CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 1 avril 2021, n° 20/02572
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
New PLV (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Prigent
Conseillers :
Mme Soudry, Mme Lignières
Avocats :
Me Grignon Dumoulin, Me Bernabe
FAITS ET PROCÉDURE :
La société New PLV commercialise des solutions d'affichages numériques sur supports de type écrans plasma et LCD, destinées aux super et hypermarchés.
MM. X et Y ont été chargés par la société New PLV de commercialiser les espaces de publicité défilant sur ces écrans auprès de centres commerciaux de la grande distribution, notamment dans les centres Leclerc, à compter respectivement du 1er septembre 2008 et du 1er octobre 2014.
Ainsi plusieurs contrats ont successivement été conclus entre la société New PLV et M. X :
- un contrat cadre de régie publicitaire signé le 1er septembre 2008 (par la société Happysenior à travers laquelle exerçait à l'époque M. X), d'une durée déterminée prenant fin le 31 décembre 2009,
- un contrat cadre d'agent commercial signé le 26 novembre 2008, valable jusqu'au 31 décembre 2009, d'une durée déterminée prenant fin le 31 décembre 2009,
- un contrat cadre d'agent commercial signé le 19 janvier 2010, d'une durée déterminée prenant fin le 31 décembre 2010,
- un autre contrat cadre d'agent commercial signé le 1er janvier 2011, d'une durée déterminée prenant fin le 31 décembre 2011,
- un contrat de régie publicitaire signé le 3 janvier 2011, pour une durée indéterminée et pour tout le territoire national, dont l'article 15-5 précisait que ce contrat annulait et remplaçait tous accords écrits ou verbaux des parties relatifs au même objet.
Pour sa part, M. Y a été engagé verbalement en octobre 2014 par la société New PLV, dans les mêmes conditions que M. X, pour les sites Leclerc de Château Thierry (02) et de Chambly (60).
Le 16 décembre 2014, MM. X et Y ont eu un rendez-vous avec les dirigeants de la société Ad France, concurrente de la société New PLV.
Le 6 ou le 7 janvier 2015, M. Z, gérant de la société New PLV, a notifié oralement à MM. X et Y la rupture immédiate de leurs contrats en raison du caractère fautif selon lui de cette rencontre.
Par lettres recommandées avec demande d'avis de réception des 9 et 16 janvier 2015, MM. X et Y se sont opposés à cette décision et ont mis en demeure la société New PLV d'y renoncer sous 48 heures, ainsi que de leur payer leurs commissions échues.
Par lettres recommandées avec demande d'avis de réception des 21 et 27 janvier 2015, la société New PLV a confirmé à MM. X et Y la résiliation immédiate de leurs contrats, sans indemnités, au motif de leur manquement à leur obligation de loyauté.
Par lettres recommandées avec demande d'avis de réception des 7 et 10 février 2015, MM. X et Y ont contesté ce grief et fait valoir leur droit à être indemnisés de la rupture de leurs contrats d'agence commerciale, conformément aux articles L. 134-11 et L. 134-12 du code de commerce, ce, en vain.
Par suite, selon acte du 26 mars 2015, MM. X et Y ont assigné à bref délaXa société New PLV aux fins d'obtenir notamment réparation de leur préjudice résultant de la rupture de leurs contrats.
Par jugement du 2 décembre 2015, le tribunal de commerce de Paris a :
- dit recevable mais mal fondée l'exception d'incompétence territoriale soulevée in limine litis, et se déclare compétent pour connaître du litige sur le fond ;
- dit que MM. X et Y n'étaient pas liés à la société New PLV par un contrat d'agent commercial mais par un mandat d'intérêts communs ;
- condamné la société New PLV à payer à M. X et M. Y respectivement les sommes de 46 250 euros et 24 000 euros à titre d'indemnité de préavis ;
- dit que M. X et M. Y ont commis une faute grave et les a déboutés de leurs demandes de commissions récurrentes et de dommages intérêts ;
- condamné la société New PLV à payer à M. X la somme de 8 706,88 euros relative au mois de décembre 2014 ;
- débouté les parties de leurs demandes autres, plus amples ou contraires ;
- condamné la société New PLV à payer à MM. X et Y la somme de 3 000 euros à chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus ;
- ordonné l'exécution provisoire du jugement avec constitution de garantie, cette mention, initialement omise, ayant été ajoutée par arrêt rectificatif de la présente cour du 25 février 2016 ;
- condamné la société New PLV aux entiers dépens de l'instance.
