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Décisions

Cass. com., 10 mai 2012, n° 09-12.642

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

M. Rémery

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

SCP Didier et Pinet, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Aix-en-Provence, du 12 févr. 2009

12 février 2009

Sur le moyen unique, pris en sa première branche : Vu l'arrêt du 13 avril 2010 rendu par la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation (Bull. Civ. IV, n° 81) ; Vu l'article 3 § 1er du Règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 relatif aux procédures d'insolvabilité ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'après la mise en liquidation judiciaire de la société Médiasucre international (société Médiasucre) par jugement du 7 mai 2007 du tribunal de commerce de Marseille, le liquidateur a assigné devant ce tribunal la société de droit italien Rastelli Davide et C. (la société Rastelli) aux fins d'extension à celle-ci de la procédure collective de la société Médiasucre, en invoquant la confusion de leurs patrimoines ; que le tribunal s'est déclaré incompétent après avoir relevé que la société Rastelli avait son siège social en Italie et n'avait aucun établissement sur le territoire français ; que la cour d'appel, statuant sur contredit, a dit que le tribunal de commerce de Marseille était compétent aux motifs que la demande ne tendait pas à l'ouverture d'une procédure collective à l'encontre de la société de droit italien Rastelli, mais à l'extension à celle-ci de la liquidation judiciaire de la société Médiasucre et que selon l'article L. 621-2 du code de commerce, qui fonde cette demande, le tribunal compétent pour statuer sur la demande d'extension est celui de l'ouverture de la procédure initiale ; que l'arrêt a encore retenu que le principe de l'universalité de la faillite, selon lequel un seul tribunal est compétent concernant tous les actifs et les passifs du débiteur en liquidation judiciaire, quelle que soit leur localisation, doit prévaloir sur le Règlement européen, qui ne concerne, en ses articles invoqués par la société Rastelli, que l'ouverture de la procédure, et non son extension ; que, par arrêt du 13 avril 2010, la Cour de cassation a sursis à statuer sur le pourvoi de la société Rastelli et interrogé à titre préjudiciel la Cour de justice de l'Union européenne ;

Attendu que par arrêt du 15 décembre 2011 (C-191/10), la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit :

1°) Le règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité, doit être interprété en ce sens qu'une juridiction d'un Etat membre qui a ouvert une procédure principale d'insolvabilité à l'encontre d'une société, en retenant que le centre des intérêts principaux de celle-ci est situé sur le territoire de cet Etat, ne peut étendre, en application d'une règle de son droit national, cette procédure à une deuxième société, dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre, qu'à la condition qu'il soit démontré que le centre des intérêts principaux de cette dernière se trouve dans le premier Etat membre ;

2°) Le règlement n° 1346/2000 doit être interprété en ce sens que dans l'hypothèse où une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d'un Etat membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d'une procédure d'insolvabilité ouverte dans un autre Etat membre à l'encontre d'une autre société établie sur le territoire de ce dernier Etat, la seule constatation de la confusion des patrimoines de ces sociétés ne suffit pas à démontrer que le centre des intérêts principaux de la société visée par ladite action se trouve également dans ce dernier Etat. Il est nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle ce centre se trouve au lieu du siège statutaire, qu'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permette d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l'action aux fins d'extension se situe dans l'Etat membre où a été ouverte la procédure d'insolvabilité initiale ;

Attendu que l'arrêt a retenu la compétence du tribunal de commerce de Marseille par les motifs précités ;

Attendu qu'en se déterminant par ces motifs inopérants, sans rechercher si le centre des intérêts principaux de la société Rastelli se trouvait situé sur le territoire français, ce qu'elle ne pouvait déduire de la seule constatation de la confusion de son patrimoine avec celui de la société Médiasucre, mais exclusivement d'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permettant d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société Rastelli se situait en France et non au lieu de son siège statutaire en Italie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 12 février 2009, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence.