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Décisions

CA Lyon, 6e ch., 4 mars 2021, n° 18/07759

LYON

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Ecorenove (SAS)

Défendeur :

Cofidis (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Boisselet

Conseillers :

Mme Allais, Mme Delaby

Avocats :

Selarl Saint Cyr Avocats, SARL VJA Avocats

TI Villefrance, du 25 sept. 2018

25 septembre 2018

FAITS, PROCEDURE ET DEMANDES DES PARTIES :

Dans le cadre d'un démarchage à domicile, M. Marc B. et Mme Christelle B. née L. ont commandé le 15 mars 2017 à la société Ecorenove, exerçant sous l'enseigne Energie Habitat, la fourniture et la pose de 12 panneaux aérothermiques ainsi que de 12 micro-onduleurs, moyennant le prix de 27.800 euros toutes taxes comprises. Cette installation était destinée pour partie à la production d'électricité en vue de sa revente.

Le même jour, ils ont conclu avec la société Cofidis, un crédit d'un montant de 27.800 euros afin de financer en totalité le contrat de vente, le capital prêté étant remboursable en 144 mensualités, comprenant des intérêts au taux débiteur fixe de 2,72 % l'an, avec un différé de 12 mois.

Suivant avenant du 12 mai 2017 au bon de commande du 15 mars 2017, la société Ecorenove et les époux B. ont modifié l'objet du contrat, celui-ci consistant désormais en la fourniture et la pose de 10 panneaux de 300 W en intégration, soit 6 panneaux aérothermiques et 4 panneaux photovoltaïques ainsi que de 10 micro-onduleurs, avec une remise commerciale de 500 euros par chèque sur le prix de 27 800 euros.

Le 11 juillet 2017, M.B. a signé une attestation de livraison et d'installation du matériel commandé et a demandé au prêteur de procéder au déblocage des fonds directement entre les mains de la société Ecorenove.

Par lettre recommandée du 27 septembre 2017, avec avis de réception du 2 octobre 2017, M. et Mme B. ont informé la société Ecorenove de l'exercice de leur droit de rétractation, arguant de ce qu'ils pouvaient encore s'en prévaloir à la suite d'une erreur dans le bon de commande quant au point de départ de leur délai de rétraction.

Par actes des 6 et 9 novembre 2017, M. et Mme B. ont fait assigner les sociétés Ecorenove et Cofidis devant le tribunal d'instance de Villefranche sur Saône. Dans le dernier état de la procédure, ils sollicitaient de voir :

À titre principal,

- déclarer caduc le contrat conclu avec la société Ecorenove, du fait de l'exercice de leur droit à rétractation, et dire que le contrat de crédit affecté était également de nul effet,

- condamner la société Ecorenove à leur rembourser le prix de vente avec les pénalités prévues par l'article L. 221-24 du code de la consommation,

À titre subsidiaire,

- prononcer la nullité du contrat de vente pour violation des lois régissant le démarchage à domicile et la nullité consécutive du contrat de crédit affecté,

- condamner la société Cofidis à leur restituer toutes les sommes qu'ils ont d'ores et déjà versées au titre du prêt et priver celle-ci de tout droit à remboursement à leur encontre s'agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Ecorenove,

- condamner solidairement les sociétés Ecorenove et Cofidis à prendre en charge le coût des travaux de remise en état.

Par jugement du 25 septembre 2018, le tribunal d'instance de Villefranche sur Saône a :

- constaté que M. et Mme B. se sont valablement rétractés du contrat formé avec la société Ecorenove et qu'il a été mis fin aux obligations des parties à ce contrat,

- dit qu'en conséquence, il avait été mis fin au contrat de crédit accessoire à ce contrat principal, formé entre les époux B., d'une part, la société Cofidis, d'autre part,

- en conséquence, condamné la société Ecorenove à verser à M. et Mme B., conjointement, la somme de 27 800 euros, outre les majorations suivantes, courant du 17 octobre 2017 :

Majoration de la somme du taux d'intérêt légal entre 0 et 10 jours de retard,

Pénalité de 5 % entre 10 et 20 jours de retard ; pénalité de 10 % entre 20 et 30 jours de retard,

Pénalité de 20 % entre 30 à 60 jours de retard ; pénalité de 50 % entre 60 et 90 jours de retard,

Pénalité de 5 % supplémentaire par nouveau mois de retard au-delà,

- condamné M. et Mme B., solidaires, à restituer à la société Cofidis la somme de 27 800 euros,

- condamné la société Ecorenove à payer à M. et Mme B., conjointement, la somme de 1 500 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté les autres ou plus amples demandes,

- condamné la société Ecorenove aux dépens.

