Cass. com., 1 février 2000, n° 97-13.430
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Grimaldi
Rapporteur :
Mme Aubert
Avocat général :
Mme Piniot
Avocats :
SCP Piwnica et Molinié, SCP Célice, Blancpain et Soltner
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 28 janvier 1997), que, par ordonnance du président du tribunal de grande instance du 11 décembre 1992, la société civile de placements immobiliers X... Invest 1 (la société), a été autorisée à prendre une inscription provisoire de nantissement sur les parts détenues par la société Vignal dans son capital, ainsi que celui de la société Euro Invest 1 et à procéder à la saisie conservatoire de ces parts pour garantir une créance évaluée à 8 500 000 francs ; que la société Vignal a été mise en redressement judiciaire le 16 février 1993 puis en liquidation judiciaire le 20 mars suivant, M. Y... étant désigné en qualité de liquidateur ; que le liquidateur a demandé au Tribunal de la procédure collective à être autorisé à disposer des parts qui avaient fait l'objet des mesures conservatoires ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir dit la juridiction consulaire compétente pour connaître du litige alors, selon le pourvoi, que le Tribunal saisi d'une procédure de redressement judiciaire connaît seulement des actions concernant le redressement ou la liquidation judiciaires ; que la mainlevée d'une saisie conservatoire est de la compétence de la juridiction de droit commun ; qu'en considérant que l'action du liquidateur, visant à obtenir la mainlevée des saisies conservatoires pratiquées les 17 et 18 décembre 1992 par la société, était de la compétence de la juridiction saisie de la liquidation judiciaire de la société Vignal, la cour d'appel a violé l'article 174 du décret du 27 décembre 1985, dans sa rédaction antérieure au décret n° 94-910 du 21 octobre 1994 ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le Tribunal de la procédure est compétent pour connaître de la demande du liquidateur, fondée sur la règle de l'arrêt des poursuites individuelles, propre à la procédure collective à laquelle est soumise la société Vignal et faite en vue de réaliser les actifs de la société en liquidation ; que la cour d'appel a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, pris en ses cinq branches :
Attendu que la société fait encore grief à l'arrêt d'avoir prescrit la mainlevée des deux saisies conservatoires sur les parts sociales, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la suspension des poursuites n'entraîne pas de plein droit l'anéantissement de la voie d'exécution engagée par le créancier saisissant, préalablement au jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'en considérant que les saisies conservatoires, pratiquées antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective du débiteur saisi, ne pouvaient être maintenues après le jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé les articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, d'autre part, que sont valables les actes de saisie intervenus antérieurement à la date de cessation des paiements du débiteur saisi ; qu'en prononçant la mainlevée des saisies conservatoires pratiquées antérieurement au jugement du redressement judiciaire de la société Vignal, sans constater que ces saisies avaient été diligentées postérieurement à la date de cessation des paiements, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 107.7 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, de troisième part, que l'acte de saisie même exercée à titre conservatoire rend les biens indisponibles ; qu'en prescrivant la mainlevée des saisies conservatoires, pratiquées antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de la société Vignal, débiteur saisi, la cour d'appel a violé l'article 2092-3, alinéa 1er, du Code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 qui l'a abrogée ; alors, de quatrième part, que le bénéficiaire d'un nantissement dispose de tous les droits de gage dès son inscription provisoire ; qu'en considérant que la société titulaire d'un nantissement sur les parts sociales de la société Vignal, inscrit à titre provisoire antérieurement au jugement d'ouverture de cette société ne pouvait pas se prévaloir des dispositions de l'article 161 de la loi du 25 janvier 1985, dès lors qu'elle n'avait pas pu procéder à l'inscription définitive de son nantissement, la cour d'appel a violé les articles 161 et 57 de la loi du 25 janvier 1985 et l'article 2092-3 du Code civil ; et alors, enfin, que le titulaire d'un nantissement inscrit à titre provisoire, préalablement au jugement d'ouverture de la procédure collective du débiteur, peut procéder à l'inscription définitive de son nantissement après le jugement d'ouverture et que cette inscription rétroagira à la date de la publication provisoire ; qu'en considérant que la société ne pouvait pas procéder à l'inscription définitive de son nantissement, dès lors que le Tribunal n'avait pas encore statué sur l'action engagée au fond pour fixer le montant de sa créance, la cour dappel a violé les articles 47, 48 et 57 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu qu'après avoir relevé qu'à la date du jugement d'ouverture du redressement judiciaire de la débitrice saisie, le créancier saisissant l'avait assignée en vue de faire valider les saisies conservatoires pratiquées, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que celui-ci ne possédait aucun droit acquis sur les parts sociales avant l'ouverture du redressement judiciaire et, en conséquence, a ordonné la mainlevée des saisies conservatoires ; que, par ces motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision sans encourir les griefs du moyen ; que celui-ci n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.