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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 5, 6 mai 2021, n° 19/06400

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

PSI Grand Sud (SAS)

Défendeur :

Monoprix (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Prigent

Conseillers :

Mme Soudry, Mme Lignières

Avocats :

Me Grappotte-Benetreau, Me Auche, Me Boccon Gibod

T. com. Paris, 15e ch., du 18 févr. 2019

18 février 2019

FAITS ET PROCÉDURE :

La société PSI Grand Sud (ci-après la société PSI) exerce une activité de surveillance et de gardiennage.

La société Monoprix, qui exploite un réseau de magasins de détail généralistes, a eu recours à la société PSI pour des prestations de gardiennage dans plusieurs de ses magasins à partir de 2002.

Le 31 décembre 2013, les sociétés PSI et Monoprix ont conclu un contrat-cadre pour une durée indéterminée avec effet à sa date de signature. En exécution de ce contrat, la société PSI a exécuté des prestations de surveillance et de gardiennage dans 19 magasins exploités par la société Monoprix.

En 2015, la société Monoprix a lancé une première procédure d'appel d'offres pour sélectionner ses prestataires. Par courrier du 12 juin 2015, la société Monoprix a informé la société PSI de la résiliation du contrat au 12 juin 2017, au cas où son offre ne serait pas retenue à l'issue de l'appel d'offres. 

A l'issue de l'appel d'offres, la société PSI a été sélectionnée pour 11 magasins ; le préavis prévu jusqu'au 12 juin 2017 s'appliquant pour les 8 autres magasins de son périmètre d'activité.

Le 8 octobre 2015, les sociétés PSI et Monoprix ont conclu pour 11 magasins un nouveau contrat-cadre pour une durée indéterminée, avec préavis de trois mois en cas de résiliation unilatérale. Aux termes de ce contrat, les parties convenaient d'une nouvelle grille tarifaire applicable aux prestations réalisées à compter du 1er septembre 2015.

En 2017, la société Monoprix a lancé une seconde procédure d'appel d'offres.

Par courrier du 7 avril 2017, la société Monoprix a résilié le contrat-cadre du 8 octobre 2015 avec effet au 31 août 2017.

Le 27 juillet 2017, la société PSI a été informée que son offre n'était pas retenue à l'issue de l'appel d'offres et que la résiliation du contrat était confirmée au 31 août 2017. 

Par courrier en date du 1er août 2017, la société PSI a contesté la date de résiliation et sollicité l'obtention d'un délai de préavis de 24 mois.

Par courrier électronique du 10 août 2017, la société Monoprix a refusé l'octroi du délai de préavis sollicité.

Par acte d'huissier de justice en date du 14 novembre 2017, la société PSI a fait assigner la société Monoprix devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de réparation du préjudice subi du fait des violations alléguées des dispositions de l'article L. 442-6 du code de commerce.

Par jugement du 18 février 2019, le tribunal de commerce de Paris a :

- débouté la société PSI de toutes ses demandes,

- condamné la société PSI à payer à la société Monoprix la somme de 274,25 euros à titre de remboursement de la facture payée deux fois par erreur,

- débouté les parties de l'ensemble de leurs demandes plus amples ou contraires,

- condamné la société PSI à payer à la société Monoprix la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire,

- condamné la société PSI aux entiers dépens dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 78,36 euros dont 12,85 euros de TVA.

Par déclaration du 21 mars 2019, la société PSI a interjeté appel de ce jugement en visant la totalité des chefs du jugement critiqués.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 20 janvier 2021, la société PSI demande à la cour de :

- réformer le jugement entrepris,

Vu l'article L. 442-6 I 1°, 2°, 4° et 5° du code de commerce,

Vu l'article 1147 du code civil,

- condamner la société Monoprix à verser à la société PSI les sommes suivantes :

1 720 952,80 euros correspondant à 20 mois de préavis et à titre subsidiaire la somme de 431 722,14 euros correspondant à la marge brute sur 20 mois de préavis,

