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Décisions

TUE, 9e ch., 19 mai 2021, n° T-218/18

TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Deutsche Lufthansa AG

Défendeur :

Commission européenne, République fédérale d’Allemagne, Land Rheinland-Pfalz

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Costeira

Juges :

Mme Kancheva, Mme Perišin (rapporteure)

Avocats :

Me Martin-Ehlers, Me van der Hout, Me Wagner

TUE n° T-218/18

19 mai 2021

LE TRIBUNAL (neuvième chambre),

Antécédents du litige

1 La requérante, Deutsche Lufthansa AG, est une compagnie aérienne établie en Allemagne, dont l’activité principale est le transport de passagers. Son premier aéroport pivot est celui de Francfort-sur-le-Main (Allemagne).

2 L’aéroport de Francfort-Hahn est situé en Allemagne, sur le territoire du Land Rheinland-Pfalz (Land de Rhénanie-Palatinat), à environ 120 km à l’ouest de la ville de Francfort-sur-le-Main et à 115 km de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main. Il est également à proximité des aéroports de Luxembourg (Luxembourg), de Sarrebruck (Allemagne) et de Cologne/Bonn (Allemagne). Les installations de l’aéroport de Francfort-Hahn sont utilisées principalement par Ryanair Ltd, compagnie aérienne irlandaise à bas coût.

3 Jusqu’en 1992, le site sur lequel est implanté l’aéroport de Francfort-Hahn abritait une base militaire. Cette base a, par la suite, été transformée en aéroport civil. L’aéroport de Francfort-Hahn est exploité par Flughafen Frankfurt-Hahn GmbH, qui, depuis 2009, était contrôlée par le Land de Rhénanie-Palatinat. Le 1er mars 2017, ce dernier a signé un accord de cession d’actions par lequel il a vendu sa part de 82,5 % dans l’aéroport de Francfort-Hahn à HNA Airport Group GmbH, une société du groupe chinois HNA Group (ci-après « HNA »). Les 17,5 % des parts de Flughafen Frankfurt-Hahn restants sont détenus par le Land Hessen (Land de Hesse, Allemagne).

4 Le 7 avril 2017, la République fédérale d’Allemagne a notifié à la Commission européenne son intention d’octroyer une aide au fonctionnement à l’aéroport de Francfort-Hahn en raison de l’état déficitaire de celui-ci (ci-après l’« aide litigieuse »).

5 Par lettres du 24 avril et du 30 mai 2017, la Commission a demandé à la République fédérale d’Allemagne de produire des informations supplémentaires. La République fédérale d’Allemagne a produit les informations demandées le 16 mai et le 14 juin 2017 respectivement.

6 Par la décision C(2017) 5289 final, du 31 juillet 2017, relative à l’aide d’État SA.47969 (2017/N), mise à exécution par l’Allemagne concernant une aide au fonctionnement accordée à l’aéroport de Francfort-Hahn (ci-après la « décision attaquée »), prise en application de l’article 4, paragraphe 3, du règlement (UE) 2015/1589 du Conseil, du 13 juillet 2015, portant modalités d’application de l’article 108 [TFUE] (JO 2015, L 248, p. 9), et dont un résumé est publié au Journal officiel de l’Union européenne (JO 2018, C 121, p. 9), la Commission a décidé, en substance, qu’il n’y avait pas lieu d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE (ci-après la « procédure formelle d’examen »), dès lors que, bien que la mesure en cause constituât une aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, elle était compatible avec le marché intérieur au titre du paragraphe 3, sous c), du même article.

7 Dans la décision attaquée, tout d’abord, la Commission a décrit l’aide litigieuse comme ayant pour but de couvrir les pertes opérationnelles de l’aéroport de Francfort-Hahn par la voie de versements qui lui seraient effectués par le Land de Rhénanie-Palatinat pendant la période allant de 2018 à 2022. Cette aide couvrait les pertes opérationnelles effectives, au sens du point 118 des lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes (JO 2014, C 99, p. 3, ci-après les « lignes directrices sur les aides à l’aviation »), de la période allant de 2017 à 2021 à hauteur d’un maximum de 25,3 millions d’euros (considérant 10 de la décision attaquée). La Commission a précisé que l’aide litigieuse était octroyée pendant la période transitoire de dix ans établie par le point 112 des lignes directrices sur les aides à l’aviation, selon lequel « les aides au fonctionnement octroyées aux aéroports, soit sous la forme d’aides individuelles, soit au titre d’un régime d’aides, seront considérées comme étant compatibles avec le marché intérieur conformément à l’article 107, paragraphe 3, [sous] c), [TFUE], durant une période transitoire de dix ans à compter du 4 avril 2014, pour autant que les critères cumulatifs énoncés au point 79 comme il est indiqué aux points 113 à 134 soient remplis ».

8 Ensuite, la Commission a relevé que la République fédérale d’Allemagne avait calculé le montant maximal de l’aide litigieuse selon un modèle fondé sur le déficit de financement des coûts d’exploitation initial au début de la période transitoire, conformément au point 122 des lignes directrices sur les aides à l’aviation. Ce montant représentait 50 % du déficit de financement des coûts d’exploitation initial de l’aéroport de Francfort-Hahn pour une période de dix ans (considérant 11 de la décision attaquée).

9 Puis la Commission a constaté que la République fédérale d’Allemagne prévoyait, dans le plan de gestion ex ante de l’aéroport de Francfort-Hahn, une augmentation du trafic des passagers du fait de l’introduction par HNA de vols à destination et au départ de la Chine, opérés par les lignes aériennes détenues par HNA, à raison de trois vols par semaine en 2017, susceptibles d’être augmentés dans le futur. De même, était prévue une augmentation du trafic de fret à l’aéroport de Francfort-Hahn pour la période allant de 2014 à 2024, du fait qu’il était prévu que HNA effectue trois vols de fret par semaine provenant de la Chine (considérant 17 de la décision attaquée).

10 Enfin, la Commission a déterminé que, sur la base du plan de gestion ex ante de l’aéroport de Francfort-Hahn présenté par la République fédérale d’Allemagne concernant les revenus attendus par l’exploitation de l’aéroport grâce à l’augmentation du trafic de passagers et de fret, l’aéroport devrait couvrir ses coûts de fonctionnement après 2022, de sorte qu’aucune aide au fonctionnement ne serait versée à l’aéroport de Francfort-Hahn à partir de 2023 (considérant 19 de la décision attaquée).

11 À la lumière des éléments qui précèdent, la Commission a qualifié la mesure litigieuse d’aide d’État au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE (considérants 21 à 35 de la décision attaquée). En particulier, la Commission a notamment observé, en ce qui concerne la distorsion de la concurrence et les effets sur les échanges, qu’il existait une concurrence entre les aéroports pour attirer des compagnies aériennes. À cet égard, elle a constaté que la principale compagnie aérienne opérant à partir de l’aéroport de Francfort-Hahn était Ryanair, de sorte que l’aide litigieuse permettrait à cet aéroport de continuer à fonctionner au détriment d’autres aéroports de l’Union européenne qui pourraient attirer la capacité de Ryanair dont bénéficiait actuellement cet aéroport.

12 Néanmoins, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre de l’aide litigieuse, estimant qu’elle était compatible avec le marché intérieur selon l’article 107, paragraphe 3, sous c), TFUE (considérants 38 à 70 de la décision attaquée). À cet égard, la Commission a relevé notamment qu’il n’y avait pas d’autres aéroports dans la même zone d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn et que les aéroports les plus proches, ceux de Luxembourg et de Francfort-sur-le-Main, avaient des modèles d’exploitation très différents du modèle d’exploitation à bas coût de l’aéroport de Francfort-Hahn. Elle a ainsi considéré que les effets négatifs non désirés sur la concurrence et les échanges dus à l’octroi de l’aide litigieuse étaient minimes.

13 La Commission a adopté, préalablement à la décision attaquée, deux autres décisions à propos de mesures prises par la République fédérale d’Allemagne au profit de l’aéroport de Francfort-Hahn et de Ryanair, à savoir, premièrement, la décision (UE) 2016/788, du 1er octobre 2014, relative à l’aide d’État SA.32833 (11/C) (ex 11/NN) mise à exécution par l’Allemagne au sujet des modalités de financement de l’aéroport de Francfort-Hahn mises en place de 2009 à 2011 (JO 2016, L 134, p. 1, ci-après la « décision Hahn I »), qui a fait l’objet de l’ordonnance du 17 mai 2019, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑764/15, non publiée, sous pourvoi, EU:T:2019:349), et, deuxièmement, la décision (UE) 2016/789, du 1er octobre 2014, relative à l’aide d’État SA.21121 (C 29/08) (ex NN 54/07) mise à exécution par l’Allemagne concernant le financement de l’aéroport de Francfort-Hahn et les relations financières entre l’aéroport et Ryanair (JO 2016, L 134, p. 46, ci-après la « décision Hahn II »), qui a fait l’objet de l’arrêt du 12 avril 2019, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑492/15, sous pourvoi, EU:T:2019:252).

14 Par ailleurs, le 26 octobre 2018, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen sur la base d’une plainte de la requérante enregistrée sous la référence SA.43260 visant d’autres mesures en faveur de l’aéroport de Francfort-Hahn et de Ryanair (ci-après la « procédure Hahn IV »).

Procédure et conclusions des parties

15 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 mars 2018, la requérante a introduit le présent recours.

16 Le 13 juin 2018, la requérante a présenté une nouvelle offre de preuve conformément à l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure du Tribunal.

17 Par décision du 18 septembre 2018, la République fédérale d’Allemagne a été admise à intervenir à l’appui des conclusions de la Commission.

18 Par ordonnance du 30 janvier 2019, Deutsche Lufthansa/Commission (T‑218/18, non publiée, EU:T:2019:49), le Land de Rhénanie-Palatinat a été admis à intervenir dans la présente affaire à l’appui des conclusions de la Commission.

19 Le 14 août 2019, le Tribunal a posé des questions écrites à la requérante par voie de mesure d’organisation de la procédure, prévue à l’article 89, paragraphe 3, du règlement de procédure. La requérante a déféré à la demande du Tribunal dans le délai imparti.

20 Par décision du président du Tribunal du 22 octobre 2019, prise en application de l’article 27, paragraphe 3, du règlement de procédure, la présente affaire a été attribuée à une nouvelle juge rapporteure, siégeant dans la neuvième chambre.

21 Sur proposition de la juge rapporteure, le Tribunal (neuvième chambre) a décidé d’ouvrir la phase orale de la procédure.

22 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 13 mars 2020, la requérante a présenté une nouvelle offre de preuve conformément à l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure.

23 Les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 3 juillet 2020.

24 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– annuler la décision attaquée ;

– condamner la Commission aux dépens.

25 La Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne et le Land de Rhénanie-Palatinat, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

– rejeter le recours comme irrecevable et, en tout état de cause, comme dénué de fondement ;

– condamner la requérante aux dépens.

En droit

Sur la recevabilité

26 Sans soulever formellement d’exception d’irrecevabilité, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne et par le Land de Rhénanie-Palatinat, excipe, à titre principal, de l’irrecevabilité du recours en raison de l’absence de qualité pour agir. À titre subsidiaire, la Commission estime que le recours devrait être rejeté comme irrecevable en raison, d’une part, de la violation des exigences de cohérence requises par l’article 76, sous d), du règlement de procédure et, d’autre part, du caractère abusif du recours.

27 Par ailleurs, la Commission considère que certains arguments et annexes présentés par la requérante dans le cadre de ses écritures devraient être écartés comme irrecevables, tout comme les nouvelles offres de preuve produites par la requérante au cours de la procédure devant le Tribunal.

Sur la qualité pour agir

28 La Commission fait valoir que le recours est irrecevable étant donné que la requérante n’a pas qualité pour agir au titre de l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, en ce que celle-ci ne serait ni directement ni individuellement concernée par la décision attaquée.

29 En substance, la Commission soutient que, d’une part, la requérante ne saurait être considérée comme étant une « partie intéressée » dans la procédure au sens de l’article 1er, sous h), et de l’article 24 du règlement 2015/1589 et que, d’autre part, elle n’a pas fait non plus valoir la violation de ses droits procéduraux dans son recours, contrairement à ce qui serait exigé par la jurisprudence s’agissant des recours contre des décisions de ne pas ouvrir la procédure formelle d’examen.

30 La Commission ajoute que la décision attaquée ne constitue pas un acte réglementaire au sens de la troisième hypothèse prévue à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE.

31 La requérante conteste ces arguments.

32 Conformément à l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, une personne physique ou morale ne peut former un recours contre une décision adressée à une autre personne que si cette décision la concerne directement et individuellement ou s’il s’agit d’un acte réglementaire qui la concerne directement et qui ne comporte pas de mesures d’exécution. Or, la décision attaquée a pour unique destinataire la République fédérale d’Allemagne, de sorte qu’il y a lieu d’établir si la requérante remplit les conditions de recevabilité qui viennent d’être mentionnées.

33 À titre liminaire, force est de constater que, la décision attaquée portant sur une aide individuelle, il est exclu que cette décision soit un acte réglementaire (voir, en ce sens, arrêt du 3 décembre 2014, Castelnou Energía/Commission, T‑57/11, EU:T:2014:1021, point 23 et jurisprudence citée). Ainsi, il y a lieu d’établir si la requérante est directement et individuellement concernée par celle-ci.

34 À cet égard, il convient de rappeler que, lorsque la Commission adopte une décision de ne pas soulever d’objections sur le fondement de l’article 4, paragraphe 3, du règlement 2015/1589, elle déclare non seulement les mesures en cause compatibles avec le marché intérieur, mais elle refuse également implicitement d’ouvrir la procédure formelle d’examen prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et à l’article 6, paragraphe 1, dudit règlement (voir, par analogie, arrêt du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 42 et jurisprudence citée).

35 Si la Commission constate, après l’examen préliminaire, que la mesure notifiée suscite des doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur, elle est tenue d’adopter, sur le fondement de l’article 4, paragraphe 4, du règlement 2015/1589, une décision d’ouverture de la procédure formelle, prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et à l’article 6, paragraphe 1, dudit règlement. Aux termes de cette dernière disposition, une telle décision invite l’État membre concerné et les autres parties intéressées à présenter leurs observations dans un délai déterminé, qui ne dépasse normalement pas un mois (voir, par analogie, arrêt du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 46).

36 En l’espèce, la décision attaquée est la décision de ne pas soulever d’objections fondée sur l’article 4, paragraphe 3, du règlement 2015/1589, dont la légalité dépend de la question de savoir s’il existe des doutes quant à la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur. Dès lors que de tels doutes donnent lieu à l’ouverture d’une procédure formelle d’examen à laquelle peuvent participer les parties intéressées visées à l’article 1er, sous h), dudit règlement, il doit être considéré que toute partie intéressée au sens de cette dernière disposition est directement et individuellement concernée par une décision de ne pas soulever d’objections. En effet, les bénéficiaires des garanties de procédure prévues à l’article 108, paragraphe 2, TFUE et à l’article 6, paragraphe 1, de ce règlement ne peuvent en obtenir le respect que s’ils ont la possibilité de contester la décision de ne pas soulever d’objections devant le juge de l’Union (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 47 et jurisprudence citée).

37 Ainsi, dès lors que la qualité particulière de partie intéressée est reconnue à une partie requérante, elle suffit à l’individualiser, selon l’article 263, quatrième alinéa, TFUE, et toute partie intéressée, au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589, est directement et individuellement concernée par une décision de ne pas soulever d’objections, dans la mesure où elle soulève des moyens d’annulation à l’encontre de celle-ci en vue de la protection de ses droits procéduraux (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, points 44 et 128).

38 En l’occurrence, il convient d’examiner, en premier lieu, si la requérante peut être considérée comme une partie intéressée au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 et, en second lieu, si la requérante invoque, par son recours, la violation de ses droits procéduraux.

–  Sur la qualité de partie intéressée de la requérante

39 La Commission conteste que la requérante soit une « partie intéressée ».

40 À cet égard, la Commission, soutenue par la République fédérale d’Allemagne et par le Land de Rhénanie-Palatinat, fait notamment valoir que la requérante n’est pas un aéroport, mais une entreprise de transport aérien, qui opère, dès lors, sur un marché différent de celui de l’aéroport bénéficiaire de l’aide litigieuse. Par ailleurs, la requérante n’aurait pas démontré son allégation selon laquelle l’aide litigieuse, en faveur de l’aéroport de Francfort-Hahn, aurait été en réalité transférée à Ryanair, en tant que compagnie aérienne principale dudit aéroport.

41 Pour sa part, le Land de Rhénanie-Palatinat, tout en se ralliant aux arguments de la Commission concernant l’absence de preuve du prétendu transfert de l’aide litigieuse en faveur de Ryanair et du rapport concurrentiel entre la requérante et cette dernière compagnie aérienne, fait observer que les informations présentées par la requérante dans son recours ne permettent même pas de savoir si elle est une compagnie aérienne ou plutôt une compagnie holding détenant des participations dans une compagnie aérienne.

42 La requérante conteste ces arguments.

43 L’article 1 er, sous h), du règlement 2015/1589 définit la « partie intéressée » comme étant « tout État membre et toute personne, entreprise ou association d’entreprises dont les intérêts pourraient être affectés par l’octroi d’une aide, en particulier le bénéficiaire de celle-ci, les entreprises concurrentes et les associations professionnelles ».

44 Il s’agit, en d’autres termes, d’un ensemble indéterminé de destinataires (voir, par analogie, arrêt du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 63).

45 Le concept de « partie intéressée » n’inclut pas seulement le bénéficiaire de l’aide, les entreprises concurrentes et les associations professionnelles, mais également d’autres personnes intéressées. La Cour a considéré que cette notion pouvait sous certaines conditions englober, par exemple, des syndicats de travailleurs (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 9 juillet 2009, 3F/Commission, C‑319/07 P, EU:C:2009:435, point 33) et des concurrents indirects du bénéficiaire de l’aide litigieuse (arrêts du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, points 63 à 65 et jurisprudence citée et du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 132).

46 Plus spécifiquement , s’agissant des concurrents indirects, la Cour a jugé qu’une telle entreprise puisse être qualifiée de « partie intéressée », pour autant qu’elle faisait valoir que ses intérêts pourraient être affectés par l’octroi de l’aide, et que, pour ce faire, il importait que cette entreprise démontre, à suffisance de droit, que l’aide risquait d’avoir une incidence concrète sur sa situation (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 132 et jurisprudence citée).

47 En l’espèce, premièrement, dans la mesure où le Land de Rhénanie-Palatinat et la Commission contestent la qualité de compagnie aérienne de la requérante, il convient de relever, d’emblée, que, par une mesure d’organisation de la procédure adoptée en vertu de l’article 89 du règlement de procédure, une question a été adressée à la requérante, visant à préciser si elle était elle-même une compagnie aérienne ou si elle était une compagnie holding qui détenait des participations dans une compagnie aérienne.

48 Dans sa réponse à ladite mesure, la requérante fait valoir qu’elle est un transporteur aérien au sens du règlement sur les services aériens, qui exploite lui-même des aéronefs et qui détient une licence d’exploitation correspondante du Luftfahrt-Bundesamt (Office fédéral de l’aviation, Allemagne). Cette licence est mentionnée de manière expresse dans l’extrait de la liste des transporteurs aériens agréés par l’Office fédéral de l’aviation. La requérante joint, à cet égard, une copie de la licence selon laquelle elle est autorisée à « transporter des passagers, du courrier et/ou du fret par navigation aérienne commerciale », et elle est enregistrée en tant que « transporteur aérien » sous un numéro de licence spécifique.

49 Il ressort de ce qui précède que la requérante a démontré être une compagnie aérienne.

50 Deuxièmement, il convient de constater que la requérante, en tant que compagnie aérienne, a pour premier aéroport pivot l’aéroport de Francfort-sur-le-Main. Cet aéroport est situé à 115 km de distance de l’aéroport bénéficiaire de l’aide litigieuse. Le fait que le premier aéroport pivot de la requérante se trouve à proximité de l’aéroport bénéficiaire de l’aide litigieuse est une des circonstances de nature à démontrer que l’octroi de l’aide litigieuse pourrait affecter les intérêts de la requérante. En effet, l’aéroport de Francfort-sur-le-Main étant son principal centre d’opération de vols, la requérante a un intérêt à ce que le fonctionnement de cet aéroport ne se voie pas perturbé par l’éventuelle affectation de la position concurrentielle de celui-ci qui pourrait découler de l’octroi de l’aide litigieuse.

51 Troisièmement , force est de constater que Ryanair est, tel qu’il ressort du considérant 34 de la décision attaquée, la principale compagnie aérienne opérant à l’aéroport de Francfort-Hahn. De plus, il ressort du dossier que Ryanair et la requérante proposent respectivement des vols vers des destinations identiques au départ de l’aéroport de Francfort-Hahn et de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main. En effet, la requérante a présenté devant le Tribunal une liste des destinations des vols proposées par elle-même et par Ryanair entre 2009 et 2014. Or, ces destinations coïncident. La requérante a confirmé lors de l’audience que, à partir de 2014, des vols vers des destinations qui coïncidaient ont aussi été proposés.

52 Quatrièmement, le fait que la requérante et Ryanair proposent des vols vers les mêmes destinations au départ des aéroports de Francfort-sur-le-Main et de Francfort-Hahn est de nature à indiquer qu’il existe une concurrence entre Ryanair et la requérante au sujet des destinations desservies par ces deux aéroports situés à proximité l’un de l’autre. Ainsi, la requérante et Ryanair sont actives sur le même marché de transport aérien de passagers, de sorte qu’elles sont des concurrentes.

53 Ainsi, l ’octroi de l’aide litigieuse à l’aéroport de Francfort-Hahn permet à celui-ci de continuer à opérer, en conséquence de quoi la principale compagnie aérienne qui y est active, Ryanair, peut continuer à proposer des vols, tout en exerçant une pression concurrentielle sur la requérante.

54 En l’absence de l’octroi de l’aide litigieuse, l’aéroport de Francfort-Hahn n’étant pas en mesure de poursuivre ses activités du fait de l’impossibilité pour celui-ci de couvrir ses coûts d’exploitation, ainsi qu’il ressort du point 49 de la décision attaquée, la pression concurrentielle exercée sur la requérante par Ryanair depuis l’aéroport de Francfort-Hahn serait réduite du fait que Ryanair ne serait pas non plus en mesure de proposer des vols au départ dudit aéroport.

55 Il découle de ce qui précède que l’octroi de l’aide risque d’avoir une incidence concrète sur la situation de la requérante en ce qui concerne, d’une part, le fonctionnement de son premier aéroport pivot et, d’autre part, la concurrence au regard des destinations des vols qu’elle propose au départ dudit aéroport. L’aide litigieuse peut ainsi affecter les intérêts de la requérante au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589.

56 L a requérante doit dès lors être considérée comme étant une « partie intéressée » au sens de la jurisprudence citée au point 45 ci-dessus.

–  Sur l’invocation de la violation des droits procéduraux

57 La Commission considère que, dans son recours, la requérante invoque la violation des dispositions matérielles et conteste, en réalité, le fond de la décision attaquée, alors que, conformément à la jurisprudence constante, son recours ne pourrait être considéré comme recevable que si la requérante s’était limitée à invoquer la violation de ses droits procéduraux. Or, la requérante ayant invoqué une violation de dispositions matérielles, elle serait tenue de démontrer qu’elle est directement et individuellement concernée par la décision attaquée.

58 La requérante conteste ces arguments.

59 Ainsi qu’il a été conclu ci-dessus, la requérante est une partie intéressée au sens de l’article 1 er, sous h), du règlement 2015/1589. Ainsi, la requérante doit être considérée comme étant recevable à contester la légalité de la décision attaquée, pour autant que, par le recours, elle cherche à assurer la protection de ses droits procéduraux (voir, en ce sens, arrêt du 20 juin 2019, a&o hostel and hotel Berlin/Commission, T‑578/17, non publié, EU:T:2019:437, point 43).

60 À cet égard, la requérante indique que le but des branches présentées dans le cadre du moyen unique du recours est, précisément, de corroborer ce moyen, selon lequel la Commission n’a pas ouvert la procédure formelle d’examen alors qu’elle aurait dû éprouver des doutes quant à la compatibilité avec le marché intérieur de l’aide litigieuse, ce qui constituerait une violation de ses droits procéduraux.

61 En ce qui concerne les arguments de la Commission selon lesquels la requérante invoque la violation des dispositions matérielles et conteste, en réalité, le fond de la décision attaquée, il convient de rappeler que, lorsqu’une partie requérante demande l’annulation d’une décision de ne pas soulever d’objections, elle peut invoquer tout moyen de nature à démontrer que l’appréciation des éléments dont la Commission disposait lors de la procédure d’examen préliminaire aurait dû susciter des difficultés sérieuses quant à l’analyse de la compatibilité de la mesure en cause. L’utilisation de tels arguments ne saurait pour autant avoir pour conséquence de transformer l’objet du recours, ni d’en modifier les conditions de recevabilité. Au contraire, l’existence de difficultés sérieuses quant à l’analyse de cette compatibilité est précisément la preuve que la Commission était tenue d’ouvrir la procédure formelle (voir arrêt du 20 juin 2019, a&o hostel and hotel Berlin/Commission, T‑578/17, non publié, EU:T:2019:437, points 45 et 46 et jurisprudence citée).

62 Or, en l’espèce, il résulte de l’analyse de l’ensemble de la requête que, ainsi que la requérante l’a confirmé lors de l’audience dans ses observations sur le rapport d’audience, le recours porte sur l’annulation de la décision de ne pas soulever d’objections, en mettant en cause le fait que la décision attaquée a omis de procéder à un examen complet de l’aide litigieuse, ce qui porterait atteinte à la requérante en ce qu’elle est une partie intéressée et violerait son droit d’être entendue et ses droits procéduraux.

63 S’agissant ainsi d’un recours contestant la légalité de la décision prise sans ouverture de la procédure formelle, il convient d’examiner l’ensemble des arguments soulevés par la requérante dans le moyen unique, afin d’apprécier la question de savoir s’ils permettent d’identifier des difficultés sérieuses en présence desquelles la Commission aurait été tenue d’ouvrir ladite procédure (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 7 novembre 2012, CBI/Commission, T‑137/10, EU:T:2012:584, point 68).

