Cass. soc., 27 septembre 2011, n° 10-20.308
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
Me Le Prado, Me Spinosi
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles 1er avril 2010), que la société SOS PC assistance a été mise en liquidation judiciaire le 20 septembre 2007, M. X...étant nommé liquidateur judiciaire (le liquidateur) ; que ce dernier a, par acte du 25 mars 2009, engagé une action en responsabilité pour insuffisance d'actif contre M. Y...et a demandé le prononcé d'une interdiction de gérer ;
Attendu que M. Y...fait grief à l'arrêt d'avoir dit que les conditions d'application des articles L. 651-2 et L. 653-8 du code de commerce étaient réunies à son encontre, de l'avoir condamné à payer au liquidateur la somme de 85 000 euros avec les intérêts au taux légal, ces derniers étant capitalisés, et d'avoir prononcé à son égard une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler directement ou indirectement une entreprise commerciale, artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale pour une durée de quatre ans, alors, selon le moyen :
1°/ que la violation des droits de la défense par l'assignation introductive d'instance constitue un vice de fond emportant la nullité du jugement et de l'ensemble de la procédure ; que l'assignation en responsabilité pour insuffisance d'actif qui reproduit les termes d'un rapport de conciliation confidentiel méconnaît les droits de la défense ; que M. Y...faisait valoir que l'assignation que lui avait fait délivrer le liquidateur 25 mars 2009 reproduisait les extraits du rapport du conciliateur et était à cet égard semblable à l'assignation annulée du 6 novembre 2008 ; qu'en jugeant néanmoins que le moyen d'annulation de l'assignation soulevé par M. Y...était de pure forme et devait être soulevé in limine litis, quand ce moyen, qui portait sur la violation des droits de la défense, touchait au fond, la cour d'appel a violé les articles 114 du code de procédure civile, R. 611-44 du code de commerce, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
2°/ que le tribunal statuant sur une action en responsabilité pour insuffisance d'actif n'est pas tenu par la date de cessation des paiements retenue dans le cadre de la procédure collective ; qu'il ne peut condamner le dirigeant pour avoir tardé à déclarer la cessation des paiements sans apprécier la date de cette cessation des paiements ; qu'en se contentant de reprendre l'historique de l'évolution du chiffre d'affaires de la société SOS PC assistance entre 2004 et 2007, sans déterminer la date à laquelle l'actif disponible de cette société ne permettait plus de répondre au passif exigible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
3°/ que le dirigeant ne peut être condamné à supporter une partie du passif social que s'il est résulté des fautes de gestion qui lui sont imputées une exploitation déficitaire de l'entreprise débitrice et un accroissement du passif ; qu'il appartient au juge de délimiter précisément le montant de l'insuffisance d'actif née dans l'intervalle situé quarante cinq jours après la date de cessation des paiements et celle de la déclaration de cette cessation des paiements ; qu'en condamnant néanmoins M. Y...au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif, au seul vu du montant définitif de l'insuffisance d'actif, sans préciser le montant de cette insuffisance née quarante cinq jours après la date de cessation des paiements et le 7 septembre 2007, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, que, pour déclarer irrecevable la demande de M. Y...en annulation de l'assignation, la cour d'appel ne s'est pas fondée sur le rapport du conciliateur, mais sur celui de l'administrateur judiciaire ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir constaté, d'un côté, que M. Y...avait continué une exploitation largement déficitaire en laissant s'accumuler un passif dû aux organismes sociaux et aux fournisseurs, sans régler des cotisations et des factures exigibles depuis le début de l'année 2006 pour un montant tel qu'aucun espoir d'apurement n'était raisonnablement envisageable, et, de l'autre, que les perspectives d'intervention de tiers n'autorisaient pas M. Y...à faire supporter le risque de l'aléa de cette intervention sur ses créanciers, l'arrêt retient que cette faute a contribué à l'insuffisance d'actif ; qu'ayant ainsi caractérisé la poursuite par M. Y...d'une exploitation déficitaire, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de constater l'état de cessation des paiements de la société, a légalement justifié sa décision ;
Attendu, enfin, qu'après avoir relevé que l'actif réalisé s'élevait à la somme de 27 504 euros et le passif déclaré à celle de 916 000 euros, l'arrêt retient que l'insuffisance d'actif n'apparaît certaine qu'à hauteur de 799 000 euros ; qu'ayant ainsi fixé le montant de l'insuffisance d'actif au jour où elle statuait, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'apporter la précision invoquée à la troisième branche, a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.