Cass. com., 22 octobre 1996, n° 94-12.546
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bézard
Rapporteur :
M. Lassalle
Avocat général :
M. Lafortune
Avocats :
SCP de Chaisemartin et Courjon, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 31 janvier 1994), que les époux X... se sont, le 24 décembre 1986, engagés à céder à la Société nouvelle Blanc Bernard (la SNBB) des parts d'une société civile immobilière (la SCI) sous la condition suspensive de constitution définitive de cette dernière, étant, par ailleurs, stipulé que le cessionnaire serait propriétaire des parts cédées à compter du jour de la réalisation de la cession par acte authentique et que le prix serait payé comptant le jour de la signature dudit acte ; que la SCI a été constituée le 27 mars 1987 ; que la SNBB a été mise en liquidation judiciaire le 8 novembre 1989 sans que la cession ait été réalisée ; que M. Y..., agissant en qualité de mandataire-liquidateur de la SNBB, a assigné les époux X... pour les contraindre à réitérer l'acte de vente devant notaire en les renvoyant à déclarer leur créance correspondant au prix de cession ; que, pour rejeter la demande, la cour d'appel a constaté, qu'à défaut de paiement comptant, la cession des parts sociales réclamées était dépourvue de cause ;
Attendu que M. Y..., agissant en qualité d'administrateur de la SNBB, fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'existence de la cause doit être appréciée lors de la formation du contrat sans que puissent être prises en considération les circonstances postérieures ; que, dès lors, en l'espèce, en déduisant l'absence de cause de la convention de l'inexécution par l'acheteur de son obligation de payer le prix des parts sociales, circonstance postérieure à la formation du contrat, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 1131 du Code civil ; et alors, d'autre part, que, une fois accomplie, la condition suspensive opère rétroactivement, de sorte que le contrat devient parfait dès la conclusion, peu important que les parties aient retardé le transfert de propriété ; qu'en l'espèce, la condition suspensive prévue à l'acte ayant été réalisée dans le délai requis, l'acte de cession était rétroactivement validé au jour de l'engagement des parties, indépendamment de la situation créée par la liquidation judiciaire survenue entre-temps ; que, dès lors, en refusant de faire droit à la demande en réitération de l'acte de vente, la cour d'appel a violé les articles 1179 et 1583 du Code civil ;
Mais attendu que l'administrateur judiciaire ne peut exiger l'exécution d'un contrat en cours qu'en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur ;
Attendu que, dès lors que le transfert de propriété des parts ne s'était pas réalisé avant l'ouverture de la procédure collective, le contrat de vente était en cours ; que l'administrateur judiciaire ne pouvait, dans ces conditions, exiger la réitération de la vente par acte authentique qu'en payant aux époux X... le prix promis par la SNBB ; que, par ce motif de pur droit substitué à ceux de la cour d'appel, l'arrêt se trouve justifié ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.