Par déclaration du 7 novembre 2018, la société Ecorenove a interjeté appel de la décision.

Suivant jugement du 3 mars 2020, le tribunal de commerce de Lyon a :

- ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Ecorenove,

- désigné la SELARL Jérôme A., en qualité de liquidateur judiciaire de cette société.

Par acte d'huissier de justice du 21 juillet 2020, signifié à personne, M. et Mme B. ont fait assigner en intervention forcée la SELARL A., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Ecorenove. Ils ont sollicité en outre de voir condamner la SELARL A., ès-qualités, à leur payer la somme de 1 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens de l'instance.

La SELARL A., ès-qualités, n'a pas constitué avocat.

Dans leurs dernières conclusions notifiées le 26 novembre 2020, M.et Mme B. demandent à la Cour, au visa des articles L 111-1 s. , L. 221-1 s. , L. 311-1 s. , L. 341-1 et L. 242-1 du code de la consommation (rédaction en vigueur au 1 er juillet 2016), 1103, 1104, 1193 du code civil (nouvelle rédaction en vigueur au 1er octobre 2016), L. 243-3 du code de la construction, de :

- confirmer le jugement sur la caducité du contrat qu'ils ont conclu avec la société Ecorenove et infirmer le jugement pour le reste, et ainsi :

À titre principal,

- constater l'exercice de leur droit de rétractation au titre du bon de commande signé avec la société Ecorenove, affirmé dans une lettre recommandée adressée le 27 septembre 2017 à cette dernière,

- juger que le bon de commande n° 3350 et son avenant signé avec la société Ecorenove est caduc et que le contrat affecté signé avec la société Cofidis est également de nul effet,

- juger qu'en cas d'anéantissement du contrat fondé sur l'exercice du droit de rétractation, la société Ecorenove sera condamnée en plus à leur verser une indemnité au titre du taux de pénalité applicable selon l'article L. 221-24 du code de la consommation, à savoir :

Majoration de la somme du taux d'intérêt légal entre 0 et 10 jours de retard,

Pénalité de 5% entre 10 et 20 jours de retard,

Pénalité de 10% entre 20 et 30 jours de retard,

Pénalité de 20% entre 30 à 60 jours de retard,

Pénalité de 50% entre 60 et 90 jours de retard,

5% supplémentaire par nouveau mois de retard au-delà,

Subsidiairement,

- ordonner la nullité du contrat de vente et de l'avenant qu'ils ont conclus avec la société Ecorenove au titre de la violation des lois régissant le démarchage à domicile et la nullité consécutive du contrat de prêt affecté qu'ils ont conclu avec la société Cofidis,

En toutes hypothèses,

- condamner la société Cofidis à leur restituer toutes sommes qu'ils ont d'ores et déjà versées au titre de l'emprunt souscrit, soit la somme de 7 650,45 euros au mois de novembre 2020, somme à parfaire au jour de la décision à intervenir et en fonction des échéances payées,

- priver la société Cofidis en raison de la faute commise par celle-ci de tout droit à remboursement à leur encontre s'agissant du capital, des frais et accessoires versés entre les mains de la société Ecorenove et subsidiairement, si cette faute n'est pas reconnue, fixer leur créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove à raison de la somme de 27 800 euros au titre du bon de commande et priver rétroactivement la société Cofidis de son droit aux intérêts,

- condamner solidairement la SELARL A., ès-qualités, et la société Cofidis à :

Prendre en charge le coût des travaux de remise en état et de reprise des panneaux,

Leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Payer les entiers dépens.