64 Dès lors qu’il ressort des points 56 et 63 ci-dessus que la requérante, d’une part, doit être considérée comme étant une « partie intéressée » au sens de l’article 1er, sous h), du règlement 2015/1589 et, d’autre part, invoque, par son recours, la violation de ses droits procéduraux, il y a lieu de conclure qu’elle a la qualité pour agir à l’encontre de la décision attaquée.

65 La première fin de non-recevoir invoquée par la Commission doit dès lors être rejetée.

Sur la violation de l’article 76, sous d), du règlement de procédure et sur le caractère abusif du recours

66 D’une part, la Commission soutient que la requête ne fait pas ressortir de manière cohérente les moyens invoqués, en conformité avec l’article 76, point d), du règlement de procédure. D’autre part, elle considère que le recours de la requérante doit être rejeté en raison de son caractère abusif, en ce que toutes les mesures que la requérante réprouve font l’objet de la procédure Hahn IV. La Commission considère, en particulier, que la requérante doit former un recours en carence à son égard pour ce qui est du contrat conclu entre Ryanair et l’aéroport de Francfort-Hahn et des autres aides présumées mentionnées par la requérante dans le présent recours.

67 La requérante conteste ces arguments.

68 En premier lieu, s’agissant du respect des obligations formelles du recours, il convient de rappeler que, en vertu de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige, les moyens et les arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Indépendamment de toute question de terminologie, cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il est nécessaire, pour qu’un recours soit recevable au regard de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, de la requête elle-même [voir arrêts du 12 mai 2016, Italie/Commission, T‑384/14, EU:T:2016:298, point 38 (non publié) et jurisprudence citée, et du 27 avril 2017, Germanwings/Commission, T‑375/15, non publié, EU:T:2017:289, point 23 et jurisprudence citée].

69 En l’espèce, force est de constater que la requête n’est pas structurée en moyens. En outre, il existe de nombreuses répétitions dans différentes sections.

70 Toutefois, la section 2 de la requête, intitulée « Objet du recours et moyens invoqués », contient une énumération des raisons pour lesquelles la décision attaquée serait erronée en droit. Ces raisons sont développées dans les sections 4, 5 et 7 de la requête. La section 6 contient le développement de la requérante concernant la recevabilité du recours.

71 Dès lors, il y a lieu de conclure que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels le recours se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, de la requête. Ainsi, il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir de la Commission tirée de la violation des exigences ressortant de l’article 76, sous d), du règlement de procédure.

72 En second lieu, s’agissant de l’argumentation de la Commission selon laquelle le recours est abusif, puisque le véritable objectif du recours serait d’imposer une décision dans la procédure Hahn IV, mentionnée au point 14 ci-dessus, et que la requérante aurait dû former un recours en carence à l’encontre de la Commission en ce qui concerne les mesures faisant l’objet de la procédure Hahn IV, il convient de préciser ce qui suit. À titre liminaire, la requérante invoque, dans le cadre de son recours, le fait que d’autres prétendues aides octroyées à l’aéroport de Francfort-Hahn dépassent déjà le seuil maximal d’aides au fonctionnement fixé par les lignes directrices sur les aides à l’aviation. En n’ayant pas tenu compte de ces autres prétendues aides, la Commission n’aurait pas examiné tous les faits pertinents pour analyser l’aide litigieuse.

73 Il convient de relever que les autres prétendues aides invoquées par la requérante font partie de la procédure Hahn IV.

74 Toutefois, l’aide litigieuse n’est pas l’objet de ladite procédure. À cet égard, il convient de relever que le fait que la Commission a déjà entamé une procédure formelle d’examen sur la compatibilité des aides susmentionnées avec le marché intérieur n’empêche pas que la requérante lui reproche de ne pas avoir pris en compte l’existence de ces autres prétendues aides pour analyser la compatibilité de l’aide litigieuse en l’espèce. En effet, la requérante ne vise pas à ce que le Tribunal analyse la compatibilité avec le marché intérieur des mesures faisant partie de la procédure Hahn IV, mais à ce que le Tribunal déclare que la Commission aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide litigieuse du fait de l’existence de ces autres mesures. Ainsi, le seul fait que la Commission a entamé une autre procédure concernant ces prétendues aides ne justifie pas l’irrecevabilité du recours, ni l’argument de la Commission selon lequel la requérante aurait dû entamer un recours en carence en ce qui concerne les mesures faisant l’objet de la procédure Hahn IV.

75 Il y a lieu ainsi de rejeter la fin de non-recevoir de la Commission tirée du caractère abusif du recours.

Sur la recevabilité de certains arguments et annexes présentés par la requérante dans la réplique

76 Dans la duplique, la Commission conclut au rejet, comme étant tardifs et, partant, irrecevables, des arguments avancés par la requérante aux points 20 à 37 de la réplique, ainsi que des annexes K.31 et K.32 produites au soutien de ces arguments. La Commission affirme que la requérante aurait pu formuler ces arguments au moment de l’introduction du recours et qu’elle disposait déjà desdites annexes à ce moment. Elle ajoute que la référence à des sites Internet doit aussi être déclarée irrecevable en ce que des preuves ne peuvent être produites par renvoi à ces sites, ces derniers n’étant ni stables ni disponibles.

77 Aux termes de l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure, les preuves et les offres de preuve sont présentées dans le cadre du premier échange de mémoires. Néanmoins, il y a lieu de rappeler que la règle de forclusion prévue à l’article 85, paragraphe 1, du règlement de procédure ne concerne pas la preuve contraire et l’ampliation des offres de preuve fournies à la suite d’une preuve contraire de la partie adverse (voir arrêt du 13 décembre 2018, Post Bank Iran/Conseil, T‑559/15, EU:T:2018:948, point 75 et jurisprudence citée).

78 À cet égard, il convient de relever que, dans la requête, la requérante a avancé des arguments visant à contester le constat, au considérant 46 de la décision attaquée, selon lequel aucun autre aéroport ne se trouve dans la zone d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn et que les aéroports les plus proches (Francfort-sur-le-Main et Luxembourg) ont un modèle commercial différent de celui de l’aéroport de Francfort-Hahn. Au point 48 de la requête, la requérante fait valoir que les zones d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn et de celui de Francfort-sur-le-Main se recoupent. Elle précise, en outre, que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main a inclus les compagnies à bas coût dans sa stratégie de sorte que la politique commerciale de cet aéroport ne diffère pas de celle de l’aéroport de Francfort-Hahn. Or, dans le mémoire en défense, la Commission fait observer que la requérante n’a pas suffisamment exposé, dans la requête, les affirmations qui précèdent.

79 En réponse au reproche de la Commission, la requérante a présenté, aux points 20 à 27 de la réplique, des arguments, des extraits du site Internet de l’aéroport de Francfort-Hahn et un extrait d’un entretien avec l’ancien gérant de cet aéroport visant à étayer l’affirmation que les zones d’attraction des deux aéroports se recoupent largement. Aux points 28 à 34 de la réplique, la requérante avance des arguments concernant les recoupements existants entre les destinations desservies par les aéroports de Francfort-Hahn et de Francfort-sur-le-Main, soutenus par l’annexe K.31, et expliquant la pression que Ryanair exercerait sur elle depuis l’aéroport de Francfort-Hahn. Aux points 35 à 37 de la réplique, elle a présenté des arguments sur les recoupements des zones d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn et de celui de Cologne-Bonn, illustrés par l’annexe K.32.

80 Premièrement, à cet égard, il y a lieu de faire ressortir, en ce qui concerne les points 20 à 27 de la réplique, que ces arguments répondent à ceux contenus au point 75 de la défense et développent des arguments soulevés dans la requête, de sorte qu’il y a lieu de les considérer recevables.

81 Deuxièmement, pour ce qui est des arguments contenus dans les points 28 à 34 de la réplique et l’annexe K.31, il convient de relever que la requérante a déjà développé les recoupements existants entre les destinations proposées par Ryanair et par elle-même au départ de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main dans sa requête. La Commission a contesté, dans le mémoire en défense, l’argument avancé par la requérante selon lequel les modèles commerciaux des aéroports de Francfort-Hahn et de Francfort-sur-le-Main étaient similaires. C’est à ces arguments que la requérante répond en présentant des développements visant à maintenir que ces aéroports proposent des vols vers 34 destinations identiques. Ainsi, l’argumentation de la requérante présentée dans les points 28 à 34 de la réplique et l’annexe K.31 doivent être considérées comme recevables.

82 Troisièmement, au sujet des liens vers des sites Internet dont la Commission invoque qu’ils ne fonctionnent pas, il y a lieu de constater que ceux contenus dans les points 22 et 23 de la réplique ne sont pas, en effet, directement disponibles à partir du texte de la réplique. En revanche, les liens mentionnés au point 26 de la réplique sont accessibles. Cela étant, le Tribunal ne saurait nier à la requérante la possibilité de produire des éléments de preuve sur la base des informations contenues dans des sites Internet, à condition que l’argumentation que la requérante en tire se trouve dans le texte de la réplique. Ainsi, l’indisponibilité du lien ne saurait entraîner son irrecevabilité.

83 Quatrièmement, en ce qui concerne les points 35 à 37 de la réplique et l’annexe K.32, au sujet de l’aéroport de Cologne-Bonn, il y a lieu de relever que ces éléments ne visent pas à contester une argumentation invoquée par la Commission dans son mémoire en défense. Leur présentation tardive n’étant pas justifiée, il y a lieu de les déclarer irrecevables.

84 Il ressort de ce qui précède que les arguments contenus dans les points 20 à 34 de la réplique ainsi que les liens vers des sites Internet produits par la requérante dans la réplique doivent être considérés comme recevables. L’annexe K.31 doit être également déclarée recevable. En revanche, il y a lieu de déclarer irrecevables l’annexe K.32 et les arguments de la requérante contenus dans les points 35 à 37 de la réplique.

85 Pour le reste, il convient de répondre à l’allégation de la Commission relative à l’argumentation de la requérante, au point 61 de la requête, selon laquelle la Commission aurait dû ouvrir une procédure formelle d’examen. La Commission soutient que cette assertion constitue un moyen subsidiaire qui doit être considéré irrecevable, car il ne contient aucune explication.

86 À cet égard, il suffit de rappeler qu’il résulte de l’analyse de l’ensemble de la requête que la requérante reproche, précisément, à la Commission de ne pas avoir ouvert la procédure formelle d’examen. Le raisonnement de la requérante, au point 61 de la requête, n’est pas en soi un moyen indépendant, mais plutôt la thèse principale soutenue par les branches avancées dans la requête.

87 Dès lors, l’argumentation de la requérante au point 61 de sa requête doit être déclarée recevable.

88 Partant, les arguments contenus dans les points 20 à 34 de la réplique, les liens vers des sites Internet produits dans la réplique, l’annexe K.31 et l’argumentation de la requérante au point 61 de sa requête doivent être considérés comme recevables. En revanche, il y a lieu de déclarer irrecevables l’annexe K.32 et les arguments de la requérante contenus dans les points 35 à 37 de la réplique.

Sur la recevabilité des nouvelles offres de preuve

89 La Commission conteste la recevabilité des nouvelles offres de preuve présentées par la requérante le 13 juin 2018. Soutenue par le Land de Rhénanie-Palatinat, la Commission conteste également la recevabilité des nouvelles offres de preuve déposées par la requérante le 13 mars 2020. En substance, la Commission estime que le retard dans la présentation de ces offres de preuve n’est pas justifié, de sorte qu’elles doivent être écartées comme irrecevables.

90 Aux termes de l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure, ce n’est qu’à titre exceptionnel que les parties principales peuvent encore produire des preuves ou faire des offres de preuve avant la clôture de la phase orale de la procédure ou avant la décision du Tribunal de statuer sans phase orale de la procédure, à condition que le retard dans la présentation de celles-ci soit justifié.

91 En premier lieu, s’agissant de l’offre de preuve du 13 juin 2018, elle comporte trois éléments : un tableau contenant les conditions du contrat conclu entre l’aéroport de Francfort-Hahn et Ryanair en 2016, une demande de citation d’un témoin et un extrait d’un article de presse.

92 Premièrement, au sujet du tableau contenant les conditions du contrat de 2016, la requérante met en avant qu’elle a pris connaissance par la presse des clauses du contrat conclu par l’aéroport de Francfort-Hahn avec Ryanair en 2016. La requérante présente les conditions dudit contrat dans un tableau. Elle précise qu’elle n’est pas en possession du contrat lui-même, de sorte qu’elle ne peut pas vérifier les informations qu’elle a exposées. Cependant, la requérante n’a pas démontré avoir reçu les conditions du contrat de 2016 après l’introduction de la requête. Ainsi, il y a lieu de considérer que le dépôt tardif de cette nouvelle offre de preuve n’est pas justifié.

93 Deuxièmement, pour ce qui est de la demande de citation de l’ancien dirigeant de l’aéroport de Francfort-Hahn en tant que témoin concernant les conditions du contrat entre l’aéroport de Francfort-Hahn et Ryanair en 2016, il y a lieu de rappeler que la requérante connaissait déjà l’existence de ce contrat au moment de l’introduction de la requête, de sorte qu’elle aurait pu présenter cette demande à ce moment-là. Ainsi, il y a lieu de rejeter comme tardive cette demande.

94 Troisièmement, en ce qui concerne l’extrait de l’article de presse selon lequel « les Irlandais » ne payent que 3 euros par passager, alors qu’il faut au moins 15 euros par passager pour qu’un aéroport puisse couvrir ses coûts, il convient de souligner que la date de cet article, le 11 novembre 2013, est antérieure à la date de l’introduction du présent recours. La requérante n’a pas non plus justifié sa présentation tardive, de sorte qu’il convient de rejeter également cette proposition de preuve comme tardive.

95 En second lieu, s’agissant de l’offre de preuve du 13 mars 2020, elle contient la décision du Land de Rhénanie-Palatinat du 23 mars 2018, sur la base de laquelle ce dernier a versé les aides au fonctionnement approuvées en l’espèce par la Commission, et la décision de la Commission, du 26 octobre 2018, relative à l’aide d’État SA.43260 (2015/FC) – Aide présumée en faveur de l’aéroport de Francfort-Hahn et de Ryanair (JO 2019, C 310, p. 5), relative à la procédure Hahn IV.

96 Premièrement, la requérante affirme que le Land de Rhénanie-Palatinat n’a mis sa décision du 23 mars 2018 en ligne sur Internet qu’à la suite du dépôt, le 18 septembre 2018, de la réplique. Elle atteste que ce n’est qu’en faisant de nouvelles recherches qu’elle a trouvé ce document. Cependant, la requérante n’a nullement étayé cette affirmation selon laquelle cette décision, datant du 23 mars 2018, n’aurait pas été mise en ligne avant le dépôt de la réplique ou même de sa requête, présentée le 29 mars 2018. Ainsi, il y a lieu de déclarer cette nouvelle offre de preuve irrecevable.

97 Deuxièmement, pour ce qui est de la décision de la Commission, du 26 octobre 2018, relative à l’aide d’État SA.43260 (2015/FC), il y a lieu de constater qu’elle a été publiée le 13 septembre 2019, après la fin de la phase écrite de la procédure le 29 mars 2019. Ainsi, il y a lieu de considérer que son dépôt tardif est justifié par ce fait, de sorte qu’il y a lieu de déclarer cette nouvelle offre de preuve recevable.

98 Il ressort de ce qui précède qu’il y a lieu d’écarter comme étant irrecevables l’ensemble des offres de preuves présentées par la requérante le 13 juin 2018 ainsi que le premier élément de l’offre de preuve du 13 mars 2020. En revanche, il y a lieu de déclarer recevable le deuxième élément de l’offre de preuve du 13 mars 2020, à savoir la décision de la Commission du 26 octobre 2018 relative à l’aide d’État SA.43260 (2015/FC) ressortant de la procédure Hahn IV.

Sur le fond

99 La requérante soulève, en substance, un moyen unique, articulé en trois branches. Ces branches concernent, la première, l’omission par la Commission de tenir compte de certains faits essentiels, la deuxième, l’omission par la Commission de tenir compte d’autres prétendues aides octroyées à l’aéroport de Francfort-Hahn et, la troisième, des erreurs d’appréciation qui auraient été commises par la Commission.

Observations liminaires

100 Selon la jurisprudence, lorsque la Commission ne peut pas acquérir la conviction, à la suite d’un premier examen mené dans le cadre de la procédure visée par l’article 108, paragraphe 3, TFUE, qu’une mesure d’aide d’État soit ne constitue pas une « aide » au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, soit, si elle est qualifiée d’aide, est compatible avec le traité FUE, ou lorsque cette procédure ne lui a pas permis de surmonter les difficultés sérieuses soulevées par l’appréciation de la compatibilité de la mesure considérée, cette institution est dans l’obligation d’ouvrir la procédure prévue à l’article 108, paragraphe 2, TFUE, sans disposer à cet égard d’une marge d’appréciation (voir arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 113 et jurisprudence citée ; voir également, en ce sens, arrêt du 10 mai 2005, Italie/Commission, C‑400/99, EU:C:2005:275, point 48). Cette obligation est d’ailleurs expressément confirmée par les dispositions combinées de l’article 4, paragraphe 4, et de l’article 15, paragraphe 1, du règlement 2015/1589 (voir, par analogie, arrêt du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 113).

101 L’article 4 du règlement 2015/1589 indique à cet égard que, pour autant que le projet notifié par l’État membre concerné constitue effectivement une aide, c’est la présence ou l’absence de « doutes » quant à la compatibilité de ce projet avec le marché intérieur qui permet à la Commission de décider ou non d’ouvrir la procédure formelle d’examen à l’issue de son examen préliminaire.

102 S’agissant de la notion de «  doutes » quant à la compatibilité de la mesure notifiée avec le marché intérieur, énoncée à l’article 4, paragraphes 3 et 4, du règlement 2015/1589, trois exigences ont été définies par la jurisprudence pour encadrer l’appréciation de la Commission.

103 Premièrement , cette notion revêt un caractère exclusif. En effet, l’article 108 TFUE circonscrit le pouvoir de la Commission de se prononcer sur l’existence d’une aide au terme de la procédure préliminaire d’examen aux seules mesures ne soulevant pas de difficultés sérieuses, de telle sorte que ce critère revêt un caractère exclusif (arrêt du 15 octobre 2018, Vereniging Gelijkberechtiging Grondbezitters e.a./Commission, T‑79/16, non publié, EU:T:2018:680, point 91). Ainsi, la Commission ne saurait refuser d’ouvrir la procédure formelle d’examen en se prévalant d’autres circonstances, telles que l’intérêt de tiers, des considérations d’économie de procédure ou tout autre motif de convenance administrative ou politique (voir arrêt du 16 septembre 2013, Iliad e.a./Commission, T‑325/10, non publié, EU:T:2013:472, point 35 et jurisprudence citée).

104 Deuxièmement, il résulte notamment de l’article 4, paragraphe 4, du règlement 2015/1589 que, lorsque la Commission ne parvient pas à éliminer tout doute au sens de cette disposition, elle a l’obligation d’ouvrir la procédure formelle d’examen. Ainsi qu’il a été souligné au point 100 ci-dessus, la Commission ne dispose à cet égard d’aucune marge d’appréciation (voir, en ce sens, arrêts du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission, C‑487/06 P, EU:C:2008:757, point 113 et jurisprudence citée, et du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 79 et jurisprudence citée).

105 Troisièmement, la notion de doutes énoncée à l’article  4, paragraphes 3 et 4, du règlement 2015/1589 revêt un caractère objectif. L’existence de tels doutes doit être recherchée tant dans les circonstances d’adoption de l’acte attaqué que dans son contenu, d’une manière objective, en mettant en relation les motifs de la décision avec les éléments dont la Commission pouvait disposer lorsqu’elle s’est prononcée sur la compatibilité des aides litigieuses avec le marché intérieur. Il en découle que le contrôle de légalité effectué par le Tribunal sur l’existence de doutes dépasse, par nature, la recherche de l’erreur manifeste d’appréciation (voir, en ce sens, arrêts du 2 avril 2009, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission, C‑431/07 P, EU:C:2009:223, point 63, et du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 80 et jurisprudence citée). Les éléments d’information dont la Commission « pouvait disposer » sont ceux qui apparaissaient pertinents pour l’appréciation à effectuer et dont elle aurait pu, sur sa demande, obtenir la production au cours de la phase préliminaire d’examen (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2017, Commission/Frucona Košice, C‑300/16 P, EU:C:2017:706, point 71).

106 U ne décision adoptée par la Commission sans ouverture de la procédure formelle peut être annulée en raison de l’omission de l’examen contradictoire et approfondi prévu par le traité FUE, même s’il n’est pas établi que les appréciations portées sur le fond par la Commission étaient erronées en droit ou en fait, s’il y avait des difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêt du 9 septembre 2010, British Aggregates e.a./Commission, T‑359/04, EU:T:2010:366, point 58). En effet, le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par la Commission lors de la phase d’examen préliminaire constitue un indice de l’existence de difficultés de nature à justifier l’ouverture de la procédure formelle d’examen (voir arrêt du 11 octobre 2016, Søndagsavisen/Commission, T‑167/14, non publié, EU:T:2016:603, point 24 et jurisprudence citée). La Commission est tenue, dans l’intérêt d’une bonne administration des règles fondamentales du traité relatives aux aides d’État, de conduire la procédure d’examen des mesures incriminées de manière diligente et impartiale, afin qu’elle dispose, lors de l’adoption de la décision finale, des éléments les plus complets et fiables possibles pour ce faire (arrêt du 27 avril 2017, Germanwings/Commission, T‑375/15, non publié, EU:T:2017:289, point 68).

107 Dans ce contexte, au titre du contrôle de légalité de la décision de la Commission de ne pas soulever d’objections, il incombe au Tribunal d’examiner les arguments avancés par la requérante pour établir que, après un examen préliminaire, l’aide litigieuse suscite des doutes quant à sa compatibilité avec le marché intérieur au sens de l’article 4, paragraphes 3 et 4, du règlement 2015/1589. Un tel examen est d’autant plus important pour la requérante que ces arguments correspondent essentiellement à ceux qu’elle aurait pu avancer en tant que partie intéressée en faisant usage de ses droits procéduraux lors de la procédure formelle d’examen au titre de l’article 108, paragraphe 2, TFUE si cette procédure avait été ouverte, droits procéduraux dont elle invoque, en l’espèce, la violation. L’utilisation de tels arguments ne saurait pour autant avoir pour conséquence de transformer l’objet du recours ni d’en modifier les conditions de recevabilité. Au contraire, l’existence de doutes quant à cette compatibilité est précisément la preuve qui doit être apportée pour démontrer que la Commission était tenue d’ouvrir la procédure formelle d’examen visée à l’article 108, paragraphe 2, TFUE ainsi qu’à l’article 6, paragraphe 1, du règlement 2015/1589 (voir, par analogie, arrêts du 24 mai 2011, Commission/Kronoply et Kronotex, C‑83/09 P, EU:C:2011:341, point 59 ; du 22 septembre 2011, Belgique/Deutsche Post et DHL International, C‑148/09 P, EU:C:2011:603, point 55, et du 27 octobre 2011, Autriche/Scheucher-Fleisch e.a., C‑47/10 P, EU:C:2011:698, point 50).

108 À cette fin, i l appartient à la partie requérante de prouver l’existence de difficultés sérieuses, preuve qu’elle peut fournir à partir d’un faisceau d’indices concordants (voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 2015, Pollmeier Massivholz/Commission, T‑89/09, EU:T:2015:153, point 51 et jurisprudence citée) relatifs, d’une part, aux circonstances et à la durée de la procédure d’examen préliminaire et, d’autre part, au contenu de la décision attaquée (arrêt du 10 février 2009, Deutsche Post et DHL International/Commission, T‑388/03, EU:T:2009:30, point 93). Or, il doit être relevé que, en tant que partie intéressée, la partie requérante ne dispose ni de pouvoirs d’enquête ni, en principe, de capacités d’investigation comparables à celles dont bénéficie la Commission, au besoin en sollicitant la coopération de l’État membre concerné, pour mener à bien son examen de l’aide litigieuse (voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2018, Tempus Energy et Tempus Energy Technology/Commission, T‑793/14, sous pourvoi, EU:T:2018:790, point 67).

109 Dès lors, à un stade de la procédure où les parties intéressées n’ont pas encore été mises en demeure de présenter leurs observations par une décision d’ouvrir la procédure formelle d’examen, il suffit que la partie requérante expose les raisons pour lesquelles elle estime, au vu de la décision attaquée, que la Commission aurait dû avoir des doutes sur la compatibilité de la mesure notifiée avec le marché intérieur. Elle n’est donc pas tenue de présenter tous les éléments de nature à établir l’incompatibilité du régime d’aide notifié (voir, en ce sens, arrêt du 15 novembre 2018, Tempus Energy et Tempus Energy Technology/Commission, T‑793/14, sous pourvoi, EU:T:2018:790, point 68). Pour prouver l’existence de doutes au sens de l’article 4, paragraphe 4, du règlement 2015/1589, il suffit que la partie requérante démontre que la Commission n’a pas recherché, ni examiné, de manière diligente et impartiale, l’ensemble des éléments pertinents aux fins de cette analyse ou qu’elle ne les a pas dûment pris en considération, de manière à éliminer tout doute quant à la compatibilité de la mesure notifiée avec le marché intérieur (voir, par analogie, arrêt du 15 novembre 2018, Tempus Energy et Tempus Energy Technology/Commission, T‑793/14, sous pourvoi, EU:T:2018:790, point 70).

110 En l’espèce, il convient dès lors de vérifier si les éléments avancés par la requérante devant le Tribunal, au vu des informations disponibles lors de l’adoption de la décision attaquée, étaient de nature à susciter des doutes quant à la compatibilité partielle ou totale de l’aide litigieuse avec le marché intérieur, imposant dès lors à la Commission d’ouvrir la procédure formelle d’examen, sans préjudice de l’exercice ultérieur, par cette institution, de son pouvoir d’appréciation de la compatibilité de cette mesure avec le marché intérieur à la suite de l’ouverture de ladite procédure.