Par arrêt du 15 mars 2018, la cour d'appel de Paris a :
- confirmé le jugement entrepris seulement concernant le rejet de l'exception d'incompétence, le principe de l'octroi d'indemnités compensatrices de préavis, la condamnation de la société New PLV à payer la somme de 8 706,88 euros à M. X au titre de ses commissions relatives au mois de décembre 2014, ainsi que les dépens et des indemnités aux demandeurs au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
L'infirmant pour le surplus,
- dit que MM. X et Y étaient liés à la société New PLV par des contrats d'agents commerciaux,
- dit que la rupture de ces contrats était imputable à la société New PLV,
- condamné la société New PLV à payer à M. X :
. la somme de 192 252 euros, à titre d'indemnité de rupture,
. la somme de 24 031,10 euros, à titre d'indemnité de préavis,
. la somme de 4 809,60 euros TTC, au titre des commissions relatives au mois de janvier 2015,
- les commissions dues sur l'ensemble des contrats de publicité conclus par M. X avant la date de la rupture versés au débat sous les pièces n° 21 et 22, dans les conditions prévues aux articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce,
- ordonné à la société New PLV de fournir mensuellement à M. X, à compter du mois de février 2015, un relevé de chiffre d'affaires sur les contrats versés au débat sous les pièces n° 21 et 22 jusqu'à la résiliation ou l'expiration de ces contrats, certifiés par un commissaire aux comptes, conformes à la comptabilité de la société New PLV, portant sur les opérations ouvrant droit à commissions récurrentes dans les conditions prévues par l'article L. 134-7 du code de commerce,
- condamné la société New PLV à payer à M. Y :
. 13 500 euros, à titre d'indemnité de rupture,
. 4 291,66 euros, à titre d'indemnité de préavis,
- les commissions dues sur l'ensemble des contrats conclus par M. Y avant la date de la rupture avec les annonceurs suivants :
- Les opticiens mutualistes (Leclerc Château Thierry) EURL Février (Leclerc Château Thierry),
- Etide ongles et beauté (Leclerc Château Thierry) Technibaie (Leclerc Château Thierry),
- MDP Menuiserie (Leclerc Château Thierry) MDP Menuiserie (Cora Soissons),
- Groupe Duchesne (Leclerc Château Thierry) B G (Leclerc Chambly),
- Mondial charpentes (Leclerc Chambly),
- SARL Petit Jean (Feu Vert) (Leclerc Chambly),
- Société R Construction (Leclerc Chambly),
- Clemauto (Leclerc Chambly),
Et versés au débat sous la pièce n° 35, dans les conditions prévues aux articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce,
- ordonné à la société New PLV de fournir mensuellement à M. Y, à compter du mois de janvier 2015, un relevé de chiffre d'affaires sur les contrats versés au débat sous la pièce n° 35 jusqu'à la résiliation ou l'expiration de ces contrats, certifiés par un commissaire aux comptes, conformes à la comptabilité de la société New PLV, portant sur les opérations ouvrant droit à commissions récurrentes dans les conditions prévues par l'article L. 134-7 du code de commerce,
Y ajoutant,
- déclaré irrecevable la demande de restitution de l'Ipad formé par la société New PLV à l'encontre de M. X,
- rejeté toutes les autres demandes,
- condamné la société New PLV aux dépens, en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration du 31 janvier 2020, MM. X et Y ont saisXa cour d'une requête en interprétation relativement à l'arrêt du 15 mars 2018 expliquant qu'une divergence d'interprétation dudit arrêt les opposait à la société New PLV quant aux modalités de calcul des commissions dues empêchant l'exécution de la décision.
