Cass. 3e civ., 19 avril 2000, n° 98-13.396
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beauvois
Rapporteur :
M. Bourrelly
Avocat général :
M. Sodini
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez
Sur le pourvoi formé par M. Harold Y..., ayant demeuré ..., et aux droits duquel vient Mme Béatrice A..., qui a déclaré par conclusions reprendre l'instance en qualité d'héritière de M. Y...,
en cassation d'un arrêt rendu le 21 janvier 1998 par la cour d'appel de Paris (16e chambre civile, section A), au profit de M. Pierre X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 mars 2000, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Bourrelly, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Boscheron, Toitot, Mmes Di Marino, Stéphan, MM. Peyrat, Guerrini, Dupertuys, Philippot, conseillers, M. Pronier, conseiller référendaire, M. Sodini, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Bourrelly, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme A..., de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de M. X..., les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 janvier 1998), que M. Y..., ayant renouvelé le bail de locaux affectés aux activités de brocanteur, décorateur, artiste-peintre, faisant valoir que M. X..., le preneur, n'était pas immatriculé au registre du commerce, lui a donné congé pour le terme du contrat avec refus du droit au statut des baux commerciaux ;
Attendu que Mme A... fait grief à l'arrêt de décider que M. X... est en droit de se prévaloir du droit au renouvellement du bail sur le fondement de l'extension volontaire du statut des baux commerciaux, et de recevoir une indemnité d'éviction, alors, selon le moyen,
"1°) que conformément à l'article 1er du décret du 30 septembre 1953, la soumission volontaire à tout ou partie des dispositions de ce texte d'un bail qui n'est pas inclus dans son champ d'application, ne peut se déduire, sauf déclaration expresse du bailleur, de la conformité des clauses du bail à certaines des dispositions du statut des baux commerciaux ; qu'il ne peut en être déduit que le bailleur a ainsi renoncé à se prévaloir, en fin de bail, du défaut d'immatriculation au registre du commerce du preneur ; qu'en énonçant que le bail comportait des clauses habituelles d'un bail commercial et que le bailleur s'était soumis, lors de la délivrance des congés et de la révision du loyer, au décret du 30 septembre 1953 pour en déduire que le contrat était soumis au statut des baux commerciaux, la cour d'appel a violé la disposition susvisée ;
2°) qu'à défaut de renonciation expresse, par le bailleur, à se prévaloir, en fin de bail, d'un défaut d'immatriculation au registre du commerce du preneur, la soumission des parties à certaines des dispositions issues du décret du 30 septembre 1953 ne prive pas le bailleur de la faculté de refuser de payer, au preneur évincé, une indemnité d'éviction ; qu'en décidant que le bailleur avait implicitement mais nécessairement renoncé à se prévaloir de la cause d'exclusion du statut des baux commerciaux tirée de l'absence d'immatriculation au registre du commerce du preneur, la cour d'appel a violé les articles 1er et 8 de décret du 30 septembre 1953 ;
3°) que conformément à l'article 4 du décret du 30 septembre 1953, le droit au renouvellement du bail et le droit pour le preneur de recevoir une indemnité d'éviction s'apprécient à la date de délivrance du congé et c'est à cette date que doit s'apprécier l'éventuelle renonciation, par le bailleur, du droit de se prévaloir du défaut d'immatriculation au registre du commerce du preneur ; qu'en se déterminant, pour imposer au bailleur le paiement d'une indemnité d'éviction en considération de circonstances de fait antérieures à la délivrance du congé pour affirmer la renonciation implicite mais nécessaire du bailleur à se prévaloir du défaut d'immatriculation au registre du commerce du preneur, la cour d'appel a violé la disposition susvisée" ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a justement retenu que les parties avaient placé de façon non équivoque ce contrat sous le régime du décret du 30 septembre 1953, et constaté, abstraction faite de motifs surabondants, que le bail avait été renouvelé deux fois à la suite de congés "locaux commerciaux", et que M. Y... avait écrit à M. X... que la loi sur les baux commerciaux l'obligeait à lui envoyer un congé six mois à l'avance, a pu en déduire que le bailleur avait renoncé tacitement mais de façon certaine et en connaissance de cause à se prévaloir, dans l'hypothèse de l'affectation des locaux à l'activité d'artiste-peintre, de la cause d'exclusion du statut tirée de l'absence d'immatriculation du locataire au registre du commerce ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.