Livv
Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 17 février 2021, n° 19/02634

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Avanti Logifroid (SAS)

Défendeur :

Sofidis (Sasu), Effel (SARL), Franprix Leader Price Holding (Sasu), Avanti Invest (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dallery

Conseillers :

M. Gilles, Mme Depelley

T. com. Paris, du 13 déc. 2018

13 décembre 2018

La société X (SAS), immatriculée le 17 septembre 1985, avait pour activité les transports publics ou privés, et notamment frigorifiques sous toutes leurs formes, l'activité de commissionnaire de transports, de loueur et de locataire de véhicules, entrepôt. Son président était M. Z.

La société Y (SAS), immatriculée le 22 décembre 2003, était une filiale de la société X, spécialisée dans la logistique ; elle avait pour activité le stockage, la préparation de commandes de fruits et légumes packaging. Son président était M. Z.

La société Avanti Logistique avait pour objet la prise de participation par tous moyens dans toutes sociétés à caractère commercial ; elle a été créée en 2007 pour l'acquisition de la totalité des titres des sociétés X et Y.

La société Avanti Logifroid (SAS), a été immatriculée le 23 décembre 2008, avec pour activité la prise de participations par tous moyens dans toutes sociétés à caractère commercial et pour président M. Z.

Monsieur Z et la société Avanti Invest, société holding de droit luxembourgeois, sont les associés de la société Avanti Logifroid.

La société Sofidis (SAS), immatriculée le 25 mai 1988, a pour activité la prise de participation, contrôle, direction de toutes sociétés, notamment de toutes sociétés dont l'objet est l'exploitation de toute superette ou de supermarché.

Elle est master franchisée Leader Price et a notamment en charge la gestion commerciale de ses filiales exploitant des magasins sous l'enseigne Leader Price en France métropolitaine ; elle conclut avec les transporteurs les contrats relatifs à l'acheminement des marchandises.

La société Effel (SASU), immatriculée le 15 septembre 2010, est une holding.

Elle a pour activité tous services liés à l'organisation, l'entreposage, l'approvisionnement et la logistique des produits alimentaires.

Franprix Leader Price Holding, immatriculée le 15 septembre 2010, est la société holding du groupe Franprix Leader Price spécialisé dans la vente au détail de produits alimentaires et non alimentaires.

Par contrat du 28 juillet 1999, la société Eiffel Sarl a confié à la société X « une mission de ramassage des marchandises achetées par Eiffel réception, contrôle, agréage, entreposage, éclatement, préparation, transport et livraison des marchandises négociées par son service achat » (pièce 6 des appelantes).

Un nouveau contrat portant sur des prestations identiques a été conclu le 1er décembre 2006 entre les mêmes parties à effet du 1er décembre 2004 pour se terminer le 31 décembre 2005 (Pièce 5 des intimées).

Ce contrat de prestations de service a fait l'objet d'un avenant n° 3 le 1er décembre 2006 mentionnant que la convention prendrait effet 1er janvier 2007 pour se terminer le 31 décembre 2007, renouvelable par tacite reconduction de période d'une année (pièce 15 des appelantes).

Par convention de location du 14 septembre 1999, X a mis à disposition de la société Effel Sarl, à titre gratuit, des bureaux sis à Noves (Pièce 4 des intimées).

Par deux contrats de transport du 27 mai 2002, Sofidis a confié à X, la livraison des marchandises (produits surgelés) à partir de l'entrepôt Orlygel, prestataire de la société Distribution Leader Price, chargée des approvisionnements de produits surgelés des magasins Leader Price (Pièce 7 des appelantes et 2 des intimées) ainsi que la livraison des marchandises (produits frais) à partir de la centrale de Montsoult ou de Montredon des Corbières (Pièce 1 des intimées).

Ces contrats étaient conclus pour une durée d'un an, renouvelables par tacite reconduction pour des périodes de même durée.

Par jugement du tribunal de commerce de Saint Etienne du 26 janvier 2010, la société Avanti Logifroid a été placée en liquidation judiciaire. Il en a été de même pour les sociétés X et Y par jugement du tribunal de commerce de Saint Etienne du 31 mars suivant.

Le 14 décembre 2016, la procédure de liquidation de X a été clôturée pour insuffisance d'actif.

Par acte du 20 décembre 2011, le mandataire liquidateur de ces trois sociétés a fait assigner les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding devant le tribunal de commerce de Paris, en responsabilité, leur reprochant d'avoir créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce issu de la loi LME du 4 août 2008.

Par jugement du 13 décembre 2018, ce tribunal a

- débouté Me Geoffroy B. de la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de liquidateur judiciaire de Y et d'Avanti Logifroid, Avanti Invest et M. Z de leurs demandes,

- condamné Me Geoffroy B. de la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de liquidateur judiciaire de Y et d'Avanti Logifroid, Avanti Invest et M. Z à payer aux sociétés Effel, Sofidis et Franprix Leaderprice Holding ensemble une indemnité de 15 000 euros au titre de l'article 700 du CPC,

- ordonné l'exécution provisoire,

- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires,

- condamné Me Geoffroy B. de la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de liquidateur judiciaire de Y et d'Avanti Logifroid, aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 221,78 euros dont 36,74 euros de TVA.

Par déclaration du 4 février 2019, la société B. ès qualités a interjeté appel de ce jugement.