Sur la première branche, concernant l’omission par la Commission de tenir compte des faits essentiels 

111 Par la première branche du moyen unique, la requérante fait valoir que la Commission a omis de tenir compte, dans son analyse de la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur, des faits ayant une importance cruciale pour l’appréciation juridique de ladite aide. La requérante conteste ainsi le caractère complet de l’examen de la Commission s’agissant de différents aspects liés à l’aide litigieuse.

112 Les trois griefs invoqués par la requérante dans le cadre de cette première branche concernent l’appréciation, par la Commission, de trois circonstances factuelles qui seront analysées de manière séparée ci-après : premièrement, la dépendance de l’aéroport de Francfort-Hahn à l’égard de Ryanair, deuxièmement, le transfert de l’aide litigieuse à Ryanair et, troisièmement, la procédure de privatisation de l’aéroport de Francfort-Hahn.

Sur le premier grief de la première branche, concernant la dépendance de l’aéroport de Francfort-Hahn à l’égard de Ryanair

113 Dans le premier grief de la première branche, la requérante soutient que la Commission n’a pas tenu compte du fait que l’aéroport de Francfort-Hahn était dépendant de Ryanair. Cette dépendance aurait été constatée par la décision Hahn II et se manifesterait de cinq manières.

114 Premièrement, Ryanair aurait imposé le nom de l’aéroport de Francfort-Hahn, aurait empêché, selon un article de presse, que d’autres compagnies obtiennent des parts de passagers plus importantes dans ledit l’aéroport en exerçant des pressions sur d’autres compagnies aériennes et aurait fait pression pour empêcher l’introduction d’une taxe passagers envisagée par l’aéroport en 2008.

115 Deuxièmement, la quasi-totalité des comptes annuels de l’aéroport Frankfurt-Hahn ainsi que les déclarations de sa direction démontreraient sa dépendance de Ryanair.

116 Troisièmement, au cours de la période de 1999 à 2003, Ryanair était la seule compagnie aérienne de transport de passagers qui utilisait l’aéroport de Francfort-Hahn. Depuis lors, Ryanair apporterait plus de 95 % du volume de passagers annuel. En 2009, le chiffre était de 97,05 %, ce qui ressort du considérant 23 de la décision Hahn II. En 2014, le volume de passagers de Ryanair était de 89,3 % et il était de 84,11 % en 2015.

117 Quatrièmement, la requérante affirme que les recettes générées par les activités de fret de l’aéroport de Francfort-Hahn ne relativisent pas la dépendance de cet aéroport à l’égard de Ryanair. Elle soutient que les activités de fret de l’aéroport se sont effondrées après 2011 et n’ont pas cessé de diminuer, au motif que le client de fret le plus important de l’aéroport était devenu insolvable en 2013 ainsi qu’en raison du départ d’autres clients de fret, ce que confirmerait les comptes annuels des années 2013 à 2015.

118 Cinquièmement, la requérante allègue que, en contradiction avec ce que la Commission a conclu aux considérants 61 et 62 de la décision attaquée, le nouveau propriétaire de l’aéroport de Francfort-Hahn, HNA, n’a pas ouvert, en 2017, de lignes de passagers entre ledit aéroport et la Chine et qu’il ne les ouvrira pas en 2018 ni dans un laps de temps prévisible. Elle assure que l’accord relatif au transport aérien civil conclu entre la République fédérale d’Allemagne et la République populaire de Chine le 31 octobre 1975, lequel a été adopté sous forme de loi en 1978 et publié au Bundesgesetzblatt (BGBl. 1978 II, p. 373), a limité le nombre maximal de vols de passagers entre les deux pays. La compagnie aérienne Hainan Airlines, appartenant à HNA, aurait fait savoir à la presse qu’elle n’envisageait pas de dérouter des vols de l’aéroport de Berlin-Tegel (Allemagne) vers l’aéroport de Francfort-Hahn. La requérante maintient que la Commission ne peut pas se fonder sur le plan de gestion ex ante de l’aéroport de Francfort-Hahn présenté par la République fédérale d’Allemagne pour conclure que Ryanair aurait une importance réduite dans l’aéroport ou qu’elle a subi une augmentation des taxes aéroportuaires, puisque l’importance de Ryanair serait déterminée par le contrat conclu par l’aéroport de Francfort-Hahn avec elle en 2016. Ainsi, la Commission ne pourrait pas fonder son analyse sur un plan de gestion qui prévoit autre chose.

119 La Commission conteste ces arguments.

120 I l ne saurait être reproché à la Commission de ne pas avoir tenu compte de l’importance de Ryanair dans l’aéroport de Francfort-Hahn.

121 En effet, l a connaissance, par la Commission, de la position de Ryanair dans l’aéroport de Francfort-Hahn ressort des considérants 6 et 34 de la décision attaquée, dans lesquels elle a constaté que Ryanair était, au moment de la notification de l’aide litigieuse, la principale compagnie aérienne assurant des vols à partir de l’aéroport de Francfort-Hahn. Ainsi, il découle de la décision attaquée que Ryanair était la principale compagnie aérienne dans l’aéroport au moment de l’adoption de la décision attaquée.

122 Néanmoins, la Commission explique, dans la décision attaquée, les raisons pour lesquelles le fait que Ryanair soit la principale compagnie aérienne dans l’aéroport de Frankfort-Hahn n ’est pas susceptible d’entraîner une dépendance dudit aéroport à l’égard de cette compagnie à long terme. Il ressort, en effet, des considérants 60 et 63 de la décision attaquée que le plan de gestion ex ante de l’aéroport de Francfort-Hahn montre que sa viabilité économique à l’horizon 2024 est principalement fondée sur les recettes provenant de l’activité de fret. Par ailleurs, il ressort des considérants 62 et 67 de la décision attaquée que le plan de gestion ex ante montre qu’il est envisagé une augmentation des passagers de l’aéroport, puisque HNA a l’intention que l’aéroport de Frankfort-Hahn soit utilisé par tous les usagers potentiels, et non par un seul usager. Ce constat s’appuie notamment sur le fait que HNA souhaite attirer vers l’aéroport de Francfort-Hahn tant les compagnies aériennes déjà présentes que de nouvelles compagnies pour transporter les touristes chinois en Europe.

123 Il ré sulte ainsi de la décision attaquée que la Commission a constaté la prépondérance de Ryanair dans l’aéroport. Elle a ensuite analysé le plan de gestion ex ante, mentionné au point 9 ci-dessus, et a observé que celui-ci estimait que cette situation de prépondérance allait évoluer. Cette évolution serait due, notamment, au fait que les activités de fret, que Ryanair ne semblerait pas développer, constitueraient la principale source de viabilité de l’aéroport à moyen terme et que HNA envisageait d’introduire des vols en provenance et à destination de la Chine. Ces changements introduits par HNA pouvaient, selon la Commission, indiquer que l’importance de Ryanair diminuerait graduellement dans l’aéroport de Francfort-Hahn.

124 En outre, pour ce qui est de l’accord entre la République fédérale d’Allemagne et la République populaire de Chine invoqué par la requérante, il y a lieu de souligner que, ainsi que la Commission l’a précisé lors de l’audience, cet accord étant bilatéral, c’était à ces deux États qu’il appartenait de définir la fréquence des vols entre leurs territoires. Ainsi, la Commission pouvait considérer que, si la République fédérale d’Allemagne avait prévu dans le plan de gestion ex ante de l’aéroport de Francfort-Hahn, mentionné au point 9 ci-dessus, d’introduire des vols en provenance de Chine, c’était parce que l’accord lui permettait de le faire ou qu’une renégociation était en cours au moment de l’adoption de la décision attaquée. De plus, l’étendue exacte des prétendues restrictions des vols entre l’Allemagne et la Chine ne ressort pas de manière suffisamment claire de l’ensemble des arguments des parties, de sorte que la prétendue impossibilité pour HNA d’établir des vols en provenance de Chine à l’aéroport de Francfort-Hahn n’est pas suffisamment étayée. Par ailleurs, il convient de noter que le fait que HNA a sa propre compagnie aérienne, à savoir Hainan Airlines, peut être considéré comme un élément de nature à démontrer que HNA éprouve un intérêt à ce que cette compagnie aérienne opère des vols depuis l’aéroport de Francfort-Hahn.

125 L’arg umentation de la requérante selon laquelle la Commission n’aurait pas dû se fonder sur le plan de gestion ex ante de l’aéroport ne saurait infirmer la conclusion tirée au point précédent. En effet, ainsi que le fait ressortir la Commission, le plan de gestion de l’aéroport concerné est mentionné à plusieurs reprises par les lignes directrices sur les aides à l’aviation en tant que base de l’analyse de compatibilité de l’aide litigieuse que la Commission doit effectuer. En particulier, le point 126 des lignes directrices sur les aides à l’aviation établit que les paramètres clés du plan de gestion de l’aéroport font partie intégrante de l’appréciation de la compatibilité par la Commission. Ainsi, la Commission s’est à bon droit appuyée sur le plan de gestion de l’aéroport présenté par la République fédérale d’Allemagne.

126 Dès lors, l’argumentation de la requérante , dans le cadre du premier grief de la première branche, ne suggère pas que, lors de l’analyse de la dépendance de l’aéroport de Francfort-Hahn à l’égard de Ryanair, la Commission ait erronément apprécié les informations dont elle disposait ou omis de tenir compte des informations dont elle pouvait disposer, ce qui démontrerait que la Commission n’a pas pu surmonter des difficultés sérieuses soulevées par l’appréciation de la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

127 Il y a lieu ainsi de conclure qu e, pour ce qui est de la dépendance de l’aéroport de Francfort-Hahn à l’égard de Ryanair, la requérante n’a pas démontré, dans le premier grief de la première branche, que la Commission aurait dû éprouver des doutes lors de l’analyse de l’aide litigieuse.

128 Le premier grief de la première branche doit ainsi être écarté.

Sur le deuxième grief de la première branche, concernant le transfert de l’aide litigieuse à Ryanair

129 Dans le deuxième grief de la première branche, la requérante estime que le présent recours a été formé au motif que « toutes les aides évoquées dans la décision [attaquée] » étaient transférées à Ryanair. Ce transfert se ferait notamment sur la base du contrat que l’aéroport de Francfort-Hahn a conclu avec Ryanair en 2016.

130 Premièrement, à cet égard, la requérante assure que les contrats avec Ryanair conclus en 1999, en 2002 et en 2005 ne prévoient aucune obligation pour Ryanair d’apporter un volume déterminé de passagers, ni de stationner des avions dans l’aéroport. Elle affirme que le contrat conclu entre l’aéroport de Francfort-Hahn et Ryanair en 2016 correspond pour l’essentiel au troisième contrat, conclu en 2005.

131 Deuxièmement, la requérante considère que l’aéroport de Francfort-Hahn a tenté de maintenir Ryanair auprès de lui en développant ses infrastructures en fonction des besoins de cette compagnie aérienne, que ce soit en modernisant un terminal en 1999, en construisant un terminal entièrement neuf en 2003, en mettant en place une école de formation de pilotes et de membres d’équipage de cabine en 2011 ou encore en construisant un hangar de maintenance pour des avions utilisés par Ryanair.

132 Troisièmement, la requérante estime que l’aéroport de Francfort-Hahn a artificiellement maintenu les redevances aéroportuaires à verser par Ryanair à un niveau très bas et conservé, en général, une relation commerciale qui n’a jamais été rentable. Ces conditions avantageuses pour Ryanair résulteraient d’une expertise réalisée en 2006 par la société PwC.

133 Quatrièmement, la requérante ajoute que les redevances appliquées à Ryanair seraient encore plus basses en tenant compte d’un « contrat de soutien marketing » conclu entre le Land de Rhénanie-Palatinat et Ryanair en 2005 et sur la base duquel ledit Land a versé au moins 1,2 million d’euros par an à Ryanair. La requérante souligne qu’elle avait présenté ce contrat à la Commission dans le cadre de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision Hahn I et que la Commission n’en a pas tenu compte. La maintenance des avions de Ryanair serait également favorisée par des aides octroyées par le Land. La requérante prétend que HAITEC Aircraft Maintenance GmbH (ci-après « HAITEC ») assure l’entretien des avions de Ryanair et que la base de l’activité de HAITEC était une garantie fournie par la banque publique Investitions-und Strukturbank Rheinland-Pfalz (ci-après l’« ISB ») afin de sécuriser les investissements, selon un communiqué de presse. HAITEC profiterait encore d’autres aides octroyées par le Land, ce qui ressortirait d’un article de presse.

134 Cinquièmement, la requérante relève que la relation commerciale avec Ryanair a causé des problèmes économiques considérables à l’aéroport de Francfort-Hahn, ce qui ressortirait d’une expertise réalisée par AT Kearney commandée par le Land de Rhénanie-Palatinat en 2012, selon laquelle, en 2011, il existait un défaut de couverture de 17,5 millions d’euros et les redevances aéroportuaires convenues avec Ryanair étaient trop peu élevées. La requérante note que, puisque le contrat, conclu par l’aéroport en 2016 avec Ryanair, correspond, pour l’essentiel, au contrat conclu en 2005, les conclusions auxquelles l’expertise est arrivée seraient aussi applicables.

135 La Commission réfute ces arguments.

136 À titre liminaire, il convient de relever que le présent grief pose la question de savoir si la Commission était obligée d’analyser, dans la décision attaquée, outre l’aide litigieuse, le contrat conclu entre l’aéroport de Francfort-Hahn et Ryanair en 2016 ainsi que le prétendu développement de l’infrastructure de l’aéroport pour Ryanair et les prétendues aides à HAITEC.