74 327,78 euros correspondant à la baisse tarifaire imposée,

13 735,98 euros correspondant à la rétro-commission perçue le 15 septembre 2015,

120 879,09 euros correspondant au coût salarié,

 2 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du règlement tardif des factures,

50 000 euros au titre des frais irrépétibles,

- la condamner encore aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Grappotte Benetreau en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions notifiées par le RPVA le 27 janvier 2021, la société Monoprix demande à la cour de :

Vu les dispositions de l'ancien article L. 442-6 I, 2°, 4° et 5° du code de commerce,

Vu les écritures,

Vu les pièces versées aux débats,

Vu le jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 18 février 2019 (RG n° 2017/067347),

CONFIRMER le jugement du 18 février 2019 susvisé en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Sur la rupture brutale de relations commerciales,

A titre principal,

- dire et juger que les dispositions de l'article L. 442-6 I, 5° du code de commerce ne sont pas applicables à la rupture des relations commerciales entre la société Monoprix et la société PSI,

A titre subsidiaire,

- dire et juger que le grief de rupture brutale n'est pas caractérisé,

En conséquence,

- dire et juger mal fondée l'action en responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales initiée par la société PSI à l'encontre de la société Monoprix et l'en débouter,

- débouter la société PSI de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger que les préjudices allégués par la société PSI sont injustifiés dans leur principe et leur quantum,

En conséquence,

- dire et juger mal fondée l'action en responsabilité pour rupture brutale des relations commerciales initiée par la société PSI à l'encontre de la société Monoprix et l'en débouter,

Débouter la société PSI de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts,

Sur les autres griefs,

- dire et juger que les griefs au titre des tarifs prétendument bas et de la rétro-commission ne sont pas caractérisés,

En conséquence,

- dire et juger mal fondée l'action en responsabilité au titre des tarifs prétendument bas et de la rétro-commission initiée par la société PSI à l'encontre de la société Monoprix et l'en débouter,

- débouter la société PSI de l'ensemble de ses demandes de dommages-intérêts,

A titre infiniment subsidiaire,

- dire et juger que les préjudices allégués par la société PSI sont injustifiés dans leur principe et leur quantum,

En conséquence,

- dire et juger mal fondée l'action en responsabilité au titre des tarifs prétendument bas et de la rétro-commission initiée par la société PSI à l'encontre de la société Monoprix et l'en débouter,

- débouter la société PSI de l'ensemble de ses demandes,

Sur la demande de dommages-intérêts pour paiement tardif des factures,

- constater que la société Monoprix a réglé l'ensemble des sommes dues à la société PSI au titre des factures, pénalités de retard et indemnités de recouvrement dues,

En conséquence,

- dire et juger mal fondée l'action en responsabilité au titre du paiement tardif des factures,

- débouter la société PSI de sa demande indemnitaire de ce chef,

En tout état de cause,

- débouter la société PSI de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la société PSI à payer à la société Monoprix la somme de 50 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, dont distraction au profit de la SELARL Lexavoué Paris-Versailles,

- condamner la société PSI aux entiers dépens de l'instance.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 3 février 2021.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la rupture brutale de la relation établie

L'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige dispose qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure. Lorsque la rupture de la relation commerciale résulte d'une mise en concurrence par enchères à distance, la durée minimale de préavis est double de celle résultant de l'application des dispositions du présent alinéa dans les cas où la durée du préavis initial est de moins de six mois, et d'au moins un an dans les autres cas.

La relation commerciale, pour être établie au sens de ces dispositions, doit présenter un caractère suivi, stable et habituel. Le critère de la stabilité s'entend de la stabilité prévisible, de sorte que la victime de la rupture devait pouvoir raisonnablement anticiper pour l'avenir une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial.

Le texte précité vise à sanctionner, non la rupture elle-même, mais sa brutalité caractérisée par l'absence de préavis écrit ou l'insuffisance de préavis.

Le délai de préavis doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser en fonction de la durée, de la nature et des spécificités de la relation commerciale établie, du produit ou du service concerné.

