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Décisions

CA Colmar, 1re ch. civ. A, 22 mars 2021, n° 17/02203

COLMAR

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

AGM Diffusion (SARL), AGM Vertriebs GmbH (Sté) , AGM Diffusion France (SAS)

Défendeur :

Vorwerk France (SCS), Vorwerk International AG (SA), Vorwerk Elektrowerke & Co. KG GmbH (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Panetta

Conseillers :

M. Roublot, Mme Robert Nicoud

Avocats :

Me Borghi, Me Bloch, Me Heichelbech

TGI Saverne, du 7 avr. 2017

7 avril 2017

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES :

La SCS VORWERK FRANCE, la société de droit allemand VORWERK ELEKTROWERKE GMBH & CO.KG et la société de droit suisse SA VORWERK INTERNATIONAL AG, ci-après dénommées 'sociétés du groupe VORWERK', commercialisent des produits électroménagers haut de gamme par l'intermédiaire de vendeurs à domicile indépendants et assurent le service après-vente par un réseau de stations techniques agrées.

En 2008, un rapport CELOG a mis en évidence que des produits neufs et d'occasion VORWERK étaient proposés à la vente sur le site internet vorwerk-shop.com, dont le nom de domaine appartenait à Madame X., et sur le site internet stores.ebay.fr/vorwerk-shop.

Par acte d'huissier du 4 septembre 2008, les sociétés du groupe VORWERK ont fait assigner les époux X en contrefaçon de leurs marques et droits d'auteur ainsi que sur le fondement de la concurrence déloyale pour la commercialisation sans autorisation de produits neufs de la marque VORWERK sur le site vorwerk-shop.com puis sur le site mondial-shop.com.

Par jugement du 16 février 2010 passé en force de chose jugée, le tribunal de grande instance de Paris a notamment, dit que les époux X ont commis des actes de contrefaçon par imitation de la marque internationale VORWERK dont VORWERK ELEKTROWERKE est le titulaire et la marque communautaire VORWERK dont VORWERK INTERNATIONAL est le titulaire, interdit aux époux X sur l'ensemble du territoire français tout usage du signe VORWERK, sur tout support, et tout usage des marques VORWERK dans une adresse internet ou à titre de méta-balise, sous astreinte, interdit aux époux X de procéder à la vente de produits VORWERK neufs, sous astreinte et condamné les époux X à payer aux sociétés VORWERK ELEKTROWERKE et VORWERK INTERNATIONAL diverses sommes en réparation des préjudices subis du fait des actes de contrefaçon et de concurrence déloyale.

Par acte d'huissier en date du 16 janvier 2013, les sociétés du groupe VORWERK ont assigné les époux X et la SARL AGM DIFFUSION devant le tribunal de grande instance de Saverne aux fins d'exécution de leur condamnation au titre du jugement rendu le 16 février 2010 par le tribunal de grande instance de Paris, d'interdiction de vendre des produits VORWERK neufs sous astreinte ainsi que de réparation des préjudices subis résultant de leur résistance abusive et des actes de concurrence déloyale fautifs commis par ces derniers à leur encontre.

Par acte d'huissier en date du 22 janvier 2013, les sociétés du groupe VORWERK ont assigné les époux X et la société AGM DIFFUSION devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins de voir cesser de nouveaux actes de concurrence déloyale commis à leur encontre.

Par ordonnance de référé du 23 mai 2013, le juge des référés près le tribunal de grande instance de Paris a notamment fait interdiction aux époux X et à la SARL AGM DIFFUSION de vendre des produits VORWERK neufs sur le site mondial-shop.com ainsi qu'à leur domicile et au siège social de la société AGM DIFFUSION, sous astreinte, et condamné in solidum les époux X et la société AGM DIFFUSION à verser à VORWERK FRANCE la somme de 1 000 euros à titre provisionnel à valoir sur le préjudice subi au titre des actes de concurrence déloyale et parasitaire.

Par arrêt du 9 octobre 2014, la cour d'appel de Paris a condamné in solidum les époux X et la société AGM DIFFUSION à verser aux sociétés du groupe VORWERK la somme de 25 000 euros à valoir sur la réparation de leurs préjudices au titre de la concurrence déloyale et confirmé l'ordonnance pour le surplus.

Par acte d'huissier du 4 avril 2014, les sociétés du groupe VORWERK ont fait assigner la société AGM VERTRIEBS, prise en la personne de son représentant légal, Monsieur X, aux fins d'obtenir sa condamnation solidaire avec les époux X et la société AGM DIFFUSION.

Par ordonnance du 26 septembre 2014, les deux causes ont été jointes.

Par ordonnance du 18 décembre 2015, le juge de la mise en état a déclaré irrecevable l'exception d'incompétence territoriale soulevée par les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS, ci-après dénommées 'sociétés AGM'.

Par un jugement en date du 7 avril 2017, le tribunal de grande instance de Saverne a :

- déclaré la mise en cause de la société de droit allemand AGM VERTRIEBS recevable ;

- fait interdiction aux époux X, à la société AGM DIFFUSION et à la société AGM VERTRIEBS de vendre des produits VORWERK neufs, sous astreinte provisoire de 1 000 euros par infraction constatée courant à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter du présent jugement et pendant 1 an et s'est réservé la liquidation de l'astreinte ;

- condamné solidairement Monsieur X et Madame X. à payer aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

- condamné in solidum les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à verser aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 30 000 euros de dommages-intérêts au titre du manque à gagner sur la vente des appareils VORWERK ;

- condamné in solidum les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à verser aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 50 000 euros de dommages-intérêts au titre de l'atteinte portée à l'image de marque et de la désorganisation du réseau ;

- débouté les sociétés du groupe VORWERK de leur demande de condamnation solidaire des époux X au paiement de la somme de 3 954,82 euros ;

- débouté les sociétés du groupe VORWERK de leur demande production de pièce ;

- dit n'y avoir lieu à confirmer la saisie-conservatoire ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- et condamné in solidum les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à verser aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 10 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS ont interjeté appel du jugement précité par déclaration au greffe du 17 mai 2017.

Les sociétés du groupe VORWERK se sont constituées intimées le 30 juin 2017 et ont formé un appel incident.

La SAS AGM DIFFUSION France s'est constituée intimée suite à intervention forcée, le 22 janvier 2019.

