Cass. 3e civ., 10 juin 1980, n° 79-13.330
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cazals
Rapporteur :
M. Francon
Avocat général :
M. Simon
Avocat :
M. Choucroy
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Epipress fait grief à l'arrêt attaque (Paris, 6 mars 1979) d'avoir refusé de surseoir à statuer sur l'action en révision du prix d'un contrat qualifie de crédit-bail immobilier que lui a consenti la société bail-investissement, jusqu'à la solution d'une instance pénale pendante à la suite d'une information ouverte contre ce bailleur, alors, selon le moyen, que la règle " le criminel tient le civil en état " impose aux juges civils de surseoir à statuer jusqu'à décision définitive sur l'instance pénale chaque fois que la solution à intervenir sur l'action publique est de nature à exercer une influence sur le sort du procès-civil ; que, quel qu'ait pu être le motif d'un preneur lors de son entrée dans les lieux, il n'aurait pas souscrit le contrat et accepté ses clauses s'il n'avait été trompé par les manœuvres de son cocontractant ; d'où il suit que la cour d'appel, qui rappelle que les faits visés dans la plainte concernaient le contrat litigieux, ne pouvait refuser de surseoir à statuer jusqu'à décision définitive sur l'instance pénale laquelle pouvait révéler des éléments propres à justifier la demande ;
Mais attendu que la cour d'appel, saisie d'une demande en révision du loyer, retient qu'une telle action procède de faits différents de ceux qui motivent la plainte pénale ; qu'elle en déduit exactement qu'il n'y avait pas lieu de surseoir à statuer ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Epipress fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que les dispositions de l'article 28 du décret du 30 septembre 1953 ne pouvaient s'appliquer à la convention de crédit-bail immobilier conclue avec la société bail-investissement et d'avoir, en conséquence, rejeté sa demande en révision, alors, selon le moyen, que d'une part, appelés a trancher une contestation dont le sort dépend directement de la qualification du contrat, les juges du fond ne peuvent s'attacher à la seule qualification adoptée par les parties, laquelle se réfère a une institution mettant en jeux deux types distincts de contrat, sans exercer leur propre contrôle sur la réunion des éléments légaux du contrat qu'ils retiennent ; d'où il suit qu'en l'état de la signature par les parties d'un contrat de crédit-bail, la cour d'appel ne pouvait se borner à retenir cette qualification sans vérifier si les éléments légaux d'un tel contrat étaient bien réunis en l'espèce, alors, d'autre part, que jusqu'au moment où s'opère le transfert de propriété par l'effet de la levée de l'option, les parties se trouvent simplement dans les liens d'une location de locaux à usage commercial à laquelle est adjointe une simple promesse de vente ; que, par suite, tant que la vente n'est pas conclue, l'ensemble des règles d'ordre public du statut des baux commerciaux s'appliquent et notamment celles relatives à la révision du loyer, dont l'application n'est pas incompatible avec les dispositions conventionnelles relatives à un amortissement du capital ;
Mais attendu, d'une part, que l'arrêt révèle que la société Epipress ne conteste pas être liée à la société bail-investissement par un contrat de crédit-bail immobilier ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt énonce à ce bon droit que si la convention de crédit-bail immobilier peut faire appel à des éléments empruntés à d'autres contrats, elle constitue une institution juridique particulière tendant essentiellement à l'acquisition de la propriété des murs ; que la cour d'appel en déduit exactement que les dispositions du décret du 30 septembre 1953 ne lui sont pas applicables ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs :
Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 6 mars 1979 par la cour d'appel de Paris.