La cour doit procéder à une appréciation in concreto des conditions de déroulement et de la spécificité de la relation.

- l'existence d'une relation commerciale établie :

La société PSI critique le jugement en ce qu'il a qualifié sa relation commerciale avec la société Monoprix de précaire lors de la rupture de 2017 en faisant principalement valoir que le nouveau contrat signé en 2015 était à durée indéterminée et qu'elle pouvait donc raisonnablement penser que la relation allait perdurer au moins au-delà de deux années.

La société Monoprix demande la confirmation du jugement en ce qu'il a retenu l'absence de relation commerciale établie entre les parties lors de la rupture intervenue en 2017.

Sur ce,

Alors que les sociétés entretenaient une relation d'affaires établie depuis 2002 par la fourniture de prestations de gardiennage dans divers magasins Monoprix, un contrat cadre en 2013 est venu définir et formaliser l'ensemble de leurs relations contractuelles. Deux ans après ce premier contrat cadre, un appel d'offres a été lancé par la société Monoprix auquel la société PSI a participé et à l'issue duquel cette dernière a vu son périmètre d'intervention limité à 11 magasins. Dès 2015, la relation commerciale entre les parties s'est fragilisée et s'est caractérisée par l'aléa concurrentiel. Aussi, lorsque deux ans après la conclusion du contrat cadre de 2015, un second appel d'offres en 2017 est à nouveau lancé par la société Monoprix, la société PSI ne pouvait plus raisonnablement penser que la relation n'allait pas être marquée par une mise en concurrence régulière. D'autant que dans son courriel du 17 aout 2015, l'équipe responsable du gardiennage des magasins Monoprix lui a écrit : « Suite à votre proposition tarifaire et au travail fourni lors de la rédaction de votre réponse, votre proposition concernant la réalisation de votre gardiennage a été retenue. Pour information, nous vous confirmons que notre direction juridique travaille d'ores et déjà sur notre contrat. Dans l'intervalle, nous comptons sur votre professionnalisme pour appliquer pour le 1er septembre 2015 les prix devisés CNPAS incluse dans notre grille tarifaire et de les maintenir jusqu'au 01 septembre 2017 ». (pièce 11 de PSI).

Pour prouver l'existence d'une relation établie entre les parties, il n'est pas non plus pertinent pour la société PSI d'invoquer le fait que le contrat cadre de 2015 était conclu à durée indéterminée, puisque le premier contrat cadre de 2013 l'était déjà et pourtant un appel d'offres a été lancé par la société Monoprix deux ans après.

Au vu de ses éléments, la relation entre les parties depuis 2015 était devenue précaire et avait vocation à être soumise tous les deux ans à un nouvel appel d'offres.

Par conséquent à défaut d'une relation commerciale établie entre les parties existant lors de la rupture intervenue en 2017, les dispositions de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ne sont pas applicables.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a débouté la société PSI de ses demandes en indemnisation pour rupture brutale, y compris sa demande au titre du coût des salariés qu'elle a dû licencier du fait de la brutalité de la rupture.

Sur les autres demandes de la société PSI

- Sur la baisse tarifaire imposée

La société PSI soutient que la société Monoprix lui a imposé en 2015 dans le cadre de sa candidature à l'appel d'offres des conditions tarifaires extrêmement basses puisqu'inférieures à celles qui étaient pratiquées alors entre les parties, que même pour les magasins entrant dans le champ du préavis alors que le préavis suppose un maintien des mêmes conditions, cette baisse des prix étant été appliquée dès le 1er septembre 2015 jusqu'à aout 2017. Elle ajoute qu'elle s'est vue imposer cette baisse des prix lors de la réunion du 10 juillet 2015, qu'après la reconduction du contrat elle a demandé une hausse minime des prix fin 2016 et que cela a été concomitant avec l'annonce d'un nouvel appel d'offres.

La société PSI prétend que cette baisse de tarifs imposée constitue un déséquilibre significatif ainsi que l'obtention de conditions manifestement abusives sous la menace d'une rupture brutale.

