Cass. 2e civ., 25 mars 2021, n° 19-20.156
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
PARTIES
Demandeur :
Actifil (SAS)
Défendeur :
Pieuvre Elec (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Pireyre
Rapporteur :
Mme Bohnert
Avocat général :
M. Aparisi
Avocats :
SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Thouin-Palat et Boucard
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 2 mai 2019), la société Actifil, se plaignant d'agissements constitutifs de concurrence déloyale de la part de la société Pieuvre Elec, a saisi le président d'un tribunal de commerce d'une requête tendant, sur le fondement de l'article 145 du code de procédure civile, à désigner un huissier de justice à fin d'effectuer diverses investigations au siège de la société Pieuvre Elec.
2. La société Pieuvre Elec a sollicité la rétractation de l'ordonnance du 14 juin 2018, tandis que la société Actifil a assigné la société Pieuvre Elec devant le juge des référés pour voir ordonner la mainlevée du séquestre des documents recueillis par l'huissier de justice.
3. La société Actifil a interjeté appel de l'ordonnance ayant joint les instances et renvoyé les parties devant le juge du fond.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches
Enoncé du moyen
4. La société Actifil fait grief à l'arrêt de rétracter l'ordonnance sur requête du 14 juin 2018, de débouter la société Actifil de toutes ses demandes, d'annuler l'ensemble des saisies et autres opérations effectuées sur la base de l'ordonnance sur requête et de dire et juger que tous les éléments saisis en vertu de l'ordonnance du 14 juin seront restitués à la société Pieuvre Elec, alors : « 3)° qu'en se fondant, pour rétracter l'ordonnance ayant fait droit à la mesure d'investigation sollicitée par la société Actifil, sur la considération que ladite mesure aurait été « disproportionnée en raison de l'atteinte susceptible d'être irrémédiablement occasionnée à un concurrent », sans aucunement constater la nature de cette atteinte ni donc caractériser cette prétendue disproportion, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 145 du code de procédure civile ;
4°) qu'en énonçant, pour rétracter l'ordonnance sur requête du 14 juin 2018, que la mesure ordonnée était « générale », cependant que l'arrêt avait relevé que la mesure de saisie précédemment ordonnée était limitée aux fichiers clients de la société Pieuvre Elec, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 145 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 145 du code de procédure civile :
5. Il résulte de ce texte que le juge, saisi d'une demande de rétractation d'une ordonnance sur requête, doit vérifier si la mesure ordonnée était nécessaire à l'exercice du droit à la preuve du requérant, et proportionnée aux intérêts antinomiques en présence.
6. Pour rétracter l'ordonnance ayant fait droit à la mesure d'investigation sollicitée par la société Actifil, l'arrêt retient que cette mesure est disproportionnée en raison de l'atteinte susceptible d'être irrémédiablement occasionnée à un concurrent, en faisant notamment courir un risque économique irrémédiable à la société Pieuvre Elec.
7. En se déterminant ainsi, par des motifs d'ordre général, sans caractériser ni la nature de l'atteinte ni la disproportion de la mesure au regard des intérêts antinomiques en présence, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon.