Cass. com., 4 juin 2013, n° 12-17.203
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
Mme Schmidt
Avocat général :
M. Le Mesle
Avocats :
Me Foussard, SCP Lyon-Caen et Thiriez
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 9 février 2012), que la société Domelec services (la société débitrice) a été mise en redressement judiciaire le 9 septembre 2010, M. X... (l'administrateur) étant désigné administrateur avec une mission d'assistance ; que ce dernier a exigé de la caisse de Crédit mutuel de Cherbourg Napoléon (la banque) la poursuite d'une convention de compte courant sous la double signature du débiteur et de la sienne, ès qualités ; que devant le refus de la banque, l'administrateur et la société débitrice ont saisi le juge-commissaire ; que la débitrice ayant été mise en liquidation judiciaire le 14 octobre 2010, l'instance a été reprise par la société Bruno Cambon en sa qualité de liquidateur judiciaire ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé, pour la période courant jusqu'au prononcé de la liquidation judiciaire, l'injonction de maintenir le compte courant ouvert au nom de la société débitrice, ce compte devant fonctionner sous la double signature, alors, selon le moyen :
1°/ qu'à supposer que l'émission d'un chèque, en cas de procédure de redressement judiciaire, comportant l'assistance d'un administrateur, suppose l'accord de l'administrateur, cette règle postule seulement que le débiteur ne s'autorise à émettre un chèque qu'avec l'accord de l'administrateur et que l'administrateur met en place les mesures nécessaires, dans le cadre de l'organisation de l'entreprise, pour que cette règle soit respectée, sans qu'il puisse être imposé à la banque l'usage de chèques portant la double signature du débiteur et de l'administrateur ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé l'article L. 631-12 du code de commerce, ensemble les articles L. 131-72 et L. 163-6 du code monétaire et financier ;
2°/ que si la banque, dès lors que l'administrateur le décide, est tenue de poursuivre l'exécution des conventions, dans les termes où elles ont été conclues, l'administrateur n'a en aucune façon le pouvoir d'en modifier les termes ; qu'en s'abstenant de rechercher, avant d'adresser une injonction à la banque, si les conventions relatives au compte courant prévoyaient ou autorisaient l'émission de chèques portant une double signature, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 631-12, L. 631-14 et L. 622-13 du code de commerce, ensemble les articles L. 131-72 et L. 163-6 du code monétaire et financier ;
3°/ que si, sachant que les conventions ne peuvent être maintenues que dans les termes où elles ont été contractées, les juges du fond devaient à tout le moins rechercher, comme le faisait valoir la banque, si, en application de l'article 4 de la convention de compte, la banque n'était pas autorisée à refuser une modalité, eu égard à sa complexité, du fait des contraintes de gestion entraînées ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point, les juges du fond ont de nouveau privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil, L. 631-12, L. 631-14 et L. 622-13 du code de commerce, ensemble les articles L. 131-72 et L. 163-6 du code monétaire et financier ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé que l'administrateur s'était vu confier une mission d'assistance sans aucune restriction, la cour d'appel en a justement déduit que cette mission emportait obligation pour ce dernier d'assister la société débitrice dans tous les actes de gestion au nombre desquels figure le fonctionnement des comptes bancaires sous leur double signature ;
Attendu, en second lieu, qu'après avoir énoncé qu'en application des dispositions de l'article L. 622-13 et L. 631-14 du code de commerce, nonobstant toute disposition légale, ou toute clause contractuelle, aucune indivisibilité, résiliation ou résolution d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, la cour d'appel a retenu, par motifs adoptés, que ces dispositions interdisent à la banque d'opposer à l'administrateur qui entend poursuivre la convention d'ouverture de compte, des prétextes tirés d'une impossibilité organisationnelle, prétextes dissimulant la volonté de la banque de cesser tout concours avec une entreprise placée en redressement judiciaire ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Sur le second moyen :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.