes qui en sont issues dont l’importance serait telle que le financement et, partant, la pérennité de ces organismes seraient susceptibles d’être compromis si les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux étaient autorisés à diffuser de la publicité régionale dans le cadre de leurs programmes émis sur l’ensemble du territoire national.

67 Par conséquent, il découle de ce qui précède que l’incohérence dont pourrait être affecté l’article 7, paragraphe 11, du RStV pourrait tenir au fait, devant faire l’objet d’une vérification par la juridiction de renvoi, que l’interdiction que comporte cette disposition s’applique aux seuls services publicitaires fournis par les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et non aux services publicitaires, notamment linéaires, fournis sur Internet, alors qu’il pourrait s’agir de deux types de services concurrents sur le marché allemand de la publicité qui, sous réserve de vérification par la juridiction de renvoi, sont susceptibles de présenter le même risque pour la santé financière et la pérennité des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux et, partant, pour l’objectif auquel tend ladite disposition, à savoir favoriser le pluralisme des médias à l’échelle régionale et locale.

68 Dans ce contexte, il incombera en particulier à la juridiction de renvoi de vérifier si le droit allemand permet aux organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux de diffuser de la publicité régionale dans le cadre de leurs émissions en flux continu sur des sites Internet. Dans l’affirmative, il conviendrait nécessairement de conclure au caractère incohérent de la mesure mise en place par l’article 7, paragraphe 11, du RStV.

69 Les circonstances de l’affaire au principal sont d’ailleurs, à cet égard, en substance comparables à celles ayant donné lieu à l’arrêt du 17 juillet 2008, Corporación Dermoestética (C 500/06, EU:C:2008:421).

70 En effet, si, au point 39 de cet arrêt, la Cour a conclu à l’incohérence et, partant, à l’inaptitude du régime de publicité en cause dans cette affaire à garantir la réalisation de son objectif lié à la protection de la santé publique, au motif que ce régime comportait une interdiction de la publicité concernant les traitements médicaux et chirurgicaux sur les chaînes de télévision nationales, tout en offrant la possibilité de diffuser une telle publicité sur les chaînes de télévision locales, une telle conclusion s’explique manifestement par la circonstance que, s’agissant de publicité pour de tels traitements, cet objectif de protection de la santé publique était tout autant pertinent que cette publicité soit diffusée sur les chaînes de télévision nationales ou sur les chaînes de télévision locales.

71 Enfin, il y a lieu de rappeler, ainsi qu’il a déjà été dit au point 57 du présent arrêt, que le large pouvoir d’appréciation dont disposent les autorités nationales lorsqu’elles entendent protéger le pluralisme des médias doit être pris en compte par la juridiction de renvoi lors de l’évaluation du caractère cohérent de la restriction.

72 En second lieu, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour rappelée au point 52 du présent arrêt, pour qu’une restriction à une liberté fondamentale garantie par le traité FUE puisse être justifiée, la mesure nationale qui est à l’origine de celle-ci doit non seulement répondre à une raison impérieuse d’intérêt général et être propre à garantir la réalisation de l’objectif qu’elle poursuit, mais également ne pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre.

73 Il y a donc lieu d’examiner si, en l’occurrence, d’autres mesures moins attentatoires à la libre prestation de services auraient pu permettre d’atteindre l’objectif de protection du pluralisme des médias au niveau régional et local, voulu par le législateur allemand au moyen de la mesure établie par l’article 7, paragraphe 11, du RStV.

74 À cet égard, il convient de relever, ainsi que l’a également observé, en substance, M. l’avocat général aux points 69 et 70 de ses conclusions, que le seul fait que d’autres États membres assurent le financement des organismes de radiodiffusion télévisuelle publics par des redevances et permettent aux organismes privés de diffuser librement de la publicité tant nationale que régionale ne constitue pas, en tant que tel, une preuve suffisante de l’absence de proportionnalité de l’interdiction prévue par l’article 7, paragraphe 11, du RStV.

75 En effet, compte tenu, notamment, du fait que, ainsi qu’il ressort du point 57 du présent arrêt, il convient de reconnaître aux États membres une certaine marge d’appréciation s’agissant de la mise en œuvre de l’objectif tenant au respect du pluralisme des médias, le fait qu’un État membre impose des règles moins strictes que celles imposées par un autre État membre ne saurait signifier que ces dernières sont disproportionnées (voir, en ce sens, arrêt du 18 septembre 2019, VIPA, C 222/18, EU:C:2019:751, point 71).

