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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 18 février 2021, n° 18/22624

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Europ'express (SARL)

Défendeur :

Gefco France (Sasu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Prigent

Conseillers :

Mme Lignières, M. de Chergé

T. com. Lyon, du 3 sept. 2018

3 septembre 2018

FAITS ET PROCÉDURE :

La société Europ'express est un transporteur.

La société Gefco France a pour activité l'organisation et la commission de transport.

La société Gefco France fait appel à la société Europ'express, en qualité de sous-traitante, de manière régulière, pour effectuer des tournées de ramassage et distribution de colis et palettes de pièces automobiles du groupe PSA Peugeot Citroën.

Au début de l'année 2017, le groupe PSA Peugeot Citroën a informé la société Gefco France de l'arrêt des tournées qui lui étaient confiées au départ de Pont du Château avec effet au mois de juin 2017, tournées sous-traitées à la société Europ'express.

En février 2017, la société Gefco France a par conséquent informé la société Europ'express de la fin des tournées qu'elle effectuait pour le groupe PSA Peugeot Citroën à compter du mois de juin 2017.

Parallèlement, au mois de mars 2017, un appel d'offres a été mis en place par la société Gefco France pour l'attribution de nouvelles prestations de transport à réaliser entre le mois de juin et le mois de septembre 2017. La société Europ'express a été invitée à y participer mais ses offres n'ont pas été retenues. Les relations entre les sociétés Europ'express et Gefco France ont donc cessé en juin 2017.

La société Europ'express s'est estimée victime d'une rupture brutale des relations et a tenté de trouver un accord amiable avec la société Gefco France, en vain.

Par acte d'huissier de justice du 6 novembre 2017, la société Europ'express a assigné la société Gefco France devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir des indemnités en raison d'un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et en raison de la rupture brutale de leurs relations commerciales.

Par jugement du 3 septembre 2018, le tribunal de commerce de Lyon a :

- débouté la société Europ'express de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la société Europ'express à payer la somme de 2 000 euros à la société Gefco France sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- dit que les dépens seront supportés par la société Europ'express.

Par déclaration du 19 octobre 2018, la société Europ'express a interjeté appel de ce jugement.

Par conclusions notifiées par le RPVA le 17 juin 2019, la société Europ'express demande à la cour de :

Vu les articles L. 442-6 et D. 442-3 du code de commerce,

Vu l'article 46 al 3 du code de procédure civile,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de commerce de Lyon du 3 septembre 2018,

Statuant à nouveau,

- constater le déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties instauré par la société Gefco,

- constater les tentatives de la société Gefco en vue d'obtenir une baisse de prix sous la menace d'une rupture des relations contractuelles,

- constater la brusque rupture des relations contractuelles à l'initiative de la société Gefco,

En conséquence,

- condamner la société Gefco au paiement de la somme de 100 000 euros, à titre de dommages et intérêts pour le déséquilibre contractuel instauré au détriment de Europ'express,

- condamner la société Gefco au paiement de la somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts pour les menaces de rupture subies par Europ'express,

- condamner la société Gefco au paiement de la somme de 145 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la brusque rupture des relations contractuelles,

- condamner la société Gefco au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Gefco aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées par le RPVA le 3 octobre 2019, la société Gefco France demande à la cour de :

Vu l'article L. 442-6 du code de commerce,

Vu la loi du 30 décembre 1982 dite d'Orientation des Transports Intérieurs (LOTI),

Vu les dispositions du contrat type de sous-traitance de transport institué par le décret du 26 décembre 2003,

Vu le jugement du 3 septembre 2018 du tribunal de commerce de Lyon,

- confirmer en tous points le jugement entrepris,

Ce faisant,

- débouter la société Europ'express de l'intégralité de ses demandes à toutes fins qu'elles comportent,

- condamner la société Europ'express à verser à la société Gefco France la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Europ'express en tous les dépens, dont distraction en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 22 octobre 2020.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce

Sur le déséquilibre significatif :

La société Europ'express considère que la société Gefco a imposé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations respectives des parties dans la mesure où :

- la société Gefco n'a jamais renégocié au moins chaque année les prix et ne se conformait pas à ses obligations en application du contrat type en cas de sous-traitance (notamment sur l'obligation d'informer par écrit sur le volume des prestations),

- la société Gefco imposait en général les prix qu'elle acceptait de payer,

- la société Gefco interdisait à la société Europ'express d'augmenter ses prix et lui imposait même de les baisser, malgré une augmentation de ses coûts de revient,

- la société Gefco a imposé un système de remboursement des avaries et mis en place un système de paiement par compensation des avaries en violation de l'article 11.3 du contrat type et ne confirmait pas les réserves émises ni n'appliquait la limite de responsabilité prévue au contrat type,

- la société Gefco a appliqué à la société Europ'express une surcharge gasoil, sans en préciser les modalités de calcul à son sous-traitant,

- la société Gefco ne réglait pas ses factures dans le délai de 30 jours prévu par l'article L. 441-6, alinéa 11 du code de commerce mais plutôt sous 60 jours.