La société Monoprix demande la confirmation du jugement sur ce point.

- le grief fondé sur le déséquilibre significatif :

Selon l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers de soumettre ou de tenter de soumettre un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

La caractérisation de la pratique prohibée par les dispositions de l'article L. 442-6 I 2° du code de commerce suppose d'une part, d'établir une tentative de soumission ou une soumission du partenaire commercial à une clause et d'autre part, de démontrer que cette clause est constitutive de déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties.

Tout d'abord, l'élément de soumission ou de tentative de soumission de la pratique de déséquilibre significatif implique la démonstration que cette baisse de prix lui a été imposée.

La charge de la preuve incombe à la société PSI. Cette dernière produit à l'appui de ses allégations l'échange des courriels entre les parties dans le cadre de l'appel d'offres de 2015. (pièce 10 de PSI)

Il ressort de la lecture de ces courriels que le gérant de la société PSI a écrit à M. E... (directeur des achats et frais généraux du groupe Casino auquel appartient la société Monoprix) en ces termes : « Monsieur, pour faire suite à votre mail de ce jour et à notre rencontre d'hier, veuillez trouver ci-joint la grille tarifaire Monoprix 2015, ainsi que notre nouvelle proposition relative à l'appel d'offres « Sécurité Humaine Monoprix/Cdiscount/Gosport » (...)

« Nous attirons votre attention sur les efforts tarifaires consentis :

- baisse du tarif horaire qui passe à 18,65 euros HT au lieu de 18,96 euros HT aujourd'hui, qui était annoncé hier à 18,68 euros HT,

- nouvelle grille RFA en nette amélioration ».

Concernant les magasins retenus à l'issue de l'appel d'offres, il n'est pas démontré de soumission ou tentative de soumission de la part de la société PSI qui a librement soumis sa proposition tarifaire dans le cadre de l'appel d'offres.

Concernant les prestations pour les magasins n'ayant pas été retenus à l'issue de l'appel d'offre, le principe est que la relation contractuelle pendant le préavis se maintient dans les mêmes conditions y compris tarifaires. Cependant, il est constant que la société Monoprix a octroyé un préavis de 24 mois avant la cessation effective de la relation contractuelle sur ces 11 magasins, la société PSI ayant donc bénéficié d'un préavis d'une durée largement supérieure à celle à laquelle elle pouvait prétendre à l'issue d'une relation de 12 ans dénuée de dépendance économique, ce qui est le cas en l'espèce, étant constant que la société PSI tirait de sa relation d'affaires avec la société Monoprix 11 % de son chiffre d'affaires.

Au vu de ces éléments, les juges de 1re instance ont, à juste droit, relevé que la baisse de tarifs sur l'ensemble du « marché Monoprix » de 2015 à 2017, y compris pour le gardiennage des magasins faisant partie du préavis avant rupture, a été compensée par une durée particulièrement longue du préavis accordé par la société Monoprix.

La société PSI a d'ailleurs confirmé l'application des nouveaux tarifs sur l'ensemble du marché Monoprix par courriel du 12 aout 2015 en ces termes : « nous vous confirmons l'application des nouveaux tarifs sur le marché Monoprix à compter du 1er septembre 2015 ». (pièce 10 de PSI)

La réalité du déséquilibre significatif allégué n'est donc pas démontrée en l'espèce.

- le grief fondé sur l'obtention sous la menace de conditions manifestement abusives

Selon l'article L. 442-6 4° du code de commerce : « I.- Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : »

« 4°. D'obtenir ou de tenter d'obtenir, sous la menace d'une rupture brutale totale ou partielle des relations commerciales, des conditions manifestement abusives concernant les prix, les délais de paiement, les modalités de vente ou les services ne relevant pas des obligations d'achat et de vente ».

Les tarifs critiqués ayant été proposés dans le cadre d'une procédure d'appel d'offres, il ne peut être pertinemment allégué de l'existence d'une menace d'une rupture brutale.

