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Décisions

Cass. com., 30 janvier 2019, n° 17-31.060

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocats :

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Foussard et Froger, SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia

Bordeaux, du 11 oct. 2017

11 octobre 2017

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 11 octobre 2017), que M. Y... ayant été mis en redressement judiciaire le 3 avril 2008, la Caisse d'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes (la Caisse) a déclaré au passif deux créances pour les montants respectifs de 354 090,36 et 378 452,55 euros, qui n'ont été admises qu'à hauteur de 145,58 et 144,45 euros ; qu'un plan de redressement ayant été arrêté le 7 mai 2009, M. Y... a immédiatement réglé ces deux dernières sommes en application de l'article L. 626-20, II, du code de commerce ; qu'après la résolution du plan prononcée le 8 janvier 2016, la Caisse a, de nouveau, déclaré ses créances pour leur montant initial réactualisé ;

Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt d'admettre les créances alors, selon le moyen :

1°) que si la résolution du plan de redressement a pour effet d'anéantir rétroactivement les délais et remises acceptés par un créancier lors de son adoption, elle ne remet pas en cause le caractère libératoire des dividendes déjà versés à ce créancier par le débiteur pour l'apurement de chaque créance déclarée ; que le versement, par le débiteur, de la dernière échéance prévue par le plan, avant sa résolution, emporte l'extinction de la créance concernée, par complet paiement, ce qui exclut la possibilité de déclarer à nouveau cette créance au passif de la procédure collective ouverte à la suite de la résolution du plan de redressement ; en l'espèce, M. Y... faisait valoir que, dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire, la créance déclarée au titre du prêt n°[...] avait été admise à hauteur de 145,58 euros, et que celle déclarée au titre du prêt n°[...] l'avait été à hauteur de 144,45 euros ; qu'il ajoutait que ces deux créances avaient été intégralement payées par le commissaire à l'exécution du plan le 28 juillet 2009, ce dont il déduisait qu'elles avaient été éteintes ; que la cour d'appel a pourtant jugé le contraire au motif que « le paiement partiel ne saurait avoir un effet extinctif pour le tout » ; en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les paiements effectués par le commissaire à l'exécution du plan correspondaient, pour chacune des créances concernées, à l'intégralité de leur montant tel qu'admis au passif de la procédure collective, et s'il en résultait que ces paiements, dont le caractère libératoire devait s'apprécier créance par créance, avaient éteint ces deux créances, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 626-19 et L. 626-27 III du code de commerce, et 1234 du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause ;

2°) que le juge est tenu de respecter et de faire respecter le principe de la contradiction, et ne peut soulever un moyen d'office sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que le moyen soutenu par M. Y..., suivant lequel les paiements effectués à hauteur de 145,58 euros et 144,45 euros le 28 juillet 2009 avaient éteint les créances déclarées par la banque pour les prêts n° [...] et n° [...], était sans portée au motif que «le paiement partiel ne saurait avoir un effet extinctif pour le tout » ; qu'en se prononçant ainsi, tandis qu'aucune des parties n'avait soutenu que ces paiements ne correspondaient qu'à une partie des créances déclarées au titre de chacun de ces prêts, la cour d'appel, qui n'a pas invité les parties à se prononcer sur ce moyen qu'elle a relevé d'office, a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

3°) que si la dispense du créancier, soumis au plan ou admis au passif de la première procédure, d'avoir à déclarer sa créance dans la seconde procédure ouverte à la suite de la résolution de ce plan, ne lui interdit pas, s'il le souhaite, de déclarer à nouveau sa créance dans la nouvelle procédure, c'est seulement pour obtenir son admission au passif à concurrence du montant actualisé de celle-ci ; que cette faculté ne lui permet pas de contester la décision d'admission du juge-commissaire, mais seulement d'en actualiser le montant au regard d'éléments survenus après cette admission ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré, par motifs propres et adoptés, que la Caisse d'Épargne pouvait de nouveau déclarer les créances correspondant aux prêts n°[...] et n°[...], pour des montants très nettement supérieurs à ceux déclarés puis admis dans le cadre de la précédente procédure collective, en raison de l'absence d'autorité de la chose jugée des premières décisions d'admission ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que si la banque pouvait déclarer ces créances plutôt que de bénéficier de la dispense de déclaration prévue par la loi, elle ne pouvait cependant procéder à cette déclaration qu'afin de les actualiser, la cour d'appel a violé l'article L. 626-27 III du code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir retenu à bon droit que l'admission ou le rejet de la créance dans la première procédure collective n'a pas autorité de la chose jugée dans la seconde procédure ouverte à l'égard du même débiteur après résolution de son plan de redressement et que si l'article L. 626-27, III, du code de commerce dispense le créancier, soumis au plan ou admis au passif de la première procédure, d'avoir à déclarer sa créance dans la seconde procédure, le texte ne lui interdit pas, s'il le souhaite, de déclarer de nouveau sa créance dans la nouvelle procédure, l'arrêt relève que les deux créances à nouveau déclarées par la banque sont justifiées et ne sont pas spécialement critiquées par le débiteur ; que par ce seul motif, la cour d'appel, qui n'a pas relevé d'office un moyen, qui était dans le débat, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.