Cass. com., 22 mai 2007, n° 06-10.632
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 juin 2005), que par jugement du 19 juin 2001, le tribunal a ouvert le redressement judiciaire de la société Air liberté AOM (la société) et désigné MM. X... et Y... en qualité d'administrateurs ; que par jugement du 27 juillet 2001, le plan de cession de la société a été arrêté au profit de la société Holco, MM. X... et Y... étant nommés aux fonctions de commissaires à l'exécution du plan ; que durant la période d'observation, la société a utilisé les ressources de l'aéroport de Pointe-à-Pitre et s'est rendue débitrice de redevances envers la chambre de commerce et d'industrie de Pointe-à-Pitre (la chambre de commerce), gestionnaire de l'aéroport; que par ordonnance de référé du 3 juillet 2002 confirmée par un arrêt du 14 février 2003, MM. Y... et X..., ès qualités, ont été condamnés à payer à la chambre de commerce une certaine somme au titre de ces redevances ; que soutenant que MM. Y... et X... avaient commis, en leur qualité de commissaire à l'exécution du plan, une faute engageant leur responsabilité personnelle en s'abstenant d'exécuter ces décisions de justice, la chambre de commerce les a assignés en paiement de dommages-intérêts ;
Attendu que la chambre de commerce fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le moyen :
1°/ qu'engage sa responsabilité l'administrateur qui, bien que disposant des fonds nécessaires, refuse d'exécuter une décision de justice le condamnant à payer une créance née régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins de la période d'observation ; qu'en jugeant que l'existence de créanciers prioritaires au sens de l'article L. 621-32 du code de commerce dont l'échéance n'était pas encore fixée définitivement justifiait ce refus d'exécution, la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant violant l'article L. 621-32 du code de commerce, ensemble l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'à supposer même que l'existence de créances super privilégiées eût pu justifier le refus des mandataires judiciaires d'exécuter l'arrêt du 14 février 2003 les ayant condamnés au paiement de sa créance, il ne pouvait en être ainsi qu'autant que le créancier super privilégié ait demandé paiement de sa créance avant que la chambre de commerce ne demande paiement de la sienne, ce que la cour d'appel se devait de vérifier ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 621-32 du code de commerce ;
3°/ qu'en énonçant qu'il appartenait à la chambre de commerce de diligenter d'autres mesures d'exécution sur des biens saisissables, ce que son titre exécutoire lui donnait la possibilité de faire alors qu'elle ne pouvait percevoir les sommes séquestrées qui ne pouvaient être réparties qu'en suivant l'ordre fixé par la loi, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau code de procédure civile ;
4°/ qu'elle s'est également prononcée par un motif inopérant, violant ainsi l'article L. 621-32 du code de commerce ;
5°/ qu'en jugeant que les "administrateurs" n'avaient pas commis de faute en poursuivant l'activité de la société et en utilisant ainsi les ressources de l'aéroport de Pointe-à-Pitre tout en s'interdisant de régler les redevances dues en conséquence en rendant indisponibles les sommes perçues au titre de cette activité pour les réserver à d'autres créanciers, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que le commissaire à l'exécution du plan et le liquidateur ont l'obligation de verser à la Caisse des dépôts et consignations toutes les sommes qu'ils perçoivent dans l'exercice de leur mission ; que dès leur dépôt, ces sommes, qui sont aux termes de l'article L. 627-1 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, insaisissables, échappent aux poursuites individuelles des créanciers postérieurs , et sont affectées au règlement des créanciers selon leur rang ; qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que les fonds qui auraient pu permettre le paiement de la chambre de commerce se trouvaient, à la date du 31 mars 2003, à la Caisse des dépôts et consignations, et constaté qu'existaient des créanciers prioritaires au sens de l'article L. 621-32 du code de commerce, l'arrêt retient que ces fonds ne pouvaient être répartis qu'en suivant l'ordre fixé par la loi ; que par ces seuls motifs, la cour d'appel, qui n'a pas remis en cause le droit de poursuite individuelle dont disposait la chambre de commerce pour obtenir paiement de sa créance et qui n'avait pas à effectuer la recherche mentionnée à la deuxième branche, a pu retenir que MM. Y... et X..., commissaires à l'exécution du plan, n'ont pas commis de faute en refusant de se dessaisir des fonds déposés à la Caisse des dépôts et consignations ;
Et attendu, en second lieu, que la responsabilité des commissaires à l'exécution du plan ne pouvait être recherchée au titre des conditions de la poursuite de l'activité ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.