Cass. com., 4 juillet 2000, n° 98-11.803
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
Mme Lardennois
Avocat général :
M. Jobard
Avocats :
Me Copper-Royer, SCP Vincent et Ohl, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 1er décembre 1997), que la société Majesté (la société) a déposé en gage des marchandises à la société Auxiga en les affectant, pour partie à un pool bancaire dont le chef de file était la Caisse de Crédit agricole mutuel Sud-Alliance (le Crédit agricole) et, pour le reste, au seul Crédit agricole ; que, dans les deux actes constitutifs, il a été convenu qu'avec l'accord du Crédit agricole, la société pouvait être autorisée à retirer des marchandises gagées moyennant " la substitution simultanée, aux marchandises retirées, de marchandises d'un montant équivalent en valeur déclarée " ; qu'après la mise en redressement judiciaire de la société intervenue le 22 avril 1997, son administrateur a demandé l'autorisation de substituer des marchandises au Crédit agricole qui a refusé ; que la société, son administrateur et son représentant des créanciers ont saisi le juge-commissaire ;
Attendu que le liquidateur judiciaire de la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de substitution du gage, alors, selon le pourvoi, que la loi du 25 janvier 1985 a pour finalité la sauvegarde de l'entreprise ; qu'à cet égard, l'article 33 interdit de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture ; que si les dispositions de son alinéa troisième permettent le retrait de l'objet gagé contre paiement de la créance garantie, ce n'est pas pour l'extraire du patrimoine du débiteur pour la satisfaction du créancier qui serait supérieur aux autres, mais pour remettre l'objet gagé au débiteur lui-même afin de lui permettre de poursuivre l'activité de l'entreprise ; que, dans le même but, l'article 34 lui permet de proposer aux créanciers la substitution aux garanties qu'ils détiennent de garanties équivalentes ; qu'ainsi, les dispositions des articles 33 et 34 n'ont pas pour finalité de protéger des créanciers gagistes, mais de permettre au débiteur de poursuivre l'activité de l'entreprise, de sorte que l'article 33, alinéa 3, ne saurait exclure l'application de l'article 34, alinéa 3 ; que, dès lors, en énonçant que la loi du 25 janvier 1985 accorde au créancier gagiste une supériorité sur tous les autres créanciers de sorte que son droit à ne délivrer la chose que contre paiement consacré par l'article 33, alinéa 3, de cette loi ne peut être compris comme trouvant sa limite dans le pouvoir du juge-commissaire d'imposer une substitution du gage, la cour d'appel a méconnu la finalité de la loi du 25 janvier 1985 et a violé, par fausse interprétation, ses articles 33 et 34 ;
Mais attendu que le droit de rétention issu du gage avec dépossession qu'un créancier a régulièrement acquis confère à son titulaire le droit de refuser la restitution de la chose légitimement retenue jusqu'à complet paiement de sa créance ; que le contrat de gage ayant prévu une faculté de substitution avec l'accord du créancier, la cour d'appel, qui a retenu que le droit de rétention ne pouvait être limité par le pouvoir conféré au juge-commissaire par l'article 34, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 d'imposer une substitution de garantie, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.