76 Cela étant, force est de constater que l’article 7, paragraphe 11, du RStV prévoit lui-même une clause dite d’« ouverture », permettant aux Länder d’introduire une mesure moins restrictive que l’interdiction pure et simple, à savoir un régime d’autorisation spécifique, pour autant que le droit du Land concerné le prévoie.

77 Partant, une mesure moins restrictive pourrait résulter de la mise en œuvre effective de ce régime d’autorisation au niveau des Länder, permettant la diffusion de publicité régionale par les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux dans certaines limites et sous certaines conditions devant être déterminées au regard des spécificités de chaque Land afin, notamment, de minimiser d’éventuelles incidences financières sur les organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux et, ainsi, de préserver le caractère pluraliste de l’offre télévisuelle notamment à l’échelle régionale et locale.

78 Ainsi que l’a également relevé M. l’avocat général au point 69 de ses conclusions, le fait que cette possibilité est demeurée inappliquée jusqu’à présent ne change rien au fait que le législateur allemand, en introduisant cette clause, a reconnu la compatibilité d’un tel régime d’autorisation avec les objectifs de la mesure en cause.

79 En outre, l’existence d’une mesure a priori moins restrictive ne saurait affecter la proportionnalité de l’article 7, paragraphe 11, du RStV que pour autant, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier, que celle-ci puisse effectivement être adoptée et mise en œuvre de manière à assurer que, en pratique, l’objectif de cette disposition visant à préserver le pluralisme des médias aux niveaux régional et local moyennant la protection du financement et de la pérennité des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux puisse être atteint.

 Sur la conformité aux articles 11 et 20 de la Charte

80 S’agissant, en troisième et dernier lieu, de la question de savoir si l’interdiction établie par l’article 7, paragraphe 11, du RStV peut être considérée comme portant atteinte à la libre radiodiffusion telle que garantie par l’article 11 de la Charte, ou comme étant contraire au principe d’égalité de traitement, il y a lieu de relever, à titre liminaire, que, eu égard à une jurisprudence constante de la Cour, dès lors qu’il a été établi, dans le cadre de l’examen au regard de l’article 56 TFUE, que cette réglementation est de nature à entraver la libre prestation de services que l’État membre concerné estime être justifiée au regard d’une raison impérieuse d’intérêt général tenant, en l’occurrence, à l’objectif de la préservation de la pluralité des médias, ladite réglementation doit être considérée comme mettant en œuvre le droit de l’Union, au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte, de telle sorte qu’elle doit être conforme aux droits fondamentaux garantis par cette dernière [voir, en ce sens, arrêt du 21 mai 2019, Commission/Hongrie (Usufruits sur terres agricoles), C 235/17, EU:C:2019:432, points 63 à 65].

 Sur la liberté d’expression et d’information garantie par l’article 11 de la Charte

81 Pour ce qui concerne la liberté d’expression et d’information, consacrée à l’article 11 de la Charte, il y a lieu de rappeler que cette liberté est également protégée par l’article 10 de la CEDH qui s’applique en particulier, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, à la diffusion par un entrepreneur des informations à caractère commercial, notamment sous la forme de messages publicitaires (arrêt du 17 décembre 2015, Neptune Distribution, C 157/14, EU:C:2015:823, point 64 et jurisprudence citée).

82 Or, la liberté d’expression et d’information, consacrée à l’article 11 de la Charte et à l’article 10 de la CEDH, ayant le même sens et la même portée dans chacun de ces deux instruments, ainsi qu’il ressort de l’article 52, paragraphe 3, de la Charte et des explications relatives à celle-ci en ce qui concerne son article 11, il convient de constater que la mesure nationale en cause au principal, en ce qu’elle limite les possibilités de diffusion de publicité télévisée régionale par les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux au bénéfice des annonceurs concernés, constitue une atteinte, dans le chef de ces opérateurs, à cette liberté fondamentale (voir, en ce sens, arrêts du 26 juin 1997, Familiapress, C 368/95, EU:C:1997:325, point 26 ; du 23 octobre 2003, RTL Television, C 245/01, EU:C:2003:580, point 68, ainsi que du 17 décembre 2015, Neptune Distribution, C 157/14, EU:C:2015:823, points 64 et 65).

83 S’agissant des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux, l’ingérence dans la liberté d’expression et d’information prend la forme particulière d’une ingérence dans la liberté des médias ou la liberté de radiodiffusion, protégée spécifiquement par l’article 11, paragraphe 2, de la Charte.

84 Si les libertés garanties par la Charte peuvent être limitées, toute limitation de leur exercice doit être, conformément à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, prévue par la loi et respecter le contenu essentiel desdites libertés. En outre, ainsi qu’il ressort de cette disposition, dans le respect du principe de proportionnalité, des limitations ne peuvent être apportées que si elles sont nécessaires et répondent effectivement à des objectifs d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui (arrêt du 17 décembre 2015, Neptune Distribution, C 157/14, EU:C:2015:823, point 68).

85 À cet égard, il y a lieu de constater, en l’occurrence, premièrement, que la limitation résultant de l’interdiction de publicité régionale visée à l’article 7, paragraphe 11, du RStV doit être regardée comme étant prévue par la loi en ce qu’elle est contenue dans un traité conclu entre tous les Länder allemands.

86 Deuxièmement, le contenu essentiel de la liberté d’expression et d’information des opérateurs concernés n’est pas affecté, dès lors que, d’une part, comme l’a également relevé M. l’avocat général au point 81 de ses conclusions, cette réglementation nationale restreint uniquement la faculté, pour les annonceurs, d’utiliser un canal de communication particulier, à savoir les chaînes de télévision nationales, tout en leur laissant la liberté d’exploiter d’autres canaux promotionnels pour atteindre leur cible régionale, comme la publicité sur Internet, dont le caractère performant, y compris à l’échelle régionale, n’est d’ailleurs pas contesté.

87 D’autre part, s’agissant des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux privés et non subventionnés, si la liberté des médias dont ils bénéficient est limitée en ce qu’il leur est interdit de diffuser de la publicité régionale dans le cadre de la diffusion de programmes à portée nationale, il ne s’agit que d’une méthode de diffusion de publicité et, partant, que d’une source de revenus parmi d’autres pour ces opérateurs.

88 Troisièmement, l’ingérence visée au point 85 du présent arrêt répond à un objectif d’intérêt général reconnu par l’Union.

89 En effet, ainsi qu’il ressort du point 53 du présent arrêt, la réglementation nationale en cause au principal vise à réserver les recettes de la publicité télévisée régionale aux organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux en vue d’assurer leur financement et, partant, leur pérennité, afin de leur permettre de contribuer au caractère pluraliste de l’offre des programmes de télévision par la voie de la fourniture de contenus à caractère régional et local.

90 Cet objectif, en ce qu’il vise la protection du pluralisme des médias à l’échelle régionale et locale, constitue un objectif d’intérêt général, ainsi qu’il a déjà été relevé au point 55 du présent arrêt, expressément reconnu à l’article 11, paragraphe 2, de la Charte.

91 Quatrièmement, quant à la proportionnalité de l’ingérence constatée, il importe de souligner qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme concernant l’article 10, paragraphe 2, de la CEDH que les autorités nationales jouissent d’une certaine marge d’appréciation pour juger de l’existence d’un besoin social impérieux susceptible de justifier une restriction à la liberté d’expression. Selon cette jurisprudence, ceci est particulièrement indispensable en matière commerciale et spécialement dans un domaine aussi complexe et fluctuant que la publicité (arrêt du 23 octobre 2003, RTL Television, C 245/01, EU:C:2003:580, point 73 et jurisprudence citée).

92 L’interdiction de publicité régionale visée à l’article 7, paragraphe 11, du RStV procède essentiellement d’une mise en balance entre, d’une part, la liberté d’expression à caractère commercial des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et des annonceurs de diffuser de la publicité télévisée régionale dans le cadre de programmes destinés à l’ensemble des téléspectateurs nationaux, et, d’autre part, la protection du pluralisme des médias à l’échelle régionale et locale auquel les organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux ne peuvent contribuer que si leur financement et, partant, leur pérennité sont assurés en leur réservant des revenus suffisants provenant de la publicité régionale.

