Cass. com., 3 mai 2011, n° 10-18.031
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Rapporteur :
M. Rémery
Avocat général :
M. Bonnet
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Waquet, Farge et Hazan
Donne acte à M. X..., tant en son nom personnel qu'ès qualités, à M. et Mme Y... et à M. et Mme Z... ainsi qu'à la société Carlier investissement pêche du désistement de leur pourvoi, en ce qu'il est formé à l'encontre de la société Viking investissement, aujourd'hui représentée par son liquidateur judiciaire ;
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, qu'entre 1992 et 1994, la société Viking investissement (société Viking) a promis à M. X..., à Mme A..., épouse X..., à M. et Mme Y... et à M. et Mme Z... ainsi qu'à la société Carlier investissement pêche (les quirataires), détenant des quirats dans les copropriétés des navires Clipper II, Viking V et Viking VI, d'acquérir ces parts jusqu'au 31 décembre 2002 ; que, postérieurement à la mise en redressement judiciaire de la société Viking, par jugement du 25 juillet 2000, les quirataires ont levé l'option stipulée à leur bénéfice puis demandé, en juillet 2002, à la société de leur payer les prix convenus des différents quirats ;
Sur le moyen unique, en tant qu'il concerne M. et Mme Y... et la société Carlier investissement pêche :
Attendu que ceux-ci font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande en paiement, alors, selon le moyen :
1°) qu'il résulte des dispositions de l'article L. 621-32 du code de commerce, dans sa version antérieure à la loi du 26 juillet 2005, applicable en l'espèce, que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture sont payées à leur échéance lorsque l'activité est poursuivie ; qu'en cas de liquidation judiciaire, elles sont payées par priorité à toutes les autres créances, à l'exception de celles qui sont garanties par le privilège établi aux articles L. 143-10, L. 143-11, L. 742-6 et L. 751-15 du code du travail, des frais de justice, de celles lui sont garanties par des sûretés immobilières ou mobilières spéciales assorties d'un droit de rétention ou constituées en application du chapitre V du titre II du livre V ; que la créance du prix de vente naît de la délivrance de la chose vendue ; qu'en énonçant pour débouter les quirataires de leur action en paiement du prix des quirats ; que la société Viking était engagée par les promesses unilatérales de rachats des quirats consenties avant l'ouverture de la procédure collective, quelles que soient les dates auxquelles ont été conclus les contrats de vente par levée des options à l'initiative des quirataires, qui sont intervenues postérieurement au jugement déclaratif de la société Viking, la cour d'appel a violé l'article L. 621-32 du code de commerce par défaut d'application ;
2°) que le jugement ouvrant la procédure emporte de plein droit interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture qui doit être déclarée au passif du débiteur ; qu'une créance est antérieure dès lors que son fait générateur est né antérieurement au jugement déclaratif ; que les quirataires avaient levé l'option dont ils bénéficiaient en application des promesses de rachat après l'ouverture de ladite procédure, de sorte que l'obligation de la société Viking de payer le prix des quirats cédés n'était née qu'après cette date ; qu'en énonçant cependant, pour débouter les quirataires, que l'engagement de la société Viking de procéder au rachat des quirats était antérieur à l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé les articles L. 621-24 et L. 621-43 du code de commerce par fausse application ;
Mais attendu que la décision irrévocable d'admission d'une créance au passif ayant autorité de chose jugée quant à la date de naissance de la créance déclarée en application de l'article L. 621-43 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi de sauvegarde des entreprises du 26 juillet 2005, son antériorité par rapport à la date d'ouverture de la procédure collective ne peut plus être contestée ; que, par motifs adoptés, l'arrêt retient que les créances de M. et Mme Y... et de la société Carlier investissement pêche ont, non seulement été déclarées au passif, mais y ont été admises définitivement ; que par ces motifs, abstraction faite de ceux critiqués, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur ce même moyen, en tant qu'il concerne M. X..., Mme A..., épouse X... et M. et Mme Z... :
Vu l'article L. 621-32 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Attendu que la créance du prix de vente convenu dans une promesse unilatérale d'achat souscrite par le débiteur mis ultérieurement en redressement judiciaire naît postérieurement au jugement d'ouverture si son bénéficiaire lève l'option après celui-ci ;
Attendu que, pour rejeter les demandes de M. X..., de Mme A..., épouse X... et de M. et Mme Z..., l'arrêt retient que leurs créances ont pour origine les promesses unilatérales d'achat, qui engageaient la société Viking depuis une date antérieure à l'ouverture de sa procédure collective ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la vente des quirats n'était devenue parfaite que par la levée d'option pendant la période d'observation, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que les créances correspondantes avaient été admises au passif ni que l'administrateur du redressement judiciaire avait renoncé à la poursuite des contrats de promesse en cours, a violé, par refus d'application, le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ses dispositions rejetant les demandes de M. et Mme Y... ainsi que de la société Carlier investissement pêche, l'arrêt rendu le 4 mars 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Rouen ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Caen.