La société Europ'express considère que ces comportements qui l'ont empêché de pratiquer des prix en adéquation avec ses coûts de revient pendant 20 ans lui ont causé un préjudice estimé à hauteur de 100 000 euros, soit environ 5 000 euros par an.

En réplique, la société Gefco demande la confirmation du jugement sur ce point.

Sur ce ;

Aux termes de l'article L. 442-6 2° du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, « I. -Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

(...)

2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ; ».

Il convient de rappeler que l'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration de l'absence de négociation effective.

L'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties.

Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l'économie de la relation contractuelle.

Il appartient à la société qui se prétend victime d'apporter la preuve du déséquilibre qu'elle subit.

En l'espèce, concernant la fixation des prix, la société Europ'express affirme que les prix lui ont été imposés par la société Gefco France tout au long de sa relation commerciale de près de 20 ans sans respecter la renégociation annuelle prévue par le contrat type de sous-traitant en son article 10-4. Pour le démontrer, elle se limite à produire les factures sur la prestation de deux trajets de 2015 à 2017 dont le prix apparaît en baisse de 15 % pour l'un et 17% pour l'autre.

De son côté, la société Gefco France nie l'absence de renégociation annuelle des prix et justifie avoir recouru à des appels d'offres en 2012 et en 2014 afin d'être en ligne avec la tendance des prix du marché, or, il ne peut lui être reproché une mise en concurrence de la société Europ'express. Ainsi, la société Gefco France écrivait à la société Europ'express dans un courriel du 30 septembre 2014 : « dans le cadre d'une renégociation de nos tournées PR (pièces de rechange) nous lançons une consultation transport pour l'ensemble des tournées au départ de GEFCO PONT du CHATEAU (...) nous vous remercions de bien vouloir remplir ce fichier en tenant compte des prix les plus justes bien évidemment » (pièce 3 et 4 de Gefco).

La société Europ'express échoue donc à démontrer que la société Gefco France a empêché toute renégociation tarifaire et l'aurait forcée à accepter des prix qui ne lui permettaient pas par exemple de couvrir ses charges.

Concernant le remboursement des avaries, s'il est vrai que le contrat type applicable aux transports publics routiers exécutés par des sous-traitants dans son article 11-3 interdit « toute imputation unilatérale du montant des dommages allégués sur le prix des services rendus », pourtant, la société Europ'express ne justifie que d'une seule note d'imputation de la part de la société Gefco France en date du 10 janvier 2017 qui prétend l'avoir commise par erreur, ce qui est justifié par le courriel du 13 janvier 2017 : « Laurence vient de vous faire une note de crédit de 1573 euros. Je vous présente nos excuses pour cette anomalie de facturation indépendante de notre volonté » (pièce 4 de la société Europ'express).

Par ailleurs, il n'apparaît pas que les litiges évoqués dans le courriel et la facture de 2016 produites en pièces 4-1 et 4-2 de l'appelante correspondent à des imputations unilatérales interdites par l'article 11-3 du contrat type.

Il n'est donc pas prouvé l'existence d'une pratique illicite de la part de la société Gefco France à son égard.

Concernant les autres griefs reprochés à la société Gefco France, la société Europ'express se contente d'affirmations de principe sans en apporter la moindre preuve.

Par conséquent, le grief de soumission ou de tentative de soumission au visa de l'article L. 442-6, I, 2° n'est pas établi.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes d'indemnisation fondées sur les dispositions de l'article L. 442-6 2° du code de commerce.

Sur la menace de rupture

La société Europ'express allègue que la société Gefco a tenté d'obtenir une baisse de ses prix en la menaçant de rompre leurs relations commerciales, en violation de l'article L. 442-6 4° du code de commerce, courant 2016 sur les grilles tarifaires proposées, puis en 2017 avant de l'évincer des nouvelles tournées.

La société Gefco répond que le courriel de 2016 auquel la société Europ'express se réfère ne constitue pas une menace de rupture puisqu'il invite seulement celle-ci à revoir sa position et à proposer une date d'arrêt. Sur les griefs de 2017, la société Gefco France soutient qu'il ne s'agissait pas d'une menace de rupture mais d'échanges dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres.

Sur ce ;

Aux termes de l'article L. 442-6 4° du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, « I. -Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers :

4° D'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ; ».

La mise en œuvre du 4° de l'article 442-6 4° du code de commerce, suppose que soient prouvées par la société qui s'en prévaut l'existence de conditions manifestement abusives que le partenaire commercial a obtenues ou tenté d'obtenir, par l'usage de menaces ou de mesures de rétorsion visant à forcer l'acceptation.