- débouter la société Cofidis et la SELARL A., ès-qualités, de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

- dire que sur le fondement de l'article R.631-4 du code de la consommation, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire, en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001, portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées par les parties succombantes, en sus de l'indemnité mise à leur charge sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Dans ses dernières conclusions notifiées le 4 février 2020, la société Cofidis demande à la Cour de :

- juger M. et Mme B. irrecevables et subsidiairement mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,

- juger la société Ecorenove irrecevable et mal fondée en ses demandes dirigées à son encontre,

- la juger recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions,

- juger n'y avoir lieu à rétractation, caducité ou nullité des conventions pour quelque cause que ce soit,

- condamner solidairement M. et Mme B. à poursuivre l'exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d'amortissement,

À titre subsidiaire, si la Cour venait à prononcer la caducité ou la nullité des conventions,

- juger qu'elle n'a commis aucune faute,

- condamner solidairement M. et Mme B. à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 27 800 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

À titre plus subsidiaire, si la Cour venait à juger qu'elle a commis une faute,

- juger que M. et Mme B. ne justifient d'aucun préjudice et que la société Ecorenove étant in bonis, ils peuvent parfaitement récupérer les fonds directement entre les mains de ladite société, à charge pour eux de rembourser la banque,

- condamner solidairement M. et Mme B. à lui rembourser le capital emprunté d'un montant de 27 800 euros, au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir, déduction à faire des échéances payées,

À titre encore plus subsidiaire, condamner la société Ecorenove à lui payer la somme de 33 972,95 euros au taux légal à compter du « jugement » à intervenir,

À titre infiniment subsidiaire, condamner la société Ecorenove à lui payer la somme de 27 800 euros au taux légal à compter de l'arrêt à intervenir,

En tout état de cause,

- condamner la société Ecorenove à la relever et garantir de toute condamnation qui pourrait être mise à sa charge au profit de M. et Mme B.,

- condamner solidairement la société Ecorenove et M. et Mme B. à lui payer la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner « l'exécution provisoire » de ses seules demandes,

- condamner solidairement la société Ecorenove, M. et Mme B. aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 5 janvier 2021.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties aux conclusions écrites susvisées.

MOTIFS DE LA DECISION :

Les contrats principal et accessoire ayant été conclus le 15 mars 2017, les articles du code de la consommation et du code civil visés ci-après s'entendent dans leur rédaction applicable à cette date.

Sur la rétractation du contrat principal :

La société Cofidis fait valoir que :

- compte tenu des termes de l'article L.221-18 du code de la consommation alors applicable, M. et Mme B. ne disposaient que d'un délai de 14 jours à compter du contrat de vente du 15 mars 2017 pour se rétracter,

- à titre subsidiaire, M. et Mme B. étaient informés de ce qu'ils pouvaient se rétracter dans le délai de 14 jours suivant la réception des marchandises en raison d'une clause en faisant état dans le contrat de prêt, signé en même temps que le bon de commande dans le cadre d'une opération commerciale unique.

M. et Mme B. répliquent que :

- le contrat mixte de prestation de service et de vente de biens qu'ils ont conclu avec la société Ecorenove est constitutif d'un contrat de vente, de telle sorte que le délai de rétractation applicable à ce contrat était de 14 jours à compter de la livraison des biens,

- le bon de commande et l'avenant, qui font référence aux dispositions du code de la consommation applicables avant le 1er juillet 2016 alors que le contrat était soumis aux dispositions postérieures à cette date, mentionnent à tort que le délai de rétractation court à compter de la signature du bon de commande,

- les informations relatives au droit de rétractation doivent figurer dans le bon de commande, de telle sorte qu'il importe peu que le délai de rétractation propre au contrat de crédit figure bien dans ce contrat ; au surplus, les conditions générales de vente, surtout en ce qui concerne l'avenant, sont écrites dans une police ne dépassant pas les 2 mm et sont illisibles, de telle sorte qu'elles ne respectent pas les dispositions de l'article L.211-1 du code de la consommation : aussi, ces conditions générales doivent être écartées des débats et leur sont inopposables,

- en l'absence d'information correcte sur les modalités de leur droit de rétractation, leur délai de rétractation a été prolongé de 12 mois à compter du 26 juillet 2017, date d'expiration du délai initial.

Si le bon de commande fait référence aux dispositions des articles L.121-1 et suivants du code de la consommation, lesquelles n'étaient plus applicables depuis le 13 juin 2014, cette irrégularité a été corrigée dans l'avenant qui fait bien référence aux dispositions des articles L.221-18 et suivants du code de la consommation. Le premier juge a constaté à juste titre que le verso de l'avenant du 12 mai 2017, précisant les modalités d'exercice du droit de rétractation étaient rédigées en caractère très petits et largement inférieurs au corps 8, de telle sorte qu'il n'était pas opposable aux époux B.. En outre, le contrat conclu entre les parties ayant principalement pour objet la vente d'équipements de production de chaleur et de production électrique, il est constitutif d'un contrat de vente et non d'un contrat de prestation de services même s'il inclut la pose de ces équipements ainsi que la prise en charge de différentes démarches administratives. Or, tant le bon de commande que l'avenant font état de ce que le délai de rétractation court à compter de la signature du contrat alors qu'il ne courait qu'à compter de la livraison du matériel commandé, plus précisément à compter du 12 juillet 2017, compte tenu des règles de décompte de ce délai fixées par l'article L.221-19 du code de la consommation.