Vu les dernières conclusions de la société B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés Y et Avanti Logifroid, appelante, notifiées et déposées le 11 octobre 2019, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu l'ancien article L. 442-6 I 2° du Code de commerce,

- INFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 13 décembre 2018 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING de leurs demandes plus amples et contraires, notamment leur demande de rejet de pièces et d'irrecevabilité pour prescription et droit d'agir ;

Statuant à nouveau,

- DIRE ET JUGER que l'action en responsabilité engagée par la SELARL B., ès qualités, sur le fondement de l'ancien article L. 442-6 I 2° du Code de Commerce est de nature délictuelle ;

- DIRE ET JUGER que les agissements fautifs des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING, dont la SELARL B., ès qualités, sollicite réparation, sont postérieurs au 6 août 2008, date d'entrée en vigueur de la loi ;

Par conséquent,

- DÉCLARER l'action de la SELARL B., ès qualités, recevable à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ;

Sur le fond

- DIRE ET JUGER que les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ont soumis les sociétés X, Y et AVANTI LOGIFROID à des obligations ayant créé un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, au détriment de ces dernières ;

- CONDAMNER in solidum les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING au paiement entre les mains de la SELARL B. ès qualité de liquidateur, de la somme de 836 552,14 € à parfaire au titre du préjudice subi par la société Y ;

- CONDAMNER in solidum les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING au paiement entre les mains de la SELARL B. ès qualité de mandataire ad hoc, de la somme de 8 799 942,19 € à parfaire au titre du préjudice subi par la société X ;

- CONDAMNER in solidum les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING au paiement entre les mains de la SELARL B. ès qualité de liquidateur, de la somme de 2 908 405 € à parfaire au titre du préjudice subi par la société AVANTI LOGIFROID ;

Sur les appels incidents,

- CONFIRMER le jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 13 décembre 2018 en ce qu'il a débouté les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING de leurs demandes plus amples et contraires, notamment leur demande de rejet de pièces et d'irrecevabilité pour prescription et droit d'agir ;

- DÉBOUTER les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING de leurs demandes plus amples et contraires ;

En tout état de cause,

- CONDAMNER in solidum les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE à verser la somme de 20 000 € à la SELARL B. ès qualités au titre de l'article 700 du Code de procédure civile

- CONDAMNER in solidum les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE aux entiers dépens.

Vu les dernières conclusions de la société Avanti Invest et de Monsieur Z, intimés, notifiées et déposées le 27 octobre 2019, il est demandé à la cour d'appel de Paris de :

Vu les articles 325 et suivants 328 et 329 du nouveau code de procédure civile. Vu la qualité d'actionnaire de la société AVANTI INVEST et de Monsieur Z.

Confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré recevable la société AVANTI INVEST et Monsieur Z en leur intervention volontaire à titre principal et de leur intérêt légitime à intervenir.

Confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté l'incident de communication de pièces, Monsieur Z ne pouvant se voir opposer le secret.

INFIRMER LE JUGEMENT ET STATUANT A NOUVEAU

Dire que l'action en responsabilité engagée par la SELARL B. ès qualités, sur le fondement de l'article L. 442-6, I , 2° du code de commerce est de nature délictuelle.

Constater que les agissements fautifs des sociétés SOFIDIS ET EFFEL et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING dont la SELARL B. ès qualités sollicite réparation sont postérieurs au 6 août 2008 date d'entrée en vigueur de la Loi.

Dire que les sociétés SOFIDIS ET EFFEL et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ont commis des fautes ayant entraîné la liquidation judiciaire des sociétés Y, X et AVANTI LOGIFROID.

Dire et juger que la liquidation judiciaire des sociétés X, Y et AVANTI LOGIFROID a eu pour conséquence de créer divers préjudices non seulement au détriment de ces sociétés mais également au détriment de leurs associés.

Fixer le préjudice subi par la société AVANTI INVEST à la somme de 2 090 000 €.

Fixer le préjudice subi par Monsieur Z à la somme de 2 268 015,19 €

Condamner conjointement et solidairement les sociétés EFFEL, SOFIDIS ET FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING à payer à titre de dommages et intérêts à la société AVANTI INVEST la somme de 2 090 000 euros avec intérêts à compter du dépôt des présentes conclusions.

Condamner conjointement et solidairement les sociétés EFFEL, SOFIDIS ET FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING à payer à titre de dommages et intérêts à Monsieur Z la somme de 2 268 015,19 euros avec intérêts à compter du dépôt des présentes conclusions.

Condamner avec la même solidarité les sociétés EFFEL, SOFIDIS ET FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING au paiement d'une somme de 20 000 euros à la société AVANTI INVEST au titre de l'article 700 du CPC.

Condamner avec la même solidarité les sociétés EFFEL, SOFIDIS ET FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING au paiement d'une somme de 20 000 euros à Monsieur Z au titre de l'article 700 du CPC.

Débouter les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING de l'ensemble de leurs demandes.

Condamner les sociétés EFFEL, SOFIDIS ET FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING en tous les dépens de première instance et d'appel, lesquels pour ces derniers au profit de Maître C..

Vu les dernières conclusions des sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leader Price Holding, intimées, notifiées et déposées le 23 juin 2020, par lesquelles il est demandé à la cour de :

Vu l'ancien article L. 442-6 I 2e du Code de commerce tel que modifié par la loi du 4 août 2008 dite LME, Vu l'article L. 133-6 du Code de commerce, Vu l'ancien article 1382 du Code civil, Vu les articles 122, 329 alinéa 2 et 352 du Code de Procédure Civile, Vu l'article 378 du Code de procédure civile, Vu l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, Vu les dispositions du Règlement Intérieur National du Barreau, Vu les conclusions et pièces versées aux débats, Vu le jugement du 13 décembre 2018,

1 Sur le retrait des débats des pièces des appelantes n° 36 et 37 et des pièces n° 10-1, 10-2, 10-3 et 10-4 et 11 produites par la société AVANTI INVEST et Monsieur Z,

INFIRMER le jugement susvisé en ce qu'il a débouté les sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADERPRICE HOLDING de leur demande de rejet des pièces n° 36 et 37 produites par la SELARL B. ès qualités de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID, X et Y et des pièces n° 10-1, 10-2, 10-3 et 10-4 et 11 produites par la société AVANTI INVEST et Monsieur Z,

Y AJOUTANT, STATUANT A NOUVEAU,

DIRE ET JUGER que les pièces n° 36 et 37 produites par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y sont couvertes par la confidentialité légale,

DIRE ET JUGER que les pièces n° 10-1, 10-2, 10-3 et 10-4 et 11 produites par la société AVANTI INVEST et Monsieur Z sont couvertes par la confidentialité légale,

En conséquence,

LES ÉCARTER des débats,

ECARTER des débats tous les arguments développés par la SELARL B. ès qualités, la société AVANTI INVEST et Monsieur Z sur le fondement des pièces susvisées et, plus généralement, écarter tous les arguments ayant trait aux négociations intervenues entre les parties.

