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Décisions

CA Agen, 1re ch. civ., 3 mai 2021, n° 19/00142

AGEN

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Etablissements André Bondet (SA)

Défendeur :

MMA Iard (SA), MMA Iard Assurances Mutuelles (SA), Beologic (SA), MS Amlin Insurance (Sté), Inter Mutuelles Entreprises (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Gaté

Conseillers :

M. Benon, M. Segonnes

TGI Auch, du 16 janv. 2019

16 janvier 2019

FAITS :

A l'automne 2008, Gérard B. et Brigitte G. son épouse (les époux B.), ont passé commande auprès de la SARL Wood Chop de 90 m² de lames en matière composite destinées à être posées sur la terrasse de la piscine située dans le jardin de leur propriété de Fleurance (32).

Selon factures établies le 27 novembre 2008, les époux B. ont ainsi acquis, pour un prix de 7 037,68 Euros TTC :

- 171 lames Belavia Gris,

- 107 lambourdes pour pose sur dalle béton,

- 1 710 vis inoxydables,

- 1 710 pièces de jonction en composite.

Les lames ont été posées par les époux B. et, dès l'année 2009, ils ont constaté des fissurations, soulèvements et déformations de l'ensemble.

En avril 2010, la SARL Wood Chop a livré de nouvelles lames aux époux B., qui se sont chargés à nouveau de les poser.

Les lames ont été fabriquées par la SA Etablissements André Bondet, fournisseur de la SARL Wood Chop, qui exerce une activité d'extrusion et d'injection de différents types de matières thermoplastiques, qu'elle achète auprès de sociétés spécialisées, à partir d'outillages spécifiques.

Ces lames ont été fabriquées avec une matière première (composée de 70 % de sciure de bois et de 30 % de polymère de haute densité) fabriquée par la société belge Beologic.

Au printemps 2011, les époux B. ont constaté la réapparition des mêmes désordres et ont déclaré le sinistre à leur assureur, la compagnie Aviva, laquelle a fait procéder à une expertise amiable par le cabinet Eurexpo, en présence de la compagnie Matmut, devenue Inter Mutuelles Entreprises, assureur de la SARL Eco Tendance, nouveau nom de la SARL Wood Chop.

Selon rapport établi le 26 novembre 2013, le cabinet Eurexpo a constaté :

- une déformation généralisée des lames de terrasse suivant leur profit transversal par dilatation et bombage,

- des fentes et vrillages de lames,

- une probabilité de caractère non hydrophobes des lames.

Le 22 septembre 2014, la SARL Eco Tendance a été admise au bénéfice d'une procédure de sauvegarde.

Les époux B. ont déclaré au passif une créance de 16 082,28 Euros.

Par ordonnance du 30 juin 2015, le juge des référés du tribunal de grande instance d'Auch, saisi par les époux B., a ordonné une expertise des désordres confiée à Gerard E., laquelle a été réalisé en présence des sociétés suivantes :

- SARL Eco Tendance et son assureur la SA Inter Mutuelles Entreprises (anciennement Matmut),

- SA Etablissements André Bondet, et ses assureurs les SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles,

- société Beologic, fournisseur de la matière première des lames.

L'expert a déposé son rapport le 28 avril 2016.

Par acte délivré les 22, 25, 28 juillet et 10 août 2016, les époux B. ont fait assigner la SARL Eco Tendance, prise en la personne de Me E., la SA Etablissements André Bondet et la société Beologic devant le tribunal de grande instance d'Auch afin de les voir condamner à leur payer le coût de la réfection calculé par l'expert à 18 913,95 Euros.

Les compagnies Amlin Insurance SE, assureur de la société Beologic, et Inter Mutuelles Entreprises, sont intervenues volontairement à l'instance.

Les SA MMA Iard, MMA Iard Assurances Mutuelles ont été appelées en cause.

Le 15 septembre 2015, la SARL Eco Tendance a été placée en liquidation judiciaire, Me E. étant désigné en qualité de mandataire liquidateur.

Par jugement rendu le 16 janvier 2019, le tribunal de grande instance d'Auch a :

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Inter Mutuelles Entreprises, assureur de la société Eco Tendance,

- déclaré recevable l'intervention volontaire de la société Amlin Insurance SE, assureur de la société Beologic,

- déclaré recevable l'action de M. et Mme B. sur le fondement de la garantie des vices cachés,

- dit que la société Eco Tendance et la société Etablissements André Bondet sont tenues in solidum d'indemniser le préjudice subi par M. et Mme B. qui s'élève à 18 651,60 TTC,

- fixé au passif de la société Eco Tendance représentée par son mandataire judiciaire Me E. la somme de 18 651,60 Euros TTC, au profit de M. Gérard B. et Mme Brigitte G. épouse B.,

- condamné la société Etablissements André Bondet à payer à M. Gérard B. et Mme Brigitte G. épouse B. la somme de 18 651,60 Euros TTC,

- débouté M. Gérard B. et Mme Brigitte G. épouse B. de leurs demandes formées à l'encontre de la société Beologic,

- débouté la société Etablissements André Bondet et la société Eco Tendance, représentée par son mandataire judiciaire Me E., de leur appel en garantie à l'encontre de la société Beologic et de son assureur, la société Amlin,

- fixé la contribution à la dette à hauteur de :

. 20 % à la charge de la société Eco Tendance représentée par son mandataire judiciaire Me E.,

. 80 % à la charge de la société Etablissement André Bondet,

- constaté que le plafond de garantie des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles est épuisé,

- dit que la société Inter Mutuelles Entreprises, assureur de la société Eco Tendance, est fondée à opposer une exclusion de garantie,

- condamné en conséquence la société Etablissements André Bondet à relever et garantir la société Eco Tendance, représentée par son mandataire judiciaire, Me E., à hauteur de 80 % de la condamnation prononcée à son encontre,

- condamné la société Etablissements André Bondet à payer à M. Gérard B. et Mme Brigitte G. épouse B. la somme de 3 000 Euros au titre des frais irrépétibles,

- débouté les autres parties sur leurs demandes fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Etablissements André Bondet au paiement des dépens de l'instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement.

