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Décisions

Cass. com., 31 janvier 1995, n° 92-17.733

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Versailles, 13e ch., du 21 mai 1992

21 mai 1992

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Versailles, 21 mai 1992), que la Société anonyme commerciale agricole (la société), dont l'objet était la vente avant embarquement de cafés de Colombie, mise en règlement judiciaire par jugement du 16 mars 1985, a obtenu de ses créanciers un concordat homologué par jugement du 7 mars 1988 ; que, sur déclaration de cessation des paiements effectuée par M. X..., président de son conseil d'administration, la société, par deux jugements rendus le 16 mars 1989, a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires ; que le liquidateur de cette procédure collective a assigné M. X... en paiement des dettes sociales sur le fondement de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Attendu que M. X... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné à supporter l'insuffisance d'actif de la société à concurrence d'une somme de 200 000 francs alors, selon le pourvoi, d'une part, que le concordat met fin, selon l'article 74, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967, à la procédure de règlement judiciaire, dès que le jugement d'homologation est passé en force de chose jugée ; qu'il en résulte que la déclaration de cessation des paiements que fait le débiteur postérieurement audit concordat, après l'entrée en vigueur de la loi du 25 janvier 1985, ouvre nécessairement une nouvelle procédure de "règlement" judiciaire sous l'empire de la loi nouvelle ; que, conformément aux dispositions des articles 50 et 53 de cette loi, seules les créances déclarées dans les formes et délais prévus par ces deux textes sont admises au passif de l'entreprise faisant l'objet d'une procédure collective, la non-déclaration desdites créances entraînant leur extinction ; qu'en estimant, pour retenir l'insuffisance d'actif invoquée par le liquidateur de la seconde procédure collective, que les créanciers de la procédure collective initiale, conclue sous l'empire de la loi du 13 juillet 1967 par un concordat, n'étaient pas tenus de déclarer leurs créances à l'ouverture de la nouvelle procédure collective dans laquelle ils auraient conservé l'intégralité de leurs droits, la cour d'appel a violé, par fausse application, les textes susvisés ; et alors, d'autre part, qu'aux termes de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, la condamnation du dirigeant à supporter les dettes de la société faisant l'objet d'une procédure collective, est subordonnée à l'existence d'une faute de gestion imputable au dirigeant, laquelle doit être prouvée et ne saurait être présumée ; que pour condamner M. X..., les juges du second degré ont retenu que si le règlement judiciaire initial s'est prolongé pendant 35 mois sous la responsabilité du syndic, tandis que la phase concordataire sous celle de M. X... n'avait duré que 12 mois, rien ne laissait toutefois supposer que la phase initiale ait engendré des compléments de perte ; qu'ainsi, en déduisant la faute de M. X... de ce que la preuve de la responsabilité du syndic n'était pas rapportée, la cour d'appel, qui institue une présomption de faute à l'encontre de M. X..., a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

Mais attendu, d'une part, que, pour la détermination du montant de l'insuffisance d'actif, le passif de la société ne pouvait comprendre les créances antérieures au concordat n'ayant pas fait l'objet d'une nouvelle déclaration, dès lors que la société avait été mise, non en liquidation des biens après annulation ou résolution du concordat par application des dispositions de la loi du 13 juillet 1967 qui avaient vocation à s'appliquer, mais en redressement puis en liquidation judiciaires par application de celles de la loi du 25 janvier 1985 et que ces procédures ne continuaient pas, en s'y substituant la procédure de règlement judiciaire initiale ; que, cependant, l'arrêt n'a pris en considération, pour fixer le montant de l'insuffisance d'actif, qu'une somme de 600 000 francs correspondant, selon ses constatations, aux seules créances postérieures au concordat qui ont été admises au passif de la liquidation judiciaire ; qu'ainsi, abstraction faite du motif erroné mais surabondant critiqué par la première branche du moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié du chef critiqué ;

Attendu, d'autre part, que, loin de présumer la faute de gestion de M. X..., l'arrêt retient, tant par motifs propres qu'adoptés, que, pendant la période postérieure à l'homologation du concordat et tandis que la trésorerie de la société déclinait, M. X... n'a pas mis fin, comme il l'aurait dû dès le second semestre de l'année 1988, à l'activité de la société qui, "hautement spéculative" et déjà atteinte par la grave crise frappant le commerce du café de Colombie, était déficitaire et qu'il a, en outre, procédé, sans y être contraint, à plusieurs paiements préférentiels au profit d'intermédiaires, au détriment de la société, mais dans son propre intérêt afin d'assurer son avenir personnel dans ce genre de commerce ; que, par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ; Et sur les demandes présentées au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile :

Attendu que M. X... et le liquidateur de la procédure collective sollicitent chacun, sur le fondement de ce texte, l'allocation d'une somme de 10 000 francs ;

Mais attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir ces demandes ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.