En l'espèce, pour démontrer que la société Gefco France a tenté d'obtenir une baisse de ses prix en la menaçant de rompre leurs relations commerciales, la société Europ'express s'appuie sur l'échange de courriels suivant (pièces 13 et 14 de la société Europ'express) :

- courriel de la société Gefco France du 17 mai 2016 : « Malheureusement, ce n'est pas ce que j'attends d'un prestataire comme vous. Je vous rappelle que nous nous sommes rencontrés début avril et que depuis j'attends une réponse de votre part. Je vous demande de revoir votre position d'ici fin de semaine et vous remercie de me proposer une date d'arrêt plus en adéquation avec nos demandes »,

- courriel du 25 mai 2016 de la société Europ'express : « Suite à notre entretien de ce matin, je vous transmets comme convenu notre proposition tarifaire. Dans l'attente de votre validation pour la mise en place de ces nouvelles tournées »,

- courriel de la société Gefco France du 25 mai 2016 : « Ok pour mise en place au 1er juin, merci encore pour votre réactivité ».

Or, il ne ressort de ces échanges sur les grilles tarifaires proposées par la société Europ'express à la société Gefco France aucune menace de rompre les relations sous condition de baisser les prix.

Il ne peut pas non plus être reproché légitimement à la société Gefco France d'avoir mis en place courant 2017 un appel d'offres sur les nouvelles tournées du groupe PSA et de ne pas avoir retenu la société Europ'express.

Il en ressort que le grief d'obtention ou de tentative d'obtention sous la menace, visé à l'article L. 442-6, I, 4° du code de commerce n'est pas établi.

Sur la rupture brutale des relations commerciales établies

La société Europ'express, qui indique être en relation avec la société Gefco depuis 20 ans, reproche à la société Gefco d'avoir rompu brutalement leurs relations, sans lui accorder un préavis suffisant.

Elle fait valoir que le préavis qui lui a été délivré est irrégulier dans sa forme puisqu'aucune date précise ne lui a été communiquée pour l'arrêt des prestations, étant seulement indiqué « à compter de juin 2017 ».

La société Europ'express considère en outre qu'il est irrégulier sur le fond puisque le courrier du 20 février 2017 ne peut être considéré comme une lettre de notification de la rupture, informant seulement de l'arrêt de certaines tournées mais indiquant que la société Gefco la solliciterait de nouveau, laissant la société Europ'express légitimement espérer la proposition de nouvelles tournées en remplacement.

L'appelante considère également que le préavis est irrégulier dans son exécution puisque la date annoncée pour la fin des tournées visées n'a pas été respectée et l'économie générale du contrat n'a pas été maintenue, comme en témoigne la baisse de chiffre d'affaires de la société Europ'express.

La société Europ'express dit par ailleurs que le préavis est irrégulier dans sa durée et qu'il n'y a pas lieu d'appliquer les dispositions du contrat type à ce sujet puisque la société Gefco s'est sciemment affranchie de celles-ci en se plaçant hors du cadre du contrat type en appliquant aucune de ses dispositions et puisque les parties ne se sont jamais expressément référées audit contrat type dans leurs relations, ce qui a pour effet, d'après la jurisprudence, d'exclure son application au profit de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce. Or, en application de cet article, elle considère que le préavis aurait dû être d'une durée minimum de 8 à 10 mois pour lui permettre de trouver des solutions économiquement viables de remplacement.

La société Gefco répond qu'en matière de sous-traitance de transport seules les dispositions du contrat type issues de la loi du 30 décembre 1982 ont vocation à s'appliquer, excluant l'application de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce. Or, elle considère qu'en application du contrat type de sous-traitance de transport, qui s'applique puisque les parties n'avaient pas stipulé de clause contraire, et qu'elle a parfaitement respecté ses obligations en accordant un préavis de trois mois et demi. Elle souligne que la société Europ'express n'est pas recevable à contester l'application de ce contrat type, dans la mesure où elle se fonde sur les dispositions de celui-ci pour tenter de rapporter la preuve du déséquilibre significatif qu'elle allègue.

La société Gefco considère que le préavis qu'elle a communiqué à la société Europ'express était régulier dans la forme et le fond, en application des articles 12.2 et 12.3 du contrat type puisqu'il a été fait par lettre recommandée avec accusé de réception, il a mis en place un préavis de trois mois et demi, donc supérieur au préavis obligatoire, il a été exécuté, l'économie du contrat ayant été maintenue pendant toute sa durée.

Sur l'application des dispositions de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce

Les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ne s'appliquent pas dans le cadre des relations commerciales de transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, lorsque le contrat-type qui prévoit la durée des préavis de rupture, institué par la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (LOTI), régit, faute de dispositions contractuelles, les rapports du sous-traitant et de l'opérateur de transport.