Le tribunal a estimé que le délai de prescription de l'action en garantie pour vice caché a couru à compter du 27 novembre 2013, date à laquelle les époux B. ont été informés des désordres par le rapport amiable et qu'ils n'ont pas laissé s'écouler le délai biennal ; que la société Eco Tendance doit garantie à ses clients compte tenu du vice du matériaux vendu ; que la SA Etablissements André Bondet est également tenue à cette garantie ; qu'il était établi que la matière première avait été livrée par la société Beologic, laquelle n'avait toutefois pas manqué à son obligation de renseignement sur les caractéristiques du produit envers la SA Etablissements André Bondet ; que la SARL Eco Tendance avait commis une faute en continuant la livraison de produits dont elle avait été informée qu'ils étaient viciés ; que la garantie de la SA Inter Mutuelles Entreprises était exclue par une clause ne permettant pas la garantie pour les travaux exécutés par l'assuré; que compte tenu du caractère sériel du sinistre, la garantie de l'assureur de la SA Etablissement André Bondet était épuisée.

Par acte du 5 février 2019, la SA Etablissements André Bondet a régulièrement déclaré former appel du jugement en désignant Me E., es-qualité de liquidateur de la société Eco Tendance, les SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, les époux B., la société Beologic, la SA Amlin Insurance SE et la SA Inter Mutuelles Entreprises en qualité de parties intimées et en indiquant que l'appel porte sur la totalité du dispositif du jugement qu'elle cite dans son acte d'appel.

La clôture a été prononcée le 9 décembre 2020 et l'affaire fixée à l'audience de la Cour du 13 janvier 2021.

PRETENTIONS ET MOYENS :

Par dernières conclusions notifiées le 8 décembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la SA Etablissements André Bondet présente l'argumentation suivante :

- L'action intentée à son encontre par les époux B. est prescrite :

. le tribunal a retenu à juste titre que cette action ne pouvait être fondée que sur la garantie des vices cachés, compte tenu qu'elle reposait sur un problème de qualité des lames.

. le délai biennal de l'article 1648 du code civil a commencé à courir, non pas à partir du dépôt du rapport d'expertise amiable le 27 novembre 2013, mais à partir du printemps 2011, date de la connaissance de la nature des désordres, alors que l'assignation en référé n'a été délivrée que le 13 mars 2015.

. les époux B. ne justifient pas du préjudice qu'ils invoquent : le coût de réfection est excessif comparé aux prix du marché.

- Elle n'a commis aucune faute :

. le tribunal a retenu qu'elle aurait été défaillante dans le processus d'extrusion et n'aurait pas procédé à des tests sur les lames produites.

. tous les experts désignés pour ce sinistre sériel ont conclu à un vice du matériau composé d'une trop grande proportion de bois et à l'absence de minéraux, imputable à la société Beologic.

. les tests sur l'inadaptabilité de son extrudeuse, réalisés par M. E. ne sont pas probants :

- le fabricant de l'extrudeuse a certifié sa compatibilité pour fabriquer les lames de bois composites,

- l'expert n'a pas procédé à un test de vieillissement complet,

- elle a également utilisé cette filière pour des lames de terrasses qui n'ont jamais fait l'objet de réclamation,

- un autre expert a exclu une faute dans le processus d'extrusion.

. les essais des lames incombaient à la SARL Eco Tendance qui les avait conçues et commercialisées : elle n'était que le sous-traitant industriel de cette société et il n'existait qu'une norme expérimentale dont l'application ne lui a pas été demandée.

- L'action récursoire exercée à son encontre par la SA Inter Mutuelles Entreprises doit être rejetée :

. la responsabilité du fait des produits défectueux suppose un dommage causé à une personne ou un bien autre que le produit lui-même.

. les lames ne peuvent être considérées comme constituant des éléments conçus pour satisfaire à des exigences déterminées à l'avance au sens de l'article 1792-4 du code civil.

- L'action récursoire exercée à son encontre par la société Beologic doit être rejetée :

. elle n'a commis aucune violation des articles 25 et 74 de la Convention de Vienne relatifs aux relations contractuelles.

. elle n'avait aucune obligation contractuelle de faire procéder à des essais.

- Elle doit être garantie par la SA Inter Mutuelles Entreprises :

. la responsabilité de la SARL Eco Tendance est prépondérante dans la survenue des désordres : elle a défini leurs dimensions, leur profil, leur esthétique, fait fabriquer l'outillage d'extrusion et édité une notice de montage.

. en garantissant son produit 25 ans, elle devait établir un cahier des charges et procéder à des essais techniques.

. la SARL Eco Tendance a poursuivi la commercialisation alors qu'elle avait connaissance de désordres.

. l'assureur ne justifie pas que les conditions générales et particulières produites correspondent au contrat souscrit par la SARL Eco Tendance ni que les clauses d'exclusion de garantie ont été portées à la connaissance de l'assuré.

. les clauses d'exclusions invoquées ne sont pas formelles et limitées.

- Elle doit être garantie par la société Beologic et son assureur Amlin Insurance SE :

. la société Beologic a fabriqué une matière non-conforme car inadaptée à l'utilisation en extérieur des lames extrudées, dont elle avait connaissance, et en est responsable en vertu des articles 35 et 36 de la Convention de Vienne.

. son action en garantie n'est pas forclose pour avoir été exercée au-delà du délai de 2 ans prévu à l'article 39 de cette convention, dès lors qu'en vertu de l'article 40, la société Beologic, qui connaissait le vice, ne peut s'en prévaloir.

. pour de la matière première livrée le 15 avril 2010, elle a informé la société Beologic de la non-conformité par un e-mail du 9 mars 2012, date à laquelle le fabricant en avait déjà connaissance, comme en atteste un e-mail du 7 décembre 2011.

. la clause d'exclusion qui est invoquée par l'assureur lui est inopposable pour les mêmes motifs que la clause opposée par la SA Inter Mutuelles Entreprises.

- La garantie des SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles lui est acquise :

. les pièces versées au débats n'apportent pas la preuve de la connaissance des clauses d'exclusion pour les frais de remplacement des lames, l'avenant à effet au 1er mai 2013 n'étant ni signé ni paraphé et la signature de l'avenant à effet du 1er mai 2012 étant apposée avant la liste des clauses d'exclusion.

. la police d'assurance de l'année 2005, retenue par le tribunal, a d'autant moins vocation à régir le sinistre en litige dont les premières réclamations sont intervenues entre 2011 et 2013 que les plafonds sont différents.