La clause du contrat de crédit invoquée par la société Cofidis n'est relative qu'au droit de rétractation des emprunteurs, lequel n'est pas soumis aux mêmes modalités que le droit de rétractation des acquéreurs dans le cadre du contrat de vente. Au surplus, les époux B. font observer à juste titre que les informations relatives à leur droit de rétractation devaient être mentionnées dans le contrat de vente au regard des dispositions de l'article L.221-9 du code de la consommation.

Il ressort de ces éléments que M. et Mme B. n'ont pas reçu les informations relatives à leur droit de rétractation prévues par l'article L.221-5 2° du code de la consommation, de telle sorte qu'ils disposaient en application de l'article L.221-20 du code de la consommation d'un délai de 12 mois à compter du 27 juillet 2017 pour exercer leur droit de rétractation. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a constaté que M. et Mme B. s'étaient valablement rétractés du contrat conclu avec la société Ecorenove et qu'il a été mis fin aux obligations des parties à ce contrat.

Sur la résiliation du contrat de crédit affecté :

Le contrat de vente conclu entre la société Ecorenove et les époux B. ayant été valablement rétracté, le contrat de crédit destiné à financer ce contrat est résilié de plein droit sans frais ni indemnité, à l'exception éventuellement des frais engagés pour l'ouverture du dossier de crédit en application de l'article L.312-54 du code de la consommation. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit qu'il avait été mis fin au contrat de crédit conclu entre les époux B. et la société Cofidis.

Sur les conséquences de l'anéantissement des contrats :

Quant au contrat de vente :

Les dispositions aux termes desquelles la société Ecorenove a été condamnée à verser à M. et Mme B., conjointement, la somme de 27 800 euros, outre les majorations suivantes, courant du 17 octobre 2017 :

Majoration de la somme du taux d'intérêt légal entre 0 et 10 jours de retard,

Pénalité de 5 % entre 10 et 20 jours de retard ; pénalité de 10 % entre 20 et 30 jours de retard,

Pénalité de 20 % entre 30 à 60 jours de retard ; pénalité de 50 % entre 60 et 90 jours de retard,

Pénalité de 5 % supplémentaire par nouveau mois de retard au-delà,

Ne sont pas critiquées. Aussi, il convient de confirmer le montant de la somme à rembourser par la société Ecorenove aux époux B.. Toutefois, la société Ecorenove ayant été placée en liquidation judiciaire au cours de la présente procédure, il y a lieu de fixer la créance des époux B. au passif de cette liquidation judiciaire et non de prononcer une condamnation à paiement à son encontre. Le jugement sera réformé sur ce point.

M. et Mme B. ne sont plus propriétaires du matériel vendu même si la SELARL A., ès-qualités, ne sollicite pas la restitution de ce matériel du fait de sa non comparution. Aussi, il convient de dire que le coût de la reprise du matériel vendu et des travaux de remise en état nécessaires suite à cette reprise sera à la charge de la SELARL A., ès-qualités.

quant au contrat de crédit :

La société Cofidis fait valoir que :

- elle est bien fondée à réclamer le remboursement du capital prêté en application de l'article L.312-26 du code de la consommation, indépendamment de toute faute qui pourrait être mise à sa charge,

- le préjudice des emprunteurs pouvant résulter de la privation de leur créance de restitution n'est qu'hypothétique, « la société Ecorenove étant in bonis »,

- s'il lui incombe de contrôler la régularité du bon de commande, elle ne peut être tenue que de détecter les causes flagrantes de nullité ; or, en l'espèce le bon de commande comportait toutes les informations exigées par les textes et les éventuelles carences du bon de commande n'avaient pas un caractère déterminant pour les acquéreurs, de telle sorte qu'elles n'étaient pas constitutives d'une cause de nullité ; en outre, compte tenu de l'incertitude juridique existant quant au point de départ du délai de rétractation dans le cadre du contrat de vente, elle ne pouvait anticiper cette difficulté en sa qualité de prêteur ; aussi, le bon de commande avait une apparence de régularité, de telle sorte qu'elle n'a pas commis de faute en versant les fonds au vu de ce document,

- M. et Mme B., qui ne sollicitent pas la résolution du contrat, ne prouvent pas que leur installation ne fonctionne pas, étant observé qu'elle a libéré les fonds au vu non seulement d'une attestation de livraison signée sans réserve mais aussi d'un procès-verbal de réception sans réserve, d'une attestation de conformité du consuel et d'une facture.

