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Décisions

Cass. 3e civ., 6 décembre 1995, n° 94-10.611

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Beauvois

Rapporteur :

Mme Borra

Avocat général :

M. Baechlin

Avocats :

Me Balat, SCP Delaporte et Briard

Paris (16e ch B), du 15 oct. 1993

15 octobre 1993

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 octobre 1993), que les consorts Y..., qui avaient donné à bail à la société "Les Grands Bains Simart" des locaux à usage commercial de bains-douches, lui ont délivré congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer plus élevé ;

qu'avant que le loyer ne soit judiciairement fixé les bailleurs ont exercé leur droit d'option et refusé le renouvellement en sollicitant la fixation du montant d'une indemnité d'éviction ;

Attendu que la société locataire fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à faire constater la nullité de la notification du droit d'option et l'irrecevabilité de la demande en fixation de l'indemnité d'éviction, alors, selon le moyen, "que le droit d'option prévu à l'article 31 du décret du 30 septembre 1953 peut faire l'objet d'une renonciation par le bailleur dès lors que celui-ci manifeste une volonté non équivoque de renoncer à son droit ;

qu'ainsi, la cour d'appel ayant constaté l'existence d'augmentations contractuelles de la part des bailleurs, à compter de la délivrance du congé avec offre de renouvellement, n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, en décidant qu'aucune renonciation n'était intervenue alors que l'augmentation des loyers constituait une manifestation non équivoque de la part des bailleurs caractérisant la renonciation à son droit d'option ;

qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé, par refus d'application, le texte susvisé, ensemble l'article 1134 du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant retenu que les consorts Y... avaient, à l'origine de la procédure, accepté le renouvellement du bail, en procédant à compter de la date du renouvellement à des augmentations contractuelles, la cour d'appel a pu relever qu'ils n'avaient pas, pour autant, renoncé à leur droit d'option qui demeurait entier, tant qu'aucun accord ni décision définitive n'étaient intervenus sur le montant du loyer ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société "Les Grands Bains Simart" fait grief à l'arrêt de fixer à 1 319 090 francs le montant de l'indemnité d'éviction, alors, selon le moyen, "qu'aux termes de l'article 8 du décret du 30 septembre 1953, le montant de l'indemnité d'éviction est égal au préjudice causé par le défaut de renouvellement du bail au locataire ;

qu'à cet égard, lorsque l'absence de renouvellement entraîne la perte du fonds, les juges doivent apprécier la valeur du fonds exercé dans les locaux pour fixer l'indemnité d'éviction à la date où ils statuent ;

qu'ainsi, la cour d'appel ayant écarté les conclusions de l'expert ainsi que les documents comptables produits aux débats par le locataire pour défaut de sincérité, en se bornant à viser la faible rentabilité du fonds, le caractère modeste des installations et l'absence de salariés, pour minorer le montant de l'indemnité proposée par l'expert, sans préciser aucunement les documents desquels elle avait déduit les caractéristiques ainsi visées, a privé de base légale l'arrêt attaqué, violant le texte susvisé" ;

Mais attendu qu'ayant relevé que si les bilans produits par la locataire au cours de l'expertise reflétaient des résultats relativement élevés pour les deux dernières années, la sincérité de ces chiffres ne pouvait être vérifiée et que la société locataire ne les avaient pas actualisés par la remise de bilans plus récents, la cour d'appel, qui, sans être tenue de suivre l'ensemble des conclusions de l'expert, a souverainement retenu, au vu des documents qui lui étaient soumis, que la valeur brute des installations et du matériel était pratiquement inexistante et que la faible rentabilité du fonds ainsi que l'absence de salariés conduisaient à une évaluation modeste de la valeur vénale du fonds, a légalement justifié sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.