. pour les dommages immatériels non consécutifs, le plafond de 305 000 Euros mobilisable par sinistre et par année d'assurance, est reconstitué pour chacune des années concernées par les réclamations.

. ainsi, pour le sinistre des lames Belavia, de 2013 à 2015, le plafond est de 3 fois cette somme.

. les conditions particulières de la police contiennent une contrariété entre trois clauses dans la mesure où il est prévu que le plafond de 305 000 Euros et mobilisable par année d'assurance et par sinistre.

. les frais du cabinet d'expertise Erget, missionné par l'assureur, ne peuvent être imputés, au titre des 'frais de défense' sur le plafond de garantie, faute qu'ils aient permis de traiter à l'amiable un nombre important de dossier et qu'elle ait donné son accord aux conditions financières de son intervention.

. pour les frais de dépose et repose, dont la garantie peut jouer, le plafond de garantie est distinct des dommages immatériels non consécutifs et doit également être apprécié pour chaque année du sinistre.

Au terme de ses conclusions, (abstraction faite des multiples « dire et juger » et « juger » qui constituent des moyens et non des prétentions) elle demande à la Cour de :

- réformer le jugement,

- déclarer l'action formée à son encontre par les époux B. prescrite et en conséquence irrecevable,

- à titre principal :

- rejeter les demandes présentées à son encontre par les époux B., la SA Inter Mutuelles Entreprises, la société Beologic et la compagnie Amlin Insurance SE,

- à titre subsidiaire :

- condamner la SA Inter Mutuelles Entreprises, en qualité d'assureur de la SARL Eco Tendance, la société Beologic et son assureur la compagnie Amlin Insurance SE, à la garantir de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

- à titre très subsidiaire :

- dire que le plafond de garantie n'est pas épuisé et que les frais de dépose et repose des lames sont à la charge des SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles et les condamner à la garantir :

. des frais de remplacement des lames,

. des dommages immatériels non consécutifs,

. des frais de dépose et repose des lames,

. de toutes les condamnations prononcées à son encontre,

- condamner les époux B., ou qui mieux le devra, à lui payer la somme de 8 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 1er décembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, Gérard B. et Brigitte B. présentent l'argumentation suivante :

- Les produits vendus sont affectés de désordres :

. l'expert a décrit précisément les désordres, indiqué qu'ils généraient des risques de chutes et étaient inesthétiques, et prescrit leur enlèvement.

. il a expliqué que les lames n'ont pas été suffisamment compactées dans l'extrudeuse de la SA Etablissements André Bondet.

. il a mis en évidence la nécessité de procéder à une réfection complète pour un coût de 18 651,60 Euros TTC.

- Les responsabilités sont les suivantes :

. la SA Etablissements André Bondet a utilisé des équipements inappropriés, n'a procédé à aucune évaluation et n'a pas mis en œuvre de démarche qualité.

. la société Beologic n'a pas réalisé de fiche technique et n'a pas préconisé suffisamment les contraintes de sa matière.

. la SA Eco Tendance n'a pas analysé le produit et ne s'est pas préoccupée des normes.

. leur vendeur leur doit garantie pour vice caché du produit vendu et ce n'est que le 27 novembre 2013, après réalisation de l'expertise amiable, qu'ils ont eu connaissance du vice, date à laquelle le délai biennal a commencé à courir, puis a été interrompu par l'assignation en référé.

. la SA Etablissements André Bondet est également tenue à garantie des vices cachés, en raison de la chaîne de contrats, ou subsidiairement pour faute délictuelle.

Au terme de leurs conclusions, ils demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement,

- subsidiairement :

- retenir la responsabilité délictuelle de la SA Etablissements André Bondet et la condamner à leur payer la somme de 18 651,60 Euros.

- en tout état de cause :

- condamner la SA Établissements André Bondet à leur payer la somme de 5 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 6 mars 2020, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la SARL Eco Tendance, prise en la personne de Me E., et la SA Inter Mutuelles Entreprises, présentent l'argumentation suivante :

- La SA Inter Mutuelles Entreprises ne doit pas sa garantie :

. l'article 32-B 21 du contrat exclut, comme habituellement, les coûts de réparation, remplacement ou remboursement des produits livrés ou des travaux exécutés par l'assuré qui ne remplissent pas les fonctions promises par ce dernier, ainsi que les défauts de performance.

. l'article 32 B 32 exclut également la garantie pour les frais occasionnés par le retrait des biens produits, ou marchandises livrées quelle qu'en soit la cause, ainsi que les dommages subis par les acquéreurs et/ou assurés du fait de l'arrêt de leur livraison.

. l'article 32 B 1 exclut les dommages immatériels qui ne sont pas consécutifs à des dommages matériels ou corporels garantis.

- Les demandes présentées par les époux B. doivent être rejetées :

. ils ont constaté les premiers désordres en 2009, puis les seconds en 2011, point de départ de la découverte du vice qui ne peut être confondu avec la date à laquelle la cause est connue, et n'ont saisi le juge des référés qu'en mars 2015, au-delà du délai biennal de l'action en garantie des vices cachés.

. en outre, l'assignation en référé expertise n'exprimait pas clairement l'intention des demandeurs d'interrompre la prescription.

- La SA Etablissements André Bondet doit être déclarée responsable des vices :

. après avoir constaté des défauts sur des lames commandées en Chine, la SARL Wood Chop s'est adressée à la SA Etablissements André Bondet, spécialisée dans l'extrusion, qui se fournissait en matière première auprès de la société Beologic.

. les essais de fabrication de lames de terrasse ont été effectués par la SA Etablissements André Bondet, propriétaire des outillages, et la société Beologic qui ont choisi le matériau de fabrication et sa teneur en bois, en dehors de la SARL Wood Chop à laquelle aucun résultat de performance n'a été communiqué.

. la société Beologic était garant des performances de sa matière première et la SA Etablissements André Bondet du choix de cette matière.

. la SARL Wood Chop a commandé, selon facture du 1er septembre 2009, à la SA Etablissements André Bondet la fabrication de deux outillages pour le bardage et de profil des lambourdes.

. pour les lames fabriquées entre juillet 2009 et février 2012, il a été employé deux filières d'extrusion :

- une sur la base d'une fabrication chinoise, avec adaptation de l'outillage, complété puis remplacé dès 2010,

- une à partir d'un deuxième moule,

. la répétition des désordres à partir des produits fabriqués par les deux filières exclut toute mise en cause de la seule première filière.

