Cass. com., 21 février 2006, n° 04-10.187
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Besançon
Avocat général :
M. Main
Avocats :
SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Defrenois et Levis
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 13 novembre 2003), que par acte notarié du 2 septembre 1993 M. et Mme X..., mariés sous le régime de la communauté d'acquêts, se sont portés cautions solidaires et ont hypothéqué un immeuble dépendant de leur communauté en garantie de crédits consentis à la société Confort 2000 par la Caisse de Crédit mutuel d'Altkirch (la caisse) ; que M. X... a été mis en redressement judiciaire le 5 avril 1994 et a bénéficié d'un plan de continuation le 18 octobre suivant ; que par acte notarié du 6 juillet 2000 les époux X... ont vendu l'immeuble hypothéqué ; que s'étant fait verser le prix de vente, M. Y..., commissaire à l'exécution du plan, a procédé à la répartition du prix entre les créanciers de la procédure collective, selon l'état de collocation déposé au greffe, sans tenir compte de la créance de la caisse, éteinte à l'égard de M. X..., pour n'avoir pas été déclarée à son redressement judiciaire ;
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan reproche à l'arrêt d'avoir annulé l'état de collocation, afférent à la répartition des fonds résultant de la vente de l'immeuble appartenant au débiteur et à son épouse commune en biens, et d'avoir en conséquence décidé que le commissaire à l'exécution du plan devrait reverser à la caisse, en sa qualité de créancier hypothécaire de la femme, la somme de 60 979,61 euros correspondant au prix de cession, alors, selon le moyen :
1°) que la répartition entre les créanciers, auxquels est applicable l'apurement du passif prévu dans le plan de continuation, du prix de cession d'un immeuble grevé d'une hypothèque, est effectuée, dans le cadre des modalités de cet apurement, suivant une procédure d'ordre par le commissaire à l'exécution du plan ; qu'en énonçant que le mandataire judiciaire n'avait pas qualité pour répartir, par procédure d'ordre, et au profit des créanciers admis, le prix résultant de la vente par le débiteur d'un immeuble grevé d'une hypothèque, pour en déduire que ledit prix devait revenir à un créancier hypothécaire non admis faute de déclaration, la cour d'appel a violé les articles L. 621-65, L. 621-68 et L. 621-80 du Code de commerce ainsi que 102 du décret du 27 décembre 1985 ;
2°) qu'en toute hypothèse, à défaut de déclaration de sa créance au passif de la procédure collective visant un époux commun en biens, le créancier du conjoint in bonis ne peut faire valoir son hypothèque prise sur l'immeuble commun, sauf, le cas échéant, sur le solde du prix du dit immeuble subsistant après règlement des créanciers admis au passif ;
qu'en l'espèce, le créancier hypothécaire n'avait pas déclaré sa créance au passif du redressement judiciaire prononcé à l'égard du débiteur commun en biens, de sorte qu'en autorisant cependant l'établissement de crédit à faire valoir son hypothèque à l'égard de la femme sur l'immeuble commun pour obtenir paiement du prix de vente de celui-ci, avant les créanciers admis au passif, la cour d'appel a violé les articles L. 622-23 du Code de commerce et 1413 du Code civil ;
3°) que le mandataire judiciaire soutenait que le créancier dont la créance était éteinte à l'égard du débiteur soumis à une procédure collective, faute de déclaration de sa créance, ne pouvait exercer de poursuite individuelle à l'encontre du conjoint in bonis et, en particulier, ne pouvait faire valoir son hypothèque ; qu'en délaissant des écritures aussi déterminantes, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après l'arrêté du plan de continuation et sauf disposition contraire de celui-ci, le débiteur, redevenu maître de ses biens, peut disposer de ceux-ci ainsi que de leur prix, sans avoir à solliciter l'autorisation du tribunal ou du juge-commissaire, ses créanciers étant réglés selon les modalités du plan ;
Qu'ayant constaté que la cession de l'immeuble appartenant aux époux X... n'était pas prévue par le plan, la cour d'appel en a exactement déduit que le prix de la vente, intervenue après l'arrêté de ce plan, n'avait pas à être versé au commissaire à l'exécution du plan et devait revenir à la Caisse, créancière de Mme X... et bénéficiant d'une hypothèque de premier rang sur cet immeuble ; que le moyen, qui n'est pas fondé en sa première branche, est inopérant pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.