Par jugement en date du 24 mai 2019, le tribunal de grande instance de Saverne a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de Monsieur X et désigné Me M. en qualité de mandataire judiciaire et la SELARL ADJE en qualité d'administrateur judiciaire.

Le 25 septembre 2019, les sociétés du groupe VORWERK ont procédé aux déclarations de créances requises dans le cadre de ladite procédure auprès de Me Jean-Denis M., ès qualité de mandataire judiciaire.

Par acte d'huissier du même jour, Me M., ès qualité de mandataire judiciaire, et la SELARL ADJE, ès qualité d'administrateur judiciaire, ont été régulièrement assignés.

Monsieur X a été placé en redressement judiciaire par jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Saverne le 24 mai 2019 après avoir interjeté appel dans la présente affaire.

Le 25 septembre 2019, Maître Julie J., en sa qualité de conseil de VORWERK FRANCE, VORWERK ELEKTROWERKE & CO.KG et VORWERK INTERNATIONAL AG, a procédé aux déclarations de créances requises dans le cadre de ladite procédure de redressement judiciaire, auprès de Maître Jean Denis M., Mandataire judiciaire en charge.

II a été procédé à la mise en cause des organes de la procédure à savoir Maître Jean-Denis M., Mandataire judiciaire et la Selarl ADJE en qualité d'administrateur, lesquels n'ont pas constitué avocat.

Or, par arrêt du 28 octobre 2020, la Cour de céans a infirmé le jugement de redressement judiciaire pour dire n'y avoir lieu à redressement judiciaire.

M. X étant in bonis, les parties ont mis leurs dernières écritures en conformité avec la situation de Monsieur X.

Par ailleurs, il n'y a plus lieu de conclure à l'égard des mandataire et administrateur judiciaires.

Par des dernières conclusions en date du 8 mars 2019, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, les époux X, la société AGM DIFFUSION, la société AGM VERTRIEBS et la société AGM DIFFUSION FRANCE demandent à la Cour de déclarer leur appel recevable et bien fondé, d'infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau, de déclarer les demandes en intervention forcée dirigées contre les sociétés AGM VERTRIEBS et AGM DIFFUSION FRANCE irrecevables, de débouter les sociétés du groupe VORWERK de l'ensemble de leurs prétentions et de les condamner aux entiers frais et dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. Ils demandent également à la Cour de rejeter l'appel incident.

Au soutien de leurs demandes, ils font valoir que la compétence des juridictions françaises n'est pas justifiée dans la mesure où la société de droit allemand n'a jamais eu aucune activité et n'a commis aucun manquement sur le territoire national français,

- que sa mise en cause n'est pas recevable, que les sociétés du groupe VORWERK font état de faits commis antérieurement au jugement du tribunal de grande instance de Saverne du 7 avril 2017 et que, ainsi, aucune évolution du litige ne justifie la mise en cause de la société AGM DIFFUSION FRANCE, que des éléments produits au dossier justifient la vente de produits VORWERK dans les centres commerciaux et par le site internet kobold.vorwerk.de,

- que, dans la mesure où les intimées souhaitent obtenir des appelants la communication des noms et adresses de leurs fournisseurs en Europe et en France, il n'existe aucun réseau de distribution sélective,

- que les sociétés du groupe VORWERK ne démontrent pas la licéité de leur réseau sélectif au regard des règles de la concurrence, qu'ils ne vendent pas et n'ont pas vendu des produits neufs de marque VORWERK,

- que les sociétés VORWERK qui, selon elles, maîtrisent leur réseau de distribution, sont les seules à pouvoir commercialiser des produits neufs, que les produits VORWERK qu'ils vendent sont des produits d'occasion nécessairement acquis auprès de particuliers au sein du réseau de distribution sélective des sociétés VORWERK puis revendus, que dès lors, la vente de biens ayant été acquis auprès de particuliers par des particuliers, et constituant du matériel d'occasion, ne peut intervenir en violation du réseau de distribution sélective, qu'il est injustifié que les sociétés VORWERK leur demandent de fournir les noms de leurs fournisseurs de produits VORWERK en France et en Europe, que dans l'hypothèse où les sociétés VORWERK disposeraient d'un réseau de distribution sélective, il leur appartiendrait d'interroger directement leurs distributeurs, que le jugement rendu le 16 février 2010 par le tribunal de grande instance de Paris est définitif,

- que si les intimées estiment qu'il n'a pas été exécuté, il leur appartient d'agir aux fins d'exécution du jugement qui se fait par huissier et non par l'obtention d'un nouveau titre, que le jugement rendu le 16 février 2010 rendu par le tribunal de grande instance de Paris avait prévu une sanction à la non-exécution, à savoir une astreinte, dont il a entendu s'en réserver la liquidation, que la demande en réparation du préjudice résultant de la résistance abusive est en conséquence irrecevable et mal fondée, qu'il n'est ni démontré l'existence d'un réseau de distribution sélective, ni l'existence d'actes de concurrence déloyale, ni l'existence et l'étendue d'un quelconque préjudice, que les sociétés du groupe VORWERK produisent des constats d'huissier anciens et intégralement contestés, que les préjudices invoqués au titre de la concurrence déloyale doivent être individualisés et ne peuvent faire double emploi, que les sociétés du groupe VORWERK ont nécessairement pu vendre le matériel revendu, car, à défaut, il n'y aurait pas de réseau de distribution sélective, que, partant, l'allocation de sommes au titre du manque à gagner constitue indiscutablement une double indemnisation du préjudice et que, par ailleurs, à supposer qu'un préjudice soit établi, les sociétés intimées VORWERK ne démontrent l'ampleur de leur préjudice.

Par des dernières conclusions en date du 03 Décembre 2020, auxquelles était joint le bordereau de communication de pièces récapitulatif, qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, les sociétés du groupe VORWERK demandent à la Cour de déclarer les demandes en intervention forcée dirigées à l'encontre de la société AGM DIFFUSION FRANCE recevable et de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qu'il a condamné solidairement les époux X à leur payer la somme globale de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive, condamné in solidum les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à leur verser la somme globale de 30 000 euros de dommages-intérêts au titre du manque à gagner sur la vente des appareils VORWERK et la somme globale de 50 000 euros de dommages-intérêts au titre de l'atteinte portée à l'image de marque et à la désorganisation du réseau mais également en ce qu'il les a déboutés de condamnation solidaire des époux X au paiement de la somme de 3 954,82 euros au titre de l'exécution du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 16 février 2010 et de leur demande de production de pièce et dit n'y avoir lieu à confirmer la saisie-conservatoire.