. le produit a été élaboré par la SA Etablissements André Bondet.

. l'expertise a révélé que les désordres proviennent de la matière choisie et du processus de sa transformation.

. en tout état de cause, seule une part de responsabilité n'excédant pas 10 % pourrait être laissée à la charge de la SARL Eco Tendance et le coût des lambourdes (Dictionnaire de l'Académie Française : pièce de bois reposant sur les solives servant à soutenir un plancher ou les lames d'un parquet), d'un montant de 2 970 Euros, doit être déduit du coût de réfection.

Au terme de ses conclusions, elles demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement sauf sur les points suivants :

- rejeter les demandes présentées à l'encontre de la SARL Eco Tendance et de la SA Inter Mutuelles Entreprises,

- condamner la SA Etablissements André Bondet, les SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles, la société Beologic et la compagnie Amlin Insurance SE à les garantir de toutes éventuelles condamnations,

- condamner toutes les autres parties à leur payer la somme de 10 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 6 mars 2020, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la SA Beologic présente l'argumentation suivante :

- Elle n'a commis aucune faute :

. sa matière première n'est entrée que dans la fabrication des lames posées en avril 2010.

. la SA Etablissements André Bondet était en charge de la maîtrise du procédé d'extrusion, a conçu les lames en fonction des préconisations de la SARL Wood Chop, a choisi la matière première et a livré le produit sans procéder à aucun essai.

. le tribunal a reconnu qu'elle n'a manqué à aucune obligation d'information entre professionnels, seul le fabricant du produit fini étant à même de décider si la matière première est adaptée à son produit, et qu'elle s'est limitée à livrer un produit, non affecté d'un vice, qui lui a été commandé, sans cahier des charges.

. l'expert a indiqué que le compactage de la matière première avec une filière de bonne qualité permettait d'élaborer un produit non affecté de défaut et que le défaut d'incorporation de minéraux dans la matière première est sans incidence sur le sinistre, de sorte qu'il a conclu que seule l'utilisation d'un matériel inadapté est en cause.

. la matière première composée à 70 % de bois peut être utilisée pour des produits destinés à une utilisation en extérieur, comme le fait par exemple la société Silvadec.

. la SA Etablissements Bondet s'est abstenue d'appliquer la norme reconnue.

. elle n'a jamais validé le processus d'extrusion, ni procédé à des essais, et a été mise hors de cause dans la majorité des décisions rendues.

. finalement, seul l'outillage utilisé par l'extrudeur est en cause.

. les époux B. ne réitèrent d'ailleurs pas à son encontre les griefs qui ont été rejetés par le tribunal.

- Les appels en garantie formés à son encontre sont irrecevables :

. le défaut de conformité ne lui a pas été dénoncé dans le délai raisonnable d'un maximum de 2 ans de l'article 39 de la Convention de Vienne, le mail du 9 mars 2012 invoqué ne faisait aucune référence à des défauts où au chantier B. et il ne peut lui être opposé qu'elle connaissait, au moment de la vente, un défaut quelconque.

. la SA Etablissements André Bondet ne justifie pas de la traçabilité et des dates de la matière première achetée.

. l'action intentée à son encontre par la SARL Eco Tendance et son assureur est soumise à la loi applicable au premier contrat, c'est à dire au droit belge, de sorte que les articles 1134 et 1792-4 du code civil invoqués ne lui sont pas applicables et, en tout état de cause, son produit ne constitue pas un Epers.

. ces sociétés ne peuvent invoquer ni les articles 1383, 1386-1 et suivants du code civil, dont les conditions d'application ne sont pas réunies, ni exercer une action dont le vendeur originaire ne dispose plus.

. il n'existe pas de chaîne de contrats communautaires.

- Très subsidiairement, elle doit être garantie par la compagnie Amlin Insurance SE :

. selon ses conditions générales de vente qui figurent au verso de toutes ses factures, sa responsabilité est limitée au montant pris en charge par son assureur.

. la clause d'exclusion qui lui est opposée par son assureur n'est ni claire ni précise et la clause de limitation prive le contrat de tout intérêt.

. en tout état de cause, les clauses qui lui sont opposées ne peuvent trouver application.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

- à titre principal :

- confirmer le jugement qui a rejeté les demandes formées à son encontre,

- à titre subsidiaire :

- limiter le préjudice à 14 256 Euros,

- déclarer les appels en garantie formés à son encontre irrecevables ou mal fondés et les rejeter,

- à titre très subsidiaire :

- limiter toute condamnation à son encontre à 2 138,40 Euros,

- condamner la SA Etablissements André Bondet, la SA Inter Mutuelles Entreprises, les SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à la relever indemne de toute éventuelle condamnation,

- inscrire ce montant au passif de la SARL Eco Tendance,

- encore plus subsidiairement :

- condamner la compagnie Amlin Insurance SE à la relever indemne de toute condamnation, ou toute somme dépassant la somme de 320,76 Euros,

- rejeter les demandes de cette compagnie relative au plafond de garantie pour 'dépose-repose' et d'application de la franchise,

- en tout état de cause :

- condamner la SA Etablissements André Bondet à lui payer la somme de 10 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 30 novembre 2020, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, les SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles présentent l'argumentation suivante :

- La garantie n'est pas due :

. la SA Etablissements André Bondet a souscrit, en novembre 2005, une police toujours en vigueur qui garantit sa responsabilité civile, ayant fait l'objet d'avenants en 2012 et 2013 qui ont seulement modifié les conditions tarifaires du contrat et repris les exclusions.

. la police, signée en 2005 par André Bondet, exclut les dommages causés au produit fourni et les frais nécessaires pour le remplacer.

. la seule garantie mobilisable est la garantie des dommages immatériels consécutifs à des dommages corporels ou matériels non garantis, limitée à 305 000 Euros, qui a été épuisée par les frais de défense exposés dans l'intérêt de l'assuré et l'intervention d'un expert technique, assistant l'assuré dans 80 dossiers, d'un total de 309 146,54 Euros, conformément à l'article III-D-5 du contrat d'assurance

. le plafond est stipulé par sinistre pour l'ensemble des sinistres d'une même année d'assurance et pour l'ensemble des assurés, les réclamations résultant d'une même erreur malfaçon ou faute constituant un seul et même sinistre, imputé à l'année d'assurance au cours de laquelle la première réclamation a été présentée, ce qui n'est que le rappel des dispositions de l'article L. 124-1-1 du code des assurances.

