Cass. 2e civ., 16 septembre 2010, n° 09-16.182
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loriferne
Avocat :
SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal des affaires de sécurité sociale de Perpignan,15 mai 2009) que M. X..., avocat, a été placé en redressement judiciaire le 30 juillet 2007 puis admis le 1er juillet 2008 au bénéfice d'un plan de continuation ; que la réunion des assureurs maladie des professions libérales de province (l'organisme social) a décerné une contrainte pour obtenir paiement des cotisations personnelles d'assurance-maladie de l'intéressé pour la période du 4 juillet au 31 décembre 2007 ; que le juge-commissaire a admis la créance de l'organisme social pour les cotisations échues à la date d'ouverture de la procédure collective ; que M. X... a frappé d'opposition la contrainte désormais limitée par l'organisme social au reliquat des cotisations et majorations de retard postérieures à l'ouverture de la procédure collective ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief au jugement de valider la contrainte, alors, selon le moyen :
1°) que le juge-commissaire est l'organe central de la vérification du passif et a une compétence exclusive à cet égard ; que par suite, il a seul compétence pour statuer sur le caractère antérieur ou postérieur d'une créance ; qu'en refusant néanmoins d'interroger le juge-commissaire sur le caractère antérieur ou postérieur de la créance en cause, le tribunal a violé par refus d'application l'article L. 624-2 du code de commerce ;
2°) que méconnaît les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile un jugement qui ne comporte pas de motifs, ou qui n'analyse pas la demande ; que, par suite, en s'abstenant totalement d'analyser la demande de M. X... tendant à voir demander au juge-commissaire de déterminer le caractère antérieur ou postérieur d'une créance, le tribunal a privé sa décision de motifs et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'aucun texte ne confère au juge-commissaire le pouvoir de statuer sur une créance née régulièrement après l'ouverture de la procédure collective ;
Et attendu que le juge-commissaire ayant admis la créance de l'organisme social pour les cotisations échues à la date d'ouverture de la procédure collective et épuisé ainsi sa saisine, la demande de question préjudicielle était dépourvue de fondement ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief au jugement de valider la contrainte, alors, selon le moyen :
1°) que les personnes mentionnées à l'article L. 613-1 du code de la sécurité sociale sont redevables sur leur revenu d'activité d'une cotisation annuelle de base, que cette cotisation est assise sur l'ensemble des revenus professionnels nets de l'année procurés par l'activité tels qu'ils sont retenus par l'assiette de l'impôt sur le revenu et que la cotisation provisionnelle est payable d'avance et répartie en deux échéances semestrielles fixées au 1er avril et au 1er octobre ; qu'il en résulte que la référence n'est plus une période d'activité mais une activité annuelle et qu'il ne s'agit plus d'acomptes mais de cotisations provisionnelles dont le fait générateur est l'activité générée pendant une année, du 1er janvier au 31 décembre ; que, par suite, la date de paiement des cotisations provisionnelles ne peut pas être considérée comme définissant la date d'origine de la créance ; que le fait générateur est l'existence de l'entreprise au 1er janvier, en l'occurrence, le 1er janvier 2007 ; qu'en refusant néanmoins de considérer que le fait générateur était l'existence de l'entreprise le 1er janvier 2007, ce dont il résultait que l'organisme de sécurité sociale devait déclarer sa créance à titre provisionnel pour la totalité de l'année sans pouvoir procéder à un prorata entre la période antérieure et la période postérieure au jugement déclaratif, le tribunal a violé par refus d'application l'article D. 612-2 du code de la sécurité sociale modifié ;
2°) que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur, pour son activité professionnelle, pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que lorsqu'elles ne sont pas payées à l'échéance, ces créances sont payées par privilège avant toutes les autres créances, assorties ou non de privilèges ou sûretés ; que sont nécessaires aux besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation les frais tels que loyer, téléphone, personnel, etc
; que les cotisations de sécurité sociale personnelles ne sont pas nécessitées par la poursuite de l'activité pendant la période de redressement et ce, contrairement aux cotisations de sécurité sociale assises sur les salaires versés aux employés ; qu'en considérant néanmoins que la cotisation à titre professionnel doit être considérée comme une garantie qui, en cas de survenance du risque, permet la pérennité de l'entreprise, et en cas de non assujettissement, ruinerait la poursuite de l'activité du professionnel privé de ressources par la maladie, le tribunal a perdu de vue que la créance de sécurité sociale qui a pour objet de préserver le chef d'entreprise à titre personnel n'est pas une créance nécessaire payable à son échéance mais répond à la définition de la créance privilégiée et a violé par fausse application l'article L. 622-17 du code de commerce ;
3°/ qu'en se déterminant au motif que la créance postérieure au jugement d'ouverture qui répond aux critères de l'article L. 622-17 du code de commerce est payable à l'échéance ou à défaut par privilège avant toutes les autres créances, alors que seules sont payables à l'échéance les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pour son activité professionnelle, pendant cette période, le tribunal a violé à nouveau par fausse application l'article L. 622-17 du code de commerce ;
Mais attendu que le fait générateur de la créance en litige n'est pas l'existence de l'entreprise au 1er janvier mais l'activité exercée pendant la période de référence ainsi qu'il résulte de l'article D. 612-2 du code de la sécurité sociale ; que le paiement des cotisations d'assurance maladie et maternité des avocats est une obligation légale prévue par l'article L. 613-1 du code de la sécurité sociale qui reprend les termes de l'article L. 615-1 alors applicable ; qu'étant inhérente à l'exercice professionnel, elle entre dans les prévisions de l'article L. 622-17 du code de commerce lorsque cet exercice perdure après l'ouverture de la procédure collective ;
Et attendu qu'après avoir relevé que la créance est générée par l'activité professionnelle de M. X... postérieure à l'ouverture de la procédure collective, le tribunal a exactement déduit de cette constatation que la contrainte devait être validée ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.