Statuant à nouveau, elles demandent à la Cour de :

- condamner solidairement les époux X à leur payer la somme globale de 30 000 euros à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

- condamner in solidum les époux X et les sociétés AGM à leur verser la somme globale de 100 000 euros de dommages-intérêts au titre du manque à gagner sur la vente des appareils VORWERK et la somme globale de 100 000 euros de dommages-intérêts au titre de l'atteinte portée à l'image de marque et à la désorganisation du réseau ;

- condamner solidairement les époux X à leur payer la somme de 3 954,82 euros au titre de l'exécution du jugement rendu par le tribunal de grande instance de Paris le 16 février 2010 ;

- faire injonction aux époux X et aux sociétés AGM de communiquer à la SCS VORWERK FRANCE les noms et adresses de leurs fournisseurs en France et en Europe de produits et accessoires VORWERK et tout document permettant de déterminer le nombre total de produits et consommables VORWERK neufs commercialisés par leurs soins, le prix d'achat et de revente des produits et consommables VORWERK ainsi que le chiffre d'affaires et les marges générées par ces commercialisations ;

- et confirmer la saisie-conservatoire effectuée le 18 décembre 2012 par Me P., huissier de justice, au domicile des époux X et au siège de la société AGM DIFFUSION.

Elles demandent également à la Cour de condamner solidairement les époux X, la société AGM VERTRIEBS et la société AGM DIFFUSION FRANCE à leur verser la somme de 1 000 euros au titre de l'astreinte par infraction constatée.

Elles demandent en outre à la Cour de débouter les appelants de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions.

Enfin, en toutes hypothèses, elles demandent à la Cour de condamner in solidum les époux X et les sociétés AGM à leur verser la somme globale de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Au soutien de leurs demandes, elles font valoir qu'elles étaient parfaitement fondées à attraire la société AGM VERTRIEBS devant la juridiction de première instance initialement saisie du litige,

- que le lien avec le litige les opposant aux époux X et à la société AGM DIFFUSION apparaît suffisant de sorte que la mise en cause de la société VERTRIEBS est recevable,

- que la réalisation de nouveaux actes de commercialisation illicites après le jugement de première instance commis par la SAS AGM DIFFUSION FRANCE démontre une évolution du litige,

- que la demande d'intervention forcée diligentée contre la société AGM DIFFUSION FRANCE est donc nécessaire et recevable,

- que les produits VORWERK sont proposés à la vente à travers une démonstration des produits au domicile des personnes intéressées par des vendeurs à domicile indépendants, dûment sélectionnés et formés par VORWERK, que les consommables (sacs, spatules, etc) sont quant à eux présentés à la vente par l'intermédiaire des voyageurs représentants placiers, des stations techniques agréées et du site officiel shop.vorwerk.fr sélectionnés sur la base de critères objectifs et qualitatifs, compte tenu de la spécificité des produits qu'ils vendent, qu'en raison de leur technicité, les produits sont entretenus et réparés, en cas de besoin, dans des stations techniques agréées,

- que dès le jugement du 16 février 2010 et l'ordonnance du 23 mai 2013 du tribunal de grande instance de Paris, confirmée par l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 9 octobre 2014, l'existence du réseau de distribution sélective mis en place par les sociétés VORWERK a été établie,

- qu'ainsi que le relèvent les premiers juges, les appelants ne peuvent déduire du fait que les sociétés VORWERK ne connaissent pas leur mode d'approvisionnement, sur lequel ils refusent toujours de s'expliquer, que le réseau de distribution VORWERK n'est pas un réseau de distribution sélective, que leur réseau de distribution sélective basée sur des critères purement qualitatifs est licite,

- que les appelants ne justifient pas de la provenance de leur approvisionnement et ne démontrent pas que les appareils VORWERK qu'ils vendent sont des biens d'occasion, que l'état des produits résulte uniquement de leur caractère utilisé ou non, qu'en l'espèce, les appelants ne peuvent se prévaloir d'une quelconque utilisation dont les biens litigieux auraient fait l'objet, que plusieurs procès-verbaux établissent au contraire que des produits et consommables VORWERK vendus par les appelants sont présentés comme des appareils n'ayant jamais été utilisés ou comme des appareils neufs, figurant pour certains toujours dans leur emballage d'origine et ont été fabriqués quelques semaines plus tôt,

- que les époux X commercialisent par l'intermédiaire des sociétés AGM des produits neufs de la marque VORWERK alors qu'ils n'ont jamais été agréés par les sociétés VORWERK,

- que l'activité des époux X, exercée par l'intermédiaire de leurs deux sociétés constitue leur activité professionnelle principale, que la société AGM VERTRIEBS, désignée en tant que 'Service Center' / centre de réparation, se livre à des services de réparation et d'entretien de produits VORWERK à 1 euro, via le site ebay.fr, en l'absence de tout agrément,

- qu'il résulte de ce qu'il précède que les appelants ont commis en toute connaissance de cause des actes de concurrence déloyale,

- que, dans la mesure où les appelants persistent à vendre des appareils VORWERK neufs sur leur site internet mondial-shop.com postérieurement à l'interdiction qui leur en avait été faite par des décisions successives à compter du 16 février 2010, le prononcé d'une astreinte est nécessaire pour garantir le respect de l'interdiction de vendre des produits VORWERK neufs,

- que la preuve du nombre exact de biens VORWERK neufs vendus par les appelants sur la période considérée ne pourrait résulter que de l'examen de la comptabilité des sociétés défenderesses et de la connaissance de l'identité de ses fournisseurs,

- que le jugement rendu le 16 février 2010 par le tribunal de grande instance de Paris n'a toujours pas été totalement exécuté par les appelants en dépit des nombreux actes de recouvrement qui ont été mis en œuvre par huissier de justice, lesquels se sont pour la plupart avérées infructueux, que ces derniers sont parfaitement solvables mais de mauvaise foi,

- qu'ainsi que l'ont relevé les premiers juges, malgré l'interdiction qui leur en avait été faite par le jugement du 16 février 2010, renouvelée par un arrêt du 9 octobre 2014, par l'ordonnance de référé du 23 mai 2013 et par le jugement du tribunal de grande instance de Saverne du 7 avril 2017, et malgré leurs trois condamnations, les appelants ont poursuivi la vente des produits et consommables neufs des marques protégées VORWERK sur leur site internet mondial-shop.com, à domicile et au siège de la société AGM DIFFUSION, que les intimées ont été contraintes d'effectuer de très nombreuses démarches auprès des époux X et de la société AGM DIFFUSION, qu'il en résulte qu'un préjudice distinct du retard et résultant de la mauvaise foi des appelants est caractérisé, que la vente par internet et au siège de la société AGM DIFFUSION décrédibilise le modèle de vente historiquement mis en place par le groupe VORWERK depuis sa création, ceci d'autant plus que les appelants ont proposé à la vente des produits VORWERK neufs alors même qu'ils n'étaient pas encore commercialisés sur le territoire français,

- que la démonstration du fonctionnement des produits et consommables est en effet un élément essentiel, qui a pour objectif d'entourer la vente et le pacte d'achat d'un environnement inspirant la confiance, valorisant les produits et les consommables VORWERK et permettant un contact direct avec la clientèle pour l'informer et la conseiller sur leurs multiples fonctionnalités, qu'en outre, il apparaît qu'à plusieurs reprises les clients de la société AGM DIFFUSION ont pris attache avec la société VORWERK FRANCE, pensant que le site mondial-shop.com était un vendeur agréé de VORWERK et sollicitant la garantie et la réparation du d'un produit défectueux, qu'il y a donc bel et bien un risque de confusion auprès du public entre VORWERK France et mondial-shop.com, préjudiciable aux intimées, que les courriels des clients démontrent que ces clients n'ont pas obtenu une garantie satisfaisante de leurs produits VORWERK neufs achetés sur le site mondial-shop.com et sont donc très insatisfaits du produit et de la marque VORWERK, qu'il en va de même concernant les services d'entretien et de réparation fournis par la société AGM VERTRIEBS, celle-ci se présentant comme un grand spécialiste des produits VORWERK et procédant, en l'absence de toutes compétences et connaissances des produits VORWERK, sanctionnées par la délivrance d'un agrément, au remplacement de pièces détachées de produits VORWERK et aux prétendues réparations de ces derniers, qu'en outre, le fait que ces prestations soient proposées via le site ebay.fr dévalorise indéniablement la qualité des prestations fournies par les distributeurs agréés du réseau de distribution VORWERK au titre de l'entretien et/ou de la réparation des produits commercialisés par les intimées,

- qu'il en résulte un préjudice considérable quant à l'atteinte portée à l'image de marque et de la désorganisation du réseau, qu'en vendant depuis 2010 des produits et consommables VORWERK neufs, les appelants leur ont causé une perte de chiffre d'affaires évidente, qu'il a été constaté, uniquement dans le cadre de cette procédure, la commercialisation par les appelants de presque vingt produits VORWERK neufs, qu'en outre il a été démontré que de nombreux consommables et pièces détachées présentés sur le site mondial-shop.com comme neufs par les appelants ont été achetés, qu'il en résulte un manque à gagner considérable, que, si la vente en ligne d'appareils d'occasion est visiblement majoritaire, la vente d'appareils neufs n'est pas pour autant marginale et le stock est visiblement conséquent, que l'existence d'un manque à gagner est indubitable dès lors que si les appelants s'étaient abstenus, les biens auraient été acquis par l'intermédiaire du réseau de distribution sélective, qu'elles disposent de créances liquides et exigibles au titre de deux décisions de justice très partiellement exécutées à ce jour, qu'il est patent que le recouvrement de ces créances est menacé et que, dans ces conditions, il y a lieu de confirmer la saisie conservatoire totale de tout le stock des sociétés AGM DIFFUSION, AGM VERTRIEBS et des époux X.

La Cour se référera aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et de leurs prétentions respectives.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 04 Décembre 2020.

L'affaire a été appelée et retenue à l'audience du 11 janvier 2021, à laquelle les parties ont développé leur argumentation et déposé les pièces à l'appui de leurs allégations.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur la mise en cause de la société AGM VERTRIEBS :

En application de l'article 8.2 du règlement n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, une personne domiciliée sur le territoire d'un état membre peut être attraite, s'il s'agit d'une demande en intervention, devant la juridiction saisie de la demande originaire.

En l'espèce, la société AGM VERTRIEBS, dont le siège social est situé à Kehl en Allemagne, a été attraite par les sociétés du groupe VORWERK dans le litige les opposant aux époux X et à la société AGM DIFFUSION alors pendant devant le tribunal de grande instance de Saverne.

La Cour approuve les premiers juges d'avoir considéré que le tribunal de grande instance de Saverne, juridiction saisie de la demande originaire, était compétent pour statuer sur la mise en cause de la société AGM VERTRIEBS.

En outre, aux termes de l'article 325 du code civil, l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

Un lien suffisant est caractérisé lorsque les mêmes faits soutiennent deux actions possibles contre deux adversaires différents.

En l'espèce, les premiers juges ont constaté que la société AGM VERTRIEBS, dont le siège social est situé à Kehl en Allemagne, est gérée par Monsieur X qui se rend régulièrement sur place afin de récupérer de la marchandise VORWERK, qu'elle est désignée comme 'reparatur center' pour la marque VORWERK sur le site EBAY et que les sociétés du groupe VORWERK se prévalent de faits constitutifs de concurrence déloyale commis par les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS.

Par des motifs justes et pertinents que la Cour adopte, les premiers juges ont considéré que le lien avec le litige opposant les sociétés du groupe VORWERK aux époux X et leur société AGM DIFFUSION apparaissait ainsi suffisant de sorte que la mise en cause de la société AGM VERTRIEBS est recevable.

Sur la mise en cause de la société AGM DIFFUSION FRANCE :

En application de l'article 555 du code de procédure civile, la demande d'intervention forcée peut être régularisée en tout état de cause, y compris à hauteur de cour, quand l'évolution du litige implique cette mise en cause.