93 À cet égard, ainsi que l’a également relevé, en substance, M. l’avocat général au point 83 de ses conclusions, par l’adoption de l’article 7, paragraphe 11, du RStV, le législateur allemand a pu légitimement considérer, sans dépasser la marge d’appréciation importante lui revenant dans le cadre particulier d’un tel exercice de mise en balance d’intérêts éventuellement conflictuels, que la sauvegarde de l’intérêt public à ce que des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux soient en mesure de contribuer au débat public à ces niveaux devait prévaloir sur l’intérêt privé des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et des annonceurs de diffuser de la publicité télévisée régionale dans le cadre de programmes destinés à l’ensemble des téléspectateurs nationaux.

94 Il résulte des considérations qui précèdent que l’article 11 de la Charte doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une mesure d’interdiction de publicité régionale sur les chaînes de télévision nationales, telle que celle contenue à l’article 7, paragraphe 11, du RStV.

 Sur le principe d’égalité de traitement garanti par l’article 20 de la Charte

95 S’agissant de la conformité d’une réglementation nationale, telle que l’article 7, paragraphe 11, du RStV, au principe d’égalité de traitement, il y a lieu de rappeler que ce principe général du droit de l’Union est consacré à l’article 20 de la Charte. Selon la jurisprudence constante de la Cour, ledit principe général exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié. Une différence de traitement est justifiée dès lors qu’elle est fondée sur un critère objectif et raisonnable, c’est-à-dire lorsqu’elle est en rapport avec un but légalement admissible poursuivi par la législation en cause, et que cette différence est proportionnée au but poursuivi par le traitement concerné (arrêt du 22 mai 2014, Glatzel, C 356/12, EU:C:2014:350, point 43 et jurisprudence citée).

96 La juridiction de renvoi s’interroge en particulier sur la question de savoir si une mesure d’interdiction de publicité régionale sur les chaînes de télévision nationales, telle que celle contenue à l’article 7, paragraphe 11, du RStV, pourrait être contraire au principe d’égalité de traitement, dès lors que cette disposition place les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux, ainsi que les annonceurs tant résidents que non-résidents, dans une position moins favorable que les fournisseurs de services publicitaires sur Internet, tels que les services de vidéo à la demande ou les services de diffusion en flux continu, dès lors que ces derniers ont le droit de différencier leur publicité par région au même titre que les organes de presse écrite nationaux.

97 S’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier que la réglementation nationale en cause au principal est conforme au principe d’égalité de traitement, la Cour peut néanmoins lui fournir toute indication utile aux fins de cet examen (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano, C 513/18, EU:C:2020:59, point 36).

98 À cet égard, il y a lieu d’examiner, premièrement, si les différents opérateurs visés au point 96 du présent arrêt se trouvent dans une situation comparable.

99 Selon une jurisprudence constante de la Cour, le caractère comparable de situations différentes s’apprécie eu égard à l’ensemble des éléments qui les caractérisent. Ces éléments doivent, notamment, être déterminés et appréciés à la lumière de l’objet et du but de l’acte qui institue la distinction en cause. Doivent, en outre, être pris en considération les principes et les objectifs du domaine dont relève cet acte (voir, en ce sens, arrêts du 18 juillet 2013, Sky Italia, C 234/12, EU:C:2013:496, point 16, et du 30 janvier 2019, Planta Tabak, C 220/17, EU:C:2019:76, point 37 ainsi que jurisprudence citée).

100 Il incombe dès lors à la juridiction de renvoi de vérifier si la situation des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et celle des fournisseurs de services de publicité, notamment linéaires, sur Internet quant à la fourniture de services de publicité régionale sont, pour ce qui concerne des éléments caractérisant leurs situations respectives, à savoir, notamment, les modes habituels d’utilisation des services publicitaires, la manière dont ils sont fournis ou encore le cadre légal dans lequel ils s’inscrivent, significativement différentes.

101 Il appartient également à la juridiction de renvoi de vérifier si, au regard de l’objet et du but de l’article 7, paragraphe 11, du RStV visant notamment à préserver le financement des organismes de radiodiffusion télévisuelle régionaux et locaux, la situation des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux non subventionnés fournissant de la publicité est comparable à celle des fournisseurs de services publicitaires, notamment linéaires, sur Internet, en tenant compte du fait que ces deux catégories d’opérateurs dépendent de manière égale desdites recettes publicitaires pour leur financement.

102 Dans ce contexte, un élément important indiquant que les deux catégories d’opérateurs se trouvent dans une situation comparable serait constitué par la circonstance, si elle était constatée par la juridiction de renvoi, que ceux-ci fournissent des prestations de services semblables qui se trouvent en concurrence les unes avec les autres (voir, en ce sens, arrêt du 30 janvier 2020, Autoservizi Giordano, C 513/18, EU:C:2020:59, point 38).

103 Deuxièmement, si, au terme de ces vérifications, la juridiction de renvoi parvenait à la conclusion que la situation des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et celle des fournisseurs de services publicitaires, notamment linéaires, sur Internet sont comparables compte tenu des éléments les caractérisant, de l’objet et du but de l’article 7, paragraphe 11, du RStV ainsi que des principes et des objectifs du domaine du droit national dont relève cette disposition, il lui appartiendrait encore de vérifier si l’inégalité de traitement entre ces deux catégories d’opérateurs peut être objectivement justifiée.

104 À cet égard, ainsi qu’il ressort du point 95 du présent arrêt, une différence de traitement est justifiée dès lors qu’elle est fondée sur un critère objectif et raisonnable, c’est-à-dire lorsqu’elle est en rapport avec un but légalement admissible poursuivi par la législation en cause, et que cette différence est proportionnée au but poursuivi par le traitement concerné.

105 S’il incombe à la seule juridiction de renvoi de déterminer si l’inégalité de traitement découlant éventuellement de l’application de la règle énoncée à l’article 7, paragraphe 11, du RStV peut être objectivement justifiée au regard des critères rappelés au point précédent, il y a lieu de relever qu’un tel examen correspond, en substance, à celui tenant à la justification de la restriction à la libre prestation de services, opéré aux points 52 à 79 du présent arrêt, de telle sorte que ces deux examens doivent être menés de la même manière.

106 Enfin, s’agissant de la question de savoir si la règle énoncée à l’article 7, paragraphe 11, du RStV entraîne une inégalité de traitement entre, d’une part, les annonceurs qui recourent aux services des organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux afin de diffuser de la publicité au niveau régional et, d’autre part, les annonceurs qui font appel aux fournisseurs de services publicitaires, notamment linéaires, sur Internet à ce même niveau, il importe de noter que l’examen de cette question est étroitement lié à l’examen de la situation de ces organismes et de ces fournisseurs. Ainsi, les développements figurant aux points 98 à 105 du présent arrêt s’appliquent également à l’égard de tels annonceurs.

107 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux questions préjudicielles que :

– l’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13 et l’article 11 de la Charte doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui interdit aux organismes de radiodiffusion télévisuelle d’insérer dans leurs programmes émis sur l’ensemble du territoire national des publicités télévisées dont la diffusion est limitée à un niveau régional ;

– l’article 56 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une telle réglementation nationale, pour autant que celle-ci soit propre à garantir la réalisation de l’objectif de protection du pluralisme des médias au niveau régional et local qu’elle poursuit et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier, et

– l’article 20 de la Charte doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une telle réglementation nationale, pour autant que celle-ci n’entraîne pas une inégalité de traitement entre les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et les fournisseurs de publicité sur Internet pour ce qui concerne la diffusion de publicité au niveau régional, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier.

 Sur les dépens

108 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :

L’article 4, paragraphe 1, de la directive 2010/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 10 mars 2010, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à la fourniture de services de médias audiovisuels (directive « Services de médias audiovisuels »), et l’article 11 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui interdit aux organismes de radiodiffusion télévisuelle d’insérer dans leurs programmes émis sur l’ensemble du territoire national des publicités télévisées dont la diffusion est limitée à un niveau régional.

L’article 56 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une telle réglementation nationale, pour autant que celle-ci soit propre à garantir la réalisation de l’objectif de protection du pluralisme des médias au niveau régional et local qu’elle poursuit et n’aille pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier.

L’article 20 de la charte des droits fondamentaux doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une telle réglementation nationale, pour autant que celle-ci n’entraîne pas une inégalité de traitement entre les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux et les fournisseurs de publicité sur Internet pour ce qui concerne la diffusion de publicité au niveau régional, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier.