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CCE, 6 novembre 1968, n° 68/377

COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES

Décision

C.F.A

CCE n° 68/377

6 novembre 1968

LA COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,

vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 85,

vu le règlement nº 17 du Conseil, du 6 février 1962 (1), et notamment ses articles 2, 5 et 7,

vu la demande d'attestation négative présentée le 29 octobre 1962 par Me J. Lassier, avocat à la Cour d'appel de Paris, dûment mandaté à cet effet, et confirmée le 29 mai 1967, par laquelle la société anonyme Comptoir français de l'azote (C.F.A.), ayant son siège à Paris, a demandé que la Commission constate conformément à l'article 2 du règlement nº 17, qu'il n'y a pas lieu pour elle d'intervenir, en vertu de l'article 85 paragraphe 1 du traité, à l'égard de l'accord en vertu duquel les actionnaires du C.F.A. lui confient la vente en commun de tout ou en partie de leur production d'engrais azotés simples,

vu la notification effectuée à titre subsidiaire par le C.F.A. en vue d'obtenir en faveur de l'accord le bénéfice des dispositions de l'article 85 paragraphe 3 du traité au cas où une attestation négative ne pourrait lui être accordée,

après avoir entendu les entreprises intéressées conformément à l'article 19 paragraphe 1 du règlement nº 17 et aux articles 1, 2 et 3 du règlement nº 99/63/CEE (2).

après avoir publié, conformément à l'article 19 paragraphe 3 du règlement nº 17, l'essentiel du contenu de la demande d'attestation négative au Journal officiel des Communautés européennes nº 239 du 4 octobre 1967, p. 10,

vu l'avis du Comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, recueilli conformément à l'article 10 du règlement nº 17, le 12 mars 1968,

I

1. Considérant que le 20 juin 1958 a été constituée à Paris sous la dénomination de «Comptoir français de l'azote - groupement des producteurs français pour la vente en commun des engrais et produits chimiques et particulièrement des engrais azotés» et en remplacement de la société anonyme «Comptoir français de l'azote» qui avait succédé en 1923 au «Comptoir français de sulfate d'ammoniaque» créé en 1907, une société anonyme dont peuvent être actionnaires tous les producteurs français d'engrais azotés s'engageant à lui confier la vente d'une partie au moins de leur production;

considérant qu'actuellement, les statuts de cette société, tels qu'ils ont été modifiés par l'assemblée générale extraordinaire des actionnaires du 27 juillet 1967, prévoient, en leur article 1er, que le C.F.A. a, notamment, pour objet «la vente en France, dans les territoires ou départements d'outre-mer et à l'étranger, à l'exception des États membres de la Communauté économique européenne, d'engrais et de produits chimiques, particulièrement d'engrais azotés, soit pour le compte de ceux, actionnaires ou non, qui lui ont confié des tonnages, soit pour son propre compte après achat de ces tonnages en France, dans les territoires ou départements d'outre-mer ou à l'étranger»;

considérant que, dans le cadre de cet objet social, les actionnaires du C.F.A., groupés au sein du syndicat professionnel de l'industrie des engrais azotés (S.P.I.E.A.), ont confié au C.F.A., en vertu de mandats non écrits, la vente en commun de tout ou partie de leur production d'engrais azotés simples;

considérant que les modalités de fonctionnement de cet accord de vente en commun ne font pas l'objet d'une convention écrite entre les entreprises intéressées, mais sont réglées par des dispositions d'application arrêtées par le conseil d'administration du C.F.A. en vertu des pouvoirs qui lui sont reconnus par les statuts et, le cas échéant, conformément aux résolutions de l'assemblée générale des actionnaires; (1) (2) 

2. Considérant que, tel qu'il est actuellement en vigueur, cet accord prévoit ce qui suit:

Les participants sont le C.F.A. et les 28 entreprises ci-après, ayant toutes leur siège social en France: - Charbonnages de France, à Paris, et les cinq sociétés qu'ils représentent: - Houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais, à Douai,