Pour la Cour de cassation, l'évolution du litige impliquant la mise en cause d'un tiers devant la cour d'appel, au sens de l'article 555 du code de procédure civile, n'est caractérisée que par la révélation d'une circonstance de fait ou de droit, née du jugement ou postérieur à celui-ci, modifiant les données juridiques du litige. Ainsi, ne constitue pas une évolution du litige l'élément connu de la partie avant la clôture des débats en première instance.

En l'espèce, il résulte du procès-verbal de constat du 17 octobre 2016 produit par les sociétés du groupe VORWERK que la société AGM DIFFUSION FRANCE procédait à cette date-là, c'est-à-dire antérieurement au jugement de première instance du 7 avril 2017, à la vente en ligne de produits VORWERK via le site mondial-shop.com. Dès lors, l'évolution du litige n'est pas caractérisée et la mise en cause de la société AGM DIFFUSION FRANCE est irrecevable.

Sur les actes de concurrence déloyale et de parasitisme :

Sur l'existence d'un réseau de distribution sélective :

Le Règlement d'exemption n° 2790/1999 du 22 cécembre 1999, visé dans les conclusions des parties intimées, concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, a été remplacé par le Règlement n° 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010 qui définit le réseau de distribution sélective comme le réseau dans lequel le fournisseur s'engage à vendre les biens ou les services contractuels, directement ou indirectement, uniquement à des distributeurs sélectionnés sur la base de critères définis et dans lequel ces distributeurs s'engagent à ne pas vendre ces biens ou ces services à des distributeurs non agréés.

Par ailleurs, le principe de l'autorité de la chose jugée, dont l'effet négatif est l'incontestabilité, interdit de remettre en cause ce qui a été définitivement jugé.

En l'espèce, ainsi que le relèvent les premiers juges, les produits et consommables de la marque VORWERK sont vendus uniquement par l'intermédiaire de distributeurs préalablement agréés qui réalisent une démonstration au domicile des personnes intéressées, puis entretenus et réparés le cas échéant par des techniciens de service après-vente dûment sélectionnés et formés.

En outre, les époux X, la SARL AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS ne peuvent déduire du fait que les sociétés du groupe VORWERK ne connaissent pas leur mode d'approvisionnement, sur lequel ils refusent de s'expliquer, que le réseau de distribution VORWERK n'est pas un réseau de distribution sélective.

Par ailleurs, le principe de l'autorité de la chose jugée concernant le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de Paris précité, implique que l'existence du réseau de distribution sélective mis en place par les sociétés du groupe VORWERK ne puisse plus être contestée.

Ainsi, dès le jugement définitif du 16 février 2010, l'existence du réseau de distribution sélective était acquise et, dans l'ordonnance du 23 mai 2013, confirmée par la cour d'appel sur ce point, il a été établi que les époux X mettaient en vente sur leur site des produits VORWERK neufs, ce qui constituait une atteinte au réseau de distribution sélective mis en place par la société VORWERK.

Au regard de ce qu'il précède, la Cour approuve les premiers juges d'avoir considéré que l'existence d'un réseau de distribution sélective était établie, aucun élément ne démontrant qu'au jour où la présente Cour statue ce réseau ne pouvait plus être qualifié de réseau de distribution sélective.

Sur la licéité et l'étanchéité du réseau de distribution sélective :

Le système de distribution sélective purement qualitatif consiste à agréer les revendeurs sur la seule base de critères objectifs requis par la nature du produit, de manière à ce que le réseau ait une image de marque uniforme, principalement pour les produits de haute technicité.

Il ne tombe pas sous le coup de l'article 101, § 1er, du traité de fonctionnement de l'Union européenne ou de l'article L. 420-1 du code de commerce, et est considéré comme licite, sous réserve qu'il respecte trois conditions cumulatives : la nature du produit en question doit être telle qu'un système de distribution sélective est nécessaire, les revendeurs doivent être choisis sur la base de critères objectifs de nature qualitative, qui sont fixés de manière uniforme pour tous, portés à la connaissance de tous les revendeurs potentiels et appliqués de façon non discriminatoire et les critères définis ne doivent pas aller au-delà de ce qui est nécessaire

En application de ces dispositions, il faut que les critères qualitatifs soient objectifs, fixés de manière uniforme pour tous les revendeurs potentiels, appliqués de façon non discriminatoire et proportionnés tant à la nature des produits en cause qu'à l'objectif recherché, tout en n'entraînant pas de restrictions non indispensables.

En l'espèce, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la mise en place d'un tel réseau est justifiée par la technicité des produits et consommables de la marque VORWERK qui nécessite que des démonstrations soient réalisées par le vendeur à domicile indépendant qui se déplace au domicile des personnes intéressées et est ainsi mieux à même de les conseiller dans le choix du produit et dans l'utilisation qui peut en être faite. Cette haute technicité requiert également un choix et une formation particulière des techniciens de service après-vente.

À ces justes et propres motifs que la Cour adopte, il convient d'ajouter que tous les revendeurs, sans distinction, sont choisis sur la base de critères objectifs de nature qualitative et proportionnés : ils doivent notamment avoir participé à une formation sur la démonstration à domicile à l'aide du matériel qui leur est fourni et la vente des produits et consommables VORWERK.

Le réseau de distribution sélective est donc licite.

Par ailleurs, le réseau doit être juridiquement étanche : d'un côté, le fournisseur ne s'engage à vendre qu'aux distributeurs sélectionnés et de l'autre, les distributeurs sélectionnés s'engagent à ne pas procéder à des ventes à des distributeurs non agréés.

Cependant, la validité d'un réseau de distribution sélective, n'est pas subordonnée à une étanchéité parfaite. L'existence de failles dans le réseau de distribution sélective et la présence de distributeurs parallèles ne sont pas de nature à empêcher la démonstration de la licéité du réseau.

En l'espèce, la Cour relève qu'il résulte des pièces produites aux débats que les sociétés du groupe VORWERK s'engagent à n'autoriser que les distributeurs agréés à procéder à la démonstration au domicile des personnes intéressées et à la vente des produits de la marque VORWERK dans ce cadre-là, et les réparateurs agréés à procéder à la réparation de ces produits le cas échéant. Corrélativement, ces distributeurs et réparateurs s'engagent à procéder eux-mêmes aux démonstrations et réparations.