137 À cet égard , il y a lieu de signaler que le contrat entre Ryanair et l’aéroport de Francfort-Hahn conclu en 2016, le « contrat de soutien marketing » conclu entre le Land de Rhénanie-Palatinat et Ryanair en 2005, la garantie octroyée par l’ISB à HAITEC ainsi que la construction du hangar et la mise en place de l’école de formation de pilotes et de membres d’équipage de cabine en 2011 font l’objet de la procédure Hahn IV, mentionnée au point 14 ci-dessus, sur la base d’une plainte de la requérante.

138 A u sujet du contrat conclu avec Ryanair en 2016, il doit être observé qu’il ne ressort pas du dossier que ce contrat et l’aide litigieuse fassent partie d’un scénario d’ensemble, obligeant la Commission à analyser leur compatibilité avec le marché intérieur dans la même décision. En effet, premièrement, le contrat conclu en 2016 avec Ryanair et l’aide litigieuse sont échelonnés dans le temps, l’aide litigieuse, en l’espèce, ayant été notifiée un an après la conclusion du contrat. Deuxièmement, l’actionnaire majoritaire de l’aéroport de Francfort-Hahn a changé après la conclusion du contrat de 2016. Troisièmement, la forme que revêtent les deux mesures est très différente, l’aide litigieuse constituant un versement direct du Land de Rhénanie-Palatinat à l’aéroport de Francfort-Hahn sur la base des pertes opérationnelles prouvées et le contrat avec Ryanair de 2016 réglant les relations contractuelles entre l’aéroport de Francfort-Hahn et ladite compagnie aérienne.

139 S’agissant de la construction d’infrastructures prétendument réalisées en faveur de Ryanair, il doit être souligné que cette mesure revêt une forme différente de celle de l’aide litigieuse . Pour ce qui est des présumées aides au marketing de Ryanair, il convient de souligner que ladite mesure aurait été conclue en 2005 entre le Land de Rhénanie-Palatinat et Ryanair, de sorte que tant le bénéficiaire que l’entité ayant octroyé la prétendue aide sont différents de ceux de l’aide litigieuse. Il en va de même pour la garantie octroyée à HAITEC par l’ISB, qui concerne elle aussi des entités différentes de celles de l’aide litigieuse. Ainsi, ces mesures ne sauraient être considérées comme faisant partie d’un scénario d’ensemble avec l’aide litigieuse.

140 Ainsi, il y a lieu de conclure que le fait que la Commission a analysé la plainte de la requérante de manière séparée eu égard à la notification de l’aide litigieuse lors de l’analyse de la dépendance de l’aéroport de Francfort Hahn à l’égard de Ryanair ne saurait démontrer, contrairement à ce qu’avance la requérante dans le cadre du deuxième grief de la première branche, que la Commission ait erronément apprécié les informations dont elle disposait ou omis de tenir compte des informations dont elle pouvait disposer, ce qui aurait pu démontrer que la Commission n’a pas surmonté les difficultés sérieuses soulevées par l’appréciation de la compatibilité de l’aide litigieuse.

141 Dès lors, s’agissant du transfert de l’aide litigieuse à Ryanair, la requérante n’a pas établi, dans le cadre du deuxième grief de la première branche, que la Commission aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de ladite aide avec le marché intérieur.

142 Le deuxième grief de la première branche doit ainsi être écarté.

Sur le troisième grief de la première branche, concernant la procédure de privatisation de l’aéroport

143 Dans le troisième grief de la première branche, la requérante allègue que, dans l’appel d’offre publique du 23 juillet 2016 en vue de la privatisation de l’aéroport de Francfort-Hahn, le Land de Rhénanie-Palatinat a proposé à l’acquéreur potentiel de profiter des aides au fonctionnement qu’il allait octroyer conformément aux lignes directrices sur les aides à l’aviation. Elle déclare que, pendant la procédure de privatisation, le Land de Rhénanie-Palatinat a octroyé un prêt de sauvetage de 34 millions d’euros à l’aéroport de Francfort-Hahn. Elle affirme que Ryanair a imposé la conclusion du contrat de 2016 pour assurer une prévisibilité de son activité à l’aéroport de Francfort-Hahn et que ce contrat incluait une clause selon laquelle une pénalité financière serait due si l’aéroport n’était exploité que jusqu’à une date précise. En mars 2017, le Land de Rhénanie-Palatinat aurait vendu sa part de 82,5 % à HNA pour un prix nominal de 15,1 millions d’euros. Le prix d’achat réel serait toutefois, selon la requérante, moins élevé, puisque celui-ci devrait encore servir à rembourser le prêt de sauvetage octroyé par le Land de Rhénanie-Palatinat à l’aéroport de Francfort-Hahn en 2016.

144 La requérante affirme que HNA continue à subventionner Ryanair au moyen des ressources financières du Land de Rhénanie-Palatinat, en raison de la structure de la privatisation de l’aéroport de Francfort-Hahn.

145 La Commission conteste ces arguments.

146 I l y a lieu de relever qu’il ressort du texte de l’appel d’offres publié pour la vente des actions du Land de Rhénanie-Palatinat dans l’aéroport de Francfort-Hahn que la demande d’aide au fonctionnement n’était pas une condition, mais une simple option dont pouvait bénéficier l’acheteur des actions, lequel, au cas où il envisageait de demander cette aide, devait présenter un plan de gestion ex ante de l’aéroport.

147 Ainsi, le déroulement de la procédure de privatisation, tel que décrit par la requérante, n’étaye pas le fait que l’octroi de l’aide en l’espèce ait été une condition imposée par HNA au Land de Rhénanie-Palatinat pour acquérir ses actions. La structure de la privatisation ne démontre pas non plus que HNA continue de subventionner Ryanair de quelque manière que ce soit.

148 Il y a dès lors lieu de conclure que la requérante n’a pas montré à suffisance de droit, dans le cadre du troisième grief de la première branche, que le déroulement de la procédure de privatisation de l’aéroport de Francfort-Hahn aurait dû susciter des doutes chez la Commission quant à la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur justifiant l’ouverture de la phase formelle.

149 Dès lors, il y a lieu de conclure qu’il ne ressort pas de l’argumentation de la requérante, dans le cadre de la première branche, que la Commission n’a it pas recherché ni examiné de manière diligente et impartiale l’ensemble des éléments pertinents aux fins de l’analyse de la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur ou qu’elle ne les ait pas dûment pris en considération, de manière à éliminer tout doute quant à cette compatibilité. La requérante n’a ainsi pas établi, dans le cadre de la première branche, que la Commission aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

150 L a première branche doit ainsi être écarté.

Sur la deuxième branche, concernant l’omission de la Commission de tenir compte d’autres prétendues aides octroyées à l’aéroport de Francfort-Hahn 

151 Par la deuxième branche du moyen unique, la requérante conteste l’examen complet, par la Commission, de la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur, s’agissant d’autres prétendues aides qui auraient été octroyées à l’aéroport de Francfort-Hahn.

152 Premièrement, la requérante prétend que l’aéroport de Francfort-Hahn a déjà reçu des aides au fonctionnement, puisqu’il a détourné un versement de 120 millions d’euros effectué par le Land de Rhénanie-Palatinat à sa réserve de capital en décembre 2014 pour refinancer des prêts qui couvraient des investissements dans l’infrastructure. La requérante précise que ce versement a été approuvé par la Commission dans la décision Hahn I. La requérante ajoute que, sur les 120 millions d’euros de ce versement, plus de 77 millions d’euros n’ont pas été utilisés pour des investissements, mais pour couvrir des pertes d’exploitation héritées du passé, ce qui serait confirmé par un état des flux de trésorerie établi par la requérante. Elle développe ainsi des arguments qui démontrent le détournement de ce versement.

153 La requérante fait ressortir que, selon les lignes directrices sur les aides à l’aviation, la limite maximale des aides au fonctionnement serait la moitié des pertes générées au cours des cinq dernières années. En l’espèce, ce montant s’élèverait à 25,3 millions d’euros. Compte tenu du fait que 77 millions d’euros reçus ont été préalablement utilisés pour couvrir des pertes opérationnelles, le montant maximal serait déjà dépassé.

154 Deuxièmement, la requérante signale que le Land de Rhénanie-Palatinat a octroyé un prêt d’un montant de 34 millions d’euros à l’aéroport de Francfort-Hahn au deuxième semestre de 2016, ce qui constitue une aide d’État. Elle relève qu’un investisseur privé n’aurait pas accordé un tel prêt sans demander d’intérêts élevés et des garanties adéquates. La requérante fait valoir que ce prêt constitue une aide au sauvetage, conformément au point 55 des lignes directrices concernant les aides d’État au sauvetage et à la restructuration d’entreprises en difficulté autres que les établissements financiers (JO 2014, C 249, p. 1). Elle soutient que l’octroi de cette aide est interdit par le point 71 de ces lignes directrices au motif que l’aéroport de Francfort-Hahn a déjà obtenu une aide au sauvetage en 2012 et en 2013.

155 Troisièmement, la requérante avance que l’aéroport de Francfort-Hahn a obtenu du Landesbetrieb Liegenschafts- und Baubetreuung Rheinland-Pfalz (LBB, office national de l’immobilier et de la construction en Rhénanie-Palatinat, Allemagne), en 2014, des prix excessifs (18,1 millions d’euros) pour la vente de terrains sans valeur, afin de générer, à court terme, des liquidités pour l’aéroport de Francfort-Hahn. Ces opérations immobilières auraient servi à combler ses déficits financiers. Cela démontrerait que les montants reçus pour les opérations immobilières constituent des aides d’État. Les ressources provenant du contrat de vente auraient été utilisées pour rembourser le prêt à partir du système de gestion centralisée de trésorerie.

156 Quatrièmement, la requérante signale que l’aéroport de Francfort-Hahn a obtenu du Land de Rhénanie-Palatinat des subventions sur les frais de sécurité en 2014 et en 2015.

157 La Commission conteste ces arguments .

158 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que les quatre mesures mentionnées par la requérante dans le cadre de la deuxième branche font l’objet de la procédure Hahn IV, mentionnée au point 14 ci-dessus.

159 Cette branche concerne la question de savoir si la Commission aurait dû prendre en compte ces mesures lorsqu’elle a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre de l’aide litigieuse.

160 Les lignes directrices sur les aides à l’aviation n’imposent pas, dans le cadre de l’étude sur la compatibilité d’une aide au fonctionnement, d’analyser d’autres aides que l’aéroport aurait reçues pour des objectifs différents de celui des aides au fonctionnement. Les aides au fonctionnement aux aéroports ont un but précis et font l’objet de la section 5.1.2 des lignes directrices sur les aides à l’aviation. Ces lignes directrices déclarent que ces aides seront considérées compatibles avec le marché intérieur pendant une période transitoire de dix ans à compter du 4 avril 2014 pour autant qu’elles satisfassent aux critères tenant à la « contribution à un objectif d’intérêt commun », à la « nécessité de l’intervention de l’État », au « caractère approprié de l’aide en tant qu’instrument d’intervention », à l’« existence d’un effet d’incitation », à la « proportionnalité du montant de l’aide (limitation de l’aide au minimum nécessaire) » et à la « prévention des effets négatifs non désirés sur la concurrence et les échanges ».

161 Au point  128, les lignes directrices sur les aides à l’aviation fixent le montant maximal d’aide au fonctionnement qui peut être octroyé aux aéroports de la taille de celui de Francfort-Hahn, à savoir la moitié du déficit de financement initial sur une période de dix ans. À la fin de cette période, les aéroports doivent couvrir l’intégralité des coûts d’exploitation et plus aucune aide au fonctionnement ne sera jugée compatible avec le marché intérieur.

162 Au vu des critères fixés par les li gnes directrices sur les aides à l’aviation, il y a lieu de conclure que la requérante n’a pas démontré à suffisance de droit en quoi les quatre groupes de mesures mentionnées dans le cadre de la deuxième branche font partie d’un scénario d’ensemble et auraient dû être pris en compte par la Commission lors de son analyse de la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur.

163 En effet, p remièrement, en ce qui concerne le détournement du versement à la réserve de capital de l’aéroport de Francfort-Hahn, il y a lieu de constater qu’il ne ressort pas du dossier en quoi ce prétendu détournement constituerait une aide au fonctionnement.

164 Deuxièmement, toutes les prétendues aides invoquées par la requérante dans le cadre de la deuxième branche sont antérieures à l’aide litigieuse, ont des buts différents par rapport à cette aide et sont octroyées par des mécanismes différents. En effet, le prétendu prêt au sauvetage, octroyé en 2016, a un but différent de l’aide litigieuse en l’espèce. Le prix prétendument excessif perçu par l’aéroport de Francfort-Hahn pour la vente des terrains entre 2009 et 2013 n’est pas un versement direct effectué par le Land de Rhénanie-Palatinat, mais une contrepartie reçue pour une vente. Le subventionnement aux frais de sécurité vise un objectif très spécifique et différent également de celui de l’aide litigieuse. De plus, toutes ces mesures sont non seulement d’une nature différente, mais elles sont échelonnées dans le temps.