- Houillères du bassin de Lorraine, à Saint-Avold,

- Houillères du bassin d'Aquitaine, à Albi,

- Houillères du bassin de la Loire, à Saint-Étienne,

- Société industrielle et financière de Lens (Finalens), à Douvrin,

- Société des produits chimiques d'Auby, à Neuilly-sur-Seine,

- Société chimique de la Grande-Paroisse, à Paris,

- Société générale d'engrais et produits chimiques Pierrefitte, à Paris,

- Potasse et engrais chimiques, à Paris,

- Société Ugine-Kuhlmann, à Paris,

- Société des usines chimiques Ugine-Kuhlmann, à Paris,

- Société des produits chimiques Courrières-Kuhlmann, à Paris,

- Société anonyme d'explosifs et de produits chimiques, à Paris,

- Office national industriel de l'azote (O.N.I.A.), à Toulouse,

- Société chimique d'engrais et de produits de synthèse (Azolacq), à Paris,

- Compagnie des produits chimiques de Roche-la-Molière, à Paris,

- Péchiney-Saint-Gobain, à Levallois-Perret,

- Union sidérurgique lorraine (Sidelor), à Paris,

- Usinor, à Paris,

- Société mosellane de sidérurgie, à Paris,

- Société métallurgique de Normandie, à Paris,

- Société lorraine de laminage continu, à Paris,

- Société de Wendel, à Paris,

- Société des fonderies de Pont-à-Mousson, à Nancy,

- Compagnie des forges de Châtillon, Commentry et Neuves-Maisons, à Paris,

- Société industrielle de Monchecourt, à Paris,

- Société des aciéries et tréfileries de Neuves-Maisons, Châtillon, à Paris.

Les produits soumis à l'accord (produits conventionnels) sont tous les engrais azotés simples à usage agricole qui sont mis à la disposition du C.F.A. ; il s'agit, en particulier, des produits suivants : sulfate d'ammoniaque (de cokerie et de synthèse), nitrate d'ammoniaque, ammonitrates, nitrate de chaux, nitrate de soude, urée et cyanamide calcique.

Le C.F.A. est chargé de vendre, sans exclusivité, les produits conventionnels en France et dans les pays extérieurs à la C.E.E. pour le compte des entreprises citées ci-dessus, lesquelles représentent la totalité de la production française d'azote. Toutefois, depuis le 1er juillet 1962, en raison des engagements pris en leur nom par le S.P.I.E.A. vis-à-vis de la société anonyme Nitrex de Zürich, les actionnaires ne sont pas autorisés à vendre directement et individuellement sur les marchés d'exportation définis à l'article 3 de la convention Nitrex du 12 octobre 1962, mais doivent recourir exclusivement aux services du C.F.A. pour y vendre. En revanche, les exportations à destination des États membres de la C.E.E. ne peuvent être assurées qu'à titre individuel par les producteurs et leurs revendeurs.

Tous les trois ans, les actionnaires du C.F.A. lui indiquent les quantités d'azote qu'ils mettront à sa disposition sous forme d'engrais au cours des trois prochaines campagnes agricoles. De plus, tous les ans, après avoir établi leurs programmes de production pour la campagne suivante, ils définissent au sein du S.P.I.E.A. les quantités dont ils confient la vente au C.F.A. ou à d'autres services commerciaux. Le programme initial de campagne est ajusté suivant les nécessités, soit par le C.F.A., en fonction de l'évolution du marché, soit par les producteurs, en fonction des incidents de marché de leurs usines ou des opérations d'exportation qu'ils réaliseraient eux-mêmes.

Les commandes que le C.F.A. obtient pour livraison sur le marché français sont réparties par lui entre ses membres suivant l'importance des disponibilités existantes dans les usines, la préférence indiquée par l'acheteur pour obtenir livraison d'une usine déterminée ou, à défaut, la distance la plus courte entre une usine et la gare destinataire.

Le C.F.A., qui vend en France soit à des grossistes soit à des distributeurs en culture (détaillants ou coopératives), applique pour les engrais azotés mis à sa disposition des prix de vente communs pour chaque type de produit, quel que soit le fournisseur. Ces prix, fixés pour chaque mois de la campagne agricole, sont des prix franco toutes gares de destination.

Le C.F.A. applique à ses acheteurs français des conditions générales de vente uniformes qui ne contiennent aucune interdiction d'exporter.

