Cass. com., 23 novembre 2004, n° 02-12.178
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 621-40 du Code de commerce et 36 de la loi du 9 juillet 1991;
Attendu que l'action en liquidation d'une astreinte prononcée par une décision antérieure au jugement d'ouverture du redressement judiciaire et l'action en condamnation au paiement de l'astreinte liquidée sont soumises à la suspension des poursuites individuelles et que la fixation d'une astreinte définitive pour contraindre à l'exécution d'une obligation de faire née antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du débiteur entraîne pour celui-ci le paiement d'une somme d'argent et est donc également soumise à la suspension des poursuites individuelles ;
Attendu, selon l'arrêt déféré, que, par jugement du 26 janvier 1995, a été ordonnée la démolition d'ouvrages édifiés par la SCI Domaine de la Rivière sur son fond qui constituaient une atteinte à la servitude de passage dont bénéficie la SCI de la Foux et la restitution de la libre disposition du passage, sous astreinte de 1 000 francs par jour de retard ;
que, par arrêt du 17 octobre 1995, la cour d'appel a confirmé le jugement en précisant que la démolition devrait intervenir dans les six mois de la signification de son arrêt, délai à l'expiration duquel l'astreinte commencerait à courir; que par jugement du 30 octobre 1996, devenu définitif, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte fixée par l'arrêt précité et a fixé une astreinte définitive de 3 000 francs par jour de retard passé un délai de six mois après la notification de sa décision pour une durée d'un an ; que la SCI Domaine de la Rivière a été mise en redressement judiciaire le 20 décembre 1996 et que son plan de continuation a été homologué le 31 octobre 1997 ; que, par jugement du 10 septembre 1997, le juge de l'exécution a liquidé l'astreinte à la somme de 180 000 francs, dit qu'elle continuerait à courir pendant un délai de six mois, que ces sommes seraient liquidées dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'égard de la SCI de la Rivière et déclaré le jugement opposable au représentant des créanciers ;
Attendu que pour fixer à la somme de 180 000 francs le montant de l'astreinte définitive et juger qu'elle continuera à courir pendant un délai de six mois qui lui-même commencera à courir dans les quatre mois de sa signification, l'arrêt retient que, si la SCI de la Rivière n'est pas restée inactive, son action a été discontinue et même inexistante de novembre 1997 à mai 1998 ; que rien ne vient démontrer que toutes les solutions possibles ont été envisagées et qu'il n'existait pas de solution réalisable dans le délai imparti, de sorte que l'existence d'une cause étrangère ne peut être utilement invoquée ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que le représentant des créanciers étant partie à l'instance, la cour d'appel, qui ne pouvait ignorer que la SCI de la Rivière était en redressement judiciaire, était tenue de relever, au besoin d'office, le moyen tiré de l'irrecevabilité de l'action de la SCI de la Foux au regard du principe de l'interdiction des poursuites individuelles et a, en conséquence, violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour de cassation est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 28 novembre 2001, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.