Cass. com., 14 mai 2008, n° 07-10.502
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
Me Carbonnier, SCP Delaporte, Briard et Trichet
Attendu, selon les arrêts déférés, que suivant acte reçu par M. X..., notaire, le 14 octobre 1992, la banque La Hénin a consenti à la SCI Tecnoavenue (la SCI) un prêt de 4 000 000 francs puis a cédé sa créance le 11 février 1999 à la société WHBFR qui l'a transmise le 23 août 2003 à la société Chauray contrôle (société Chauray) ; que les 14, 15 et 16 octobre 2003, la société Chauray a fait pratiquer une saisie-attribution entre les mains des locataires de la SCI pour la somme de 1 607 840, 98 euros ; que le 23 octobre 2003, la SCI a assigné la société Chauray devant le juge de l'exécution pour obtenir la mainlevée des saisies-attribution ; que cette demande a été rejetée par jugement du 6 janvier 2004 dont la SCI a interjeté appel le 16 janvier suivant ; que la SCI a été mise en redressement puis en liquidation judiciaires, successivement les 12 octobre 2004 et 8 février 2005 ;
Sur le pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt du 5 avril 2006 :
Vu l'article 978 du code de procédure civile ;
Attendu que la SCI a formé un pourvoi contre l'arrêt rendu le 5 avril 2006 ; que le mémoire déposé au greffe de la Cour de cassation ne contient aucun moyen de droit à l'encontre de cette décision ; qu'il s'ensuit que la déchéance du pourvoi est encourue en ce qui concerne cet arrêt ;
Et sur le premier moyen du pourvoi, en tant qu'il est dirigé contre l'arrêt du 6 septembre 2006 :
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'intervention de M. Y... en qualité de liquidateur amiable de la SCI, alors, selon le moyen, que le débiteur conserve le droit propre, lorsqu'était en cours à la date du jugement d'ouverture de sa liquidation judiciaire, une instance tendant à sa condamnation au paiement d'une somme d'argent pour une cause antérieure à ce jugement, de poursuivre l'instance d'appel ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que, se prétendant créancière de la SCI, la société Chauray a fait pratiquer, en octobre 2003, des saisies-attribution entre les mains des locataires de la débitrice ; que, par jugement du 6 janvier 2004, le juge de l'exécution a rejeté la demande de mainlevée desdites saisies ; qu'après avoir régulièrement relevé appel de cette décision, la SCI a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, puis de liquidation judiciaire, suivant jugements des 12 octobre 2004 et 8 février 2005, M. Z... étant désigné en qualité de liquidateur judiciaire ; que, par jugement du 11 octobre 2005, M. Y... a été désigné en qualité de liquidateur amiable aux fins de représenter la personne morale dissoute ; qu'en conséquence, celui-ci est intervenu volontairement devant la cour d'appel ; que, que pour déclarer M. Y..., ès qualités, irrecevable à intervenir, l'arrêt retient qu'en conséquence de la liquidation judiciaire de la SCI, et s'agissant d'un prêt contracté par celle-ci, l'action exercée concerne son patrimoine et que dès lors seul M. Z..., ès qualités, peut agir ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Mais attendu que l'instance en cours à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective de la SCI ne tendait pas à sa condamnation au paiement d'une somme d'argent mais à la mainlevée d'une saisie-attribution pratiquée antérieurement à ce jugement ; que la cour d'appel en a exactement déduit que s'agissant d'une action patrimoniale, le liquidateur judiciaire, qui exerce pendant la durée de la liquidation judiciaire les droits et actions du débiteur, avait seul qualité pour poursuivre la dite instance et que l'intervention de M. Y..., mandataire ad hoc de la SCI, était irrecevable ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 6 de la loi n° 76-519 du 15 juin 1976 ;
Attendu qu'aux termes de ce texte, l'endossement de la copie exécutoire à ordre d'un acte authentique constatant une créance doit être notifié par le notaire signataire, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, au notaire qui a reçu l'acte ayant constaté la créance et au débiteur ; que l'absence de l'une de ces notifications entraîne son inopposabilité aux tiers ;
Attendu que pour rejeter la demande de mainlevée des saisies-attribution et écarter le moyen pris de l'absence de titre de la société Chauray, l'arrêt retient qu'il résulte de la copie exécutoire à ordre unique du 14 octobre 1992 qu'aux termes d'un acte reçu le 11 février 1999 par M. A..., notaire à Paris, la banque La Hénin a endossé pour transfert au profit de la société WHBFR la copie exécutoire à ordre et que le même acte mentionne que M. B..., notaire à Paris, a reçu le 23 août 2003 l'acte par lequel la société WHBFR donne ordre au débiteur de payer à la société Chauray la créance due au 15 juin 2003 représentée par la copie exécutoire de l'acte reçu le 14 octobre 1992 ; que l'arrêt relève encore que l'acte précise que la notification de l'endossement a été faite par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 23 août 2003 adressée au notaire, M. X..., et à la SCI, portant à leur connaissance l'endossement réalisé au profit de la société Chauray ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si la notification de l'endossement réalisé le 11 février 1999 par la banque la Henin au profit de la société WHBFR avait été régulièrement effectuée et si cet endossement pouvait être opposé à la SCI débitrice, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CONSTATE la déchéance du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt du 5 avril 2006 ;
CASSE ET ANNULE , sauf en ce qu'il a reçu l'appel et déclaré irrecevable l'intervention de M. Y..., en qualité de liquidateur amiable de la SCI Tecnoavenue, l'arrêt rendu le 6 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.