165 Dès lors, il y a lieu de conclure que le fait que la Commission n’a pas analysé les mesures mentionnées par la requérante dans le cadre de la deuxième branche dans la décision attaquée ne permet pas d’établir qu’elle n’a pas recherché ni examiné de manière diligente et impartiale l’ensemble des éléments pertinents aux fins de l’analyse de la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur ou qu’elle ne les a pas dûment pris en considération, de manière à éliminer tout doute quant à cette compatibilité.

166 La requérante n’a ainsi pas établi, dans le cadre de la deuxième branche, que la Commission aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

Sur la troisième branche, tirée des erreurs d’appréciation 

167 Dans la troisième branche du moyen unique , la requérante fait valoir que l’appréciation effectuée par la Commission dans la décision attaquée est erronée, en raison, premièrement, de l’absence d’objectif d’intérêt commun, deuxièmement, de l’appartenance à la même zone d’attraction des aéroports de Francfort-Hahn et de Francfort-sur-le-Main, troisièmement, du caractère inappropriée de l’aide litigieuse, quatrièmement, de l’absence d’effet incitatif de l’aide litigieuse, cinquièmement, de l’octroi d’aides supplémentaires depuis le 4 avril 2014 à l’aéroport de Francfort-Hahn et, sixièmement, du caractère disproportionné de l’aide litigieuse.

168 La Commission réfute ces allégations.

169 Il convient d’examiner les six griefs de manière séparée.

Sur le premier grief de la troisième branche, concernant l’absence d’objectif d’intérêt commun

170 Aux considérants 42 à 49 de la décision attaquée, la Commission a conclu que l’aide litigieuse contribuait à un objectif d’intérêt commun bien défini du fait de la création de postes de travail et de l’augmentation du tourisme dans la région.

171 Premièrement, l a requérante avance que l’aide litigieuse ne sert pas à la réalisation d’un objectif d’intérêt commun, l’aéroport de Francfort-Hahn ayant été développé selon les besoins de Ryanair et l’aide servant en réalité à financer le contrat avec cette compagnie aérienne.

172 À cet égard, il convient de rappeler qu’il a déjà été établi au point 139 ci-dessus que la construction d’infrastructures prétendument réalisées en faveur de Ryanair est une mesure qui revêt une forme différente de celle de l’aide litigieuse.

173 Deuxièmement, la requérante prétend que l’aéroport de Francfort-Hahn n’aurait pas créé 11 000 emplois, ce que la Commission a retenu au considérant  43 de la décision attaquée. Dans la réplique, la requérante critique le fait que la Commission n’a pas pris en compte une étude de 2007, qui prévoyait, pour 2005, un nombre d’emplois largement inférieur à celui figurant dans la décision de 2017.

174 Or, aucun élément du dossier n’est de nature à remettre en cause à suffisance de droit les constatations de la Commission relatives au chiffre des emplois créés par l’aéroport de Francfort-Hahn. L’article de presse cité par la requérante à cet égard ne mentionne pas les emplois créés autour de l’aéroport, mais seulement ceux de l’aéroport en lui-même ; ainsi, il ne saurait infirmer la conclusion de la Commission, qui inclut les emplois générés par l’aéroport dans la même région.

175 Troisièmement, la requérante conteste la longueur des séjours dans la région des passagers de l’aéroport de Francfort-Hahn, constatée par la Commission dans la décision attaquée. Elle fait valoir que l’aide litigieuse ne contribue pas au développement régional, puisque Ryanair n’est pas tenue par le contrat conclu avec l’aéroport de Francfort-Hahn en 2016 d’apporter un nombre déterminé de passagers.

176 À cet égard , il doit être rappelé, ainsi qu’il a été constaté au point 138 ci-dessus, qu’il ne ressort pas du dossier que le contrat conclu par l’aéroport de Francfort-Hahn en 2016 et l’aide litigieuse fassent partie d’un scénario d’ensemble, obligeant la Commission à analyser leur compatibilité avec le marché intérieur dans la même décision. De plus, la requérante n’a pas produit des éléments de preuve de nature à remettre en cause la longueur des séjours dans la région des passagers utilisant l’aéroport de Francfort-Hahn, telle que constatée par la Commission dans la décision attaquée.

177 Quatrièmement , la requérante affirme que l’aide n’améliore pas la connectivité des régions, puisque cette connectivité concerne les vols à l’intérieur de l’Union, et non ceux vers la Chine.

178 Or, il suffit de constater que la requérante a produit elle-même plusieurs éléments de preuve démontrant que l’aéroport de Francfort-Hahn proposait des vols vers plusieurs destinations dans le territoire de l’Union, de sorte qu’il ne saurait être retenu que l’aide litigieuse n’a pas d’influence sur le développement de la connectivité entre les différentes régions à l’intérieur de l’Union.

179 Il y a lieu ainsi d e conclure que la requérante n’a pas prouvé que la Commission avait commis une erreur d’appréciation quant à la détermination de l’objectif d’intérêt commun de l’aide litigieuse de nature à démontrer qu’elle aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

180 Le premier grief de la troisième branche doit ainsi être écarté.

Sur le deuxième grief de la troisième branche, concernant la zone d’attraction

181 La Commission a conclu, au considérant 45 de la décision attaquée, qu’aucun autre aéroport ne se trouvait dans la zone d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn. Elle a cité, à ce sujet, le point 25, sous 12, des lignes directrices sur les aides à l’aviation, selon lequel la zone d’attraction d’un aéroport « [est] un marché géographique situé, en principe, dans un rayon de quelque 100 kilomètres ou nécessitant un temps de trajet de 60 minutes environ en voiture, bus, train ou train à grande vitesse », qui précise que, « [t]outefois, la zone d’attraction d’un aéroport donné peut varier et doit tenir compte des spécificités de chaque aéroport particulier » et qui indique que « [l]es dimensions et la configuration de la zone d’attraction varient d’un aéroport à l’autre et sont fonction de diverses caractéristiques de l’aéroport, parmi lesquelles son modèle d’exploitation, sa localisation et les destinations qu’il dessert ». Au considérant 46 de la décision attaquée, la Commission a constaté qu’il n’y avait pas d’aéroports situés à une distance de 100 kilomètres ou à 60 minutes de route de l’aéroport de Francfort-Hahn. Elle a ajouté que les deux aéroports les plus proches, ceux de Luxembourg et de Francfort-sur-le-Main, avaient des modèles d’exploitation très différents par rapport au modèle à bas coût de l’aéroport de Francfort-Hahn. Pour ce qui est de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main, la Commission a constaté, dans une note en bas de page de la décision attaquée, que celui-ci était un aéroport international utilisé principalement par des opérateurs de réseau comme la requérante, offrant des vols de connexion.

182 À cet égard, l a requérante estime que le considérant 46 de la décision attaquée est erroné en ce qu’il conclut que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main se situe en dehors de la zone d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn et que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main suit un modèle commercial distinct de celui de Francfort-Hahn. La requérante affirme que les zones d’attraction des deux aéroports se recoupent en ce qu’il existe des lignes de bus entre eux. Elle affirme également, par rapport au modèle commercial des deux aéroports, que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main a désormais également inclus des compagnies à bas coût dans sa stratégie. Dans la réplique, la requérante illustre, par un tableau, le recoupement des zones d’attraction des deux aéroports. Le recoupement des zones d’attraction ressortirait également du site Internet de l’aéroport de Francfort-Hahn ainsi que d’un entretien avec l’ancien gérant de l’aéroport. Le tableau montrerait que la zone d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn est relativement étendue et englobe les aéroports de Cologne-Bonn et de Francfort-sur-le-Main. Il existerait, du reste, des services de navette qui proposent des liaisons quotidiennes entre la gare centrale de Francfort-sur-le-Main et l’aéroport de Francfort-Hahn. La requérante assure que la décision attaquée entre en contradiction avec la pratique antérieure de la Commission, notamment eu égard à la décision Ryanair/Aer Lingus III COMP/M 663, dans laquelle la Commission a constaté que certains vols depuis l’Irlande vers l’aéroport de Francfort-Hahn, d’une part, et vers l’aéroport de Francfort-sur-le-Main, d’autre part, étaient interchangeables et relevaient du même marché.

183 La Commission rétorque, pour sa part, que la requérante ne précise pas en quoi la distance ou la durée du trajet entre les aéroports de Francfort-Hahn et de Francfort-sur-le-Main serait inférieure à ce dont elle a tenu compte dans la décision attaquée. Elle ajoute que la requérante n’a pas non plus spécifié en quoi les modèles commerciaux des deux aéroports n’étaient pas sensiblement différents. La Commission affirme que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main a une proportion de passagers à bas coût inférieure à 10 %. Elle a précisé, lors de l’audience, que le modèle d’exploitation de l’aéroport de Francfort-Hahn différait de celui de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main en ce que ce dernier était utilisé par des voyageurs pour lesquels la durée du trajet vers l’aéroport était un facteur important et qui avaient moins de temps pour se rendre à l’aéroport de Francfort-Hahn. Pour les voyageurs d’affaires, la durée de ce trajet déterminerait le choix de l’aéroport. Ainsi, les modèles d’exploitation, à bas coût pour l’aéroport de Francfort-Hahn et premium pour l’aéroport de Francfort-sur-le-Main, seraient différents, indépendamment des destinations desservies par les deux aéroports. La Commission a également soutenu, lors de l’audience, que, pour les aéroports à bas coût, la zone d’attraction pourrait être définie plus amplement que pour les aéroports proposant des vols d’affaires, puisque le critère déterminant serait le coût du voyage, et non le temps de trajet vers l’aéroport.

184 I l ressort de la jurisprudence que, lorsque la Commission apprécie la compatibilité des aides d’État avec le marché intérieur au regard de la dérogation prévue à l’article 107, paragraphe 3, sous a), du traité FUE, elle doit tenir compte de l’intérêt de l’Union et ne peut s’abstenir d’évaluer l’incidence de ces mesures sur le ou les marchés pertinents dans l’ensemble de l’Union. En pareil cas, la Commission est tenue non seulement de vérifier si ces mesures sont de nature à contribuer effectivement au développement économique des régions concernées, mais également d’évaluer l’impact de ces aides sur les échanges entre les États membres et, notamment, d’apprécier les répercussions sectorielles qu’elles sont susceptibles de provoquer au niveau de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 82 et jurisprudence citée).

185 Il convient de rappeler que, dans le domaine spécifique des aides d’État, la Commission peut se doter de lignes directrices pour l’exercice de ses pouvoirs d’appréciation , et, pour autant qu’elles ne s’écartent pas des règles du traité, les règles indicatives qu’elles contiennent s’imposent à l’institution (voir arrêt du 13 juin 2002, Pays-Bas/Commission, C‑382/99, EU:C:2002:363, point 24 et jurisprudence citée). En effet, en adoptant des règles de conduite et en annonçant, par leur publication, qu’elle les appliquera dorénavant aux cas concernés par celles-ci, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner, le cas échéant, au titre d’une violation des principes généraux du droit, tels que l’égalité de traitement ou la protection de la confiance légitime, à moins de donner des raisons justifiant, au regard de ces mêmes principes, qu’elle s’écarte de ses propres règles (voir arrêt du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 84 et jurisprudence citée).

186 E n l’espèce, l’aide litigieuse constitue une aide au fonctionnement d’un aéroport, dont l’analyse de la compatibilité avec le marché intérieur exige l’analyse de l’existence d’un objectif d’intérêt commun, conformément aux lignes directrices sur les aides à l’aviation. Cette analyse de l’existence d’un objectif d’intérêt commun requiert, selon ces mêmes lignes directrices, la définition de la zone d’attraction de l’aéroport bénéficiaire ainsi que l’analyse de la question de savoir si d’autres aéroports sont situés dans la même zone d’attraction. Le point 25, sous 12, des lignes directrices sur les aides à l’aviation mentionne explicitement trois critères pour définir la zone d’attraction d’un aéroport, ces facteurs n’étant pas les seuls dont la Commission doit tenir compte. En effet, selon le point 25, sous 12, des lignes directrices sur les aides à l’aviation, les dimensions et la configuration de la zone d’attraction varient d’un aéroport à l’autre et sont fonction de diverses caractéristiques de l’aéroport, parmi lesquelles son modèle d’exploitation, sa localisation et les destinations qu’il dessert.

187 I l y a lieu de faire remarquer que, dans la décision attaquée, la Commission a fondé son analyse de la zone d’attraction de l’aéroport de Francfort-Hahn sur seulement deux critères, à savoir sur sa localisation et sur son modèle d’exploitation.

188 Premièrement, en ce qui concerne la localisation de l’aéroport de Francfort-Hahn, force est de constater que la distance fixée par les lignes directrices sur les aides à l’aviation est approximative, du fait de la mention des mots « quelque » et « environ ». Par conséquent, le fait que la distance entre l’aéroport de Francfort-Hahn et celui de Francfort-sur-le-Main soit de 115 km et que le temps de trajet soit de 70 minutes ne saurait suffire, à lui seul, pour exclure l’aéroport de Francfort-sur-le-Main de la zone d’attraction de celui de Francfort-Hahn.

