Cass. com., 10 février 2021, n° 18-25.474
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Distribution Casino France (SAS)
Défendeur :
Sansuc
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Le Bras
Avocat général :
M. Debacq
Avocats :
SCP Richard, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 26 septembre 2018), la société Boucherie JC Sansuc, dont M. Sansuc, artisan boucher, était le gérant et associé unique, a conclu, le 4 mars 2014, un contrat de franchise avec la société Distribution Casino France (la société DCF) en vue de l'exploitation, sous l'enseigne Spar, d'un fonds de commerce de distribution de produits alimentaires acquis auprès de la société Perco.
2. Le montant de l'opération a été partiellement financé par la souscription, par la société Boucherie JC Sansuc, d'un emprunt bancaire, dont M. Sansuc s'est rendu caution.
3. La société franchisée a été mise en liquidation judiciaire le 13 janvier 2015. Reprochant à la société DCF d'avoir fourni à la société franchisée des informations erronées et irréalistes, M. Sansuc l'a assignée en réparation de son préjudice constitué par sa dette de caution et la perte de son compte-courant d'associé.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses quatre premières branches
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Et sur le moyen, pris en sa cinquième branche
Enoncé du moyen
5. La société DCF fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. Sansuc une certaine somme à titre de dommages-intérêts, alors « que le préjudice résultant du manquement à une obligation précontractuelle d'information est constitué par une perte de chance de ne pas contracter ou de contracter à des conditions plus avantageuses ; qu'en décidant que M. Sansuc, dirigeant et caution solidaire de la société franchisée, était fondé à réclamer la réparation de son entier préjudice tenant à la perte de son compte courant et au paiement dont il s'était acquitté en sa qualité de caution solidaire, sans que ne puisse lui être opposé une perte de chance, bien que le préjudice de M. Sansuc ait consisté en la perte d'une chance de ne pas se porter caution solidaire de la société Boucherie JC Sansuc et de lui faire un apport en compte-courant, dès lors que cette dernière, si elle avait été mieux éclairée, aurait elle-même éventuellement été conduite à renoncer à intégrer le réseau de franchise SPAR, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance no 2016-131 du 10 février 2016. »
Réponse de la Cour
6. Après avoir relevé que c'est sur la base des données communiquées dans les comptes prévisionnels fournis par la société DCF que l'expert-comptable de la société Sansuc avait établi les prévisions d'exploitation pour celle-ci, l'arrêt constate que les chiffres ainsi communiqués étaient nettement surévalués, dans des proportions telles que le franchisé était dans l'impossibilité de réaliser le modèle économique défini par le franchiseur. Il souligne encore que la société Sansuc n'avait pas les moyens de contrôler ces informations, qui émanaient d'un membre d'un des plus grands groupes du secteur. Il estime en conséquence que l'ampleur de la tromperie exclut tout aléa.
7. Ayant ainsi fait ressortir, par une appréciation souveraine, que, dûment informée, la société Sansuc n'aurait pas souscrit le contrat de franchise, la cour d'appel a pu retenir que M. Sansuc était fondé à obtenir la réparation intégrale du préjudice qu'il avait subi, résultant de la mise en oeuvre de son cautionnement et de la perte de son compte-courant d'associé.
8. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS,
La Cour :
REJETTE le pourvoi.