En outre, ainsi que le précisent les premiers juges, les appelants ne démontrent pas que les produits VORWERK seraient vendus dans des centres commerciaux tels qu'ils allèguent, alors au demeurant que l'existence d'un réseau de distribution sélective ne fait pas obstacle à l'organisation d'opérations commerciales et de démonstrations dans la galerie marchande d'un centre commercial.

Le réseau de distribution sélective est donc étanche.

Sur la violation du réseau de distribution sélective en toute connaissance de cause :

Sur le caractère neuf des produits vendus :

Il résulte de la jurisprudence dans différents domaines du droit qu'un bien est d'occasion lorsqu'il a fait l'objet d'une utilisation.

En l'espèce, les pièces versées aux débats et notamment les pièces 26 à 28 produites par les intimées établissent que plusieurs produits de la marque VORWERK commercialisés par les appelants n'ont fait l'objet d'aucune utilisation, figurant pour certains toujours dans leur emballage d'origine et ont été fabriqués peu avant leur commercialisation.

En outre, les appelants allèguent que les biens litigieux seraient d'occasion car ils auraient été acquis auprès de particuliers sans apporter la preuve de leur véritable origine, alors pourtant que la preuve de la régularité de l'approvisionnement leur incombe.

Enfin, ainsi que le soulignent les premiers juges, l'attestation de l'expert-comptable de la société AGM DIFFUSION selon laquelle la société est soumise au régime fiscal applicable aux biens d'occasion n'est pas probante, dès lors qu'il n'est pas contesté que les biens vendus par le site mondial-shop sont pour certains réellement d'occasion.

Il y a donc lieu de considérer que les biens VORWERK commercialisés par les appelants sont essentiellement neufs.

Sur la vente de produits et consommables neufs hors réseau et les services d'entretien et de réparation hors réseau :

La vente fautive de biens relevant d'un réseau de distribution sélective par un revendeur non agréé par ce réseau est constitutive de concurrence déloyale et engage la responsabilité de son auteur sur le fondement de des articles 1240 et 1241 du code civil.

En l'espèce, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, la vente par les époux X, via leurs sociétés AGM DISTRIBUTION et AGM VERTRIEBS, d'appareils neufs fabriqués et distribués par le groupe VORWERK, postérieurement au jugement du 16 février 2010, résulte de nombreuses pièces versées aux débats.

A cet égard, les appelants ne peuvent légitimement soutenir que la vente entre particuliers n'est pas constitutive d'une violation d'une interdiction de revente hors réseau de distribution sélective, alors que leur activité, exercée par l'intermédiaire de leurs deux sociétés, relève du commerce et de la distribution à plus ou moins grande échelle, et constitue leur activité professionnelle principale.

Par ailleurs, une capture d'écran du site EBAY du 20 octobre 2015 présente le 'Centre de réparation AGM-VERTRIEBS' désigné comme 'Grand spécialiste des produits VORWERK' et invite les clients à lui faire parvenir les appareils en panne aux fins de réparation.

Il résulte notamment de cette pièce que la société AGM VERTRIEBS offre des services de réparation et d'entretien de produits VORWERK en violation du réseau de distribution sélective.

Sur la violation fautive du réseau de distribution sélective :

Le fait pour un distributeur hors réseau de commercialiser des produits relevant d'un système de distribution sélective est condamnable s'il s'accompagne d'une faute.

La Cour de cassation considère que la violation délibérée de l'étanchéité du réseau de distribution sélective constitue une faute. Ainsi, le distributeur parallèle engage sa responsabilité lorsqu'en connaissance de cause, il s'est approvisionné auprès d'un distributeur sélectionné ou a revendu des produits contractuels hors réseau.

En l'espèce, au regard des condamnations successives prononcées à l'encontre des époux X et de la société AGM DIFFUSION, ces derniers ainsi que la société AGM VERTRIEBS ne pouvaient ignorer l'existence de leur participation à la violation du réseau de distribution sélective mis en place par les sociétés du groupe VORWERK.

Il résulte de ce qu'il précède que les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS ont poursuivi en toute connaissance de cause la vente de produits VORWERK neufs et ont mis en place un véritable service après-vente, ce qui constitue également une violation délibérée du réseau de distribution sélective mis en place par les sociétés VORWERK.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que le comportement fautif des époux X, de la société AGM DIFFUSION et de la société AGM VERTRIEBS et des sociétés AGM engage leur responsabilité en application des articles 1382 et 1383 anciens du code civil, devenus 1240 et 1241.

Sur la demande d'interdiction de la vente de produits et consommables VORWERK sous astreinte :

Ainsi que l'ont rappelé les premiers juges, l'astreinte provisoire permet de garantir, pendant un temps donné, l'exécution de la décision mais l'interdiction elle-même n'est pas limitée dans le temps, contrairement à ce qu'affirme Monsieur X dans un échange de courriers avec le conseil des sociétés VORWERK.

Le juge détermine librement le montant et les modalités suivant lesquelles l'astreinte est calculée. Le montant de l'astreinte doit toutefois être fonction des facultés financières du débiteur, et tenir compte de l'objectif recherché, à savoir le contraindre à s'exécuter.

En l'espèce, dès lors qu'il est établi que malgré trois condamnations, en plus de celle prononcée par les premiers juges, les époux X ont persisté dans la vente de produits VORWERK neufs, il n'apparaît pas inutile de maintenir l'interdiction de tels agissements, de l'étendre à la société AGM VERTRIEBS et de renouveler l'astreinte provisoire nécessaire pour garantir le respect de cette interdiction.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a fait interdiction aux époux X, à la société AGM DIFFUSION et à la société AGM VERTRIEBS de vendre des produits VORWERK neufs, sous astreinte provisoire de 1 000 € par infraction constatée courant à l'expiration d'un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement de première instance et pendant un an, et s'est réservé la liquidation de l'astreinte.

Sur la demande de liquidation de l'astreinte provisoire à la somme de 1 000 euros :

En application de l'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel peut liquider l'astreinte prononcée par le jugement qui lui est déféré par la voie de l'appel, quand bien même le juge ayant ordonné astreinte s'en était expressément réservé le pouvoir.

Selon les dispositions de l'article L. 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, l'astreinte provisoire est liquidée en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter.

Enfin, il convient de rappeler que le caractère personnel de l'astreinte s'oppose à toute condamnation solidaire des débiteurs.