En outre, il a été démontré que les tarifs pratiqués de 2015 à 2017 sont issus d'une proposition librement consentie par PSI dans le cadre de ladite procédure d'appel d'offres, qu'il n'est donc pas démontré que ces tarifs constituaient des conditions manifestement abusives.

La décision de première instance sera donc confirmée en ce qu'elle a débouté la société PSI de ces chefs.

Sur l'obtention d'un avantage injustifié : la rétro-commission perçue le 15 septembre 2015

Aux termes de l'article L. 442-6 1° du code de commerce dans sa version applicable aux faits de l'espèce, il est sanctionné le fait d'« obtenir ou de tenter d'obtenir d'un partenaire commercial un avantage quelconque ne correspondant à aucun service commercial effectivement rendu ou manifestement disproportionné au regard de la valeur du service rendu. Un tel avantage peut notamment consister en la participation, non justifiée par un intérêt commun et sans contrepartie proportionnée, au financement d'une opération d'animation commerciale, d'une acquisition ou d'un investissement, en particulier dans le cadre de la rénovation de magasins ou encore du rapprochement d'enseignes ou de centrales de référencement ou d'achat. Un tel avantage peut également consister en une globalisation artificielle des chiffres d'affaires, en une demande d'alignement sur les conditions commerciales obtenues par d'autres clients ou en une demande supplémentaire, en cours d'exécution du contrat, visant à maintenir ou accroître abusivement ses marges ou sa rentabilité ».

C'est sur ce fondement que la société PSI reproche à la société Monoprix d'avoir récupéré la part du « CICE » (« Crédit d'Impôt Compétition Emploi ») qu'elle a perçue sur les derniers mois en sollicitant le versement de la somme de 13.735,98 euros versée entre les mains de l'actionnaire majoritaire de la société Monoprix.

La société PSI critique le jugement qui a considéré qu'il s'agissait de frais administratifs payés par la société PSI dans le cadre de l'organisation de l'appel d'offres de 2015.

La société Monoprix demande la confirmation de la décision de première instance de ce chef en faisant valoir que la société PSI avait connaissance de ces frais administratifs d'organisation et de suivi des appels d'offre puisqu'elle avait sollicité des précisions sur ceux-ci, que cette somme versée le 15 septembre 2015 ne correspond nullement à une rétrocession de la part du CICE perçue par la société PSI, et que ces frais ont été payés à la société Casino au titre des frais administratifs ouvrant droit à la participation à la procédure d'appels d'offres.

Sur ce,

Il ressort du courriel adressé par la société PSI à la société Monoprix en date du 25 juin 2015 (pièce 12 de PSI) que la société PSI avait connaissance du fait qu'elle devrait des frais administratifs au titre de la participation à l'appel d'offres à hauteur de 1,5 % de son chiffre d'affaires sur la 1ere année. La somme versée au groupe Casino, dont il n'est pas contesté et que c'est ce dernier qui a organisé l'appel d'offres de 2015 sur le gardiennage des magasins Monoprix, correspond bien aux frais administratifs prévus et non à une rétrocession déguisée du CICE comme le prétend la société PSI. (pièces 26 et 25 de PSI)

La demande de ce chef sera donc déboutée, à l'instar de ce qu'ont décidé les 1ers juges.

Sur le préjudice subi du fait du règlement tardif des factures

Il est constant que les factures dont il est allégué ont été payées tardivement par la société Monoprix à la société PSI avec les pénalités de retard, il n'est pourtant pas justifié d'un préjudice distinct subi par cette dernière qui n'aurait pas été réparé par les pénalités de retard.

Sur les frais et dépens

Le jugement du tribunal de commerce sera confirmé sur les frais et dépens de première instance. En cause d'appel, la société PSI succombant, supportera les entiers dépens de l'appel. L'appelante participera en outre à hauteur de 5 000 euros aux frais irrépétibles complémentaires que la société Monoprix a dû engager en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement entrepris dans toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société PSI Grand Sud payer à la société Monoprix la somme de 5 000 euros, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société PSI Grand Sud aux entiers dépens de l'appel.