2. Sur l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif

CONFIRMER le jugement susvisé :

- (i) en ce qu'il a jugé irrecevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés Y et AVANTI LOGIFROID à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING pour non application de l'ancien article L. 442-6 I 2° de commerce aux pratiques ayant trait aux contrats conclus entre les sociétés X, EFFEL et SOFIDIS ;

- (ii) en ce qu'il a jugé mal fondée l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés Y et AVANTI LOGIFROID à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING sur le fondement des projets de contrats ;

- (iii) en ce qu'il a débouté la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés Y et AVANTI LOGIFROID de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ;

- (iv) en ce qu'il a condamné la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés Y et AVANTI LOGIFROID à payer ensemble avec la société AVANTI INVEST et Monsieur Z la somme de 15 000 euros aux sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE, ainsi que les entiers dépens de première instance ;

INFIRMER le jugement susvisé :

- (i) en ce qu'il a jugé recevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire liquidateur des sociétés Y et AVANTI LOGIFROID à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS, et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

- (ii) en ce qu'il a jugé recevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y à l'encontre de la société FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

- (iii) en ce qu'il a jugé recevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire liquidateur de la société AVANTI LOGIFROID elle- même prise en sa qualité d'actionnaire des sociétés X et Y, à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ;

INFIRMER le jugement susvisé en ce qu'il a jugé non prescrite par application des dispositions de l'article L 133-6 du Code de commerce, l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ;

Y AJOUTANT, STATUANT A NOUVEAU,

A titre principal

DIRE ET JUGER irrecevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS pour défaut de droit à agir ;

DIRE ET JUGER irrecevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès-qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y à l'encontre de la société FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING pour défaut de droit à agir ;

DIRE ET JUGER irrecevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire liquidateur de la société AVANTI LOGIFROID elle-même prise en sa qualité d'actionnaire des sociétés X et Y, à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING, pour défaut de droit à agir au titre de la dépréciation des titres des sociétés X et Y,

DIRE ET JUGER prescrite et, par voie de conséquence, irrecevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ;

DIRE ET JUGER que le grief de déséquilibre significatif n'est pas caractérisé dans les projets de contrats ;

A titre subsidiaire,

DIRE ET JUGER que le grief de déséquilibre significatif n'est pas caractérisé dans les contrats conclus entre les sociétés X, EFFEL et SOFIDIS ;

DIRE ET JUGER que les préjudices allégués sont injustifiés et que le lien de causalité entre les fautes alléguées et lesdits préjudices n'est pas établi,

En tout état de cause,

DIRE ET JUGER mal fondée l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif initiée par la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

3 Sur l'action en responsabilité des intervenants volontaires, la société AVANTI INVEST et Monsieur Z

CONFIRMER le jugement susvisé :

- (i) en ce qu'il a jugé mal fondée l'action en responsabilité initiée par la société AVANTI INVEST et Monsieur Z à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING ;

- (ii) en ce qu'il a débouté la société AVANTI INVEST et Monsieur Z de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

- (iii) en ce qu'il a condamné la société AVANTI INVEST et Monsieur Z à payer ensemble avec la SELARL B. ès-qualités, la somme de 15 000 euros aux sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING, ainsi que les entiers dépens de première instance ;

INFIRMER le jugement susvisé en ce qu'il a jugé recevable les interventions volontaires de la société AVANTI INVEST et de Monsieur Z;

Y AJOUTANT, STATUANT A NOUVEAU,

A titre principal,

DIRE ET JUGER irrecevables les interventions volontaires de la société AVANTI INVEST et de Monsieur Z pour défaut de droit d'agir et défaut de lien suffisant avec l'instance principale,

A titre subsidiaire,

DIRE ET JUGER que les fautes alléguées ne sont pas établies,

DIRE ET JUGER que les préjudices allégués sont injustifiés et que leur lien de causalité avec les fautes alléguées n'est pas établi,

DIRE ET JUGER que la demande de condamnation solidaire de la société AVANTI INVEST et Monsieur Z à l'encontre de la société FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING est mal fondée,

En tout état de cause,

DIRE ET JUGER mal fondée l'action en responsabilité initiée par la société AVANTI INVEST et par Monsieur Z à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

3 En tout état de cause

DÉBOUTER la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID et Y de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre des sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

DÉBOUTER la société AVANTI INVEST et Monsieur Z de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions à l'encontre des sociétés EFFEL et SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING,

CONDAMNER solidairement la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur des sociétés AVANTI LOGIFROID, X et Y et la société AVANTI INVEST et Monsieur Z à verser aux sociétés EFFEL, SOFIDIS et FRANPRIX LEADER PRICE HOLDING la somme de 20 000 euros par société au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

CONDAMNER solidairement la SELARL B. ès qualités de mandataire ad hoc de la société X et de mandataire liquidateur judiciaire des sociétés AVANTI LOGIFROID, X et Y et la société AVANTI INVEST et Monsieur Z aux entiers dépens d'appel et de première instance dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles, agissant par Maitre Matthieu B.-G., conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur le rejet de pièces sollicité par les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding

Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding soutiennent que les pièces n° 36 et n° 37 produites par la société B. ès qualités et les pièces n° 10-1 à n° 10-4 et n° 11 versées par M. Z et la société Avanti Invest sont couvertes par la confidentialité au titre de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et doivent être écartées des débats.