Les commandes que le C.F.A. obtient pour livraison à l'exportation en dehors de la C.E.E. sont réparties par lui entre ses actionnaires en tenant compte de leurs disponibilités et de leur situation géographique. Pour les marchés d'exportation (hors de la C.E.E.) couverts par la convention Nitrex, les prix que le C.F.A. doit pratiquer sont déterminés par la S.A. Nitrex. Dans les autres pays extérieurs à la C.E.E., les prix de vente sont déterminés dans chaque cas par le C.F.A. après discussion avec les acheteurs, lesquels ne sont jamais des utilisateurs finals, mais des entreprises de distribution.

Chacun des engrais azotés vendus par le C.F.A. sur le marché intérieur français est payé à tous les producteurs à un prix unique en fin d'exercice. Il en est de même pour chacun des engrais vendus à l'exportation. Ces prix uniques sont définis par l'ensemble des recettes obtenues pour l'engrais considéré, d'où sont déduits les charges commerciales et les frais de fonctionnement du C.F.A. Il n'existe pas de péréquation entre les prix obtenus sur le marché intérieur et ceux obtenus à l'exportation.

3. Considérant que, tel qu'il était appliqué au moment de la présentation de la demande d'attestation négative, l'accord donnait lieu à des pratiques que la Commission avait considérées comme susceptibles d'affecter le commerce entre États membres de la C.E.E. et comme ayant pour objet et pour effet de restreindre et de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun ; qu'en particulier, il s'agissait essentiellement des pratiques suivantes: a) L'inclusion de tous les pays de la C.E.E. dans la zone d'exercice du droit de vente en commun conféré au C.F.A., ce qui restreignait la liberté d'action des actionnaires dans leurs exportations tant collectives qu'individuelles vers les autres États membres de la C.E.E. : en effet, en ce qui concerne les quantités d'engrais mises à la disposition du C.F.A. pour vente en commun, c'est le comptoir qui décidait s'il y avait lieu de les vendre en France ou de les exporter, notamment à l'intérieur du marché commun, à quels prix et à quelles conditions de vente ces exportations étaient réalisées et à quels acheteurs elles devaient être destinées, sans que les actionnaires puissent prendre de décisions individuelles à ce sujet ; en ce qui concerne les quantités non mises à la disposition du C.F.A., c'est-à-dire réservées pour la vente individuelle, les producteurs ne pouvaient pas suivre dans les pays où le comptoir avait également le droit de vendre pour leur compte et, notamment, dans les États membres de la C.E.E., une politique d'exportation différente de celle que, en tant qu'actionnaires du C.F.A., ils avaient décidé de faire suivre à ce dernier, politique d'exportation qui, en l'occurrence, consistait à s'abstenir d'exporter dans les autres États membres de la C.E.E., de manière à ne pas concurrencer les producteurs et les comptoirs de vente de ces pays, ce qui avait pour effet de maintenir artificiellement un certain cloisonnement du marché européen des engrais azotés;

b) la péréquation des prix entre les livraisons faites par le C.F.A. sur le marché intérieur français et les livraisons faites par lui à l'exportation, ce qui avait pour résultat que les actionnaires recevaient en fin d'exercice un prix unique pour chaque sorte d'engrais azotés, prix unique qui était le même pour les livraisons faites en France et pour celles faites à l'exportation, et qui correspondait au prix moyen obtenu pour les ventes sur le marché intérieur : la différence entre le prix moyen fictif et les prix réels obtenus à l'exportation était répartie entre tous les actionnaires, même ceux qui n'avaient pas exporté, proportionnellement à leur production ; cette pratique était de nature à décourager les actionnaires de réaliser des exportations individuelles, notamment à l'intérieur de la C.E.E., aussi longtemps que, comme c'était le cas, les prix qu'ils devraient consentir à l'exportation étaient inférieurs aux prix intérieurs français : en effet, lorsqu'ils exportaient par l'intermédiaire du C.F.A., ils percevaient en réalité le prix intérieur français diminué d'une partie seulement de la différence entre ce prix intérieur et le prix réellement obtenu à l'exportation, puisque cette différence était répartie entre tous les actionnaires au prorata de leur production, tandis que lorsqu'ils exportaient sans l'intermédiaire du C.F.A., ils n'encaissaient que le prix d'exportation réel, c'est-à-dire un prix moins élevé;

considérant que, dans le but d'obtenir l'attestation négative demandée, les intéressés ont décidé de mettre fin à ces pratiques après que la Commission leur eût fait savoir, par une communication des griefs effectuée le 15 mars 1967 en application de l'article 19 paragraphe 1 du règlement nº 17, qu'elle les considérait comme incompatibles avec l'article 85 du traité ; qu'à cet effet, réunis en assemblée générale extraordinaire le 27 juillet 1967, les actionnaires du C.F.A. ont modifié l'objet social défini à l'article 1er des statuts de cette société de manière que celle-ci s'interdise désormais de vendre dans les pays membres de la C.E.E. autres que la France et ont adopté une motion spéciale rédigée comme suit:

«Le C.F.A. n'étant plus chargé des ventes dans les pays de la Communauté économique européenne autres que la France, les exportations propres des actionnaires à l'intérieur du marché commun n'interviendront d'aucune manière dans le calcul des péréquations de prix. Les exportations faites par le C.F.A. hors de la C.E.E., ne pourront d'aucune manière faire l'objet d'une péréquation de prix liée aux résultats des ventes sur le marché français. En aucun cas, les calculs relatifs à la répartition des recettes réalisées par le C.F.A. ne pourront tenir compte des niveaux de production des sociétés actionnaires;»

II

4. Considérant, en la forme, que, bien que les intéressés n'aient pas utilisé le formulaire A prévu à l'article 4 paragraphe 1 du règlement nº 27 (1) pour présenter leur demande d'attestation négative, ils ont, cependant, fourni aux points I à IV du formulaire B utilisé par eux tous les renseignements prévus au formulaire A et ils ont confirmé cette demande par la suite, notamment dans une lettre recommandée du C.F.A., en date du 29 mai 1967, de sorte que la demande d'attestation négative doit être considérée comme présentée régulièrement et comme recevable en la forme au titre de l'article 2 du règlement nº 17;

5. Considérant, au fond, que l'attestation négative demandée peut être délivrée conformément aux dispositions de l'article 2 du règlement nº 17 si la Commission constate qu'il n'y a pas lieu pour elle, en fonction des éléments dont elle a connaissance, d'intervenir en vertu des dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité à l'égard de l'accord en vertu duquel les actionnaires du C.F.A. lui confient la vente en commun de tout ou partie de leur production d'engrais azotés simples;

considérant qu'aux termes de l'article 85 paragraphe 1 du traité, sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun;

considérant que l'accord visé, tel qu'il est appliqué actuellement, comporte encore plusieurs dispositions qui restreignent le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, notamment l'impossibilité pour les actionnaires du C.F.A. de fixer individuellement les prix et conditions de vente sur le marché français des quantités de produits conventionnels qu'ils mettent à la disposition du C.F.A. ; qu'une attestation négative au regard de l'article 85 paragraphe 1 ne peut, dès lors, être délivrée que si l'accord n'est pas susceptible d'affecter le commerce entre États membres;

considérant qu'à cet égard, il importe d'examiner si l'accord est susceptible de mettre en cause la liberté du commerce entre États membres d'une façon qui pourrait nuire au bon fonctionnement du marché commun ; que, dans le cas d'espèce, il convient donc d'examiner si les dispositions de l'accord et celles prises pour son application sont susceptibles d'entraver la liberté d'importation et d'exportation des actionnaires ou des tiers à l'intérieur du marché commun;

6. Considérant que l'accord ne porte pas atteinte à la liberté d'importation des actionnaires à l'intérieur du marché commun étant donné qu'il organise uniquement la vente en commun sur le marché français et sur les marchés extérieurs à la C.E.E. de la totalité ou d'une partie des produits conventionnels fabriqués par les actionnaires du C.F.A. et qu'au surplus il ne restreint pas, même de manière indirecte, les possibilités d'achat de ceux-ci dans les autres États membres de la C.E.E.;