Dans leurs dernières conclusions du 7 janvier 2011, MM. X et Y demandent à la cour de :
- juger que les condamnations prononcées à l'encontre de la société New PLV au paiement des commissions au titre des articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce portent sur l'ensemble des contrats de vente d'espaces publicitaires visés par les pièces n° 21 et 22 pour M. X ou nommément listés pour M. Y dans le dispositif de l'arrêt jusqu'à leur résiliation ou leur expiration ;
En conséquence,
- juger qu'il n'y a pas lieu de déterminer les contrats ouvrant droit à commissions pour la fixation du montant des commissions dues au titre des articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce dès lors qu'il s'agit de contrats de vente d'espace publicitaires conclus avant la cessation du contrat d'agence et que le dispositif ne prévoit aucune limitation de délai autre que la résiliation ou l'expiration des contrats de vente d'espace publicitaires ;
- juger que le montant des commissions dues au titre des articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce peut être fixé au vu des éléments d'informations ordonnés par la cour dans le dispositif de son arrêt du 15 mars 2018 sans qu'il soit nécessaire de renvoyer les parties devant le juge du fond pour liquider les droits à commissions de MM. X et Y,
- condamner la société New PLV à payer à MM. X et Y la somme de 2 500 euros chacun au titre de l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions du 6 janvier 2021, la société New Plv demande à la cour de :
- dire n'y avoir lieu à interprétation de l'arrêt de la cour d'appel du 15 mars 2018 s'agissant des modalités de calcul des commissions litigieuses, lequel est régi par les articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce et non par les stipulations du contrat de régie publicitaire du 3 janvier 2011, MM. Y et L bénéficiant du statut d'agent commercial ;
- dire qu'il est nécessaire de déterminer, avant tout calcul, les contrats ouvrant expressément droit à commission dans la mesure où la cour a, conformément à l'article L. 134-7 du code de commerce, limité ce droit aux contrats conclus « dans un délai raisonnable », sans autre précision, et qu'à défaut d'accord entre les parties, cette fixation devra être arrêtée par le juge du fond, lequel liquidera, le cas échéant, les droits à commission en application des articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce,
- condamner MM. Y et L à verser, chacun, à la société New PLV une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner in solidum MM. Y et L aux dépens qui seront recouvrés par Me Bernabe, avocat postulant.
La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Selon l'article 461 du code de procédure civile, il appartient à tout juge d'interpréter sa décision si elle n'est pas frappée d'appel.
La demande en interprétation est formée par simple requête de l'une des parties ou par requête commune. Le juge se prononce les parties entendues ou appelées.
Saisi par les parties d'une requête en interprétation, le juge ne peut, sous prétexte de déterminer le sens de sa décision, modifier les droits et obligations consacrés par celle-ci.
SXes juges ne peuvent, sous prétexte d'interpréter leurs décisions, les modifier, y ajouter ou les restreindre, il leur appartient d'en fixer le sens et d'en expliquer les dispositions dont les termes ont donné lieu à quelques doutes.
Sur les contrats, objets de la condamnation
En l'espèce, les parties s'opposent tout d'abord quant à la portée des condamnations de la société New PLV à payer :
- à M. X les commissions dues sur l'ensemble des contrats de publicité conclus par lui avant la date de la rupture versés au débat sous les pièces n° 21 et 22, dans les conditions prévues aux articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce,
- à M. Y les commissions dues sur l'ensemble des contrats conclus par lui avant la date de la rupture avec les annonceurs suivants :
- Les opticiens mutualistes (Leclerc Château Thierry) EURL Février (Leclerc Château Thierry),
- Etide ongles et beauté (Leclerc Château Thierry) Technibaie (Leclerc Château Thierry),
- MDP Menuiserie (Leclerc Château Thierry) MDP Menuiserie (Cora Soissons),
- Groupe Duchesne (Leclerc Château Thierry) B G (Leclerc Chambly),
- Mondial charpentes (Leclerc Chambly),
- SARL Petit Jean (Feu Vert) (Leclerc Chambly),
- Société R Construction (Leclerc Chambly),
- Clemauto (Leclerc Chambly),
Et versés au débat sous la pièce n° 35, dans les conditions prévues aux articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce.
MM. X et Y prétendent que ces condamnations visent tous les contrats de vente d'espaces publicitaire conclus avant la cessation de leur contrat d'agence commerciale et que ces contrats comprennent à la fois les contrats en cours au moment de la fin du contrat d'agence commerciale et s'étant poursuivis postérieurement mais aussXes contrats renouvelés postérieurement. Ils soutiennent que le dispositif du jugement est très clair sur ce point, en ne prévoyant aucune limitation de délai autre que la résiliation ou l'expiration des contrats de vente d'espaces publicitaires, et qu'il n'y a pas lieu à interprétation de ce chef.