. tel est le cas, les désordres affectant les lames « Belavia » provenant du même fait dommageable.

. l'assuré prétend voir des contradictions alors que les clauses qu'il cite concernent les plafonds applicables lorsque plusieurs sinistres se produisent au cours d'une même année d'assurance, et non plusieurs réclamations se rapportant au même sinistre.

. ces exclusions et ce plafond sont opposables aux tiers.

. les frais de dépose et repose des produits défectueux fournis par l'assuré sont pris en charge s'il les a payés.

- Subsidiairement, la garantie des vices cachés de l'assuré n'est pas due :

. seule cette garantie peut être recherchée et les époux B. ont laissé s'écouler le délai biennal qui a commencé à courir à compter de la découverte des nouveaux désordres au printemps 2011.

. la SARL Eco Tendance, bureau d'étude et non simple revendeur, et la société Beologic doivent supporter la plus grande part de responsabilité, comme la SA Etablissements André Bondet l'a expliqué.

- Les demandes indemnitaires sont excessives.

- la société Beologic et son assureur doivent les relever indemnes de toute condamnation :

. les désordres trouvent leur cause dans la matière première fabriquée par cette société, dont elle répond en application des articles 35 et 36 de la Convention de Vienne.

. le délai de recours a été respecté, la SA Etablissements André Bondet ayant informé la société Beologic des désordres par un e-mail du 9 mars 2012.

. cette dernière connaissait le défaut de conformité et a cessé d'accepter de vendre cette matière première.

. la garantie de l'assureur de la société Beologic est due.

Au terme de leurs conclusions, elles demandent à la Cour de :

- confirmer le jugement,

- subsidiairement, déclarer les demandes présentées par les époux B. sur le fondement de la garantie des vices cachés irrecevables,

- très subsidiairement, rejeter les demandes présentées à son encontre,

- encore plus subsidiairement, condamner la société Beologic et son assureur à les relever indemnes de toute condamnation prononcée à leur encontre,

- en tout état de cause, condamner toute partie succombante à leur payer la somme de 10 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 15 mai 2020, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l'argumentation, la compagnie MS Amlin Insurance (venant aux droits de la compagnie Amlin Insurance SE) présente l'argumentation suivante :

- L'action intentée par les époux B. à son encontre est irrecevable :

. rien ne démontre que les lames vendues aux époux B. ont été fabriquées avec la matière première fournie par la SA Beologic.

. cette matière première ne présentait aucun défaut et les désordres trouvent exclusivement leur cause dans le processus d'extrusion mis en œuvre par la SA Etablissements André Bondet, et plus précisément dans son outillage de mauvaise qualité, comme l'a reconnu le tribunal au vu des conclusions en ce sens de l'expert qui a procédé à des investigations complètes sur la matière première et la technique d'extrusion.

. la SA Beologic n'était tenue d'aucun conseil envers son client, professionnel de l'extrusion.

- L'action intentée par les époux B. à l'encontre de la SARL Eco Tendance et de la SA Etablissements André Bondet est forclose : le délai de 2 ans courant à compter de la découverte du vice, au printemps 2011, et non de sa cause, était écoulé lorsque les époux B. ont présenté une demande à son encontre, le 22 juillet 2016.

- Les appels en garantie formés à l'encontre de la SA Beologic ne sont pas fondés :

. l'action récursoire de la SARL Eco Tendance et de son assureur est de nature délictuelle et ne correspond pas à la responsabilité des produits défectueux ou la responsabilité de l'article 1792-6 du code civil.

. son assurée n'a commis aucune faute, et a même procédé à des essais, conformément à la norme préconisée, pour les produits qu'elle fabriquait.

- L'action récursoire de la SA Etablissements André Bondet et de ses assureurs est irrecevable :

. elle a été exercée au-delà du délai biennal prévu à l'article 39 de la Convention de Vienne, l'e-mail du 9 mars 2012 ne pouvant être assimilé à une dénonciation.

. il n'est pas établi que les lots vendus aux époux B. ont été fabriqués avec la matière première produite par la SA Beologic, faute de traçabilité des produits.

. en tout état de cause, et subsidiairement, la part de responsabilité de cette dernière ne pourrait être supérieure à 15 % de 14 445 Euros HT.

- Sa garantie est limitée :

. le droit belge autorise l'opposabilité aux tiers des exclusions de garantie des assurances non obligatoires.

. le remplacement ou la réparation des produits défectueux sont exclus par une clause claire et précise.

. la garantie des frais de dépose-repose ne joue plus 3 ans après leur date de fabrication.

. il existe également une franchise de 10 % avec un minimum de 1 000 Euros et un maximum de 5 000 Euros par sinistre.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

- confirmer le jugement, sauf en ce qu'il a fait droit aux demandes présentées par les époux B. à l'encontre de la SARL Eco Tendance et de la SA Etablissements André Bondet,

- subsidiairement :

- limiter le préjudice subi à 14 445 Euros et la somme mise à la charge de la société Beologic à 2 383,42 Euros TTC,

- déduire de toute condamnation à son contre la somme de 10 432,80 Euros correspondant aux frais de remplacement des produits défectueux,

- limiter la part de responsabilité de la SA Beologic à 15 %,

- déduire la franchise et le plafond de garantie de 125 000 Euros,

- condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 7 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS :

1) Sur l'action en garantie des vices cachés intentée par les époux B. à l'encontre de la SA Eco Tendance et de la SA Etablissements André Bondet :

a : recevabilité de l'action en garantie des vices cachés :

C'est par des motifs pertinents que la Cour adopte que le tribunal a retenu que les époux B. ont agi en garantie des vices cachés en respectant le délai de 2 ans institué à l'article 1648 du code civil qui a couru, non pas à compter de 2011, date d'apparition des déformations des lames, mais à compter du 27 novembre 2013, date à laquelle l'expertise amiable réalisée par le cabinet Saretec les a informés de la probabilité d'un vice interne des lames, et qu'ils ont régulièrement interrompu ce délai par l'assignation en référé expertise délivrée à ces sociétés en mars 2015 en application de l'article 2241 du code civil.

