Cass. com., 16 janvier 2019, n° 17-17.210
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Claire Leduc et Solange Vigand, SCP Le Bret-Desaché
Sur le premier moyen, pris en sa première branche, qui est recevable :
Vu les articles L. 622-20, alinéa 1er, du code de commerce, rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-4, alinéa 3, du même code, ensemble les articles 122 et 125 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par contrat du 5 novembre 2007, M. et Mme C... ont confié à la SCOP Memce (la SCOP), dirigée par M. et Mme X..., des travaux de rénovation d'une maison d'habitation ; qu'en raison de désordres, du retard du chantier et de dépassements de facturation, M. et Mme C... ont demandé à la SCOP d'interrompre le chantier le 28 octobre 2008 et ont obtenu la désignation d'un expert en référé le 25 mars 2009 ; que la SCOP a été mise en liquidation judiciaire le 18 juin 2010 ; que le rapport d'expertise ayant été déposé, M. et Mme C... ont, le 16 juin 2011, assigné M. et Mme X... en leur reprochant des fautes détachables de leurs fonctions de gérants de la SCOP et en demandant leur condamnation au paiement de dommages-intérêts, au titre de préjudices matériels et de jouissance, de frais d'expertise amiable et d'un dommage moral ;
Attendu que pour dire que M. et Mme X... ont commis des fautes détachables de leurs fonctions au préjudice de M. et Mme C... et les condamner au paiement de dommages-intérêts, l'arrêt constate que M. et Mme X..., dénués de toute compétence dans le secteur du bâtiment, ont créé une société coopérative ouvrière pour la maîtrise d'exécution et la réalisation de travaux de rénovation, ont embauché comme salariés des personnes non qualifiées éprouvant des difficultés d'insertion et n'ont pas souscrit d'assurances au titre des activités exercées ; qu'il retient qu'ils ont dissimulé ces informations à M. et Mme C... et ont commis des manoeuvres dolosives dans le but d'obtenir la signature du contrat de rénovation de l'immeuble de ces derniers, constitutives de fautes intentionnelles d'une particulière gravité, incompatibles avec le fonctionnement normal de la société ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans vérifier préalablement, et au besoin d'office, s'agissant d'une fin de non-recevoir d'ordre public qu'elle était en mesure de relever puisqu'elle avait constaté la mise en liquidation judiciaire de la SCOP, si M. et Mme C... , qui recherchaient la responsabilité personnelle des gérants de la SCOP pour des faits antérieurs au jugement d'ouverture de la procédure collective de cette société, invoquaient exclusivement un préjudice personnel, distinct de celui des autres créanciers, seul de nature à rendre leur action recevable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs,
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que M. et Mme X... ont commis des fautes détachables de leurs fonctions de gérants de la société Memce, les condamne in solidum à payer à M. et Mme C... les sommes de 5 993, 59 euros au titre des honoraires de l'expert amiable et de 30 000 euros en réparation de leur préjudice moral, outre les intérêts et leur capitalisation, sursoit à statuer sur les autres demandes , ainsi qu'en ses dispositions relatives à l'expertise ordonnée sur les chefs de préjudice relatifs aux travaux de reprise et au préjudice de jouissance, l'arrêt rendu le 2 février 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.