La société New PLV soutient que le dispositif de l'arrêt limite le droit à commission aux contrats conclus dans un délai raisonnable après la fin du contrat d'agence commerciale. Elle affirme que l'ensemble des commissions correspondant aux contrats publicitaires conclus avant la cessation du contrat d'agence commerciale ont été réglées et que les éventuelles commissions auxquelles sont susceptibles de prétendre MM. X et Y sont relatives à des contrats publicitaires conclus, après la rupture des contrats d'agence commerciale, grâce à leur intervention à condition que ces contrats aient été conclus dans un délai raisonnable. Elle fait valoir que sont compris dans ces contrats, les contrats publicitaires renouvelés après la fin des contrats d'agence commerciale dès lors qu'il s'agit de nouveaux contrats. Elle considère qu'en cas de désaccord avec les parties adverses sur les contrats conclus dans un délai raisonnable après la fin des contrats d'agence commerciale, il conviendra d'introduire une nouvelle instance.
Les dispositions de l'arrêt litigieux ne permettant pas de répondre de manière évidente à cette question, il y a matière à interprétation.
Afin d'interpréter la portée de la décision litigieuse sur ce point, il convient de se référer tout d'abord aux dernières conclusions des parties.
Ainsi dans leurs dernières conclusions du 10 janvier 2018, MM. X et Y, ont notamment demandé à la cour de :
. condamner la société New PLV à payer à M. X 150 000,00 euros, majorés de la TVA, à titre de provision sur les commissions récurrentes dues sur les contrats apportés par M. X à compter du mois de février 2015 jusqu'au prononcé de la décision par la cour, sauf à parfaire,
. condamner également la société New PLV à régler les commissions dues sur l'ensemble des contrats de publicité conclus par M. X avant la date de rupture versés au débat sous les pièces n° 21 et 22, dans les conditions prévues par l'article 7 du contrat de régie publicitaire signé le 3 janvier 2011, pendant toute la durée des contrats et en cas de renouvellement du contrat, sur la durée du renouvellement jusqu'à expiration du contrat ;
. ordonner à la société New PLV de fournir mensuellement à M. X à compter du mois de janvier 2015 un relevé de chiffre d'affaires sur les contrats versés au débat sous les pièces n° 21 et 22 jusqu'à la résiliation ou l'expiration de ces contrats, certifiés par un commissaire aux comptes conformes à la comptabilité de la société New PLV, sous astreinte de 5 000 euros par relevé mensuel omis après une mise en demeure restée infructueuse ;
. condamner la société New PLV à payer à M. Y les commissions dues sur l'ensemble des contrats de publicité conclus par lui avant la date de rupture avec les annonceurs suivants :
- Les opticiens mutualistes (Leclerc château Thierry),
- EURL Février (Leclerc château Thierry),
- Étide ongles et beauté (Leclerc château Thierry),
- Technibaie (Leclerc château Thierry),
- MDP menuiserie (Leclerc château Thierry),
- MDP menuiserie (Cora Soissons),
- A Y (Leclerc château Thierry),
- B Z (Leclerc Chambly),
- Mondial charpentes (Leclerc Chambly),
- SARL petitjean (Feu vert) Leclerc Chambly,
- Société R construction (Leclerc Chambly),
- Clemauto (Leclerc Chambly),
Et versés au débat sous la pièce n° 35, dans les conditions prévues par l'article 7 du contrat de régie publicitaire signé le 3 janvier 2011 entre M. X et la société New PLV pendant toute la durée des contrats et en cas de renouvellement, sur la durée du renouvellement jusqu'à expiration du contrat.
- ordonner à la société New PLV de fournir mensuellement à M. Y à compter du mois de janvier 2015 un relevé de chiffre d'affaires sur les contrats versés au débat sous la pièce n° 35 jusqu'à la résiliation ou l'expiration de ces contrats, certifiés par un commissaires aux comptes conformes à la comptabilité de la société New PLV, sous astreinte de 2 000 euros par relevé mensuel omis après une mise en demeure restée 15 jours infructueuse ;
Dans ses dernières conclusions du 8 janvier 2018, la société New PLV a notamment demandé à la cour de :
Vu les articles 10 et 11 du contrat de régie publicitaire unissent la société New PLV à M. X,
- confirmer le jugement quant au rejet du paiement des commissions de récurrence de M. X,
- dire et juger qu'aucune commission de récurrence n'est due au régisseur en question,
- constater en tout état de cause le caractère inexact des commissions de récurrence pour M. X,
- écarter également toute demande de commissions récurrentes de M. Y à raison des manquements graves commis dans l'exercice de sa relation contractuelle avec la société New PLV.
Ensuite, il convient de se reporter aux motifs de l'arrêt litigieux qui précise, sur la question des commissions restant dues, après avoir visé les dispositions des articles L. 134-6, L. 134-7 et R. 134-3 du code de commerce, que :
« En revanche, M. X sera débouté de sa demande de paiement d'une provision de 150 000 euros à valoir sur son droit à commissions récurrentes échues de février 2015 jusqu'au présent arrêt, sauf à parfaire, compte tenu de son imprécision et de ce que ce droit se trouve strictement limité dans le temps par l'article L. 134-7, portant sur les opérations conclues « dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat », et n'a pas pour effet d'instituer une rente viagère au profit de l'agent commercial, ainsi que celui-ci paraît le croire.
En revanche, il sera fait droit aux autres demandes formées concernant les commissions afférentes, conformément aux modalités prévues au dispositif, une astreinte n'apparaissant pas nécessaire. Le paiement de ces commissions sera régi par les articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce et non par les stipulations du contrat de régie publicitaire conclu le 3 janvier 2011 entre New PLV et M. X, puisque ce dernier bénéficie du statut d'agent commercial.
De même, concernant M. Y, il sera fait droit à ses demandes conformément aux modalités prévues au dispositif.
Enfin, il n'y a pas lieu à annulation de la clause 11-2 du dernier contrat de régie publicitaire conclu entre New PLV et M. X, dont l'existence n'empêche pas que ce dernier bénéficie du statut d'agent commercial. »
Il sera ainsi relevé qu'alors que M. X sollicitait la condamnation de la société New PLV à régler les commissions dues sur l'ensemble des contrats de publicité conclus par lui avant la date de rupture versés au débat sous les pièces n° 21 et 22, dans les conditions prévues par l'article 7 du contrat de régie publicitaire signé le 3 janvier 2011, pendant toute la durée des contrats et en cas de renouvellement du contrat, sur la durée du renouvellement jusqu'à expiration du contrat, la cour a dit que le droit à commission de M. X devait être régi par les articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce, et non par les stipulations du contrat de régie publicitaire conclu le 3 janvier 2011.
Cette dernière précision fait nécessairement référence à l'article 11.2 du contrat de régie publicitaire du 3 janvier 2011 qui prévoyait, à titre d'indemnisation résultant de la fin du contrat, que : « Après la fin du contrat, le mandant continuera à verser au régisseur les commissions (telles que définies en article 7) portant sur les sommes versées par les annonceurs au titre de commandes en cours apportées par le régisseur ainsi que des renouvellements (sans interruption) desdites commandes. Aucune commission ne sera due sur les commandes expirées ou résiliées et non renouvelées sans période d'interruption.
A titre de condition déterminante dans la conclusion des présentes et d'un commun accord entre les parties, le versement des commissions après la cessation du contrat (i) ne sera soumis à aucune condition préalable de la part du régisseur et (ii) constitue la seule indemnisation due par le mandant au régisseur en raison de l'expiration ou de la résiliation du contrat, pour quelle que cause que ce soit, à l'exclusion de tout autre dommage et intérêt ou toute autre indemnité sur quelque fondement et pour quelle que cause que ce soit ».
Cette interprétation ressort des motifs de l'arrêt litigieux qui expliquent que le droit à « commission récurrente » est strictement limité dans le temps par l'article L. 134-7 du code de commerce et ne peut porter que sur les opérations conclues dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat et qui a dit n'y avoir lieu à annulation de la clause 11.2 du contrat de régie publicitaire tout en en écartant l'application dès lors que M. X était soumis au statut de l'agent commercial et donc aux dispositions de l'article L. 134-7 du code de commerce.
En effet, dès lors que M. X avait été indemnisé, dans le cadre des dispositions relatives au statut des agents commerciaux, au titre de la rupture de son mandat, il ne pouvait prétendre cumuler cette indemnité avec l'indemnisation résultant de la fin du contrat prévue à l'article 11.2 du contrat de régie publicitaire et ne pouvait solliciter que le paiement des commissions dues dans les conditions des articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce.