Il suffit de préciser les éléments suivants :

- l'assignation délivrée les 13 et 18 mars 2015 à la SA Etablissements André Bondet et à Me E., es-qualité de mandataire, visait les défauts des lames posées dans leur propriété et il importe peu que les époux B. n'y aient pas expressément fait mention qu'ils souhaitaient interrompre le délai biennal, cette interruption résultant de plein droit de l'acte en application de l'article 2241 du code civil.

- c'est le cabinet Saretec qui a fait procéder à des analyses des matériaux par le Laboratoire National d'Essai dont les conclusions lui ont permis de mettre en évidence l'origine probable des désordres dans des « défauts de cohésion matière », ensuite confirmée par l'expert judiciaire.

Le jugement doit être confirmé sur ce point.

b : fond de l'action en garantie des vices cachés :

C'est également par des motifs pertinents que la Cour adopte que le tribunal, au vu des constatations de M. E., a mis en évidence que les lames vendues par la SARL Wood Chop et fabriquées par la SA Etablissements André Bondet sont atteintes de fissurations, délaminations et relèvements qui les rendent impropres à leur usage, de sorte que l'action estimatoire à l'encontre de cette société, ainsi qu'à l'encontre de la SARL Etablissements André Bondet, fabricant et vendeur originaire, et professionnels tenus de connaître les vices des biens vendus, a été admise.

Le tribunal a également justement estimé le coût de réfection à la somme de 18 651,60 Euros TTC au vu des conclusions de l'expert qui a indiqué que l'ensemble du platelage devait être changé, comprenant les lames de terrasse, les lambourdes qui ne peuvent pas être réutilisées, les clips et les vis, étant précisé que ce n'est d'ailleurs pas la solution la plus onéreuse.

Le jugement qui a déclaré ces sociétés tenues in solidum à indemnisation pour ce montant, fixé cette somme au passif de la liquidation judiciaire de la SARL Eco Tendance, et condamné la SA Etablissements André Bondet à la payer aux époux B., doit être confirmé.

2) Sur la garantie de la SA Inter Mutuelles Entreprises, assureur de la SA Eco Tendance :

La SARL Wood Chop a souscrit auprès de la Matmut un contrat d'assurance n° 820 2090 04680T50 à effet du 23 juillet 2012 couvrant sa responsabilité civile.

A l'article 32 B 21, ce contrat exclut de la garantie « les coûts de réparation, remplacement ou remboursement des produits livrés ou des travaux exécutés par l'assuré qui ne remplissent pas les fonctions promises par ce dernier, ainsi que les défauts de performance. »

A l'article 32 B 32, il exclut également de la garantie « les frais occasionnés par le retrait des biens, produits ou marchandises livrées quelle qu'en soit la cause (...) ».

Ces clauses claires et précise excluent les coûts afférents aux dommages subis par les biens, tels que ceux devant être exposés par la SARL Eco Tendance pour le remplacement des lames défectueuses, tout en laissant dans le champ de la garantie tout un ensemble de situations dommageables, comme par exemple les dommages corporels, matériels et immatériels causés aux tiers par les produits livrés.

Il ne peut donc être soutenu qu'elles videraient le contrat de toute garantie et qu'elles ne seraient pas formelles et limitées.

Ensuite, l'assureur peut opposer au tiers, qui invoque le bénéfice d'une assurance, les exceptions opposables à l'assuré.

La SA Etablissements André Bondet n'a pas qualité pour invoquer un éventuel manquement à l'obligation, pour la compagnie Matmut, d'avoir porté à la connaissance de la SARL Wood Chop les clauses d'exclusion mentionnées ci-dessus.

En effet, seul l'assuré peut invoquer un tel manquement, ce que la SARL Wood Chop, présente aux débats en la personne de son liquidateur, ne fait d'ailleurs pas, ce qui implique qu'elle ne conteste pas avoir eu connaissance des clauses d'exclusions ci-dessus mentionnées.

Le jugement qui a rejeté les demandes présentées à l'encontre de cette compagnie doit être confirmé.

3) Sur la garantie des SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles :

Le contrat de responsabilité civile invoqué par la SA Etablissements André Bondet a été souscrit le 7 novembre 2011 auprès de ces compagnies sous le numéro 114443119 à effet du 4 novembre 2005.

L'exemplaire produit porte tant la signature du représentant de l'assureur que celle de la SA Etablissements André Bondet et c'est le contrat qui est toujours en vigueur entre les parties.

Ce contrat a fait l'objet d'un premier avenant à effet du 1er mai 2012 puis d'un second à effet du 1er mai 2013 qui ont modifié ses tarifs.

Dès lors que ces avenants ont été mis en œuvre entre les parties, et que l'assuré a payé ses cotisations selon les modalités prévues par ces avenants, ils ont été acceptés par celui-ci qui, dès lors, n'est pas fondé à faire remarquer que le premier n'aurait été signé qu'avant le rappel des clauses d'exclusions et que le second n'aurait pas été signé.

Mais en tout état de cause, l'argument d'absence de signature valide des avenants n'a aucune portée dans la mesure où le contrat initial contient les clauses qui sont invoquées par les assureurs.

Ainsi, l'article II-A-1-25 du contrat initial exclut de la garantie « les frais nécessaires pour réparer ou remplacer les produits fournis par l'assuré, ainsi que le montant du remboursement total ou partiel du prix des produits, travaux ou prestations défectueux lorsque l'assuré est dans l'obligation de procéder à ce remboursement. »

Cette clause exclut par conséquent, de façon formelle et limitée, le coût de réfection des lames défectueuses livrées aux époux B. et laisse dans le champ d'application de l'assurance de multiples situations de responsabilité de l'assurée de sorte qu'elle ne vide pas le contrat de toute garantie.

Les assureurs admettent toutefois que la garantie pour « tout dommage immatériel consécutif à des dommages corporels ou matériels non garantis » pour les biens après livraison peut être invoquée dans son principe.

Cependant, l'article I-D-1 du contrat initial stipule un plafond de garantie de 153 000 Euros, ensuite porté à 305 000 Euros, et précise que les plafonds constituent des « montants exprimés par sinistre et pour l'ensemble des sinistres d'une même année d'assurance ».

