Cass. com., 23 avril 2013
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Schmidt
Avocat général :
Mme Bonhomme
Avocats :
SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, SCP de Chaisemartin et Courjon
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 décembre 2011), qu'à la suite de la mise en redressement puis liquidation judiciaires de M. X..., garagiste automobile, les 21 novembre 2008 et 4 février 2009, la société Financo a déclaré sa créance au titre d'un contrat de financement d'achat de véhicules automobiles conclu le 2 juillet 2008 ; que par ordonnance du 10 avril 2009, le juge-commissaire a ordonné la vente aux enchères de ces véhicules ; que se prévalant d'un droit de gage et de rétention sur ces biens pour être en possession des documents administratifs permettant leur immatriculation et ce, en vertu du contrat de financement du 2 juillet 2008, la société Financo a formé un recours contre cette ordonnance et a sollicité le report de son droit de rétention sur le prix de vente ;
Attendu que la société Financo fait grief à l'arrêt d'avoir refusé de reporter son droit de rétention sur le prix de vente, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ;qu'en rejetant la demande la société Financo tendant à se voir reconnaître un droit de rétention sur le prix de vente des véhicules objets du gage convenu avec M. X..., motif pris de l'inapplicabilité au contrat en cause de l'article 2286 du code civil, tel que modifié par la loi du 4 août 2008 et de l'article L. 622-7 du code de commerce, tel qu'il résulte de l'ordonnance du 18 décembre 2008, en l'absence de tout moyen soulevé en ce sens par le liquidateur, ès qualités, et sans avoir provoqué la discussion des parties sur ce point, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°/ que la loi nouvelle déterminant les effets légaux et à venir de contrats en cours s'applique immédiatement ; qu'en décidant que l'article 2286 du code civil, dans sa version entrée en vigueur le 6 août 2008, n'était pas applicable au gage sans dépossession contenu dans la convention signée le 2 juillet 2008 et dont la société Financo se prévalait dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire de M. X..., ouverte par jugement du 21 novembre 2008, puis dans celui de la procédure de liquidation judiciaire de celui-ci, ouverte par jugement du 4 février 2009, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de ce texte, la cour d'appel a violé les articles 2 et 2286 du code civil tel que résultant de la loi du 4 août 2008 ;
3°/ qu'en cas de vente par le liquidateur du bien constitué en gage, le droit de rétention du créancier gagiste est de plein droit reporté sur le prix ; que tel est le cas lorsque le droit de rétention du créancier titulaire d'un gage sans dépossession ayant pour objet des véhicules automobiles ne s'exerce que sur les certificats d'immatriculation ; que selon l'article 5.1 du contrat conclu entre M. X... et la société Financo «en garantie des sommes dues par lui en vertu du présent contrat, l'emprunteur affecte en gage et nantissement au profit du prêteur, un certain nombre de véhicules, ainsi que les pièces et titres de circulation se rapportant à ces véhicules à hauteur de 100 % du montant de l'ouverture de crédit : sur la base de 50 % de la cote Argus pour les véhicules d'occasion, sur la base de 100 % du prix concessionnaire hors taxe pour les véhicules neufs. Le prêteur pourra exiger de l'emprunteur : qu'il lui remette les procès-verbaux de réception, certificats de conformité, factures concessionnaires et certificats de cession pour les véhicules neufs, qu'il lui remette les cartes grises, volets A mutés et certificats de cession pour les véhicules d'occasion» ; qu'en décidant qu'en l'état de la clause seule invoquée, la rétention ne s'appliquait qu'aux objets matériels en la possession de Financo et que la remise des documents administratifs n'avait pas pour vocation de permettre un droit de rétention sur plus que les documents mais le cas échéant un élément d'identification des véhicules concernés et était en tout état de cause une garantie contre une vente dont l'organisme de crédit ne serait pas informé en violation de ses droits, cependant que la clause affectait expressément en gage les véhicules et les documents administratifs y afférents si bien que le droit de rétention exercé sur ces derniers devait se reporter sur le prix de vente des véhicules, la cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil et L. 624-25 du code de commerce ;
Mais attendu que le droit de rétention du prêteur sur les documents administratifs relatifs à des véhicules ne s'étend pas aux véhicules eux-mêmes et qu'il n'en résulte pas un droit pour le prêteur de se faire attribuer le produit de la vente de ces véhicules ; qu'ayant relevé que la société Financo s'était bornée dans ses écritures à soutenir que le droit de rétention qu'elle détenait sur les documents administratifs de circulation afférents aux véhicules devait être reporté sur le prix de vente, la cour d'appel, devant laquelle n'était pas allégué que le gage consenti par le débiteur sur ces mêmes véhicules avait fait l'objet d'une inscription sur le registre spécial prévu à cet effet, inscription qui seule le rendait opposable au liquidateur judiciaire du débiteur, en a exactement déduit, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et deuxième branches, que ce droit ne pouvait être reporté sur le prix de vente de ces véhicules ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.