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Décisions

Cass. com., 1 février 2011, n° 10-11.490

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocats :

SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Odent et Poulet

Nîmes, du 19 nov. 2009

19 novembre 2009

Sur moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 19 novembre 2009), qu'après résolution du plan de continuation qui avait été arrêté en sa faveur, la SARL Pro Tech habitat, dont M. X... était le gérant, a été mise en liquidation judiciaire ; que le liquidateur a saisi le tribunal d'une demande tendant à l'application au dirigeant de la sanction de l'obligation aux dettes sociales ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir mis à sa charge la totalité des dettes de la société débitrice alors, selon le moyen :

1°/ que le passif social d'une société en liquidation ne peut être mis à la charge de son dirigeant qu'en conséquence d'agissements antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a mis à la charge de M. X..., les dettes sociales en se fondant sur des faits postérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective, a violé l'article L. 652-1 du code de commerce ;

2°/ qu'un dirigeant qui a poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale peut être contraint de payer le passif social ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a retenu à la charge de M. X... le fait d'avoir organisé, de manière manifestement délibérée, la poursuite de l'activité déficitaire de l'entreprise sous le couvert d'un plan de continuation apparemment attractif pour les créanciers, bien que cette poursuite d'activité eût été décidée par le tribunal et opérée sous le contrôle des organes de la procédure collective, a violé l'article L. 652-1 du code de commerce ;

3°/ que le passif social d'une société en liquidation judiciaire peut être mis à la charge de son dirigeant, mais à la condition qu'il ait poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a retenu à la charge de M. X..., le fait que l'entreprise en difficulté s'était abstenue, postérieurement au jugement ayant arrêté le plan de continuation, de payer les cotisations sociales et les dettes fiscales de l'entreprise quant ce défaut de paiement postérieur au jugement d'ouverture, comme le non-respect des dispositions du plan ne provenaient que des difficultés de l'entreprise, qui avaient précisément motivé l'ouverture de la procédure collective, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 652-1 du code de commerce ;

4°/ que le dirigeant d'une société en liquidation judiciaire ne peut voir mis le passif social à sa charge que s'il a poursuivi abusivement, dans un intérêt personnel, une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a retenu à la charge de M. X... le fait qu'une rémunération avait été maintenue à son profit, postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure, et sans rechercher, comme il lui était demandé, si celle-ci n'était pas modeste, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 652-1 du code de commerce ;

5°/ que la condamnation d'un dirigeant à régler tout ou partie du passif d'une société en liquidation judiciaire doit être caractérisé par la poursuite, par lui, d'une activité déficitaire dans un intérêt personnel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a retenu, à la charge de M. X..., d'avoir détourné la clientèle de la société débitrice par la création d'une autre entreprise qu'il hébergeait à son domicile, quand cette société avait été créée plus de trois mois après la liquidation judiciaire de la société débitrice, privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 652-1 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que la faute retenue par l'arrêt à l'encontre de M. X... ayant été commise pendant l'exécution du plan de redressement était nécessairement antérieure à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire qui doit seule être prise en considération ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que la société débitrice a, pendant l'exécution du plan, créé un nouveau passif d'exploitation, en n'étant pas en mesure de s'acquitter de ses cotisations sociales et de ses dettes fiscales nées postérieurement au jugement ayant arrêté le plan et que la poursuite d'activité dans de telles conditions est l'unique cause de la nouvelle cessation des paiements survenue quelques jours seulement après ce jugement ; que, par ces constatations et appréciations, la cour d'appel a caractérisé, à la charge de M. X..., la faute, mentionnée à l'article L. 652-1. 4° du code de commerce, d'avoir poursuivi abusivement une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale, sans que ni l'existence du jugement ayant arrêté le plan, ni celle de difficultés de l'entreprise pût l'exonérer de sa responsabilité ;

Attendu, enfin, qu'ayant constaté que M. X..., pendant l'exécution du plan, s'était fait rémunérer pour l'exercice de ses fonctions de gérant, la cour d'appel a caractérisé par là-même son intérêt personnel à la poursuite de l'activité déficitaire, sans retenir que cet intérêt résultait aussi d'un détournement de clientèle ; D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa cinquième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.