189 Deuxièmement, e n ce qui concerne le modèle d’exploitation de l’aéroport de Francfort-Hahn, la Commission s’est limitée à constater, dans la décision attaquée, que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main avait un modèle d’exploitation très différent par rapport au modèle à bas coût de celui de Francfort-Hahn, en ce que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main était un aéroport international utilisé principalement par des opérateurs de réseau comme la requérante, offrant des vols de connexion.

190 À cet égard , force est de constater, à l’instar de ce que fait valoir la requérante et sans que cela soit contesté par la Commission, que Ryanair opère aussi des vols au départ de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main depuis mars 2017 et que ce dernier consacre un de ses terminaux à des vols à bas coût. De plus, il doit être souligné que la Commission n’a pas motivé, dans la décision attaquée, en quoi le fait que Ryanair, compagnie aérienne à bas coût, opérait des vols au départ de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main n’avait pas d’influence sur la conclusion selon laquelle les modèles d’exploitation des deux aéroports différaient, du fait que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main était utilisé, principalement, par des opérateurs de réseau. En effet, la Commission n’a pas analysé, dans la décision attaquée, la proportion des vols à bas coût au départ de l’aéroport de Francfort-sur-le-Main, ce qui pourrait être de nature à affecter la conclusion selon laquelle ce sont les opérateurs de réseau qui opèrent principalement dans cet aéroport.

191 T roisièmement, ainsi qu’il résulte du point 186 ci-dessus, la localisation de l’aéroport et son modèle d’exploitation ne sont pas les seuls facteurs dont la Commission est obligée de tenir compte lors de l’analyse de la zone d’attraction, les destinations desservies par l’aéroport étant aussi, parmi d’autres critères, un des critères indispensables que la Commission doit analyser, selon les lignes directrices sur les aides à l’aviation.

192 Pour ce qui est des destinations desservies par l’aéroport de Francfort-Hahn, la Commission a omis de tenir compte, dans la décision attaquée, de la question de savoir si l’aéroport de Francfort-sur-le-Main proposait, comme l’affirme la requérante, des vols vers les mêmes destinations. En effet, la Commission s’est limitée à constater que l’aéroport de Francfort-sur-le-Main était un aéroport international proposant, principalement, des vols de connexion, sans analyser la destination de ces connexions et des autres vols proposés par cet aéroport ou par celui de Francfort-Hahn. Cette constatation ne saurait être remise en cause par l’affirmation de la Commission, lors de l’audience, selon laquelle le considérant 44 de la décision attaquée est pertinent en ce qu’elle y a analysé les destinations desservies au départ de l’aéroport de Francfort-Hahn. En effet, ce considérant se limite à constater que l’aéroport a généré un tourisme entrant important pour la région, en ce que 88 % des passagers sont restés au moins une nuit dans la région, chiffre qui devrait augmenter dans l’avenir. Toutefois, ce considérant n’analyse pas les destinations desservies par l’aéroport de Francfort-Hahn, ni ne les compare avec celles desservies par l’aéroport de Francfort-sur-le-Main.

193 À cet égard, il sera rappelé que la requérante prétend qu’il existe une forte concurrence quant aux lignes aériennes entre l’aéroport de Francfort-Hahn et celui de Francfort-sur-le-Main.

194 Quatrièmement , il ne ressort pas de la décision attaquée que la Commission ait pris en considération d’autres spécificités de l’aéroport de Francfort-Hahn, comme l’impose le point 25, sous 12, des lignes directrices sur les aides à l’aviation.

195 Il résulte de ce qui précède que la Commission s’est limité e à analyser la localisation des aéroports et leurs modèles d’exploitation, des facteurs qui, dans le cas d’espèce, ne lui permettaient pas de tirer une conclusion concernant la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur, étant donné que la distance entre les aéroports de Francfort-Hahn et de Francfort-sur-le-Main n’était pas de beaucoup supérieure à celle fixée par les lignes directrices sur les aides à l’aviation et que les modèles d’exploitation n’était analysé dans la décision attaquée que d’une manière très succincte. L’analyse par la Commission d’autres facteurs tels que les destinations s’avérait ainsi nécessaire.

196 L ’absence d’analyse exhaustive par la Commission, dans la décision attaquée, de l’ensemble des spécificités de l’aéroport de Francfort-Hahn pour définir sa zone d’attraction est un indice de nature à démontrer le caractère insuffisant ou incomplet de l’examen mené par la Commission lors de la procédure préliminaire d’examen. En effet, l’appréciation superficielle et succincte des deux critères sur lesquels s’est fondée ladite analyse équivaut à un examen incomplet, par la Commission, de la zone d’attraction, est de nature à indiquer que la Commission aurait dû éprouver des doutes quant à la question de savoir s’il existait d’autres aéroports situés dans la même zone d’attraction et tend à révéler l’existence de difficultés sérieuses (voir, en ce sens, arrêt du 11 octobre 2016, Søndagsavisen/Commission, T‑167/14, non publié, EU:T:2016:603, point 24 et jurisprudence citée).

197 La requérante est, dès lors, fondée à soutenir que, à défaut d’avoir pris en considération les critères concernant la zone d’attraction qui s’imposaient à son appréciation par les lignes directrices sur les aides à l’aviation, la Commission ne s’est pas mise en mesure de surmonter tout doute quant à la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur pour ce qui est des effets négatifs sur les échanges de cette aide (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2012, Smurfit Kappa Group/Commission, T‑304/08, EU:T:2012:351, point 97).

198 Le deuxième grief de la troisième branche doit ainsi être accueilli.

Sur le troisième grief de la troisième branche, concernant le caractère inapproprié de l’aide litigieuse

199 Aux considérants 50 à 55 de la décision attaquée, la Commission a affirmé que l’aide litigieuse était appropriée, puisque, conformément au point 121 des lignes directrices sur les aides à l’aviation, le montant des aides devait, en principe, être établi préalablement comme étant un montant fixe couvrant le déficit de financement escompté (calculé sur la base d’un plan d’exploitation ex ante) durant une période transitoire de dix ans. À cet égard, la Commission a constaté que le versement de l’aide rentrait dans le champ d’application du montant maximum et de la période transitoire, fixés par ce point. De plus, la Commission a constaté que, d’après la République fédérale d’Allemagne, aucune autre aide au fonctionnement n’avait été versée à l’aéroport depuis avril 2014.

200 À cet égard, l a requérante invoque le caractère inapproprié de l’aide litigieuse pour la réalisation du prétendu objectif de développement régional. Elle soutient que le plan de gestion ex ante de l’aéroport de Francfort-Hahn n’a aucune valeur pour apprécier la compatibilité de l’aide litigieuse. La requérante conteste aussi le considérant 50 de la décision attaquée, selon lequel l’aéroport de Francfort-Hahn se trouve dans une situation financière très délicate. Elle invoque des contradictions entre la décision attaquée et la décision Hahn II, dans laquelle la Commission aurait observé que l’aéroport était en bonne voie pour devenir rentable.

201 La Commission avance que l’argument de la requérante selon lequel la décision attaquée contient des contradictions au regard de la décision Hahn II est irrecevable pour manque de précision.

202 À cet égard, il convient de constater que la requérante a précisé les sources auxquelles elle se référait par cette argumentation, de sorte qu’il y a lieu de rejeter la fin de non-recevoir soulevée par la Commission.

203 Or , il suffit de remarquer que la comparaison avec la situation dans laquelle se trouvait l’aéroport de Francfort-Hahn lors de l’adoption de la décision Hahn II ne saurait remettre en cause l’évaluation de cette situation par la Commission au moment de l’adoption de la décision attaquée en 2017, laquelle a pu changer. De plus, ainsi qu’il a été conclu au point 125ci-dessus, les lignes directrices sur les aides à l’aviation établissent le plan de gestion ex ante comme un des facteurs sur lesquels la Commission est obligée de fonder son analyse de la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur, de sorte qu’il ne saurait lui être reproché d’en avoir tenu compte.

204 Il y a lieu , ainsi, de conclure que la requérante n’a pas prouvé que la Commission avait commis une erreur d’appréciation quant à la détermination du caractère approprié de l’aide litigieuse de nature à démontrer qu’elle aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur.

205 Le troisième grief de la troisième branche doit ainsi être écarté.

Sur les quatrième et cinquième griefs de la troisième branche, concernant l’absence d’effet incitatif de l’aide litigieuse et le caractère erroné du considérant 51 de la décision attaquée

206 Au considérant 53 de la décision attaquée, la Commission a affirmé que l’aide litigieuse avait un effet d’incitation, compte tenu du fait que l’aéroport de Francfort-Hahn ne pourrait pas couvrir ses coûts d’exploitation sans l’aide jusqu’en 2023 .

207 À ce sujet, l a requérante fait valoir que les aides au fonctionnement n’ont pas d’effet incitatif, en ce que l’aéroport de Francfort-Hahn avait déjà reçu d’autres aides.

208 La Commission conteste ces arguments.

209 À cet égard, ainsi qu’il a été constaté au point 162 ci-dessus, il y a lieu de rappeler qu’il ne ressort pas du dossier que les prétendues aides supplémentaires mentionnées par la requérante fassent partie d’un scénario d’ensemble avec l’aide litigieuse, de sorte que la Commission aurait dû en tenir compte pour analyser la compatibilité de l’aide avec le marché intérieur.

210 Il en va de même pour l’argumentation développée dans le cadre du cinquième grief, selon lequel l’exposé figurant au considérant 51 de la décision attaquée, en vertu duquel la République fédérale d’Allemagne aurait confirmé qu’aucune aide au fonctionnement n’avait été versée depuis le 4 avril 2014 pour couvrir les pertes d’exploitation subies pendant la période transitoire, serait incorrect.

211 Il y a lieu ainsi de conclure que la requérante n’a pas prouvé que la Commission a vait commis une erreur d’appréciation quant à la détermination de l’effet incitatif de l’aide litigieuse et dans le considérant 51 de la décision attaquée de nature à démontrer qu’elle aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur.

212 Dès lors, l es quatrième et cinquième griefs de la troisième branche doivent être écartés.

Sur le sixième grief de la troisième branche, concernant le caractère disproportionné de l’aide litigieuse

213 Aux considérants 54 à 66 de la décision attaquée, la Commission a considéré que le montant de l’aide était proportionné, conformément aux limites établies par les lignes directrices sur les aides à l’aviation.

214 À cet égard , la requérante avance que l’aide serait disproportionnée, puisqu’au moment de l’adoption de la décision attaquée, il était évident que HNA n’ouvrirait pas de lignes vers la Chine et que, ainsi, le volume de passagers apporté par Ryanair serait toujours majoritaire.

215 La Commission conteste ces arguments.

216 À cet égard, il doit être signalé qu’il a déjà été conclu, au point 125 ci-dessus, qu’il ne pouvait pas être reproché à la Commission de s’être fondée sur une analyse ex ante du plan de gestion présenté par la République fédérale d’Allemagne, lequel prévoyait l’introduction de nouvelles liaisons avec la Chine.

217 Il y a lieu ainsi de conclure que la requérante n’a pas prouvé que la Commission a vait commis une erreur d’appréciation quant au caractère proportionné de l’aide litigieuse de nature à démontrer qu’elle aurait dû éprouver des doutes sur la compatibilité de l’aide litigieuse avec le marché intérieur.

218 Le sixième grief de la troisième branche doit être ainsi écarté.

219 Il ressort de l’examen de la troisième branche qu’il existe un ensemble d’indices objectifs et concordants, tirés du contenu incomplet et insuffisant de la décision attaquée du fait de l’absence d’instruction appropriée par la Commission, au stade de l’examen préliminaire, de la question de savoir si d’autres aéroports se trouvaient dans la même zone d’attraction que celui de Francfort-Hahn. L’examen effectué dans la décision attaquée au regard de la compatibilité fde l’aide litigieuse avec le marché intérieur ne permettait donc pas d’exclure l’existence de difficultés sérieuses en ce qui concerne cette question (voir, en ce sens et par analogie, arrêt du 20 juin 2019, a&o hostel and hotel Berlin/Commission, T‑578/17, non publié, EU:T:2019:437, point 129). La troisième branche doit, par conséquent être accueillie en ce qu’elle concerne son deuxième grief.

220 La décision attaquée doit , dès lors, être annulée.

Sur les dépens

221 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant succombé, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la requérante, conformément aux conclusions de cette dernière.

222 A ux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs dépens. Il y a lieu ainsi de condamner la République fédérale d’Allemagne, en tant qu’État membre intervenant, à supporter ses propres dépens.

223 Par ailleurs, aux termes de l’article  138, paragraphe 3, du règlement de procédure, le Tribunal peut décider qu’un intervenant autre que ceux mentionnés aux paragraphes 1 et 2 supportera ses propres dépens. Le Land de Rhénanie-Palatinat supportera ainsi ses propres dépens.

Par ces motifs,

LE TRIBUNAL (neuvième chambre)

déclare et arrête :

1) La décision C(2017) 5289 final de la Commission, du 31 juillet 2017, relative à l’aide d’État SA.47969 (2017/N), mise à exécution par l’Allemagne concernant une aide au fonctionnement accordée à l’aéroport de Francfort-Hahn, est annulée.

2) La Commission européenne supportera, outre ses propres dépens, les dépens exposés parDeutsche Lufthansa AG.

3) La République fédérale d’Allemagne et le Land Rheinland-Pfalz (Land de Rhénanie-Palatinat, Allemagne) supporteront leurs propres dépens.