Cass. com., 15 mai 2019, n° 17-31.553
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rémery
Avocat :
SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 31 octobre 2017), que la SCI Traoré-Boro (la société), constituée par Mme L... et sa fille, Mme S..., pour l'édification d'une maison sur un terrain appartenant à Mme L..., a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 21 juin 2016 et 20 juin 2017 ;
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de prononcer sa liquidation judiciaire alors, selon le moyen :
1°) qu'il appartient à celui qui demande l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire de rapporter la justification, d'une part, de la cessation des paiements, et, d'autre part, de ce que le redressement du débiteur est manifestement impossible ; qu'en affirmant que le redressement du débiteur était manifestement impossible au motif que Mme L... et Mme S... ne justifiaient pas de leurs revenus personnels, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1353 nouveau du code civil ;
2°) qu'il incombe aux juges du fond de se prononcer sur les documents régulièrement versés aux débats et soumis à leur examen ; qu'ils ne peuvent rejeter une demande sans avoir examiné tous les éléments de preuve fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en se bornant à énoncer, qu'au regard des bulletins de salaires produits aux débats, les salaires de Mme L... étaient très inférieurs à ceux portés sur sa déclaration de revenu puisqu'elle percevait en moyenne un salaire de 1 075 euros pour [...] et de 229,39 euros pour l'entreprise Taga Medical sans même constater que la salariée versait également aux débats des bulletins de salaires provenant de la [...], de [...] et de [...], la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) que le prononcé de la liquidation judiciaire au cours de la période d'observation est subordonné à la condition que le redressement du débiteur soit manifestement impossible ; qu'en affirmant que le redressement était manifestement impossible, quand elle avait relevé que le passif échu s'élevait à la somme de 19 205 euros, que la société avait consigné la somme de 12 990 euros en vue de garantir l'exécution d'un plan de redressement et que les bulletins de salaires enseignaient que l'une des associées percevait en moyenne un salaire de 1 075 euros pour [...], et de 229,39 euros pour la société Taga médical ainsi qu'une pension alimentaire de 95,93 euros tandis que l'autre associée justifiait d'un salaire de 1 199 euros, la cour d'appel, qui n'a pas recherché, comme elle y était invitée, si compte tenu de la faiblesse du passif échu, un plan de redressement n'était pas envisageable, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 631-15 du code de commerce ;
4°) que la situation irrémédiablement compromise d'une société ne se confond pas avec la cessation des paiements ; qu'en énonçant, par motifs adoptés, que la société ne lui permettait pas d'envisager la présentation d'un plan de redressement car elle ne disposait pas de revenus suffisants pour apurer son passif vérifié qui s'élevait à 146 296,78 euros, pour en déduire que la situation de la société était irrémédiablement compromise, la cour d'appel a violé l'article L. 631-15 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt, qui n'affirme pas que le redressement de la société débitrice était manifestement impossible au motif que Mme L... et Mme S... ne justifiaient pas de leurs revenus personnels, relève que le projet de reprise des travaux par la société n'est manifestement pas sérieux, dès lors qu'il repose sur un devis émanant d'une société en liquidation judiciaire ; qu'il relève encore que les revenus dont il est justifié pour la période de janvier à mai 2017 par Mme L..., qui a un enfant mineur à charge pour lequel elle perçoit une pension alimentaire de 95,93 euros, s'élèvent à 1 304,39 euros et ceux de Mme S... à 1 199 euros, sans que leurs charges soient justifiées ; qu'il relève encore que, peu important que ne soit pas établie la déchéance de son terme, les échéances du prêt souscrit par la société d'un montant de 710,56 euros n'ont pas été honorées depuis le mois de novembre 2015, et qu'il souligne que la somme de 12 990 euros consignée pour garantir l'exécution d'un plan s'avère insuffisante à couvrir le passif échu s'élevant à 19 205 euros, pour un passif à échoir de 129 650,40 euros ; que la cour d'appel, qui n'avait à tenir compte que des éléments de preuve déterminants régulièrement produits et non de bulletins de paie dont rien n'établit qu'ils concernaient la période considérée et avaient été produits régulièrement aux débats, a souverainement déduit de ces constatations et appréciations, sans inverser la charge de la preuve, que le redressement de la société était manifestement impossible ; que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.