Par ailleurs, selon les termes mêmes de l'arrêt, qui précise que « l'article L. 134-7 du code de commerce consacre le droit de suite ou le principe des commissions récurrentes », la notion de « commission récurrente » telle qu'employée par la cour vise uniquement les opérations commerciales conclues après la cessation du contrat d'agence et cette notion exclut donc les opérations commerciales conclues avant la cessation du contrat d'agence commerciale mais se poursuivant postérieurement, opérations qui relèvent dès lors de l'article L. 134-6 du code de commerce.
S'agissant du cas d'espèce, sXa décision litigieuse fait droit « aux autres demandes formées concernant les commissions afférentes », c'est à dire aux demandes de M. X, autres que la demande de provision au titre des commissions récurrentes, concernant « les commissions dues sur l'ensemble des contrats de publicité conclus par M. X avant la date de rupture, pendant toute la durée des contrats et en cas de renouvellement du contrat, sur la durée du renouvellement jusqu'à expiration du contrat », la cour n'y fait droit que dans les termes des articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce.
Or, en l'espèce, la notion d'opération commerciale doit s'entendre des contrats de vente d'espaces publicitaires. Ainsi qu'il ressort des pièces versées aux débats, ces contrats sont conclus pour une durée allant de 12 mois à 48 mois avec clause de reconduction tacite. Dans la mesure où la reconduction tacite d'un contrat s'analyse en un nouveau contrat et non en une prorogation du contrat initial, les contrats d'espaces publicitaires conclus avant la cessation du contrat d'agence commerciale et renouvelés après relèvent des dispositions de l'article L. 134-7 du code de commerce de sorte que l'arrêt litigieux doit être interprété en ce sens que ces contrats n'ouvrent droit à « commission récurrente » que s'ils ont été conclus dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat d'agence commerciale.
En revanche, ainsi qu'il a été indiqué ci-dessus, en ce qui concerne les contrats publicitaires conclus avant la cessation du contrat d'agence commerciale mais s'étant poursuivis postérieurement, la décision litigieuse doit être interprétée en ce sens que ces opérations relèvent de l'article L. 134-6 du code de commerce et ouvrent droit à commission pendant toute la durée du contrat publicitaire.
Sur le calcul des commissions
Ensuite les parties s'opposent quant aux modalités de calcul des commissions litigieuses.
La société New PLV prétend que la cour d'appel, dans sa décision, a expressément exclu les stipulations du contrat de régie publicitaire du 3 janvier 2011, que les commissions litigieuses doivent être calculées selon les articles L. 134-6 et L. 134-7 du code de commerce qui renvoient à l'article L. 134-5 du code de commerce et que le juge du fond, en cas de désaccord des parties, liquidera les droits à commission.
MM. X et Y affirment que lesdites commissions doivent être calculées selon les dispositions de l'article 7.1 du contrat de régie publicitaire signé le 3 janvier 2011 et qu'il n'y a pas lieu de saisir le juge du fond pour les liquider.
Il ressort des conclusions des parties et des motifs de la décision litigieuse que la question du calcul des commissions n'a pas été discutée devant la cour de sorte qu'elle ne s'est pas prononcée sur ce point et qu'il n'y a pas lieu à interprétation de ce chef.
Les dépens resteront à la charge du Trésor public. Les demandes formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
Vu l'arrêt du 15 mars 2018 ;
DIT que l'arrêt du 15 mars 2018 doit être interprété en ce sens que :
les contrats d'espaces publicitaires conclus avant la cessation des contrats d'agence commerciale de MM. X et Y et renouvelés après relèvent des dispositions de l'article L. 134-7 du code de commerce et n'ouvrent droit à « commission récurrente » que s'ils ont été conclus dans un délai raisonnable à compter de la cessation du contrat d'agence commerciale ;
les contrats publicitaires conclus avant la cessation du contrat d'agence commerciale de MM. X et Y mais s'étant poursuivis postérieurement relèvent de l'article L. 134-6 du code de commerce et ouvrent droit à commission pendant toute la durée initialement prévue du contrat publicitaire ;
DIT n'y avoir lieu à interprétation quant aux modalités de calcul des commissions litigieuses ;
DÉBOUTE les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
LAISSE les dépens à la charge du Trésor public.