considérant que l'accord ne porte pas non plus atteinte de manière directe à la liberté d'exportation des producteurs à l'intérieur du marché commun puisque le 27 juillet 1967, l'assemblée générale des actionnaires du C.F.A. a modifié l'objet social de cette société de manière à lui interdire toute intervention dans les exportations françaises à destination des États membres de la C.E.E. ; que cette modification intervenue à la suite de la communication des griefs retenus par la Commission à l'égard de la pratique antérieure en vertu de laquelle de C.F.A. avait le droit de vendre dans tous les pays du monde traduit la décision des actionnaires du C.F.A. de limiter désormais leur système de vente en commun au marché français et aux marchés extérieurs à la C.E.E., de manière que les exportations à l'intérieur du marché commun ne puissent plus être assurées qu'à titre individuel par les producteurs et leurs revendeurs ; qu'on ne relève, en outre, dans l'accord aucune disposition susceptible de mettre en cause de manière indirecte cette liberté d'exportation à l'intérieur du marché commun reconnue aux producteurs ; qu'en particulier: a) Bien que l'accord confère au C.F.A. le pouvoir de répartir les commandes entre ses actionnaires, chacun de ceux-ci n'en reste pas moins libre de déterminer lui-même les quantités d'engrais azotés qu'il met à la disposition du comptoir pour vente en commun et celles qu'il conserve pour vente individuelle dans les États membres de la C.E.E. autres que la France, puisqu'il n'est pas obligé de mettre certaines quantités à la disposition du comptoir et que ce n'est qu'à titre indicatif qu'il doit lui faire connaître chaque année les quantités qu'il compte mettre à sa disposition pour la vente en commun, afin de permettre au C.F.A. d'établir un programme prévisionnel de livraisons;

b) en vertu de la résolution adoptée par l'assemblée générale des actionnaires du 27 juillet 1967, il (3) n'est plus prévu de péréquation entre les prix moyens des ventes du C.F.A. sur le marché intérieur et les prix moyens des ventes du C.F.A. à l'exportation en dehors du marché commun, de telle sorte que les actionnaires n'ont plus d'intérêt, à prix équivalent, à substituer à leurs exportations individuelles à l'extérieur du marché commun des exportations à l'extérieur du marché commun par l'entremise du C.F.A. pour bénéficier finalement des prix moyens plus élevés qui résulteraient de la prise en considération des prix obtenus sur le marché français;

considérant que les conditions générales de vente appliquées par le C.F.A. sur le marché français ne contiennent aucune clause empêchant les clients du C.F.A. d'exporter des produits conventionnels dans l'un quelconque des États membres de la C.E.E. ou les empêchant d'importer ces produits en France ; que, par ailleurs, à la connaissance de la Commission, le comportement du C.F.A. n'exerce aucune influence, même indirecte, sur la liberté de ses acheteurs d'importer des produits conventionnels en provenance d'autres fabricants du marché commun ou d'exporter ces produits à destination des autres pays de la C.E.E.;

7. Considérant que, certes, dans sa version actuelle, l'accord examiné exerce encore des effets restrictifs perceptibles sur la position des distributeurs ou des utilisateurs à l'intérieur du marché commun ; qu'il s'agit en particulier de l'application par le C.F.A. sur le marché français d'une échelle unique de prix de vente mensuels et de conditions de vente uniformes prévoyant, notamment, la livraison franco toutes gares de destination, ce qui a pour conséquence que les acheteurs français, en ce qui concerne les quantités achetées au C.F.A., n'ont pas la possibilité de susciter une concurrence de prix entre les fabricants français ni de tirer avantage, le cas échéant, de leur localisation géographique plus favorable par rapport à certaines usines pour diminuer le coût des transports ; qu'il n'y a cependant pas lieu de tenir compte de ces restrictions de concurrence pour refuser la délivrance d'une attestation négative, étant donné qu'en fonction des éléments dont la Commission a connaissance, il n'apparaît pas, dans les circonstances actuelles, que ces restrictions, qui concernent le marché intérieur français, soient susceptibles d'affecter le commerce entre États membres;

considérant que l'essentiel du contenu de la demande d'attestation négative relative à l'accord modifié a été publié conformément à l'article 19 paragraphe 3 du règlement nº 17 en vue de donner à tous les tiers intéressés la possibilité de faire connaître leurs observations ; qu'aucune objection n'a été formulée;

considérant que la Commission peut donc constater, comme suite à la demande des entreprises intéressées, qu'il n'y a pas lieu pour elle, en fonction des éléments dont elle a connaissance, d'intervenir à l'égard de l'accord en cause en vertu des dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité;