Elles font valoir qu'il s'agit de pièces afférentes aux négociations entre avocats intervenues fin 2008 début 2009 et produisent une lettre de la commission de déontologie du barreau de Paris considérant que les pièces sont confidentielles (leur pièce n° 14).

La société B. ès qualités rétorquent que les pièces 36 et 37 qu'elle produit ne sont couvertes, ni par le secret professionnel des avocats, ni par un accord de confidentialité entre les parties, aucun engagement en ce sens n'ayant été signé.

Il résulte de l'article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, relatif au secret professionnel, que les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention « officielle », les notes d'entretien et, plus généralement, toutes les pièces du dossier sont couvertes par le secret professionnel.

De même, selon le Règlement intérieur national du Barreau, le secret professionnel de l'avocat est d'ordre public. Il est général, absolu et illimité dans le temps (article 2.1 alinéa 2).

Le secret professionnel couvre en toutes matières, dans le domaine du conseil ou celui de la défense, et quels que soient les supports, les correspondances échangées entre le client et son avocat, entre l'avocat et ses confrères à l'exception pour ces dernières de celles portant la mention officielle, (article 2.2).

Tous échanges entre avocats quel qu'en soit le support sont par nature confidentiels (article 3.1).

Ainsi que le font valoir les sociétés intimées, la pièce n° 36 est un document reproduisant les commentaires de M. Z, dirigeant du groupe X/Y, insérés dans des projets de contrats échangés entre le conseil des sociétés Effel et Sofidis d'une part, et le conseil du groupe X/Y d'autre part.

Or, les projets de contrats initiaux adressés entre conseils revêtent un caractère confidentiel, lequel s'étend nécessairement aux commentaires de M. Z qui s'y rapportent.

L'absence de mention « confidentiel » sur cette pièce est inopérante, s'agissant d'une pièce établie par M. Z lui-même.

Quant à la pièce n° 37, qui correspond à quatre projets de contrats confidentiels, dans leur version « comparaison », objet des discussions de la réunion de négociation du 11 mars 2013 se déroulant par l'entremise des conseils et en présence des parties, cette pièce revêt également un caractère confidentiel. A cet égard, les intimées expliquent et justifient que l'absence de mention « confidentiel » sur les versions « comparaison » résultent d'un dysfonctionnement du logiciel utilisé (leur pièce n° 61).

Il sera ajouté que les parties qui ne sont pas avocats n'ont été destinataires des projets de contrats par l'entremise de leurs conseils, que pour les besoins de la négociation menée par ces derniers, et non à titre personnel pour leur propre usage.

Par conséquent, il convient, infirmant le jugement entrepris de ce chef, d'écarter des débats les pièces 36 et 37 produites par les appelantes.

S'agissant des pièces n° 10-1 à 10-4 et de la pièce n° 11 versées aux débats par M. Z et la société Avanti Invest, qui correspondent respectivement aux pièces 37 et 36 de l'appelante, les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding invoquent leur caractère confidentiel à l'égard de la société Avanti Invest qui a toujours été étrangère aux négociations entre le groupe X/Y et les sociétés Effel et Sofidis, de même qu'à l'égard de M. Z qui n'a jamais participé à la réunion de négociation à titre personnel. Elles ajoutent que le cadre des négociations confidentielles a été voulu comme tel par les parties.

Contrairement à ce que soutiennent la société Avanti Invest et M. Z, la circonstance que les pièces litigieuses aient été remises à ce dernier sans aucune restriction, lors de la réunion du 11 mars 2019 à laquelle il a participé, sans engagement de confidentialité de sa part, ne permet pas de contourner le caractère confidentiel des pièces en cause dès lors que M. Z n'a participé aux négociations qu'en sa qualité de représentant légal des sociétés X et Frigo Logistique et non à titre personnel.

Le jugement est donc infirmé en ce que le tribunal a débouté les sociétés intimées de leur demande de rejet des débats des pièces n° 10-1, n° 10-2, n° 10-3, n° 10-4 et n° 11 produites par la société Avanti et M. Z.

Il y a lieu d'écarter ces pièces des débats au regard de leur caractère confidentiel.

Sur le déséquilibre significatif

La société B. ès qualités sollicite la réparation des préjudices causés par les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leader Price Holding sur le fondement du déséquilibre significatif de l'article L. 442-6 I, 2° ancien du code de commerce.

- Sur la recevabilité

Sur la prescription

Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding soutiennent que les actions en responsabilité sur le fondement du déséquilibre significatif fondées sur plusieurs contrats sont prescrites à la date de l'assignation du 20 décembre 2011, en application de l'article L. 133-6 du code de commerce aux termes duquel, l'action du transporteur à l'encontre de son mandant se prescrit dans un délai d'un an. Elles disent qu'il s'agit d'une action contractuelle et non délictuelle, faisant valoir que le grief de déséquilibre significatif est étroitement lié au contrat tant dans sa phase de négociation que dans sa phase d'exécution, et s'appuient un arrêt de la cour d'appel de Paris qui juge partiellement prescrite une demande de restitution des pénalités contractuelles fondées sur l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce en application de l'article L. 133-6 (CA Paris, 19 janvier 2011, n° 08/08300). Elles estiment inopérant l'argument de la société B. ès qualités sur la nature délictuelle de l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif au regard du refus de la Cour de cassation de faire application immédiate des dispositions de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce, ce qui démontrerait qu'il y a un lien étroit entre le grief de déséquilibre significatif et le contrat.