En l'espèce, les constats d'huissier réalisés les 21 et 26 août 2017 établissent que les appelants persistent à vendre des produits VORWERK neufs via le site mondial-shop.com après l'expiration d'un délai de quinze jours à compter de la signification du jugement de première instance.

La Cour rappelle que seuls les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS ont fait l'objet d'une interdiction sous astreinte, à l'exclusion de la société AGM DIFFUSION FRANCE qui n'avait pas été mise en cause en première instance.

Dans ces conditions, il y a lieu de liquider l'astreinte provisoire assortissant l'interdiction prononcée par le jugement du tribunal de grande instance de Saverne du 7 avril 2017 de vendre des produits VORWERK neufs à la somme de 1 000 euros, de condamner Monsieur X, Madame X. et la société AGM VERTRIEBS à verser chacun cette somme aux sociétés du groupe VORWERK.

Sur la demande de production de pièces :

Aux termes de l'article 11 du code de procédure civile, dans le cadre d'une instance en cours, lorsqu'une partie s'abstient de produire un élément de preuve, le juge peut lui enjoindre de le produire.

En l'espèce, les sociétés du groupe VORWERK sollicitent qu'il soit fait injonction aux appelants de produire les noms et adresses de leurs fournisseurs de produits et consommables VORWERK et tout document permettant notamment de déterminer le nombre total de produits et consommables VORWERK commercialisés par leurs soins.

Ainsi que le relèvent les premiers juges, la production des pièces sollicitées n'apparaît pas nécessaire à la résolution du litige, alors que toutes conséquences peuvent être tirées de l'abstention des époux X et de la société AGM VERTRIEBS

Il y a donc lieu de confirmer le jugement de première instance de ce chef.

Sur la demande en condamnation solidaire au paiement de la somme de 3 954,80 euros :

L'autorité de la chose jugée exprime l'impossibilité de soumettre à nouveau à un juge des prétentions qui ont déjà été tranchées à l'occasion d'une précédente instance.

Conformément aux dispositions de l'article 1355 du code civil, elle est conditionnée à la démonstration d'une triple identité entre la demande soumise au juge et celle qui a déjà été tranchée : il faut que la chose demandée soit la même, qu'elle soit fondée sur la même cause et qu'elle concerne les mêmes parties, prises en la même qualité.

En application de l'article 122 du code de procédure civile, dès lors que les conditions de l'article 1355 du code civil sont réunies, la demande en justice est irrecevable.

En l'espèce, pour fonder leur demande de constatation et fixation de créance solidaire et condamnation solidaire au paiement de la somme de 3 954,20 euros, les sociétés VORWERK expliquent qu'il s'agit du solde de la condamnation des époux X, prononcée par le tribunal de grande instance de Paris dans son jugement du 16 février 2010, qu'elles ne sont pas parvenues à recouvrer auprès de leurs débiteurs.

Dès lors que les sociétés VORWERK disposent d'ores et déjà d'un titre exécutoire de ce chef, il n'y a pas lieu de prononcer une nouvelle condamnation. Leur demande est irrecevable.

Il y a donc également lieu de confirmer le jugement de première instance de ce chef.

Sur la demande en réparation du préjudice résultant de la résistance abusive des époux X, de la SARL AGM DIFFUSION et de la société AGM VERTRIEBS :

En vertu de l'article 1231-6, alinéa 3 du code civil, dans l'hypothèse où le débiteur de mauvaise foi a causé au créancier un préjudice indépendant du simple retard dans l'exécution, des dommages et intérêts compensatoires peuvent être prescrits et leur montant dépend de l'étendue du préjudice souverainement appréciée par le juge.

Ceux-ci sont ainsi subordonnés à une double preuve : celle d'un préjudice indépendant du simple retard d'exécution et celle de la mauvaise foi du débiteur.

A cet égard, le préjudice peut consister dans le fait d'avoir été obligé d'engager des frais et d'effectuer des démarches.

En l'espèce, ainsi que le relèvent les premiers juges, plus de dix ans après le prononcé du jugement du tribunal de grande instance de Paris, les sociétés du groupe VORWERK ne sont pas parvenues à recouvrer l'intégralité des indemnités obtenues auprès des époux X qui n'ont jamais entendu exécuter spontanément cette condamnation.

En outre, il résulte des développements précédents que les époux X, directement et par l'intermédiaire de leurs sociétés AGM DIFFUSION et AGM VERTRIEBS, poursuivent la vente d'appareils neufs de la marque VORWERK et continuent à se charger du service après-vente et de la réparation de ces produits.

Dans ces conditions, la Cour approuve les premiers juges d'avoir considéré que le retard pris par les époux X dans le règlement des indemnités auxquelles ils ont été condamnés relève d'une mauvaise foi caractérisée qui contraint les créancières à engager de nombreux frais d'exécution, souvent en vain.

Dans ces conditions, il convient de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné solidairement les époux X, à payer aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 15 000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Sur la demande en réparation de l'atteinte à l'image de marque et de la désorganisation du réseau :

L'organisateur du réseau est fondé à se prévaloir de la notoriété des produits qu'il commercialise pour établir le préjudice résultant de l'atteinte à l'image de marque que lui occasionnaient les agissements du revendeur parallèle au regard des conditions de commercialisation s'affranchissant des exigences résultant de l'appartenance au réseau de distribution sélective.

Par ailleurs, l'entier dommage imputable à la faute doit être réparé, mais rien que le dommage.

En l'espèce, ainsi que le relèvent les premiers juges, de nombreux clients ayant acquis des produits VORWERK sur le site mondial-shop découvrent en contactant le service commercial de VORWERK FRANCE qu'ils ont contracté avec une société qui n'est pas reconnue par la marque.

Ainsi, une cliente se plaint d'avoir été contrainte de renvoyer par trois fois son aspirateur au SAV de mondial-shop avec deux mois de délais à chaque fois.

Il en résulte nécessairement une atteinte à l'image de la marque et une désorganisation si l'on considère qu'il appartient notamment aux salariés de VORWERK de répondre aux inquiétudes des clients de mondial-shop.

En outre, le réseau de distribution sélective mis en place dès l'origine par le groupe VORWERK a notamment pour objectif de fournir au client un appareil après démonstration de toutes les fonctionnalités de celui-ci. De même, le fait de s'assurer que l'entretien et les réparations ne pourront être effectués que par des techniciens spécialement formés participe à l'image de la marque.