III

8. Considérant que les conditions d'application de l'article 7 paragraphe 1 du règlement nº 17 sont réunies ; qu'il s'agit, en effet, d'un accord existant à la date d'entrée en vigueur du règlement nº 17 (13 mars 1962), notifié le 29 octobre 1962, soit dans les délais fixés à l'article 5 paragraphe 1 du règlement nº 17, ne remplissant pas les conditions d'application de l'article 85 paragraphe 3 et que les entreprises intéressées ont modifié comme il a été exposé ci-dessus de telle sorte qu'il n'est plus visé par l'interdiction édictée par l'article 85 paragraphe 1 du traité ; qu'il en résulte qu'à l'égard des versions de l'accord antérieures aux modifications, l'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1 ne s'applique, conformément à l'article 7 paragraphe 1 du règlement nº 17, que pour la période fixée par la Commission;

considérant, qu'à cet égard, il y a lieu, dans le cas d'espèce, de tenir compte du fait que les intéressés ont non seulement fait connaître à la Commission dans le délai que celle-ci leur avait imparti pour répondre à sa communication des griefs du 15 mars 1967, leur intention de modifier l'accord de telle sorte qu'il échappe à ces griefs, mais qu'ils ont aussi effectivement mis fin aux pratiques incriminées après un court délai, soit, en l'occurrence, le 27 juillet 1967 ; que ces circonstances sont suffisantes pour justifier la non application de l'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1 pour la période antérieure au 27 juillet 1967, date d'entrée en vigueur de la version de l'accord pour laquelle l'attestation négative peut être délivrée,

A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DÉCISION:

Article premier

Il n'y a pas lieu pour la Commission, en fonction des éléments dont elle a connaissance, d'intervenir, en vertu des dispositions de l'article 85 paragraphe 1 du traité instituant la Communauté économique européenne, à l'égard de l'accord de vente en commun existant entre le Comptoir français de l'azote et les entreprises françaises productrices d'engrais azotés simples, dans sa version résultant des modifications entrées en vigueur le 27 juillet 1967.

Article 2

L'interdiction édictée à l'article 85 paragraphe 1 ne s'applique pas aux versions antérieures de l'accord pour la période comprise entre le 13 mars 1962 et le 27 juillet 1967.

Article 3

La présente décision est destinée aux entreprises ci-après: 1. Comptoir français de l'azote, à Paris,

2. Charbonnages de France, à Paris,

3. Houillères du bassin du Nord et du Pas-de-Calais, à Douai,

4. Houillères du bassin de Lorraine, à Saint-Avold,

5. Houillères du bassin d'Aquitaine, à Albi,

6. Houillères du bassin de la Loire, à Saint-Étienne,

7. Société industrielle et financière de Lens, à Douvrin,

8. Société des produits chimiques d'Auby, à Neuilly-sur-Seine,

9. Société chimique de la Grande-Paroisse, à Paris,

10. Société générale d'engrais et produits chimiques «Pierrefitte», à Paris,

11. Potasse et engrais chimiques, à Paris,

12. Société Ugine-Kuhlmann, à Paris,

13. Société des usines chimiques Ugine-Kuhlmann, à Paris,

14. Société des produits chimiques Courrières-Kuhlmann, à Paris,

15. Société anonyme d'explosifs et de produits chimiques, à Paris,

16. Office national industriel de l'azote, à Toulouse,

17. Société chimique d'engrais et de produits de synthèse «Azolacq», à Paris,

18. Compagnie des produits chimiques de Roche-la-Molière, à Paris,

19. Péchiney-Saint-Gobain, à Levallois-Perret,

20. Union sidérurgique lorraine «Sidelor», à Paris,

21. Usinor, à Paris,

22. Société mosellane de sidérurgie, à Paris,

23. Société métallurgique de Normandie, à Paris,

24. Société lorraine de laminage continu, à Paris,

25. Société de Wendel, à Paris,

26. Société des fonderies de Pont-à-Mousson, à Nancy,

27. Compagnie des forges de Châtillon, Commentry et Neuves-Maisons, à Paris,

28. Société industrielle de Monchecourt, à Paris,

29. Société des aciéries et tréfileries de Neuves-Maisons, Châtillon, à Paris.

(1) JO nº 13 du 21.2.1962, p. 204/62.

(2) JO nº 127 du 20.8.1963, p. 2268/63.

(3) JO nº 35 du 10.5.1962, p. 1118/62