Livv
Décisions

Cass. com., 27 juin 2006, n° 04-16.296

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Paris, 3e ch. B, du 21 mars 2003

21 mars 2003

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 21 mars 2003), qu'après la mise en liquidation judiciaire de l'association Institut européen des sourds (l'association), le liquidateur judiciaire, M. X..., a saisi le tribunal d'une demande en comblement de l'insuffisance d'actif et d'une demande de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer dirigées contre M. Y..., ancien dirigeant de l'association ; que le tribunal a rejeté la demande de renvoi de M. Y... qui invoquait l'absence d'un interprète en langue des signes afin de l'assister lors des débats et a dit que ce dernier était tenu de contribuer à l'insuffisance d'actif de l'association à concurrence d'une certaine somme et a prononcé une mesure d'interdiction de gérer pendant cinq ans ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'avoir refusé d'annuler le jugement entrepris et de l'avoir condamné "à combler le passif" de l'association alors, selon le moyen :

1 / que "le comblement de passif" étant une sanction pénale, l'impossibilité où il s'est trouvé en première instance de bénéficier de l'assistance effective d'un interprète pour lui permettre de suivre les débats et de s'entretenir à l'audience avec son avocat, ne peut faire regarder la procédure suivie à son endroit comme équitable au sens de l'article 6 de la "convention européenne des droits de l'homme" ;

2 / que le tribunal qui avait ordonné la désignation de deux interprètes devait rendre effective l'exécution de son ordre et n'a pu, dès lors, légalement passer outre aux débats sans autre motif, violant ainsi de plus fort l'article 6 précité ;

3 / qu'en l'absence de renonciation formelle et expresse de sa part à l'assistance des interprètes dont il avait demandé la désignation par conclusion écrite, l'abstention de la cour d'appel l'a défavorisé et violé l'article 6 précité ;

Mais attendu que l'arrêt relève qu'au cours de la procédure suivie devant le tribunal, M. Y... a bénéficié de l'assistance d'un avocat avec lequel il a pu communiquer grâce à la désignation d'un interprète spécialement affecté à la préparation du procès, que son conseil a conclu et l'a représenté lors des débats au cours desquels le président n'a pas souhaité lui donner la parole; qu'il relève encore que M. Y... n'a pas formulé de demande afin de se faire assister d'un interprète lors des débats devant la cour d'appel ; qu'ayant ainsi fait ressortir que le recours à l'assistance d'un interprète lors de l'audience n'ayant été ni sollicité par le président d'audience, ni souhaité par M. Y... ne s'imposait pas et que ce dernier avait au cours de l'instance civile, bénéficié des garanties procédurales lui assurant un procès équitable, la cour d'appel n'a pas violé l'article 6 1, de la convention européenne des droits de l'homme ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. Y... fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamné "à combler le passif" d'une association en sa qualité de dirigeant de fait pour la période écoulée entre le 6 novembre 1998 et le 1er juillet 1999, alors, selon le moyen :

1 / que l'action "en comblement de passif" n'est pas applicable aux dirigeants d'association d'intérêt public ; qu'en condamnant dès lors M. Y... à combler partie du passif de l'association, la cour d'appel a fait une fausse application des dispositions de l'article L. 624-1 du code de commerce ;

2 / que la gestion de fait s'entend essentiellement du pouvoir d'engager financièrement une personne morale ; que les éléments relevés par la cour d'appel relativement à la période de référence ne caractérisent l'exercice de la part de M. Y... d'aucune prérogative d'ordre financier ; que dès lors l'arrêt attaqué est privé de toute base légale sur la notion de gestion de fait au sens de l'article L. 624-1 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, qu'il n'est pas contesté que l'association est une personne de droit privé, peu important la nature de sa mission ;

Attendu, d'autre part, que l'arrêt relève que M. Y..., pendant la période comprise entre le 6 novembre 1998 et le 1er juillet 1999, a exercé ses fonctions de directeur général sans aucun contrôle du conseil d'administration, qu'en particulier il a engagé l'association envers des tiers, mis en oeuvre des sanctions disciplinaires à l'égard des membres du personnel et était considéré par ces derniers comme leur employeur ; qu'en l'état de ces appréciations et constatations faisant ressortir que M. Y... avait exercé au cours de la période considérée, en toute indépendance, une activité positive de direction de l'association, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.