Ainsi l'application de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce suppose à la fois l'absence de contrat-type prévoyant la durée d'un préavis de rupture et l'absence de dispositions contractuelles quant à un préavis de rupture.

En l'espèce, le contrat liant la société Europ'express à la société Gefco France est un contrat de transport soumis au contrat type annexé au décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003 en l'absence de disposition contractuelle prévoyant un préavis et ce, compte tenu du caractère supplétif du contrat-type.

La société Europ'express ne peut donc se référer aux dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce pour remettre en cause la régularité de la rupture initiée par la société Gefco France, seul le contrat type régissant cette rupture.

Sur la régularité de la rupture au regard du contrat type applicable :

Aux termes de l'article 12.2. du contrat type applicable à l'espèce: « Le contrat de sous-traitance à durée indéterminée peut être résilié par l'une ou l'autre partie par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception moyennant un préavis d'un mois quand le temps déjà écoulé depuis le début d'exécution du contrat n'est pas supérieur à six mois. Le préavis est porté à deux mois quand ce temps est supérieur à six mois et inférieur à un an. Le préavis à respecter est de trois mois quand la durée de la relation est d'un an et plus. »

Aux termes de l'article 12.3. du contrat type : « Pendant la période de préavis, les parties s'engagent à maintenir l'économie du contrat. »

En l'espèce, il n'est pas contesté que la société Gefco France a adressé à la société Europ'express une lettre recommandée datée du 20 février 2017 avec pour objet : « Dénonciation de contrat » et contenant ces termes : (pièce 2 de la société Europ'express)

« En confirmation du mail du 20 février, nous vous confirmons par la présente l'arrêt des tournées PR (Pièces de Rechange) N3 Vichy, N06 Moulins et N07 Montluçon que vous effectuez au départ de Pont du Château. L'arrêt est effectif à compter de juin 2017. Nous vous communiquerons la date exacte au plus vite. Une réorganisation sera faite jusqu'à l'arrêt total de la distribution en septembre. Nous vous solliciterons pour la réorganisation suivant l'arrêt des concessionnaires pour la mise en place des tournées. »

Il s'agit donc sans ambiguïté d'une lettre de rupture ayant explicitement accordé un préavis de plus de 3 mois, du 20 février 2017 jusqu'au plus tôt au 1er juin 2017. Le délai minimal de préavis prévu par le contrat-type a donc été respecté par la société Gefco France.

Sur les conditions d'exécution effective de ce préavis, il n'est pas contesté que la relation commerciale s'est maintenue jusqu'au 19 juin.2017, mais il est reproché à la société Gefco France par la société Europ'express de ne pas avoir maintenu l'économie du contrat pendant la période de préavis, ce qui est contesté par l'intimée.

La société Europ'express s'appuie sur les tableaux établis en page 14 de ses conclusions à partir des chiffres mentionnés à son Grand Livre client (pièces 7 et 8 de la société Europ'Express) pour démontrer que la société Gefco France a réduit le volume qui lui était habituellement confié après la lettre de rupture. Y sont comparés les chiffres d'affaires sur les mois de mars, avril mai de 2015/2016 à ceux de 2017 :

- moyenne des années 2015/2016 : le CA de mars est de 20 214 euros, le CA d'avril est de 20 524 euros, le CA de mai est de 19 318 euros,

- année 2017 : le CA de mars est de 18 700 euros, le CA d'avril est de 15 705 euros, le CA de mai est de 16 500 euros.

Il résulte de cette comparaison des chiffres d'affaires de l'appelante tirés de sa relation avec la société Gefco France que le volume a un peu diminué de mars à mai 2017, néanmoins cette diminution n'est pas assez importante pour en déduire que l'économie du contrat n'a pas été maintenue entre les parties durant le préavis. En effet, en cours de préavis, le contrat s'est poursuivi selon ses modalités initiales, le donneur d'ordres n'étant pas tenu contractuellement à un volume minimum. En outre, cette diminution des volumes n'est pas assez importante pour démontrer que le donneur d'ordres a exécuté ce préavis de mauvaise foi.

A défaut de rupture irrégulière au vu du contrat type applicable en l'espèce, il convient de débouter la société Europ'express de toutes ses demandes en indemnisation fondées sur la rupture brutale, à l'instar de ce qu'ont décidé les premiers juges.

Sur les dépens et les frais

La société Europ'express succombe à l'instance. Elle sera condamnée à supporter les dépens d'appel, ainsi qu'à la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour participer aux frais irrépétibles engagés par l'intimée pour se défendre en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société Europ'express à payer à la société Gefco France la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société Europ'express aux dépens d'appel.