Ce mécanisme est explicité à l'article II-A-3-a qui dispose que ce plafond, pour un sinistre sériel, constitue « la limite d'engagement de l'assureur pour l'ensemble des conséquences dommageables des sinistres portés à sa connaissance au cours d'une même année d'assurance ; les montants ainsi fixés se réduisent jusqu'à épuisement par tout règlement amiable ou judiciaire d'indemnités quels que soient les dommages auxquels ils se rapportent sans reconstitution ».

Cet article ajoute : « sont considérés comme formant un seul et même sinistre quel que soit le nombre de lésés, les réclamations résultant d'une même erreur, malfaçon ou faute quelconque. »

Dès lors que le sinistre dont ont été victimes les époux B. a un caractère sériel et qu'il trouve sa cause dans un vice intrinsèque des lames Belavia fabriquées par la SA Etablissements André Bondet donnant lieu à de très nombreuses réclamations, il doit être considéré comme constituant un seul et même sinistre de sorte que ce sinistre sériel ne peut donner lieu à une indemnisation totale de plus de 305 000 Euros.

Enfin, l'article III-D-5 dispose que, pour cette garantie, les frais de défense, de quittance et autres frais de règlement viennent en déduction du montant du plafond.

Or, il est constant que pour assurer la défense de leur assuré, les assureurs ont mandaté un cabinet d'expertise technique pour l'ensemble des demandes d'indemnisation présentées, soit environ 80 dossiers, ce qui a eu pour effet d'épuiser le plafond de 305 000 Euros, avant le sinistre des époux B..

Il importe peu que ce ne soit pas l'assuré qui ait lui-même mandaté cet expert technique et il ne peut être soutenu que ce mandat aurait été donné à l'insu de l'assuré.

En effet, les assureurs produisent des échanges entre le cabinet d'expertise et l'assuré dont il résulte clairement que ce dernier donnait des instructions à l'expert des assureurs qui intervenait dans son seul intérêt.

Dès lors, c'est à juste titre que le tribunal a dit que la garantie de ces compagnies n'était plus due à la SA Etablissements André Bondet.

Cependant, la SA Etablissements André Bondet invoque également, en cause d'appel, la garantie, distincte des précédentes et qui a son propre plafond de 305 000 Euros, de « dépose et repose » prévue à l'avenant à effet du 1er mai 2013.

Cette garantie stipule à l'article 2.1.2. que sont exclus de la garantie les frais de dépose ou repose, mais précise :

« Est toutefois pris en charge le remboursement des frais de dépose et de repose des produits défectueux fournis par l'assuré dès lors qu'ils sont engagés par lui sous réserve que sa responsabilité soit engagée ».

Tel est le cas en l'espèce, la responsabilité de la SA Etablissements André Bondet étant engagée, et reconnue, au titre de la garantie des vices cachés des produits, et cette société devant prendre en charge le coût des réfections dues aux époux B., qui n'a pas été pré-financé par une autre partie.

Dès lors, la garantie des assureurs est due, mais seulement pour le coût de la dépose et de la repose des produits, et non pour le remplacement des produits eux-mêmes, soit à hauteur de 8 856 Euros, réduit à 5 856 Euros après application de la franchise de 3 000 Euros.

Le jugement sera infirmé en ce sens.

4) Sur l'origine des défectuosités et les actions récursoires de la SA Etablissements André Bondet et de la SARL Eco Tendance et leurs assureurs à l'encontre de la société Beologic et son assureur :

En premier lieu, selon l'expertise et les explications respectives, l'historique de fabrication des lames en litige est la suivante :

- la SARL Wood Chop est à l'origine de la décision de fabrication du produit et a élaboré la brochure commerciale et la fiche technique de montage des lames.

- initialement, elle a fait fabriquer ses lames en Chine mais, insatisfaite du résultat et compte tenu de défauts de fabrication, a décidé d'y mettre un terme et de les faire fabriquer en France.

- début 2009, elle a contacté la SA Etablissements André Bondet, spécialiste des procédés d'extrusion qui a décidé de s'approvisionner en matière première auprès de la société Beologic.

- la SARL Wood Chop a récupéré les deux outillages d'extrusion utilisés en Chine qu'elle a déposés dans les locaux de la SA Etablissements André Bondet où des essais de fabrication ont été réalisés.

- cette dernière a ensuite modifié le matériel et mis au point sa propre machine d'extrusion.

- suite à la première livraison d'une matière première composée de 70 % de sciure de bois et de 30 % de polymère de haute densité, le produit a été validé.

- les lames ont été fabriquées de janvier 2010 à février 2012 avec commercialisation immédiate au fur et à mesure de la production.

En deuxième lieu, le tribunal justement mis en évidence, après avoir analysé la chronologie des événements et les documents produits, que les lames livrées aux époux B. en avril 2010 qui sont en cause, (en remplacement des précédentes), ont nécessairement été fabriquées en début d'année 2010 sur la première machine de la SA Établissements André Bondet avec la matière première achetée auprès de la société Beologic, son seul fournisseur, même si la SA Etablissements André Bondet n'a pas mis en œuvre un procédé précis de traçabilité des produits.

En troisième lieu, s'agissant des causes du sinistre, l'expert a procédé à des analyses très approfondies, tant chimiques et mécaniques sur les produits, et a même investigué sur le processus d'extrusion mis au point par l'appelante.

Il n'a à aucun moment mis en cause la qualité de la matière première fournie par la société Beologic, conforme aux commandes et, au contraire, a validé son procédé de fabrication qui consiste à utiliser un pré-mélange des composants.

Il a précisé qu'il est possible d'obtenir des lames de bonne qualité avec une matière première composée de 70 % de sciure de bois et de 30 % de polymère.

Ainsi, le fabricant « Silvadec » a fabriqué des produits non affectés de défauts à partir de la même matière première et la société Megawood en fabrique également avec une matière première ayant une teneur en bois encore supérieure.

L'expert a expliqué qu'à partir de cette matière première, le procédé de fabrication des lames consiste à conformer la matière sous pression à l'aide d'une filière dont les différentes étapes doivent prendre en compte :

- la composition de la matière première,

- les paramètres d'extrusion déterminés à partir du point de fusion du plastique et de la réduction du taux d'humidité du composé bois,

- un dégazage poussé,

- l'adaptation de l'extrudeuse pour limiter les pertes de pression et favoriser la cohésion du matériau avec un faible angle aigu de cheminement du compost à travers la filière et la mise en place de chicanes pour assurer une surcompression.