S'agissant de la qualification du contrat conclu entre la société X et la société Effel, elles se prévalent d'un arrêt de la cour d'appel de Versailles jugeant qu'il s'agissait d'un contrat de transport (Pièces, Franprix et autres, n° 5 et n° 15)

Enfin, elles soutiennent que, les contrats renouvelés en 2009 ayant pris fin le 31 décembre 2009, le délai annal pour agir sur le fondement de ces contrats a expiré le 31 décembre 2010, que le contrat conclu avec la société Effel le 1er janvier 2008 ayant pris fin le 31 décembre 2008, le délai annal pour agir sur le fondement de ce contrat a expiré le 31 décembre 2009 et que les contrats conclus avec la société Sofidis le 27 mai 2008 ayant pris fin le 26 mai 2009, le délai annal pour agir sur le fondement de ces contrats a donc expiré le 26 mai 2010.

La société B. ès qualités rétorque que l'action qu'elle a engagée le 20 décembre 2011 portant sur des faits entre 2006 et 2009 n'est pas prescrite dès lors qu'elle est soumise à la prescription quinquennale énoncée à l'article L.110-4 du code de commerce et non à la prescription annale de l'article L. 133-6 du code de commerce. Elle précise que son action fondée sur l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce est de nature délictuelle dès lors qu'elle ne vise pas à assurer la réparation d'un préjudice causé par les conditions d'exécution des contrats de transport conclus entre les sociétés Sofidis et Effel et la société X, mais tend à réparer le préjudice subi par le Groupe X/Y du fait du déséquilibre significatif dans ses droits et obligations au seul profit du Groupe Franprix Leader Price.

Elle fait valoir à cet égard que la Cour de cassation a écarté la prescription annale de l'article L. 133-6 du code de commerce pour une action en responsabilité fondée sur l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce (Cass. Com., 11 mai 2010, n° 09-10.797 ; Cass. Com., 1er oct. 2013, n° 12-23.456).

Sur ce,

L'action engagée par la société B. ès qualités sur le fondement du déséquilibre significatif de l'article L. 442-6 I, 2° ancien du code de commerce, ne tend pas à sanctionner l'inexécution d'une obligation née du contrat de transport mais à préserver les acteurs économiques en situation de dépendance envers leurs partenaires, au regard du comportement du partenaire commercial tant lors de l'exécution que lors de la renégociation du contrat. La responsabilité du groupe Franprix Leader Price est recherchée du fait du manquement à une obligation légale fondée sur les dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce qui a une portée générale. En conséquence, la prescription de la demande fondée sur une pratique restrictive de concurrence ne saurait dépendre du secteur d'activité de la victime de cette pratique. L'action ne peut dès lors être soumise à la prescription annale de l'article L 133-6 du code de commerce applicable au contrat de transport.

La fin de non-recevoir prise de la prescription de l'action est rejetée.

Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur l'irrecevabilité de l'action intentée pour non application de l'article L. 442-6 I 2° aux contrats en cours et à leur renouvellement ultérieur

Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leader Price Holding soutiennent que l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce issu de la loi LME du 4 août 2008, entrée en vigueur le 6 août 2008 ne s'applique pas aux contrats en cours conclus avant cette date et à leur renouvellement ultérieur par tacite reconduction. Ainsi, elles demandent à la cour de confirmer le jugement et de juger irrecevable l'action en responsabilité pour déséquilibre significatif.

La société B. ès qualités rétorque que l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce est applicable aux faits qu'elle allègue au regard du caractère délictuel de son action, la date de conclusion des contrats et des avenants étant sans incidence dès lors que les agissements fautifs qu'elle vise, ont soit perduré, soit été commis postérieurement au 6 août 2008. Elle ajoute que la renégociation des contrats originels qui a mis en exergue le déséquilibre significatif, est intervenue en 2009.

Sur ce,

En l'absence de d'effet rétroactif de la loi de modernisation de l'économie, dite loi LME du 4 août 2008, l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce qui en est issu, instaurant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, n'est pas applicable aux contrats en cours conclus avant son entrée en vigueur, le 6 août suivant.

En revanche, tel n'est pas le cas des contrats renouvelés postérieurement à l'entrée en vigueur de ladite loi, peu important que ceux-ci aient fait l'objet d'un renouvellement par tacite reconduction, que leurs stipulations n'aient pas été modifiées ou qu'il n'y ait pas eu de renégociations. En effet, le renouvellement tacite d'un contrat ne saurait faire obstacle à une loi d'ordre public économique et il appartient aux parties de mettre les dispositions contractuelles en conformité avec les dispositions nouvelles applicables lors du renouvellement, ce conformément aux dispositions des articles 2 et 6 du code civil.

En conséquence, il convient, infirmant le jugement de ce chef, de dire que les dispositions de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce sont applicables aux contrats renouvelés par tacite reconduction, en l'espèce le 1er janvier 2009 entre X et Effel et le 27 mai 2009 entre X et Sofidis.

Sur le droit d'agir

- Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix LeaderPrice Holding dénient aux sociétés appelantes Y et Avanti Logifroid, le droit d'agir sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce en ce que celles-ci n'auraient jamais été les partenaires commerciaux de Sofidis et de Effel.

Concernant la société Y, elles font valoir que celle-ci n'était ni le partenaire commercial de la société Sofidis, en l'absence de contrat conclu entre elles et de facture envoyée, son activité étant purement logistique (leurs pièces n° 1 et n° 2), ni le partenaire commercial de la société Effel, la société X n'ayant pas souhaité l'intégrer à sa filiale (leurs pièces n° 3 et n° 5 notamment et les pièces B., n° 5 et n° 19), mais le sous-traitant de X.

Concernant la société Avanti Logifroid, elles disent que celle-ci n'était pas davantage le partenaire commercial des sociétés Sofidis et Effel, s'agissant d'une holding et en l'absence de flux d'affaires ou de flux financiers.

- Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding soutiennent également que la demande initiée à l'encontre de cette dernière est irrecevable pour défaut de droit à agir.

