Cass. com., 18 juin 2013, n° 12-19.709
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Rapporteur :
M. Rémery
Avocat général :
Mme Bonhomme
Avocats :
Me Foussard, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., salarié de la société Meubles Ehalt (la société Ehalt), a été victime d'un accident du travail le 27 mai 2002 ; que son employeur a été reconnu auteur d'une faute inexcusable ; que la société Ehalt, ayant été mise en redressement judiciaire le 16 décembre 2002, la caisse primaire d'assurance maladie de Sélestat, aux droits de laquelle vient la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin (la caisse), a demandé qu'elle soit tenue avec son assureur, la société Assurances générales de France, devenue Allianz, de lui rembourser le montant de l'indemnité complémentaire due à la victime ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'avoir jugé sa demande irrecevable à l'encontre de la société Ehalt, au passif de laquelle elle n'avait pas déclaré sa créance, alors, selon le moyen, que, dès lors qu'elle est subrogée dans les droits de la victime, laquelle est dispensée de déclarer sa créance quand bien même elle entend tirer les conséquences de la reconnaissance de la faute inexcusable, la caisse, qui doit être placée dans la même situation, doit à son tour être dispensée d'une déclaration ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les articles L. 452-3 du code de la sécurité sociale et L. 621-43 du code de commerce, dans sa rédaction applicable à l'époque ;
Mais attendu qu'il résulte des dispositions de l'article L. 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, que l'indemnisation complémentaire due à la victime d'un accident du travail en cas de faute inexcusable de son employeur est versée au bénéficiaire par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur ; que la créance de restitution de la caisse ayant pour origine la faute de celui-ci est soumise à déclaration à son passif, dès lors que l'accident est antérieur à l'ouverture de la procédure collective de l'employeur ; que la cour d'appel en a exactement déduit que, par application des dispositions de l'article L. 621-46, alinéa 4, du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, la créance non déclarée de la caisse sur la société Meubles Ehalt était éteinte et ne pouvait fonder son action récursoire contre elle ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles L. 124-3 du code des assurances et L. 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale ;
Attendu que, pour déclarer définitivement irrecevable l'action directe de la caisse contre la société Allianz, l'arrêt retient qu'à défaut de déclaration de la créance de remboursement au passif de la procédure collective de l'employeur assuré, l'action directe ne peut plus également être exercée à l'encontre de l'assureur ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'après versement de l'indemnité complémentaire à la victime d'un accident du travail causé par la faute inexcusable de son employeur, la caisse, subrogée dans les droits du salarié, peut agir par voie d'action directe à l'encontre de l'assureur des conséquences financières de la faute inexcusable, sans être tenue de se soumettre à la procédure de vérification de sa créance, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin irrecevable en ses prétentions récursoires à l'encontre de la société Allianz, l'arrêt rendu le 22 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; remet en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Colmar, autrement composée.