Il a expliqué que le procédé de fabrication mis en œuvre par la SA Etablissements André Bondet est défaillant :

- elle n'a procédé aucun essai initial.

- elle a utilisé, notamment, une machine Titan T68 en principe dédiée à la réalisation de tubes en PVC, soit des produits beaucoup moins complexes que les lames de terrasse.

- elle a utilisé une méthode de réglage de débit, ce que l'expert a qualité de « peu efficiente » avec un refroidissement forcé en sortie de filière, ce qui n'est pas approprié et l'a même conduit à qualifier de « moyens mineurs (bricolage) » cette façon de procéder.

- lors des essais effectués pendant l'expertise, une sonde de pression en entrée de filière était cassée, alors que son fonctionnement est indispensable au contrôle et à l'analyse du produit.

- le procédé de fabrication, utilisé par cette société, qui ne comprenait pas de dispositif de surpression, induisait un affaiblissement des caractéristiques mécaniques du produit fabriqué.

- la démarche de validation de la qualité du produit n'est pas satisfaisante par absence d'enregistrement de paramètres d'extrusion et de caractéristiques performancielles.

- aucune évaluation de la qualité du produit fabriqué n'a été mise en œuvre, seul un contrôle visuel et dimensionnel étant réalisé.

Il a finalement identifié la cause essentielle du désordre dans la faible compacité de la matière première en entrée de filière, ce qui relève d'une défaillance dans la mise au point et le paramétrage de l'extrudeuse exclusivement imputable à la SA Etablissements André Bondet, précisant que la filière utilisée par cette dernière était inappropriée à établir une compacité homogène et suffisante pour obtenir une cohésion dans les profils de lames de terrasses à partir d'une formulation très chargée en bois.

Une rigueur particulière de fabrication était pourtant d'autant plus nécessaire que les lames, composées d'une part majoritaire de bois, étaient destinées à une utilisation extérieure.

L'appelante ne saurait remettre en cause ces constatations précises et objectives aux motifs :

- que d'autres lames de terrasses qu'elle a fabriquées avec une matière première composée pour moitié de bois et de polymère ne seraient pas affectées de défaut alors que c'est précisément la haute teneur en bois composant les lames vendues aux époux B. qui imposaient une attention toute particulière à l'extrusion,

- que des lames fabriquées avec la même matière première que celle en litige par les sociétés EPW et Dumaplast seraient également affectées de défauts, alors que l'origine de ces défauts est inconnue.

Pourtant, la SA Etablissements André Bondet avait une parfaite connaissance de la composition du produit, qu'elle avait commandé initialement dès mai 2008, et de sa haute teneur en bois mentionnée sur la facture alors établie.

Elle n'avait établi aucun cahier des charges à l'égard de la société Beologic

Enfin, elle une professionnelle de l'extrusion qui dispose de son propre bureau d'étude.

Il n'appartenait pas à la société Beologic de s'immiscer dans le processus d'extrusion, de la seule compétence de l'appelante, ni même de valider les produits fabriqués par celle-ci même si, dans le cadre de la relation commerciale, un responsable de la SA Etablissements André Bondet a pu se déplacer dans les locaux de la société Beologic en avril 2009 pour se faire présenter les produits et les analyser, et même s'il a existé des échanges entre le fabriquant et sa cliente sur les produits vendus.

Aucune faute ne peut donc être imputée à la société Beologic dans la survenance des désordres en litige.

Il résulte toutefois de l'expertise que la SARL Wood Chop a commis des fautes.

En effet, elle n'était pas un simple vendeur des lames, mais a initié la conception du produit et même proposé à ses clients une garantie de 25 ans, ce qui supposait a minima, et même si elle n'avait pas compétence pour vérifier les paramétrages de la filière d'extrusion mis en œuvre par la SA Etablissements André Bondet, qu'elle établisse un cahier des charges à destination de celle-ci, et qu'elle fasse valider les produits finis, éventuellement par un bureau d'étude ou au moins qu'elle les teste pour vérifier leur résistance aux éléments naturels, ce qu'elle n'a pas fait.

Au vu de ces éléments, la décision du tribunal qui a rejeté les actions récursoires exercées à l'encontre de la société Beologic et retenu la responsabilité de la SA Etablissements André Bondet et de la SARL Evo Tendance doit être confirmée, ce qui rend sans objet l'argument tiré du non-respect du délai pour agir à l'encontre de la société Beologic prévu à la Convention de Vienne et l'examen de la garantie de la compagnie MS Amlin Insurance.

La décision qui, au vu de la gravité des fautes commises et de leur causalité, a mis 80 % de la contribution à la dette à la charge de la SA Etablissements André Bondet et 20 % à la charge de la SARL Eco Tendance, doit également être confirmée.

Enfin, l'équité nécessite de condamner l'appelante à payer aux époux B., en cause d'appel, la somme de 4 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, l'équité n'imposant pas l'application de ce texte au profit d'autres parties.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

- CONFIRME le jugement SAUF en ce qu'il a constaté que le plafond de garantie des sociétés MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles est épuisé,

- STATUANT A NOUVEAU sur le point infirmé,

- DIT que la garantie des SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles est acquise à la SA Etablissements André Bondet dans la limite de la somme de 5 856 Euros, franchise déduite ;

- en conséquent, CONDAMNE les SA MMA Iard et MMA Iard Assurances Mutuelles à relever et garantir la SA Etablissements André Bondet à hauteur de ce montant et à relever et garantir la SARL Eco Tendance et la SA Inter Mutuelles Entreprises également dans cette limite et celle tenant à la contribution à la dette ;

- Y ajoutant,

- CONDAMNE la SA Etablissements André Bondet à payer à Gérard B. et Brigitte G. épouse B., en cause d'appel, la somme de 4 000 Euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- DIT n'y avoir lieu, en cause d'appel, à l'application de l'article 700 du code de procédure civile au profit d'autres parties ;

- CONDAMNE la SA Etablissements André Bondet aux dépens de l'appel qui pourront être recouvrés directement par la SCP d'A.-B., Me P., et la Selarl Action Juris pour ceux dont ils ont fait l'avance sans avoir reçu provision, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.