Elles font valoir à cet égard que Franprix LeaderPrice Holding dont le principal objet est la prise de participation dans des sociétés exploitant des magasins sous l'enseigne Franprix et Leader Price, n'a aucune activité opérationnelle et a fortiori de personnel en charge d'activités opérationnelles et ainsi n'a jamais entretenu de relation commerciale avec les sociétés représentées par la Selarl B., ajoutant qu'elle n'est liée par aucun contrat avec ces dernières et qu'elle ne s'est pas immiscée dans leurs relations commerciales.

La société B. ès qualités rétorque que son action est recevable sur ce fondement.

Concernant la société Y, elle précise qu'elle assurait l'entreposage et la préparation de commandes pour l'activité fruits et légumes de la société Effel à partir de l'entrepôt sis à Noves qu'elle a été contrainte de construire à la demande expresse de cette dernière et avec une clause d'exclusivité à son profit. Elle ajoute que la société Effel a couvert les pertes de la société Y.

Concernant la société Avanti Logifroid, elle fait valoir que s'agissant de la société holding des sociétés X et Y, cette société avait un intérêt direct dans le Groupe X/Y qui entretenait des relations commerciales avec le Groupe Franprix Leaderprice.

Concernant la société Franprix Leaderprice Holding, elle dit que la renégociation des contrats en 2009 est intervenue entre celle-ci et le groupe X/Y.

Sur ce,

Selon l'article L. 442-6, I, 2° ancien du code de commerce, applicable à la cause : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...) 2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».

En conséquence, la condition de partenariat commercial qui ferait défaut est une condition de constitution de l'existence d'un déséquilibre significatif.

Il ne s'agit donc pas d'une condition de recevabilité de l'action mais d'une condition de fond.

La fin de non-recevoir prise du défaut de droit d'agir est donc rejetée.

Sur l'existence d'un déséquilibre significatif

Sur le partenariat commercial

Contrairement à ce que soutiennent les sociétés Sofidis, Effel et Franprix LeaderPrice Holding qui font état de trois conditions cumulatives pour retenir l'existence d'un partenariat commercial (avoir noué un partenariat avec l'auteur des agissements reprochés en vue de réaliser un objectif commun, entretenir des relations commerciales avec l'auteur des agissements reprochés dans le cadre de ce partenariat, avoir noué des relations depuis un certain temps et s'inscrivant dans la durée), le partenaire commercial au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce est la partie avec laquelle l'autre partie s'engage ou s'apprête à s'engager dans une relation commerciale.

Il résulte à suffisance des pièces produites par la société B. ès qualités que la société X assurait depuis 1999 des prestations pour la société Eiffel Sarl et depuis 2002 pour Sofidis, que la société Y, créée en décembre 2003, assurait l'entreposage et la préparation des commandes pour l'activité "Fruits et Légumes" de la société Eiffel à partir de l'entrepôt sis à Noves, que la renégociation des contrats en 2009 intervenus entre le Groupe X/Y et le Groupe Franprix Leader Price, a pris en compte la situation de Y.

Ainsi le 1er octobre 2009, le conseil du la société Franprix Leader Price écrivait-il à l'administrateur judiciaire :

« concernant la société Y, M. Z confirme le besoin d'un prix plancher à 95 000€ mensuel, tel que cela avait été discuté lors des précédentes réunions. Notre client donne son accord pour la mise en place de cette mesure à compter du 1er octobre 2009 jusqu'au 30 novembre 2009 » (Pièce 60 de la Selarl B. ès qualités)

Dès lors, la condition de partenariat commercial est remplie s'agissant tant de la société X à l'égard des sociétés Sofidis et Eiffel que de la société Y, laquelle était engagée dans une relation commerciale à tout le moins, avec la société Effel.

En revanche, tel n'est pas le cas de la société Avanti Logifroid, société holding des sociétés X et Y, l'existence d'un partenariat commercial avec les sociétés intimées n'étant pas établie.

Les demandes présentées par la Selarl B. en qualité de mandataire liquidateur de la société Avanti Logifroid sont rejetées.

L'existence d'une relation commerciale avec la société Franprix Leader Price Holding n'est pas davantage justifiée. Il n'est notamment pas établi que cette dernière se soit immiscée dans les relations commerciales lors du renouvellement des contrats.

En conséquence, les demandes présentées par la Selarl B. ès qualités à l'encontre de la société Franprix Leader Price Holding sont rejetées.

Sur la soumission

La société B. ès qualités soutient que le pouvoir du Groupe X/Y était fragilisé par la situation de dépendance économique et qu'il n'y a pas eu de négociation effective lors de la révision des contrats originels en 2009.

Concernant la dépendance économique, elle fait valoir que :

- la relation commerciale avec les sociétés Effel et Sofidis représentait entre 75 et 80 % du chiffre d'affaires de la société X,

- si le Groupe Franprix Leaderprice a semblé se préoccuper de cet état de dépendance en invitant le Groupe X/Y à se diversifier, il a continué à profiter de ses services attractifs et sur mesure pour les magasins existants et les nouveaux magasins ouverts dans les régions desservies par la société X,

- le groupe X/Y ne pouvait diversifier sa clientèle puisqu'il n'avait pas les moyens matériels de le faire et devait répondre en permanence aux nouvelles ouvertures de magasins imposées par le Groupe Franprix Leaderprice.

Concernant la négociation de la révision des contrats originels en 2009, la société B. ès qualités soutient que celle-ci n'a pas été effective faisant valoir que :

- les contrats originels étaient sommaires et imprécis ce qui générait des impacts économiques défavorables pour le Groupe X/Y,

- après l'envoi par le Groupe X/Y d'un document de présentation des grandes lignes et objectifs de la révision contractuelle, le Groupe Franprix Leaderprice a établi des projets de contrats sur lequels le Groupe X/Y a émis des observations notamment sur le fait qu'ils étaient peu équilibrés, qu'ils ne s'inspiraient pas de ses objectifs de révision contractuelle, qu'ils ne comportaient pas de perspectives, qu'ils ne revoyaient pas les conditions économiques pour 2009, et qu'ils ne traitent pas un grand nombre de points essentiels dans le domaine du transport,

- une réunion de discussion des projets s'est tenue le 11 mars 2009, lors de laquelle les conseils du Groupe Franprix Leaderprice ont remis aux participants, dont M. Z, la dernière version des projets de contrats qui ne prenait en compte aucune observation visant à rééquilibrer et à assurer la réciprocité des droits et obligations de chacune des parties, démontrant l'absence de pouvoir réel de négociation du Groupe X/Y.

Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix LeaderPrice Holding rétorquent que la société B. ès qualités ne démontre pas l'existence d'une soumission ou d'une tentative de soumission au sens de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce et font valoir que le Groupe X/Y a pris pleinement part aux négociations pendant lesquelles il a pu exprimer sa position et a même mis fin aux négociations de façon anticipée.

Elles ajoutent que :

- la structure du marché est un simple indice de l'existence d'un rapport de force déséquilibré, rappelant l'absence de présomption de soumission en raison du rapport de force asymétrique existant entre les parties sur le marché considéré,

- l'activité de F. avec les sociétés Effel et Sofidis représente 41 % de son chiffre d'affaires et non 75 à 80 %.

Sur ce,

Selon l'article L. 442-6, I, 2° ancien du code de commerce, applicable à la cause : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...) 2° De soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties ».

Les deux éléments constitutifs de cette pratique restrictive de concurrence sont, en premier lieu, la soumission ou la tentative de soumission et, en second lieu, l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif. L'insertion de clauses dans une convention type ou un contrat d'adhésion qui ne donne lieu à aucune négociation effective des clauses litigieuses peut constituer ce premier élément. L'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif peut notamment se déduire d'une absence totale de réciprocité ou de contrepartie à une obligation, ou encore d'une disproportion importante entre les obligations respectives des parties.

Les clauses sont appréciées dans leur contexte, au regard de l'économie du contrat et in concreto. La preuve d'un rééquilibrage du contrat par une autre clause incombe à l'entreprise mise en cause et peut résulter de l'analyse des clauses du contrat au regard d'autres conventions des parties. Enfin, les effets des pratiques n'ont pas à être pris en compte ou recherchés.

S'agissant de la soumission, si la structure d'ensemble du marché de la grande distribution peut constituer un indice de l'existence d'un rapport de force déséquilibré, ce seul élément ne peut suffire et doit être complété par d'autres indices établissant l'absence de négociation effective.

La soumission ou la tentative de soumission d'un fournisseur ou partenaire commercial à des clauses instituant un déséquilibre significatif implique de démontrer l'absence de négociation effective de ces clauses.

Il convient de rechercher l'existence ou non d'un pouvoir de négociation

En l'espèce, des négociations ont eu lieu entre les parties, au cours desquelles les sociétés X et Y ont pu faire valoir leur point de vue.(notamment Pièces 12, 35, 45 et 46 B.), le redressement judiciaire de X et Ys sont intervenues respectivement le 1er avril et le 15 avril 2009 au cours des négociations, une réunion s'est tenue le 16 juin 2009 qui a donné lieu à un compte-rendu de M. Z (pièce 48 B.) au cours de laquelle il a été décidé notamment que X transmette ses propositions en matière tarifaire et de surseoir à la mise en place de nouveaux contrats (les anciens restant en vigueur) dans l'attente d'une meilleure visibilité.

Si ces dernières soutiennent que le groupe Franprix Leader Price n'a accédé à aucune proposition de groupe X/Y, ce point n'est nullement démontré, dans l'ignorance de l'état des dernières négociations à l'issue de la réunion du 11 mars 2009, étant observé que la réunion du 16 juin suivant avait indiqué que X devait transmette ses propositions en matière tarifaire et qu'une nouvelle réunion de travail était prévue le 16 octobre suivant.

En tout état de cause l'existence d'une soumission ou d'une tentative de soumission ne saurait résulter du refus allégué d'accéder aux hausses de tarifs qu'elles ont sollicitées alors que de véritables négociations ont été menées (pièce 40 B.). Ce d'autant que des hausses de prix étaient intervenues le 1er janvier 2008 et le 1er septembre 2008 s'agissant tant du contrat Effel que du contrat Sofidis et que X a donné son accord pour appliquer les derniers tarifs à compter du 1er janvier 2009, compte tenu de la démarche de révision des contrats (pièce B. 45).

ll sera observé de surcroît qu'est indifférente à cet égard le refus de proposition de nouvelle revalorisation présentée dans le plan de redressement, refus qui aurait conduit l'administrateur judiciaire à opter pour une solution de cession de l'entreprise alors que les sociétés Effel et Sofidis n'étaient pas tenues de soutenir financièrement l'activité de leur partenaire commercial.

Dès lors l'existence d'une soumission ou d'une tentative de soumission au soutien de l'existence d'un déséquilibre significatif n'est pas établie.

En conséquence ; et sans qu'il soit besoin de rechercher l'existence d'obligations créant un déséquilibre significatif entre les parties, il y a lieu de débouter la société B. ès qualités de ses demandes fondées sur l'existence d'un déséquilibre significatif.

Sur l'intervention volontaire de la société Avanti Invest et de M. Z

Les sociétés Sofidis, Effel et Franprix LeaderPrice Holding soutiennent que :

- les interventions volontaires de la société Avanti Invest et de M. Z sont irrecevables pour défaut du droit d'agir, faute de justifier d'un préjudice personnel et distinct de celui des autres créanciers dans les procédures de liquidation judiciaire dont font l'objet les sociétés du Groupe X/Y et Avanti Logifroid et que leur intervention fondée sur la responsabilité au titre de l'ouverture d'une procédure de liquidation, ne se rattache pas par un lien suffisant à l'instance principale fondée sur le déséquilibre significatif,

- la société Avanti Invest et Monsieur Z ne démontrent pas l'existence d'un lien de causalité entre les fautes que les sociétés Effel et Sofidis auraient commises et la cessation de paiements des sociétés du Groupe X/Y, de leur holding, la société Avanti Logifroid puis, leur mise en liquidation respective.

Concernant les préjudices allégués par M. Z, les sociétés intimées énoncent qu'il s'agit de préjudices résultant de la perte de chance de ne pas être exposé à des coûts ou de la perte d'une chance de réaliser des gains qui ne sont pas justifiés, ni dans leur principe ni dans leur quantum.

La société Avanti Invest et M. Z rétorquent que :

- ils sont recevables en leur intervention volontaire, en leur qualité d'associés de la société Avanti Logifroid, à demander réparation du préjudice propre et distinct de celui des autres créanciers qu'ils ont subi du fait de la liquidation judiciaire des sociétés X, Y et Avanti Logifroid à laquelle ont conduit les fautes commises par les sociétés du Groupe Franprix Leaderprice qui ont soumis leurs prestataires à des obligations ayant créé un déséquilibre significatif,

- leur préjudice propre et distinct ne peut pas faire l'objet de déclaration de créances dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire, de sorte qu'ils ne peuvent en obtenir réparation que dans le cadre d'une intervention volontaire,

- les préjudices qu'ils ont subis sont la conséquence directe des fautes commises par les sociétés par les sociétés du Groupe Franprix Leaderprice.

M. Z demande à la cour de condamner conjointement et solidairement les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding au paiement de la somme de 2 268 015,19 euros correspondant à sa participation au capital, à ses cautions personnelles et les intérêts, à la perte de sa rémunération en tant que dirigeant des sociétés X, Y et Avanti Logifroid, la décote définitivement appliquée sur ses retraites mensuelles, et la valeur à terme des sociétés liquidées,

La société Avanti Invest demande à la cour de condamner les sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leaderprice Holding au paiement de la somme de 2 090 000 euros correspondant aux participations en capital et en compte courant et à la valeur à terme des sociétés liquidées

Sur ce,

La société Avanti Invest et M. Z en leur qualité d'associés de la société Avanti Logifroid en liquidation judiciaire, sont irrecevables en leurs demandes fondées sur la perte de valeur des titres sociaux de la société Avanti Logifroid qui ne constituent pas un préjudice distinct de celui subi collectivement par tous les créanciers.

En effet, l'amoindrissement ou de la disparition du patrimoine social constitue un préjudice subi collectivement par l'ensemble des créanciers et seul le liquidateur de la société soumise à une procédure de liquidation judiciaire a qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers en vue de reconstituer le patrimoine social.

L'intervention volontaire de M. Z, qui se prévaut du préjudice personnellement subi du fait de la liquidation judiciaire des sociétés X et Y dont il était le dirigeant, est recevable en ce qu'elle se rattache par un lien suffisant à la procédure principale engagée par la société B. ès qualités à l'encontre des sociétés Sofidis et Effel sur le fondement de l'existence d'un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des sociétés du groupe X/Y.

Ses demandes fondées sur les chefs de préjudice subis en sa qualité de cautions personnelles, de la perte de sa rémunération en tant que dirigeant des sociétés X, Y et Avanti Logifroid ainsi que de la décote définitivement appliquée sur ses retraites mensuelles sont recevables.

En revanche, les demandes formées à ce titre par M. Z sont non fondées, en ce que les pratiques alléguées à l'origine des liquidations judiciaires intervenues, en l'espèce, le déséquilibre significatif, ne sont pas constituées.

M. Z est en conséquence débouté de ses demandes de ce chef.

Sur les autres demandes

La société B. ès qualités qui succombe, de même que M. Z et la société Avanti Invest, sont condamnés in solidum aux dépens d'appel et déboutés de leur demande respective au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils sont également condamnés in solidum à verser aux sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leader Price Holding la somme globale de 10 000 euros sur ce dernier fondement.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Confirme le jugement par substitution de motifs, sauf en ce qu'il a rejeté l'incident de production de pièces et en ce qu'il a dit que le grief de déséquilibre significatif introduit par la loi du 04 août 2008 n'était pas applicable aux pratiques invoquées ;

Statuant à nouveau de ces chefs et y ajoutant,

Ordonne le retrait des débats des pièces n° 36 et 37 produites par la société B. ès qualités ainsi que des pièces n° 10-1 à 10-4 et 11 produites par la société Avanti Invest et M.Z ;

Dit les dispositions de l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce applicables aux contrats renouvelés par tacite reconduction, en l'espèce le 1er janvier 2009 entre les sociétés X et Effel et le 27 mai 2009 entre les sociétés X et Sofidis ;

Déclare recevable mais non fondée l'action de la Selarl B., reprsentéee par Maître Geoffroy B., mandataire judiciaire, agissant en qualité de mandataire ad hoc de la société X, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Y, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Avanti Logifroid ;

Déclare irrecevables la société Avanti Invest et M. Z, intervenants volontaires, en leur qualité d'associés de la société Avanti Logifroid en liquidation judiciaire, en leurs demandes fondées sur la perte de valeur des titres sociaux de la société Avanti Logifroid ;

Déclare recevable mais non fondée l'intervention volontaire de M. Z en ses demandes en réparation des chefs de préjudice subis en sa qualité de caution personnelle, de sa perte de rémunération en tant que dirigeant des sociétés X, Y et Avanti Logifroid ainsi que de la décote définitivement appliquée sur ses retraites mensuelles ;

L'en déboute ;

Condamne in solidum la Selarl B., représentéee par Maître Geoffroy B., mandataire judiciaire, agissant en qualité de mandataire ad hoc de la société X, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Y, agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Avanti Logifroid ainsi que M. Z et la société Avanti Invest aux dépens d'appel avec droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile et à verser aux sociétés Sofidis, Effel et Franprix Leader Prioce Holding la somme globale de 10 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.