Dans ces conditions, par de justes et propres motifs que la Cour adopte, les premiers juges ont considéré qu'en commercialisant les appareils VORWERK sur un site en ligne, sans démonstration ni explications, et en proposant un service après-vente sujet à reproche, les époux X, la SARL AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS nuisent à l'image de prestige du produit et troublent nécessairement le réseau de distribution.

La décision entreprise sera confirmée en ce qu'elle a condamné solidairement les époux X, la SARL AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à payer aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 50 000 euros de dommages-intérêts au titre de l'atteinte portée à l'image de marque et de la désorganisation du réseau, cette somme indemnisant justement le préjudice ainsi subi par les sociétés intimées.

Sur la demande en réparation du manque à gagner :

La désorganisation du réseau s'accompagnant d'une perte de clientèle peut exposer les sociétés victimes des actes de concurrence déloyale à une perte de chiffre d'affaires. Dans ce cas, ces dernières peuvent prétendre à la réparation du gain manqué.

La Cour de cassation réaffirme régulièrement que la réparation du préjudice doit correspondre à ce dernier et ne saurait être forfaitaire.

En l'espèce, ainsi que le relèvent les premiers juges, il résulte des nombreux constats d'huissier établis depuis 2010, ainsi que du rapport d'enquête privée effectué au mois de décembre 2012, que toutes les personnes ayant souhaité acquérir un appareil VORWERK neuf auprès des consorts D. ou sur le site internet mondial-shop ont pu le faire et ont reçu leur appareil, emballé dans les films plastiques et cartons d'origine.

En outre, si la vente en ligne d'appareils d'occasion est visiblement majoritaire, la vente d'appareils neufs n'est pas pour autant marginale et le stock est visiblement conséquent dès lors que les salariés, huissiers ou enquêteurs mandatés par VORWERK ont toujours pu acquérir l'appareil neuf souhaité. Les nombreuses allées et venues de Monsieur X en ALLEMAGNE au mois de décembre 2012 afin d'approvisionner l'espace commercial aménagé à son domicile le démontre également.

L'existence d'un manque à gagner est démontrée dès lors que si les époux X, et la société AGM VERTRIEBS s'étaient abstenus, les biens auraient été acquis par l'intermédiaire du réseau de distribution sélective.

En outre, une part non négligeable du chiffre d'affaires des époux X, de la SARL AGM DIFFUSION et de la société AGM VERTRIEBS résulte de la renommée de la marque VORWERK pour laquelle ils n'ont pas eu à investir.

Cependant, la preuve du nombre exact de biens VORWERK neufs vendus par les époux X, la SARL AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS sur la période considérée ne pourrait résulter que de l'examen de la comptabilité desdites sociétés et de la connaissance de l'identité de ses fournisseurs. En s'abstenant de produire les documents sollicités, elles font obstacle à cette démonstration et ne peuvent du même fait reprocher aux sociétés VORWERK de ne pas rapporter la preuve de leur préjudice.

Dans ces conditions, par de justes et propres motifs que la Cour adopte, les premiers juges ont considéré que l'existence d'un manque à gagner est établie.

Cependant aucun élément probatoire ne permet d'allouer la somme de 100 000 € sollicitée par les sociétés intimées qui ne modifient que le montant de leur demande par rapport à la première instance sans donner aucun autre justificatif concernant cette demande d'indemnisation.

Il convient de confirmer le jugement de première instance en ce qu'il a retenu que les époux X, la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS étaient tenus solidairement à payer aux sociétés du groupe VORWERK la somme globale de 30 000 euros de dommages-intérêts au titre du manque à gagner sur les appareils VORWERK, et en ce qu'il a condamné sous cette solidarité Madame D., la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à payer cette somme aux sociétés du groupe VORWERK.

Sur la confirmation de la saisie conservatoire :

Ainsi que le rappellent les premiers juges, l'article L. 522-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose que le créancier qui a obtenu ou possède un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la vente des biens qui ont été rendus indisponibles jusqu'à concurrence du montant de sa créance.

Il n'y a pas lieu de confirmer la saisie conservatoire dont le créancier peut poursuivre la conversion dès lors qu'il dispose d'un titre exécutoire.

Le jugement entrepris sera, en conséquence, confirmé de ce chef.

Sur les autres chefs de demande :

Monsieur X, Mme X., la société AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS succombant à titre principal supporteront les entiers dépens de l'appel.

L'équité commande d'allouer aux sociétés du groupe VORWERK une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité ne commande pas d'allouer à Monsieur X, à Mme X., à la société AGM DIFFUSION FRANCE, à la SARL AGM DIFFUSION et à société AGM VERTRIEBS une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

DECLARE la mise en cause de la société AGM DIFFUSION FRANCE irrecevable,

CONFIRME le jugement rendu le 7 avril 2017 par le tribunal de grande instance de Saverne,

Y AJOUTANT,

LIQUIDE l'astreinte provisoire assortissant l'interdiction prononcée par le jugement du tribunal de grande instance de Saverne du 7 avril 2017 de vendre des produits VORWERK neufs à la somme de 1 000 euros avec les intérêts au taux légal à compter de ce jour,

CONDAMNE Monsieur X, Madame X. et la société AGM VERTRIEBS à verser chacun, et respectivement à la SCS VORWERK FRANCE, la société de droit allemand VORWERK ELEKTROWERKE GMBH & CO.KG et la société de droit suisse VORWERK INTERNATIONAL AG la somme de 1 000 euros avec les intérêts au taux légal à compter de ce jour,

CONDAMNE in solidum Monsieur X, Mme X., la SARL AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS aux entiers dépens de l'appel,

CONDAMNE in solidum Monsieur X, Mme X., la SARL AGM DIFFUSION et la société AGM VERTRIEBS à verser à la SCS VORWERK FRANCE, la société de droit allemand VORWERK ELEKTROWERKE GMBH & CO.KG et la société de droit suisse VORWERK INTERNATIONAL AG la somme globale de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT n'y avoir lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de Monsieur X, Mme X., la SARL AGM DIFFUSION la société AGM DIFFUSION FRANCE et de la société AGM VERTRIEBS.

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