Cass. com., 3 février 2021, n° 19-14.664
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
David (ès qual.), Merly (ès qual.), Expansion 5 (Sasu), Expansion SAV (Sarlu), Expansion 5 Paris (Sasu)
Défendeur :
Lixxbail (SA), BNP Paribas Lease Group (SA), Symbiose Informatique (SAS), CM-CIC Leasing Solutions (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Brahic-Lambrey
Avocat général :
M. Lecaroz
Avocats :
SCP Delamarre et Jehannin, SARL Cabinet Briard, SCP Lyon-Caen et Thiriez
Reprise d'instance
1. Il est donné acte à la société David-Goic et associés, en qualité de mandataire judiciaire de la société Expansion 5 et de la société Expansion 5 Paris, à la société Ajire, en qualité d'administrateur judiciaire de la société Expansion 5 et de la société Expansion 5 Paris, à la société Expansion 5, à la société Expansion 5 Paris et à la société Expansion SAV de la reprise de l'instance dirigée contre la société Lixxbail, la société BNP Paribas lease group, la société Symbiose informatique et la société CM-CIC leasing solutions.
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 29 janvier 2019), les sociétés BNP Paribas lease group (la société BNP Paribas), GE capital équipement France (la société GE capital), devenue CM-CIC leasing solutions, et la société Lixxbail ont acquis de la société Symbiose informatique des matériels et outils informatiques, qu'elles ont donné à bail aux sociétés Expansion 5, Expansion 5 Paris et Expansion SAV, avec lesquelles elles ont conclu des contrats de location financière.
3. Le 28 septembre 2011, les sociétés Expansion 5 et Expansion SAV, puis, le 19 octobre 2011, la société Expansion 5 Paris ont bénéficié d'une procédure de sauvegarde. Les contrats de location financière n'ont pas été poursuivis. Les sociétés BNP Paribas, Lixxbail et GE capital ont déclaré leurs créances au titre des loyers impayés et indemnités de résiliation. Le plan de sauvegarde des sociétés Expansion 5, Expansion SAV et Expansion 5 Paris a été adopté le 25 mars 2013.
4. Les sociétés Expansion 5, Expansion SAV et Expansion 5 Paris ont assigné les sociétés Symbiose informatique, BNP Paribas, Lixxbail et GE capital devant le tribunal de commerce de Nanterre, en annulation des contrats et condamnation des sociétés en paiement des loyers versés et en dommages-intérêts.
Examen des moyens
Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, et le deuxième moyen, ci-après annexés
5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le premier moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
6. Les sociétés David-Goic et associés et Ajire, ès qualités, et les sociétés Expansion 5, Expansion 5 Paris et Expansion SAV font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les demandes d'annulation et de paiement de dommages-intérêts, alors « que s'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits ; que constitue une demande, et non un simple moyen de défense, la prétention du débiteur tendant à ce que soit annulé le contrat dont procède sa dette, et tendant à ce que son adversaire soit condamné à lui payer des dommages-intérêts ; qu'en l'espèce, les sociétés Expansion 5 et Expansion 5 Paris demandaient que soit prononcée la nullité des contrats de financement conclus avec les établissements de crédit, et que leur soit alloués des dommages-intérêts correspondant, d'une part, aux créances de ces établissements admises au passif de la procédure collective, et d'autre part, « à la surévaluation provoquée par leur dol au titre des matériels loués » ; que les exposantes formaient ainsi une véritable demande, et ne soulevaient donc pas un simple moyen de défense ; que la cour d'appel a pourtant retenu, s'agissant du contrat de location R64100, que « l'autorité de la chose jugée attachée à l'admission de la créance interdit la remise en cause de la validité du contrat fondant la créance. Il s'en déduit que les demandes formées par la société Expansion 5 au titre de ce contrat sont irrecevables », et s'agissant des neuf autres contrats de location conclus avec les sociétés BNP Paribas lease, GE capital et Lixxbail, que « l'autorité de la chose jugée attachée à ces décisions [les ordonnances du juge-commissaire du 10 juillet 2013 et l'état des créances en date du 29 janvier 2014] interdit la remise en cause de la validité des contrats fondant ces créances, en sorte que les demandes de la société Expansion 5 qui tendent à obtenir, sous forme de dommages-intérêts, la restitution des loyers admis au passif sont irrecevables » ; qu'en statuant ainsi, quand les prétentions formulées par les exposantes étaient constitutives de demandes nouvelles, et non de simples moyens, de sorte qu'il ne pouvait leur être opposé l'autorité de la chose précédemment jugée, la cour d'appel a violé l'article 1351, devenu 1355, du code civil. »
Réponse de la Cour
7. Les créances des loueurs au titre des contrats de location financière ayant été définitivement admises au passif, c'est à bon droit que la cour d'appel a déclaré irrecevables les demandes des sociétés locataires tendant à l'annulation des contrats, ces demandes remettant en cause les admissions de créances fondées sur des contrats dont la validité est définitivement acquise, en raison de l'autorité de la chose jugée qui s'attache aux décisions d'admission.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
Sur le troisième moyen
Enoncé du moyen
9. Les sociétés David-Goic et associés et Ajire, ès qualités, et les sociétés Expansion 5, Expansion 5 Paris et Expansion SAV font grief à l'arrêt de fixer à 40 000 euros le montant de la créance de la société Lixxbail à titre d'indemnité de résiliation au passif de la procédure de sauvegarde de la société Expansion 5, alors « que doit être réputée non écrite toute clause par laquelle un commerçant soumet un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu'une clause pénale imposant une pénalité d'un montant manifestement disproportionné au préjudice subi entraîne un déséquilibre significatif ; qu'en l'espèce, les sociétés Lixxbail et Expansion 5 sont toutes deux commerçantes ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt que la clause du contrat de location prévoyant une indemnité de résiliation « était manifestement excessive » ; qu'en refusant pourtant de constater qu'elle devait être réputée non écrite au prétexte que « l'article L. 442-6, I, 2° invoqué est inapplicable en l'espèce », la cour d'appel a violé, par refus d'application, l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1161 du 13 novembre 2008, applicable en la cause. »
10. Le tribunal de commerce de Nanterre étant, en application de l'article D. 442-3 du code de commerce, sans pouvoir juridictionnel pour statuer sur une demande fondée sur l'article L. 442-6, I, 2° du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 24 avril 2019, et la cour d'appel de Versailles étant elle-même dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour statuer sur un litige portant sur l'application de cet article, il ne peut être reproché à cette dernière d'avoir violé un texte qu'elle ne pouvait appliquer.
11. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi.