Cass. com., 29 novembre 2016, n° 15-13.396
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Barbot
Avocat général :
M. Le Mesle
Avocat :
Me Rémy-Corlay
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Saint-Denac immobilier (la société débitrice) a été mise en redressement judiciaire le 20 novembre 2013 ; que par un acte du 30 décembre suivant, la société Nouvelle BCP, associée majoritaire, a cédé la totalité de ses parts à la société Les Estudies ; que le dépôt par celle-ci de l'acte de cession ayant été refusé par le greffier chargé de la tenue du registre du commerce et des sociétés (RCS), la société Les Estudies a formé un recours devant le juge commis à la surveillance du registre, qui l'a rejeté ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la société Les Estudies fait grief à l'arrêt de confirmer cette décision alors, selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que le principe du contradictoire applicable en matière gracieuse oblige le juge à inviter la partie requérante à s'expliquer sur l'absence de remise des pièces justificatives de la demande quand il ressort de la procédure que la partie a régulièrement transmis au juge son dossier de plaidoirie venant précisément justifier sa requête ; qu'en l'espèce, il est établi que le conseil de la société Les Estudies, à la suite de la demande de la cour d'appel à l'audience du 23 septembre 2014 réclamant la transmission des pièces justificatives dans le cadre du délibéré, a transmis à ladite juridiction par courrier du 1er octobre 2014 reçu le 2 octobre, « le dossier de plaidoirie (…) dans cette affaire », soit les pièces justificatives venant à l'appui de l'appel ; qu'à considérer que la cour d'appel n'ait pas trouvé ces pièces au dossier, il appartenait à la juridiction d'interroger la société Les Estudies sur l'absence de remise des pièces justificatives au dossier de plaidoirie venant précisément répondre à la demande de la cour d'appel de production des pièces dans le cadre du délibéré ; qu'en se contentant de dire que « Il a été demandé à l'audience au requérant de communiquer, en cours de délibéré, des pièces complètes mais il n'a pas cru devoir s'exécuter », la cour d'appel a méconnu l'article 16 du code de procédure civile, l'article 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble le principe de contradiction et le droit à un procès équitable ;
Mais attendu qu'ayant, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire, autorisé la société Les Estudies à déposer des pièces après la clôture des débats, et constaté qu'il n'y avait pas été donné suite, la cour d'appel n'était pas tenue, après réception en cours de délibéré d'un dossier de plaidoirie n'impliquant pas en soi la remise de pièces, d'inviter la société Les Estudies à s'expliquer sur l'absence audit dossier des pièces concernées ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que, pour refuser le dépôt de l'acte de cession au RCS, l'arrêt constate, d'abord, qu'il résulte de cet acte que les sociétés cédante et cessionnaire étaient représentées par M. X..., la première détenant 75 % du capital de la société débitrice ; qu'il retient, ensuite, que, dans un procès-verbal d'assemblée générale du 7 janvier 2014, les deux associés de la société sont, cette fois, représentés par M. Y..., dont la qualité n'est pas précisée ; que l'arrêt en déduit que M. X... contrôle la société débitrice par l'intermédiaire de la société BCP, de sorte que la cession ne pouvait s'effectuer que dans les conditions de l'article L. 631-10 du code de commerce ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de la société Les Estudies, qui soutenait que la cour d'appel, se prononçant sur le recours formé contre une décision du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés, n'avait pas le pouvoir de déterminer si la société cédante avait la qualité de dirigeant de la société Saint-Denac immobilier pour l'application de l'article L. 631-10 du code de commerce, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 décembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.