M. et Mme B. répliquent que :

- la société Cofidis a commis de multiples fautes contractuelles qui la privent du droit au remboursement du capital prêté, sans qu'il soit nécessaire pour eux d'établir un préjudice particulier :

Elle a libéré prématurément les fonds le 1er août 2017 alors que leur droit de rétractation n'était pas expiré, que les travaux n'étaient pas totalement achevés, en l'absence de déclaration préalable d'urbanisme et de mise en service de l'installation et qu'ils avaient expressément refusé le déblocage des fonds considéré ; l'attestation de livraison du 11 juillet 2017 n'était pas suffisante en l'espèce pour que le prêteur considère que la société Ecorenove avait exécuté l'ensemble des prestations à sa charge,

Elle a remis les fonds alors qu'elle avait connaissance de la nullité du bon de commande et de l'avenant, résultant des éléments suivants : pas de détail des caractéristiques techniques, pas d'indication du prix unitaire, pas d'indication du délai d'exécution, références erronées à des dispositions antérieures à l'ordonnance du 14 mars 2016, formulaire de rétractation non conforme,

Enfin, elle a manqué à ses obligations en optant pour un crédit à la consommation plutôt qu'un prêt immobilier plus avantageux, en ne respectant pas son obligation d'information et de mise en garde à leur égard, et en n'ayant pas été suffisamment vigilante quant au choix de son partenaire commercial, ne justifiant pas notamment de la formation de ce partenaire en matière de crédit,

- si par extraordinaire il leur incombait de justifier d'un préjudice, celui-ci est multiple : ils auraient pu se dégager de cette opération ruineuse si l'organisme de crédit n'avait pas financé un bon de commande irrégulier; en outre, ils sont contraints de payer un prêt pour une installation qui ne revend pas d'électricité et est illégale à défaut de déclaration préalable d'urbanisme et de déclaration attestant de l'achèvement et de la conformité des travaux ; en outre, ils sont privés du droit à la restitution des fonds du fait de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove.

Lors de l'examen de l'exercice du droit de rétractation par les époux B., la Cour a constaté que ni le bon de commande ni l'avenant ne contenaient les informations nécessaires quant aux modalités d'exercice du droit de rétractation. Au surplus, le formulaire type de rétractation n'est pas conforme aux dispositions de l'article R.221-1 du code de la consommation, ne précisant pas l'adresse du vendeur et ne pouvant pas être détaché du bon de commande sans amputer ce dernier de la signature des acquéreurs.

Les irrégularités susvisées, causes de nullité, étaient apparentes et facilement décelables par le prêteur, dans le cadre de son obligation de vérification de la légalité du bon de commande. La société Cofidis a donc commis une faute en consentant un crédit au vu d'un bon de commande affecté d'irrégularités manifestes qui auraient dû l'alerter sur les insuffisances du vendeur.

Par ailleurs, il ressort du bon de commande et de l'avenant que le raccordement et la mise en service de l'installation vendue était à la charge de la société Ecorenove. La société Cofidis établit avoir débloqué les fonds le 1er août 2017 au vu des documents suivants :

- le récépissé de dépôt d'une déclaration préalable du 17 mai 2017 auprès de la mairie du lieu d'habitation de M. et Mme B..

- une fiche d'installation signée le 11 juillet 2017 par M. B., aux termes de laquelle celui-ci fait état de ce que la livraison et l'installation lui donnent entière satisfaction,

- une attestation de livraison et d'installation sans réserve signée le même jour par M. B. et contenant un ordre de déblocage des fonds par le prêteur au moment de la délivrance du consuel,

- l'attestation de conformité de l'installation de production du 17 juillet 2017 visée le 19 juillet 2017 par le consuel.

Toutefois, ces seules pièces n'étaient pas suffisantes pour justifier du raccordement et de la mise en service effective de l'installation photovoltaïque, compte tenu du court délai écoulé entre l'avenant du 12 mai 2017 et l'émission de ces documents. Aussi, la société Cofidis ne pouvait ignorer que la livraison et la pose de l'installation photovoltaïque ainsi que l'obtention du consuel ne constituaient que l'exécution partielle du contrat de vente et qu'en l'absence de spécification contractuelle du paiement d'un acompte à ce stade, les clients n'étaient pas tenus de payer le prix correspondant à l'exécution complète du contrat. Elle a donc également commis une faute en débloquant prématurément les fonds avant l'exécution complète du contrat.

Compte tenu de l'obligation de restitution du matériel vendu à la charge des époux B. et de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove, les fautes commises par la société Cofidis, tant dans le cadre de la vérification de la régularité du bon de commande que dans le déblocage des fonds, ont causé aux emprunteurs un préjudice équivalent au capital emprunté. La société Cofidis sera déboutée de sa demande en restitution du capital prêté ainsi que de tous frais et accessoires et condamnée à rembourser à M. et Mme B. les échéances du prêt que ceux-ci ont d'ores et déjà payées. Le jugement sera réformé sur ce point.

Sur les autres demandes des parties :

La société Cofidis n'étant pas partie au contrat de vente, il n'y a pas lieu de la condamner solidairement avec la SELARL A., ès-qualités, à prendre en charge le coût des travaux de remise en état et de reprise des panneaux. Le jugement sera confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a débouté M. et Mme B. de leur demande sur ce point.

Eu égard à la liquidation judiciaire de la société Ecorenove, les demandes de condamnation en paiement ou de relevé et garantie formées par la société Cofidis à l'encontre de cette société seront déclarées irrecevables.

Par ailleurs, la présente décision n'étant pas susceptible d'une voie de recours suspensive d'exécution, la demande d'exécution provisoire de la société Cofidis est sans objet.

Enfin, compte tenu de la solution apportée au litige, le jugement sera infirmé quant aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile. La société Cofidis sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel. Elle sera condamnée en outre à payer à M. et Mme B. la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et déboutée de sa demande en paiement sur le même fondement.

En revanche, il n'y a pas lieu, en application de l'article R.631-4 du code de la consommation, de mettre à la charge de la société Cofidis et de Maître A., ès-qualités, l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L.111-8 du code des procédures civiles d'exécution. M. et Mme B. seront déboutés de leur demande à cette fin ainsi que de leur demande de condamnation de Maître A., ès-qualités, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement en ce qu'il a :

Constaté que M. et Mme B. s'étaient valablement rétractés du contrat conclu avec la société Ecorenove,

Dit qu'il avait été mis fin au contrat de crédit accessoire conclu entre les époux B. et la société Cofidis,

Débouté M. et Mme B. de leur demande afin de voir condamner la société Cofidis à prendre en charge le coût des travaux de remise en état et de reprise des panneaux ;

L'infirme pour le surplus ;

STATUANT A NOUVEAU,

Fixe la créance de M.et Mme B. au passif de la liquidation judiciaire de la société Ecorenove à la somme de 27 800 euros, outre les majorations suivantes, courant du 17 octobre 2017 :

Majoration de la somme du taux d'intérêt légal entre 0 et 10 jours de retard,

Pénalité de 5 % entre 10 et 20 jours de retard ; pénalité de 10 % entre 20 et 30 jours de retard,

Pénalité de 20 % entre 30 à 60 jours de retard ; pénalité de 50 % entre 60 et 90 jours de retard,

Pénalité de 5 % supplémentaire par nouveau mois de retard au-delà ;

Dit que le coût de la reprise du matériel vendu et des travaux de remise en état nécessaires suite à cette reprise sera à la charge de la SELARL A., ès-qualités ;

Déboute la société Cofidis de sa demande en restitution du capital prêté ainsi que de tous frais et accessoires à l'encontre de M.et Mme B. ;

Condamne la société Cofidis à payer à M.et Mme B. les échéances du prêt déjà payées ;

Déboute M. et Mme B. de leur demande en application de l'article R.631-4 du code de la consommation ;

Déclare irrecevables les demandes de condamnation formées par la société Cofidis à l'encontre de la société Ecorenove ;

Condamne la société Cofidis aux dépens de première instance et d'appel ;

Condamne la société Cofidis à payer à M. et Mme B. la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. et Mme B. de leur demande à l'encontre de Maître A., ès-qualités, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.